Éditorial
Dans ce numéro, nous discutons de ce que le non à l'extension des autoroutes pourrait signifier pour un tournant dans le domaine des transports.
L'initiative sur la place financière a été lancée. Et le nouveau plan directeur climatique montre quelles mesures seraient nécessaires pour que la Suisse atteigne l'objectif net zéro d'ici 2035.
Nous évoquons le développement de l'électricité solaire et le fait que nous gaspillons beaucoup d'énergie, mais que les politiques ne veulent rien faire pour y remédier. La compensation des émissions de CO2 continue de faire l'objet de critiques.
Les négociations internationales sur le climat lors de la COP29 ont donné peu de résultats et les accords sur le plastique et la biodiversité ont également donné lieu à peu d'accords.
Nous montrons ce que la victoire de Trump pourrait signifier pour la protection du climat.
Plusieurs études montrent que les pays font toujours trop peu pour la protection du climat. Ils trichent également en comptabilisant leurs forêts dans les objectifs climatiques. Les émissions et la concentration de CO2 atteindront des niveaux records en 2024. Selon une nouvelle étude, la crise climatique entraînera une baisse de l'économie mondiale de près de 20 % d'ici 2050. Les scientifiques du climat lancent un nouvel avertissement : "Nous sommes au bord d'une catastrophe climatique irréversible. Il s'agit sans aucun doute d'une urgence mondiale. Une grande partie des bases de la vie sur terre est menacée. Nous entrons dans une nouvelle phase critique et imprévisible de la crise climatique".
Nous expliquons à la fin du journal climatique pourquoi nous avons besoin de plus que de l'espoir pour sauver la planète.
Suisse
Non à l'extension des autoroutes. Oui à un tournant pour les transports ?
Les électeurs suisses ne veulent pas étendre le réseau autoroutier. 52,7% des votants ont rejeté le paquet de 4,9 milliards de francs suisses qui prévoyait l'extension de six projets ; la participation s'est élevée à 45,1%. La Suisse romande, le Tessin ainsi que de nombreux cantons alémaniques ruraux ont voté non, y compris à Bâle-Ville, Berne, Genève et Vaud, où des projets d'extension devaient être réalisés. A Saint-Gall et Schaffhouse, où des tubes de tunnel supplémentaires étaient prévus, la population urbaine a également rejeté les projets. Ce n'est que sur le Plateau et en Suisse orientale que l'extension de l'autoroute a été majoritairement approuvée.
Quelles sont les raisons du non ? L'"euphorie du béton" est terminée, estime le Tages-Anzeiger (paywall). La NZZ (paywall) parle d'une "perte totale" pour Albert Rösti, qui s'était engagé en faveur du projet. Plus d'informations sur SRF. L'enquête post-électorale de 20 Minuten et Tamedia met en lumière de nettes différences selon le sexe et le revenu. 61% des femmes se sont opposées à l'extension de l'autoroute, tout comme les personnes aux revenus les plus faibles. En revanche, les hommes (56%) et les personnes gagnant bien leur vie ont approuvé l'extension. Plus d'informations dans le Tages-Anzeiger et l'Wochenzeitung.
Avant la votation, on avait appris que les coûts attendus de 7,1 milliards de francs étaient nettement plus élevés que les 4,9 milliards indiqués par la Confédération, comme l'a montré K-Tipp (paywall). Plus d'informations dans la NZZ (paywall). Au préalable, plus de 340 spécialistes de la mobilité s'étaient par ailleurs prononcés contre l'extension des autoroutes, estimant qu'elle entraînerait une augmentation du trafic et des embouteillages et que les solutions alternatives de mobilité et le développement urbain ne seraient pas pris en compte (Tages-Anzeiger).
Quelles sont les revendications actuelles ? Le parti écologiste veut utiliser l'argent du fonds pour les routes nationales et le trafic d'agglomération (FORTA) pour des mesures de protection du climat : développement des transports publics, du trafic cycliste et piétonnier ainsi que protection contre le bruit et aussi adaptations au changement climatique, par exemple dans les régions de montagne. Pour réaliser cela, il faut une modification légale du fonds, que les électeurs avaient approuvée en 2017. Plus d'informations à ce sujet dans la NZZ (paywall) et le Tages-Anzeiger (paywall). Les discussions portent également à nouveau sur une tarification dynamique et sur les taxes de congestion. Au lieu de construire de nouvelles routes, le trafic devrait être géré par le biais du prix. Plus d'informations sur SRF et dans le Sonntagsblick.
Le conseiller national PS Jon Pult estime qu'un détournement de l'argent du FORTA, par exemple pour la protection du climat, n'est pas susceptible de réunir une majorité. En lieu et place, davantage d'argent du fonds doit être consacré au trafic d'agglomération, peut-on lire dans l'hebdomadaire. Actuellement, cela représente entre 9 et 12% de l'argent annuel du FORTA, selon Pult, cette part devrait être doublée.
Quelles sont les conséquences sur la politique des transports ? La Confédération examine désormais tous les projets de construction de routes nationales. Il s'agit de 24 plans d'aménagement, dont certains sont déjà avancés, pour un volume de 18 milliards de francs, comme le rapporte la SRF. Selon l'Office fédéral des routes (OFROU), les projets doivent certes être poursuivis. Mais on examine quand et si ceux-ci seront pris en compte pour les prochaines étapes d'aménagement. Le conseiller fédéral Albert Rösti reconnaît lui aussi dans la NZZ am Sonntag (paywall) qu'un élargissement continu de l'A1 à six voies n'est actuellement plus d'actualité. La République esquisse ce à quoi pourrait ressembler la mobilité du futur.
Initiative pour la place financière : Pour des flux financiers respectueux du climat
La place financière suisse gère environ un cinquième des actifs mondiaux qui sont investis au-delà des frontières. Comme ces fonds servent également à investir dans des entreprises actives dans le secteur du charbon, du pétrole et du gaz naturel et à octroyer des crédits, la place financière suisse est coresponsable d'énormes quantités d'émissions de gaz à effet de serre.
Selon un calcul effectué par les conseillers en entreprise de McKinsey en 2022, ces émissions représentent au moins 18 fois les émissions nationales totales de la Suisse. Cela va à l'encontre de l'accord de Paris sur le climat, selon lequel les flux financiers mondiaux doivent être orientés vers un développement à faible émission de gaz à effet de serre.
Une alliance d'organisations environnementales, du PS et des Verts a maintenant lancé l'initiative sur la place financière. Elle vise à empêcher que les banques et les assurances suisses continuent à faciliter des projets qui accélèrent le changement climatique. Il reste 18 mois pour récolter les 100'000 signatures nécessaires à une votation populaire.
L'initiative "Pour une place financière suisse durable et tournée vers l'avenir" veut obliger la Confédération à s'engager en faveur d'une orientation écologiquement durable de la place financière suisse. Il s'agit de garantir que les banques, les gestionnaires de fortune, les assurances et les caisses de pension suisses alignent leurs activités commerciales à l'étranger sur les objectifs internationaux en matière de climat et de biodiversité. En outre, la loi doit exclure que des entreprises financières suisses financent ou assurent l'exploitation et l'utilisation de nouveaux gisements d'énergie fossile ou l'extension d'installations existantes. Afin de faire respecter les directives, une autorité de surveillance doit avoir les compétences pour effectuer des contrôles et délivrer des sanctions. Plus d'informations dans la Wochenzeitung (paywall) et dans la NZZ (paywall).
Jusqu'à présent, le Conseil fédéral et le Parlement ont toujours refusé d'édicter des règles climatiques contraignantes pour la place financière. Au lieu de cela, le Conseil fédéral fait confiance à des solutions sectorielles volontaires. La participation des instituts financiers au test climatique annuel de la Confédération est également volontaire. Les résultats de l'enquête actuelle ont été présentés début novembre. Il en ressort que les entreprises pétrolières, dans lesquelles les banques, les assurances et les caisses de pension continuent de détenir des participations, ont développé leurs capacités d'extraction.
Des feuilles pour la collecte de signatures peuvent être téléchargées ici.
La place financière suisse n'est pas la seule à réchauffer le climat mondial. Les négociants en matières premières qui sont basés en Suisse sont responsables d'énormes quantités de gaz à effet de serre. L'organisation non gouvernementale Public Eye montre dans un rapport que les émissions de CO2 dues au charbon, au pétrole et au gaz naturel distribués par les entreprises de matières premières étaient l'année dernière 100 fois plus importantes que celles de l'ensemble de la Suisse. Les entreprises elles-mêmes affichent des émissions nettement inférieures. Elles ne prennent généralement en compte que les émissions de leurs propres installations de production et de transport. Public Eye y ajoute également les émissions indirectes dues à la combustion des matières premières fossiles. Plus d'informations dans le Sonntagsblick (paywall).
Reculs dans la politique climatique - la Constitution peut-elle aider ?
Lors de la session d'hiver en cours, le Parlement débattra du programme d'économies du Conseil fédéral, présenté en septembre. Le Conseil national a déjà décidé de supprimer 54 millions de francs prévus dans la loi sur le climat et l’innovation (LCI) pour le remplacement des chauffages. Le Conseil des Etats pourrait décider d'autres coupes.
Ce n'est qu'en 2023 que les électeurs ont approuvé la LCI et donc un montant de 200 millions de francs par an pour remplacer les chauffages fossiles par des chauffages renouvelables. L'association Protection du climat Suisse critique le fait que le Parlement ignore de manière flagrante la volonté du peuple. Le Conseil fédéral voulait également supprimer les subventions pour les trains de nuit ainsi que pour les bus et les bateaux électriques. Il semble que ces fonds ne seront pas réduits par le Parlement.
Le Conseil fédéral s'est donné beaucoup de temps pour la mise en œuvre de la loi sur la protection climatique. L’ordonnance sur la protection du climat (OCl) entrera en vigueur début 2025, en même temps que la LCI (même si certaines parties de cette dernière ont déjà été modifiées par le Parlement). Les instruments d'encouragement prévus dans la LCI pour l'industrie et le secteur du bâtiment y seront notamment précisés. La manière dont la fonction d'exemple de la Confédération, inscrite dans la LCI, sera mise en œuvre reste ouverte. Les dispositions de mise en œuvre correspondantes "nécessitent des clarifications supplémentaires", peut-on lire à ce sujet dans les explications de l'ordonnance. Le journaliste climatique Alex Tiefenbacher fait le point sur les nouvelles règles de protection du climat dans le podcast Treibhaus.
Les mesures prises par la Suisse pour lutter contre le changement climatique sont-elles suffisantes ? Non, pensent plus de deux tiers de la population. C'est ce que révèle un vaste sondage d'opinion réalisé par l'institut GFS Berne sur mandat de la SSR. Plus de 50'000 personnes ont été interrogées entre mai et juin 2024 dans le cadre de ce sondage représentatif. Plus d'informations sur SRF.
Marcel Hänggi, initiateur de l'initiative sur les glaciers et actif au sein de Climat-Info, est lui aussi convaincu que la Suisse ne fait pas assez pour lutter contre le changement climatique. Pourtant, les bases juridiques existent bel et bien, comme il le montre dans son nouveau livre "Weil es Recht - Vorschläge für eine ökologische Bundesverfassung" (Parce que c'est juste - Propositions pour une Constitution fédérale écologique). Selon Hänggi, la Constitution fédérale offre une bonne base pour la protection du climat. Il faudrait toutefois procéder à diverses révisions pour protéger l'environnement et créer un avenir digne d'être vécu. Au passage, le livre offre un résumé éclairant de la politique environnementale suisse des dernières décennies. Plus d'informations sur SRF et dans la Wochenzeitung.
Des approches pour une meilleure protection du climat existent également au niveau entrepreneurial : de nouvelles entreprises qui investissent dans la protection du climat, l'économie circulaire ou d'autres secteurs d'avenir. En Suisse, il existe aujourd'hui déjà plus de 600 start-ups dans le domaine des cleantech, comme le montre la publication CleantechAlps.
Net zéro d'ici 2035 ? Le plan directeur climatique montre comment
L'Alliance climatique suisse, qui regroupe plus de 150 organisations suisses, met à jour le Masterplan Climat de 2016 en indiquant les mesures urgentes à prendre pour que la Suisse puisse atteindre un bilan net nul d'ici 2035, sans dépasser son budget CO2.
Le plan, qui s'appuie sur les connaissances scientifiques les plus récentes et est conçu comme un guide d'action actuel pour la politique climatique suisse, comprend 11 ensembles d'instruments politiques. Il s'agit notamment de : Taxes strictes sur les émissions, une augmentation des moyens financiers, l'échange de chauffage et l'assainissement énergétique, la réorientation des flux financiers, moins de mobilité, l'e-mobilité et le développement des transports publics, la transformation verte de l'alimentation et de l'agriculture. Le mélange d'investissements respectueux du climat et de mesures politiques doit permettre d'accélérer la transformation vers une société respectueuse du climat. La version présentée en novembre a été élaborée par des experts des organisations membres de l'Alliance climatique. La consultation s'est achevée début décembre. La version définitive sera publiée début 2025.
Les subventions fiscales nuisent au climat
Les avantages fiscaux accordés aux voyageurs ne coûtent pas seulement beaucoup d'argent à l'État, ils entraînent aussi des émissions de gaz à effet de serre supplémentaires. Des chercheurs de l'EPF de Lausanne ont calculé l'ampleur de ces effets. L'étude a porté sur la taxe sur la valeur ajoutée, l'impôt sur le revenu, l'impôt sur les huiles minérales et diverses subventions. Résultat : les pertes fiscales s'élèvent jusqu'à 4,6 milliards de francs par an. Si l'on y renonçait, on pourrait économiser chaque année jusqu'à 2,5 millions de tonnes de CO2, soit 6% des émissions totales en Suisse. Plus d'informations sur SRF.
Trois domaines se distinguent particulièrement :
- Le trafic aérien international ne doit payer ni la TVA ni l'impôt sur les huiles minérales. La Confédération perd ainsi plus de 1,3 milliard de francs de recettes fiscales par an. Sans les subventions fiscales, les émissions annuelles de CO2 seraient, selon l'étude, inférieures de 1,5 million de tonnes.
- En matière de mobilité professionnelle, les allègements fiscaux pour les trajets domicile-travail en voiture, les voitures de société et les places de parking gratuites nuisent au climat. Si ces déductions étaient supprimées, plus de 600'000 tonnes de CO2 pourraient être économisées.
- Avec la redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations (RPLP), le trafic des camions ne prend pas en charge l'ensemble des coûts externes qu'il génère. De plus, les véhicules utilitaires légers sont exemptés de la RPLP. Si le transport de marchandises devait couvrir l'intégralité des coûts externes, les émissions de CO₂ diminueraient de plus de 200'000 tonnes.
Les compensations de CO2 toujours critiquées
Le trafic motorisé est responsable d'un tiers des émissions de CO2 en Suisse. Contrairement au mazout et au gaz naturel, aucune taxe sur le CO2 n'est prélevée sur l'essence et le diesel. En lieu et place, les importateurs de carburant sont tenus par la loi de compenser une partie des émissions de gaz à effet de serre dues au trafic par des projets de protection du climat en Suisse et à l'étranger. Comme le secteur n'atteint pas les objectifs climatiques depuis des années, les règles devraient être renforcées : plus de CO2 devrait être compensé et davantage en Suisse.
Mais le Conseil fédéral a désormais renoncé à un durcissement. Cette décision a été précédée d'une rencontre entre le conseiller fédéral Albert Rösti et des représentants de l'Office fédéral de l'environnement (OFEV) et les importateurs de carburants, écrit le Tages-Anzeiger (paywall). Ces derniers ont ainsi réussi à éviter des directives plus strictes en matière de compensation de CO2. Les défenseurs du climat critiquent la "proximité problématique" du conseiller fédéral Albert Rösti et de ses experts avec le lobby des carburants.
Les affaires de compensation sont traitées par la fondation Klik (Klimaschutz und CO₂ -Kompensation), sur mandat du secteur des carburants. Pour financer les certificats, les stations-service peuvent prélever un supplément de 5 centimes maximum par litre. Comme le montre le magazine en ligne Lamm, Klik a augmenté la majoration à 8 centimes depuis le début de l'année. Toutefois, cette majoration reste très faible par rapport à la taxe CO2 sur les combustibles. Et elle est contraire à la loi. L'OFEV veut maintenant examiner la démarche de cette branche.
Klik fait actuellement aussi les gros titres (de manière négative) avec deux de ses projets à l'étranger : l'un au Ghana et l'autre en Thaïlande. Au Ghana, l'argent de la Suisse permet d'utiliser des fours de cuisson plus efficaces ; jusqu'à présent, environ 18'000 unités ont été vendues. Cela devrait permettre de réduire les particules fines nocives pour la santé et les émissions de CO₂. Une recherche de ONG Alliance Sud montre que les économies de CO2 réalisées sont bien moindres que celles prévue. Plus d'informations sur SRF. En Thaïlande, Klik finance des bus électriques qui seront mis en service à Bangkok. L'objectif est de remplacer tous les bus équipés de moteurs à combustion. Le problème est que l'entreprise thaïlandaise qui exploite les bus électriques vient d'être créée. Elle ne peut donc pas retirer elle-même les anciens bus de la circulation. Comme le montre la République, un seul bus a été mis au rebut jusqu'à présent. Il est en outre reproché au constructeur de bus d'enfreindre le droit du travail. Pour en savoir plus, consultez le Beobachter et la SRF.
Les nouvelles règles environnementales pour les bâtiments
Pour rendre le secteur du bâtiment compatible avec le climat, les cantons jouent un rôle décisif. Ils fixent les normes pour les habitations et les bureaux qui seront utilisés pendant des décennies. Les modèles de prescriptions énergétiques des cantons (MoPEC) sont essentiels à cet égard. De nombreux cantons sont toutefois en retard dans la mise en œuvre de ces règles. Jusqu'à présent, seuls 15 cantons ont révisé leurs lois sur l'énergie conformément au MoPEC 2014. Pourtant, il est temps de renforcer les règles. La Conférence des directeurs cantonaux de l'énergie a mis en consultation le projet de MoPEC 2025 à l'automne. L'un des objectifs de cette adaptation est de faire des bâtiments des "hubs énergétiques", où la production, le stockage et la consommation d'énergie sont réunis. La part d'énergie renouvelable lors du remplacement des chauffages doit être augmentée et l'efficacité énergétique des bâtiments existants améliorée.
Les organisations environnementales doutent de la capacité du secteur du bâtiment à atteindre les objectifs climatiques avec les nouveaux modèles de prescriptions.
La Fondation suisse de l'énergie demande que les modèles de prescriptions soient orientés de manière plus conséquente vers l'objectif net zéro. Et les lacunes existantes doivent être comblées. Ainsi, les prescriptions relatives à l'énergie grise et à la mobilité électrique doivent être intégrées dans le module de base que tous les cantons doivent mettre en œuvre. Les critiques portent également sur le fait que les prescriptions en matière d'énergie grise et d'électromobilité se limitent aux nouveaux bâtiments. Elles devraient également concerner les infrastructures existantes. En outre, il devrait y avoir des exigences concrètes pour le stockage de l'énergie.
L'association "energie-wende-ja" déplore que le MoPEC 2025 soit trop peu ambitieux et ne suffise pas à atteindre les objectifs climatiques. Le secteur du bâtiment devrait être climatiquement neutre d'ici 2040 au plus tard.
Le développement de l'électricité solaire se poursuit-il ?
En juin 2024, les électeurs suisses ont accepté la loi sur l'électricité (loi fédérale relative à un approvisionnement en électricité sûr reposant sur des énergies renouvelables). Bien plus rapidement que pour la loi sur la protection du climat (voir ci-dessus "Reculs dans la politique climatique"), le Conseil fédéral a adopté l'ordonnance correspondante. Début 2025, les installations photovoltaïques sur les façades et sur les toits des parkings seront davantage encouragées. Et les règles d'utilisation de l'électricité solaire produite seront assouplies. Pour les énergies renouvelables provenant d'installations en Suisse, le Conseil fédéral se contente d'une part minimale de 20%. Lors de la consultation, les associations avaient demandé une part plus élevée. Aujourd'hui, la part d'énergie renouvelable dans le mix électrique suisse est de 60%.
Le Conseil fédéral n'a pas encore décidé des mises en œuvre importantes. Ainsi, on ne sait toujours pas à combien s'élèvera la rétribution minimale de l'électricité solaire. Dans le projet du début de l'année, le Conseil fédéral avait prévu une réduction significative.
L'association professionnelle Swissolar critique le fait que le Conseil fédéral n'ait pas encore clarifié ce point. Et elle exige des tarifs minimaux appropriés, sans quoi le développement nécessaire des installations photovoltaïques risque d'être freiné. L'association économique swisscleantech salue le fait que la reconnaissance des installations solaires d'intérêt national améliore les conditions-cadres pour le développement de davantage d'électricité en hiver. Elle critique toutefois la mise en œuvre hésitante de la loi sur l'électricité, car les nouvelles règles sont introduites de manière échelonnée. Plus d'informations dans le Tages-Anzeiger (paywall).
La loi sur l'électricité prévoit que 35 térawattheures supplémentaires d'électricité renouvelable soient produits chaque année en Suisse d'ici 2035. Cela représente un peu plus de la moitié des besoins actuels en électricité de la Suisse. 80% de la quantité d'électricité supplémentaire peut provenir de nouvelles installations photovoltaïques, si des conditions-cadres attrayantes sont mises en place pour l'électricité solaire. C'est ce qui ressort de l'Observatoire solaire suisse de Swissolar, établi pour la première fois. Il sera à l'avenir actualisé chaque année afin de pouvoir évaluer de manière réaliste le développement de l'énergie solaire en Suisse.
Le développement des installations solaires alpines n'avance pas. Sur un total de 62 projets annoncés, 27 ne seront pas poursuivis. Selon l'Office fédéral de l'énergie, seuls quatre projets ont reçu un permis de construire définitif. Pour une installation, "Sedrun-Solar" près de Tujetsch, les travaux de construction ont commencé. Mais cela n'est pas dû en premier lieu à des oppositions, comme le montre une enquête de l'Association des entreprises électriques suisses. Les plus grands défis sont plutôt les études d'impact sur l'environnement qui prennent beaucoup de temps, le long traitement des demandes de permis de construire, les exigences en montagne ainsi que la rentabilité. Comme le montrent la SRF et la NZZ (paywall), il est beaucoup plus coûteux que prévu d'installer des panneaux photovoltaïques en montagne. Ainsi, le groupe électrique Axpo renonce à réaliser une installation malgré une autorisation juridiquement valable. Cela est d'autant plus remarquable que la Confédération prend en charge jusqu'à 60% des coûts d'investissement.
Pour l'instant, aucune installation photovoltaïque flottante ne sera autorisée sur les lacs de barrage. Le risque de dommages dus à des vents violents, des crues ou des glissements de terrain est trop important, explique le Tages-Anzeiger. Actuellement, il existe en Suisse une installation avec des panneaux flottants, sur le lac des Toules, près du Grand Saint-Bernard. Pourtant, le potentiel de production d'électricité serait bien là, comme le montre un rapport du Conseil fédéral sur les installations photovoltaïques sur les centrales hydroélectriques et les lacs de barrage.
Un grand gaspillage d'énergie - mais la politique observe
Dans le débat politique, la question d'une production d'électricité suffisamment importante domine. Les approches visant à économiser l'électricité sont négligées. En 2021, le conseiller national vert Kurt Egger a demandé un rapport au Conseil fédéral. Celui-ci devrait montrer combien d'électricité est gaspillée parce que les aérations et les éclairages fonctionnent alors qu'il n'y a personne dans la pièce ou parce que les moteurs et les processus de production tournent inutilement au ralenti. En effet, le potentiel d'économie est considérable : chaque année, 6 à 7 TWh d'électricité sont gaspillés, comme le montre le rapport "Gaspillage d'énergie lors de l'exploitation sans utilité" qui vient d'être publié. Cela correspond à 12% des trois secteurs : ménages, services et industrie. Le potentiel d'économie serait encore plus important si les secteurs de la mobilité et de l'agriculture étaient également pris en compte. Pourquoi les pertes sont-elles si élevées ? Parmi les raisons possibles, le rapport cite le manque de connaissances des consommateurs ainsi que des obstacles techniques et financiers. Les mesures possibles pour lutter contre le gaspillage sont des prescriptions sur l'efficacité énergétique des appareils et des installations ainsi que des règles légales pour les gros consommateurs et des incitations financières par le biais de conventions d'objectifs, de conseils en énergie et d'informations.
La réalité est toutefois différente. Les entreprises qui consomment beaucoup d'électricité sont soulagées financièrement : Elles sont exemptées du supplément réseau, actuellement de 2,3 centimes par kilowattheure. Cette taxe alimente un fonds avec lequel la Confédération encourage la construction d'installations solaires, de centrales hydroélectriques et de centrales éoliennes. Lorsque la réglementation a été introduite en 2009, les gros consommateurs étaient dans la ligne de mire afin de soutenir l'industrie à forte consommation d'électricité et orientée vers l'exportation.
La NZZ (paywall) montre maintenant qu'en raison de l'absence de critères précis, les hôtels de luxe, les installations de surf indoor et les toboggans aquatiques profitent également de la réduction de l'électricité. Plus de 250 entreprises peuvent obtenir de l'électricité à prix réduit, dont 30 domaines skiables, pour faire fonctionner les remontées mécaniques et les canons à neige. Mais au lieu d'endiguer cette prolifération, la réduction de l'électricité doit encore être étendue. Les difficultés économiques des aciéries suisses sont à l'origine de cette mesure. Ainsi, la Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie du Conseil national demande que les entreprises d'acier et d'aluminium en Suisse soient exemptées pendant quatre ans d'une partie des taxes pour l'utilisation du réseau électrique. Le Parlement se prononcera à ce sujet lors de la session d'hiver en cours. Plus d'informations sur SRF et dans la NZZ (paywall).
Le thème du gaspillage d'électricité est également ignoré dans le débat sur les centrales de réserve. Les contrats avec les centrales de réserve de Birr (AG), Cornaux (NE) et Monthey (VS) courent encore jusqu'au printemps 2026. En février 2024, le Tribunal administratif fédéral avait décidé que le Conseil fédéral n'aurait pas dû accorder d'autorisation d'exploitation à la centrale de réserve de Birr. En effet, il n'avait pas pu expliquer pourquoi il fallait s'attendre à une situation de pénurie d'électricité. Le jugement n'a pas empêché la Confédération de négocier de nouveaux contrats pour la période après 2026. L'appel d'offres n'a toutefois pas abouti, les coûts proposés étant trop élevés. On apprend aujourd'hui que la Confédération continue de s'accrocher aux centrales de réserve. Comme il n'est pas possible de remplacer sans interruption les centrales de réserve existantes à partir de l'hiver 2026/27, le Conseil fédéral veut prolonger l'ordonnance sur les réserves hivernales jusqu'au 31 décembre 2030. Selon lui, il sera ainsi possible de maintenir les installations existantes en état de veille jusqu'à ce que de nouvelles centrales de réserve soient disponibles.
Date de fermeture de Beznau et discussions sur les déchets nucléaires
La centrale nucléaire de Beznau, déjà la plus ancienne du monde, devrait rester en service jusqu'en 2033. Axpo veut investir 350 millions de francs pour la poursuite de son exploitation. En 2033, la centrale nucléaire aura produit de l'électricité pendant 64 ans. Actuellement, elle produit environ 6 térawattheures d'électricité par an, ce qui correspond à 10% de la production suisse d'électricité. La même quantité d'électricité est gaspillée chaque année (voir ci-dessus : Grand gaspillage d'énergie - mais les politiques observent).
Selon le patron d'Axpo, Christoph Brand, le groupe va ainsi à la limite du possible, une poursuite prolongée de l'exploitation de Beznau étant techniquement exclue, même si on l'avait voulu politiquement et économiquement. Plus d'informations sur SRF, dans le Tages-Anzeiger et dans la NZZ (paywall).
La Fondation suisse de l'énergie (SES) salue cette décision. Selon elle, l'accélération du développement des énergies renouvelables permet de poursuivre la sortie du nucléaire. La SES souligne que grâce au développement des installations solaires sur les infrastructures existantes en Suisse, on produira d'ici 2033 plus d'électricité hivernale supplémentaire que celle qui sera supprimée par l'arrêt de Beznau.
Il faudra encore des décennies avant que les déchets radioactifs des centrales nucléaires suisses puissent être stockés dans un dépôt définitif. La Société coopérative nationale pour le stockage des déchets radioactifs (Nagra) a fait un pas dans ce sens en novembre - elle a déposé une demande d'autorisation pour un dépôt en profondeur sur le site "Nördlich Lägern" dans le canton de Zurich. La décision de choisir le site sur le territoire de la commune de Stadel avait déjà été prise il y a deux ans. Pendant 16 ans, la Nagra a étudié le sous-sol et dépensé plus de 200 millions de francs à cet effet. Les déchets nucléaires doivent être stockés à environ 900 mètres de profondeur dans une couche d'argile à Opalinus de 100 mètres d'épaisseur - pour un million d'années. C'est le temps qu'il faudra pour qu'il n'y ait plus de danger pour l'homme et l'environnement.
Les critiques estiment que ce concept est dépassé. Il faudrait plutôt promouvoir des techniques comme la transmutation, une sorte de recyclage de l'uranium. Le Conseil fédéral et le Parlement se prononceront sur le dépôt en profondeur à partir de 2029. Si un référendum est lancé - ce qui est probable - le projet sera soumis au peuple. Pour en savoir plus, voir ici et ici chez Watson et dans la NZZ (paywall).
Si la Suisse devait construire une nouvelle centrale nucléaire - comme le souhaitent le Conseil fédéral et une initiative populaire - la place dans le dépôt en profondeur ne suffirait pas. C'est ce qu'a déclaré le chef de la Nagra à la NZZ (paywall). Le dépôt en profondeur est prévu pour une quantité de déchets correspondant à 60 ans d'exploitation des centrales nucléaires existantes. D'un point de vue géologique, il serait certes possible de stocker des déchets nucléaires supplémentaires, mais en pratique, cela serait compliqué.
Décisions de la Confédération et des cantons en matière de climat
Les craintes des partisans de l'initiative sur la biodiversité se sont confirmées : La Confédération refuse de prendre des mesures efficaces contre la perte de la biodiversité. La deuxième phase du plan d'action biodiversité, décidée en novembre par le Conseil fédéral, prévoit tout juste 24 millions de francs jusqu'en 2030, soit environ 4 millions de francs par an.
Pour le premier plan d'action (2017-2023), le montant était encore deux fois plus élevé. Le financement est totalement insuffisant, critiquent les organisations environnementales Pro Natura, WWF et Birdlife. "Le financement du plan d'action est si faible qu'il doit être qualifié de totalement inapproprié. Il aurait été plus honnête de ne pas adopter de plan d'action". Le fait que le Conseil fédéral propose avant tout des rapports, des études et des projets pilotes est également critiqué. Pourtant, des études scientifiques démontrent déjà en détail à quel point la biodiversité est en mauvais état en Suisse.
Le Conseil fédéral veut renforcer l'économie circulaire. Les nouvelles règles qui entreront en vigueur début 2025 doivent permettre de créer des bases pour fermer les cycles de matériaux. Dans le domaine de la construction, les cantons sont chargés de fixer des valeurs limites d'énergie grise pour les nouvelles constructions et les rénovations importantes de bâtiments existants. Pour les produits et les emballages, le Conseil fédéral peut fixer de nouvelles exigences. Et en outre, la Confédération doit jouer un rôle de modèle dans le cadre de ses achats et de ses constructions.
L'initiative sur l'alimentation veut obliger la Confédération à promouvoir un mode d'alimentation basé sur des aliments végétaux. Parallèlement, il s'agit de réduire la dépendance vis-à-vis de l'étranger et de garantir une eau potable propre. Le Conseil fédéral rejette cette demande, sans contre-projet. Il estime que les exigences de l'initiative ne sont pas réalisables dans le délai de dix ans qu'elle prévoit. De plus, une acceptation de l'initiative populaire aurait des conséquences importantes sur la production et la consommation de denrées alimentaires en Suisse (c'est en effet l'objectif de l'initiative). Plus d'informations dans l'Aargauer Zeitung et la NZZ (paywall).
Les électeurs valaisans ont rejeté la loi sur le climat. Elle aurait obligé le canton à atteindre la neutralité climatique d'ici 2040. La loi prévoyait en outre la création d'une "réserve climatique" dotée de 100 millions de francs, qui aurait permis de financer des mesures concrètes d'adaptation et de réduction des émissions de CO2. La majorité des partis politiques s'étaient prononcés en faveur de la loi sur le climat. Les partisans avaient argumenté en vain que le Valais, en tant que canton de montagne, était particulièrement touché par le réchauffement climatique, la fonte des glaciers et les phénomènes météorologiques extrêmes qui en découlent. Plus d'informations sur SRF et le Walliser Zeitung.
La ville de Zurich veut atteindre la neutralité climatique d'ici 2040. Un bilan intermédiaire montre à quel point le chemin pour y parvenir est long. Certes, les émissions directes de gaz à effet de serre dues au chauffage et au trafic sur le territoire de la ville diminuent légèrement. Mais les émissions indirectes augmentent plus fortement. Elles représentent 85% de tous les gaz à effet de serre, et la ville n’exerce aucune influence sur elles. L'aviation pèse lourd dans la balance. En 2023, les voyages en avion ont généré 3,3 tonnes d'équivalents CO2 par habitant. C'est plus que l’empreinte directe totale. L'augmentation des constructions fait également grimper les émissions indirectes. Pour en savoir plus, consultez le Tages-Anzeiger (paywall) et la NZZ (paywall).
Politique climatique internationale
COP29 : résultats décevants des négociations sur le climat
Les négociations de la 29e conférence des Nations unies sur le climat (COP29) à Bakou (Azerbaïdjan) ont été particulièrement tendues cette année, car il a fallu négocier le financement climatique destiné aux pays les plus pauvres. Le premier objectif de financement avait été décidé à Copenhague en 2009. A l'époque, les pays s'étaient mis d'accord pour mettre à disposition 100 milliards de dollars par an jusqu'en 2020, mais cet objectif n'a été atteint que deux ans plus tard.
Les nations pauvres et les ONG ont réclamé à Bakou 1300 milliards de dollars US par an. Un compromis minimal a finalement été trouvé : d'ici 2035, le financement climatique pour les pays pauvres sera augmenté à au moins 300 milliards de dollars US par an. Les États ne se sont toutefois pas mis d'accord sur la part de cette somme qui sera constituée de subventions et de crédits, ni sur la part qui proviendra de sources publiques.
Les représentants de nombreux pays pauvres ont été indignés "Les pays industrialisés nous envoient toujours un texte à la dernière minute, nous le font avaler et nous devons toujours l'accepter au nom du multilatéralisme", a déclaré Juan Carlos Monterrey Gómez, envoyé spécial du Panama pour le changement climatique (plus d'informations dans le Guardian). Mais certains ont souligné qu'une promesse de financement climatique insuffisante était toujours mieux que pas de promesse du tout, surtout avec l'administration Trump qui s'annonce. Plus d'informations dans le Guardian.
De nombreux commentateurs ont également jugé positif le fait qu'après des années d'impasse, des règles aient été mises en place pour un marché mondial d'échange de certificats CO2 - mais de grandes inquiétudes subsistent quant à l'intégrité de tels marchés. Plus d'informations dans le Financial Times.
Les négociations ont été mal préparées et mal dirigées par le pays hôte, l'Azerbaïdjan. Au printemps, le président de ce pays louait encore les combustibles fossiles comme un "don de Dieu". Il n'est donc pas étonnant qu'aucun progrès n'ait été réalisé en matière d'abandon du pétrole et du gaz. Outre l'Azerbaïdjan, pays hôte, l'Arabie saoudite en est également responsable. Plus d'informations dans le NY Times (paywall). Le président de la COP 29, Mukhtar Babayev, critiqué pour sa carrière au sein de l'entreprise pétrolière nationale, a publié un éditorial dans le Guardian après les négociations, dans lequel il critiquait ouvertement différents pays occidentaux. Cela a été considéré comme très contre-productif par les experts. Des négociations multinationales réussies ne peuvent être menées à bien que si la confiance entre les négociateurs est établie dans les mois précédant et suivant les négociations. C'est là que la présidence de la COP a échoué, comme l'explique Christiana Figueres de manière impressionnante dans son podcast.
Des voix de premier plan, dont l'ancien secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon et le climatologue Johan Rockström, estiment que les négociations COP sur le climat ne remplissent plus leur objectif. "Cette lenteur des progrès est en contradiction avec la science du climat et avec les dommages et risques climatiques réels", écrivaient-ils déjà en 2023. Cette année encore, ils font des propositions concrètes pour que les négociations soient menées plus efficacement - dans leur Lettre ouverte du Club de Rome, à lire.
Carbon Brief a rédigé un résumé détaillé et complet de toutes les décisions qui ont été négociées à Bakou. Le podcast de l'économiste climatique Claudia Kemfert est également passionnant.
Accord sur la biodiversité : Trop peu de progrès
La protection du climat et celle de la nature ont longtemps été traitées comme des questions indépendantes, mais lors du sommet sur la biodiversité COP16, les chefs d'État et de gouvernement ont pris conscience de la réalité : la crise climatique ne peut être abordée sans mettre un terme à la perte de la nature.
Il y a eu quelques succès. Il est prévu de créer un fonds alimenté par des taxes sur les produits commerciaux qui utilisent du matériel génétique de plantes et d'animaux. Cela pourrait rapporter des fonds annuels allant jusqu'à 1 milliard de dollars.
Les nations se sont mises d'accord sur un nouvel organe permanent pour les peuples autochtones. Cela leur permettra pour la première fois d'être directement consultés et d'exprimer leur opinion sur les COP de biodiversité.
Cependant, les discussions ont été assombries par le manque de progrès dans la mise en œuvre du Cadre mondial de la biodiversité Kunming-Montréal, l'accord révolutionnaire "Accord de Paris pour la nature" conclu lors de la COP15 à Montréal en 2022. Depuis que les pays se sont mis d'accord sur des objectifs ambitieux de protection de la nature en 2022, le paysage politique a changé. Une étude menée par Carbon Brief et le Guardian montre que la grande majorité des pays n'ont pas respecté le délai pour présenter de nouveaux plans afin d'atteindre leurs objectifs de protection. A la fin du sommet, seules 44 parties sur 196 - moins d'un quart - avaient présenté de nouveaux plans de biodiversité. Seuls cinq des 17 "pays méga diversifiés", qui abritent 70% de la biodiversité mondiale, ont présenté un plan.
Les parties n'ont pas non plus réussi à se mettre d'accord sur la création d'un nouveau fonds dans le cadre de la COP. Le monde a besoin de 700 milliards de dollars par an pour protéger les habitats importants. Mais d'où viendra cet argent ? Les parties doivent reprendre les négociations en février 2025 à Rome. Plus d'informations sur Carbon Brief et ici et ici dans le Guardian.
Accord sur les plastiques : Pas d'accord
Une autre négociation de l'ONU s'est avérée extrêmement difficile : les nations ont négocié à Busan, en Corée du Sud, un nouvel accord visant à réduire la pollution plastique. Aucun accord n'a cependant été trouvé.
Il y avait un désaccord sur le fait de savoir si le traité devait inclure des objectifs de réduction de la production de plastique ou se concentrer uniquement sur la réduction des déchets, comme le recyclage. Plus de 100 pays souhaitaient un traité juridiquement contraignant limitant la production de plastique, et presque autant de pays voulaient éliminer complètement les produits chimiques les plus nocifs utilisés dans leur fabrication. Mais de grands pays producteurs de pétrole et de gaz, dont l'Arabie saoudite, la Russie, le Koweït et l'Iran (soutenus par les lobbyistes de l'industrie pétrochimique), se sont opposés avec véhémence à de telles restrictions.
L'exemple suivant montre à quel point il est important de s'attaquer à la production : l'Alliance to End Plastic Waste (AEPW) a été créée en 2019 par un groupe des plus grands producteurs de plastique du monde, parmi lesquels ExxonMobil, Dow, Shell, TotalEnergies et ChevronPhillips. Ils ont promis d'améliorer le recyclage du plastique et de créer une économie circulaire. Mais au cours des cinq dernières années, ils ont produit 1000 fois plus de plastique qu'ils n'en ont retiré de l'environnement. Plus d'informations dans le Guardian.
La question du financement a également posé problème lors des négociations pour un accord sur le plastique. Qui va aider les pays en développement à produire et à utiliser moins de plastique et à éliminer les déchets de manière écologique ? Cette question reste ouverte.
On s'attend à ce que les pays négocient à nouveau l'année prochaine. En attendant, certains soutiennent que les presque 100 pays qui ont fait pression pour obtenir un engagement juridiquement contraignant de réduction de la production - dont le Royaume-Uni, l'Union européenne, le Groupe africain et de nombreuses nations d'Amérique du Sud - sont en train d'élaborer leur propre accord.
Ce que la victoire de Trump signifie pour la protection du climat
Le président américain nouvellement élu Donald Trump n'a cessé de qualifier le changement climatique de "grande arnaque" pendant sa campagne électorale et son vice-président est lui aussi un menteur climatique.
Trump, qui a gagné grâce à un soutien financier considérable de l'industrie pétrolière et gazière, veut maintenant accélérer la production de combustibles fossiles. Selon une étude de Carbon Brief, cela pourrait entraîner une augmentation des émissions de quatre milliards de tonnes de CO2. A titre de comparaison, les Etats-Unis émettent environ six milliards de tonnes de CO2 par an.
Au cours de son premier mandat, l'administration Trump a supprimé plus de 100 lois et réglementations environnementales importantes, y compris toutes les réglementations climatiques pertinentes de l'ère Obama. Aujourd'hui, il a l'intention d'annuler les réglementations relatives à la réduction des émissions des centrales électriques à combustibles fossiles ainsi que des dizaines d'autres réglementations environnementales relatives à la protection des espèces et à la limitation de la pollution de l'air et de l'eau.
Trump veut vider de leur substance les agences fédérales impopulaires, notamment l'Agence de protection de l'environnement (EPA). Le projet 2025, le plan conservateur de restructuration du gouvernement fédéral, recommande de réduire considérablement le budget de l'EPA, de licencier des employés et des conseillers scientifiques et de supprimer les programmes de protection des populations pauvres dans les zones fortement polluées.
Trump a annoncé qu'il souhaitait annuler pratiquement toute la politique climatique du président Biden, y compris la principale loi américaine sur le climat, l'"Inflation Reduction Act". Cette loi prévoit des investissements de plus de 390 milliards de dollars dans les véhicules électriques, les batteries et autres technologies énergétiques propres. Les conseillers de l'administration Biden travaillent désormais d'arrache-pied pour attribuer des subventions à hauteur de centaines de millions de dollars et finaliser les réglementations environnementales afin de garantir au moins une partie de l'agenda climatique du président Biden avant l'arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche.
Il n'est pas certain que Trump parvienne à annuler l'Inflation Reduction Act. Environ 80% de l'argent dépensé jusqu'à présent l'a été dans des districts républicains du Congrès. De nouveaux emplois ont ainsi été créés, raison pour laquelle les législateurs et les dirigeants économiques veulent protéger ces investissements. Les États vont probablement devenir un rempart contre les efforts du gouvernement fédéral pour inverser la politique environnementale. C'était déjà le cas lors de la première présidence de Trump. En 2017, le gouverneur de Californie de l'époque, Jerry Brown, a rencontré le président Xi Jinping et signé une série d'accords sur le climat et l'énergie entre la Californie et plusieurs autorités nationales et gouvernements provinciaux chinois. Plus d'informations dans Nature.
Elon Musk a soutenu l'élection de Donald Trump à hauteur de 250 millions de dollars US. Musk se qualifie souvent de "respectueux de l'environnement" et de "super respectueux du climat". La question est maintenant de savoir si les opinions de Musk sur le changement climatique pourront influencer la nouvelle administration ou s'il s'adaptera à la rhétorique de Trump. En août, Musk a déclaré : "Si nous arrêtions maintenant d'utiliser le pétrole et le gaz, nous mourrions tous de faim et l'économie s'effondrerait. Je ne pense donc pas qu'il soit juste de dénigrer l'industrie du pétrole et du gaz". Plus dans le NY Times (paywall).
Trump veut à nouveau se retirer de l'accord de Paris sur le climat. On craint que d'autres nations soient encouragées à assouplir également leurs engagements. Lors de la COP29, les Etats-Unis et l'Argentine ont déjà assuré qu'ils quitteraient l'accord de Paris sur le climat (Deutsche Welle). Ce serait particulièrement difficile si les Etats-Unis quittaient également la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC). Il faudrait alors une majorité des deux tiers au Sénat américain pour permettre une réintégration.
Une enquête de CORRECTIV montre comment, avec l'élection de Trump, de telles idées hostiles au climat gagnent en influence en Allemagne également. Des organisations allemandes comme l'Institut Prometheus reçoivent des financements des États-Unis, notamment de la Fondation Templeton et du réseau Atlas. Ces réseaux, financés pour la plupart par des industries fossiles, s'étendent jusqu'à la politique allemande mainstream par le biais de think tanks et de conseillers, avec des liens avec la CDU et le FDP.
Plus d'informations dans le NY Times (paywall), le Guardian, la BBC, The Financial Times (paywall), le NY Times (paywall) et dans Le Temps.
La Cour internationale de justice se penche sur la politique climatique
Après des années de lobbying de la part des États insulaires, l'Assemblée générale des Nations unies a demandé l'année dernière à la Cour internationale de justice de se prononcer sur les "obligations des États en matière de changement climatique".
La Cour suprême des Nations unies a entamé une audience de deux semaines. Il s'agissait d'examiner ce que les pays du monde entier doivent légalement faire pour lutter contre le changement climatique et aider les nations vulnérables à combattre ses effets dévastateurs. Cependant, les nations riches qui produisent beaucoup d'émissions font valoir qu'elles ont déjà pris des engagements suffisants en matière de changement climatique dans le cadre de l'Accord de Paris.
Les avis du tribunal ne sont pas contraignants. Les experts soulignent toutefois que la décision sera utilisée comme document déterminant dans les futurs processus climatiques et les négociations internationales sur le climat. Plus d'informations chez Associated Press et dans Climate Home News.
Comment les pays enjolivent leur bilan climatique avec leurs forêts
L'objectif net zéro signifie qu'un Etat ne doit pas produire plus de gaz à effet de serre qu'il ne peut en extraire de l'atmosphère et les stocker durablement. Mais qu'est-ce qui est considéré comme un puits naturel de CO2 qui ne peut pas être pris en compte dans l'objectif de réduction ? Par exemple une forêt existante ? Et qu'est-ce qui est considéré comme un puits de carbone créé par l'homme ? Par exemple, une forêt nouvellement reboisée ?
Une définition précise fait défaut dans l'accord de Paris sur le climat. C'est pourquoi de nombreux pays comptabilisent leurs forêts en fonction de leur objectif climatique. Avec la comptabilisation actuelle, les États ayant une grande part de forêts peuvent atteindre leurs objectifs climatiques nationaux sur le papier sans avoir suffisamment réduit leurs émissions réelles.
Au niveau mondial, 6 à 7 milliards de tonnes de CO₂ par an sont ainsi comptabilisées comme des réductions d'émissions, alors qu'elles proviennent de puits naturels. Cela correspond à environ 15% des émissions mondiales de CO₂. Les auteurs d'une nouvelle étude publiée dans Nature demandent désormais que les pays fassent d'urgence la distinction entre puits anthropiques et naturels dans leurs objectifs climatiques. Plus dans le Guardian, Cicero et Tages Anzeiger (paywall).
Politique climatique européenne
Le règlement européen sur la déforestation sous pression
Bien que les négociations sur le règlement de l'UE relatif à la déforestation soient déjà terminées, cette importante mesure de politique environnementale est à nouveau sous pression au sein du Parlement européen, dominé par la droite conservatrice. L'objectif du règlement est d'établir des chaînes d'approvisionnement sans déforestation. Ainsi, certains produits et biens commerciaux ne doivent être importés que s'il peut être garanti qu'ils ne sont pas liés à la déforestation et à la dégradation des forêts (plus d'informations auprès du BMEL).
La nouvelle Commission souhaite toutefois repousser d'un an l'entrée en vigueur initiale du règlement. La DIHK, par exemple, soutient ces plans et demande même un report de deux ans. D'autres règles et procédures doivent en outre être modifiées sous la pression des députés de droite, libéraux et conservateurs. Les associations environnementales sont "horrifiées", comme le titre le WWF. L'ONG juge la démarche du PPE honteuse, les retards doivent être annulés. Autre point sensible des propositions de modification : La catégorie dite "risque zéro". Ainsi, les Etats seraient considérés en bloc comme sans risque et exclus du règlement. Selon le DNR, 25 des 27 Etats membres s'y sont opposés en raison d'une incompatibilité avec les règles de l'OMC. Aucun accord n'a pu être trouvé jusqu'à présent. Si cela reste le cas, le règlement entrera en vigueur en janvier 2025.
La nouvelle Commission européenne est prête
Six mois après les dernières élections au Parlement européen, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen (PPE) a présenté sa nouvelle équipe. La Commission, composée de 26 commissaires, a reçu fin novembre l'approbation du Parlement - malgré des critiques parfois acerbes. Elle a été soutenue principalement par les groupes PPE, S&D et Renew. Néanmoins, avec 370 voix contre 282, le résultat a été moins convaincant que lors de son premier mandat, comme le rapporte Euractiv.
Outre la défense, la compétitivité et le commerce, la nouvelle Commission européenne met clairement l'accent sur la politique économique. Mais en même temps, la transformation industrielle, la politique énergétique, environnementale et climatique restent des défis majeurs de notre époque. Pour faire face à ces tâches, la Commission a créé plusieurs portefeuilles clés :
- L'Espagnole Teresa Ribera Rodríguez (S&D) prend la responsabilité de "Clean, Just and Competitive Transition". Dans son rôle de vice-présidente, elle dirigera la mise en œuvre et le développement du Green Deal.
- Le Néerlandais Wopke Hoekstra (PPE) sera le commissaire chargé du "Climate, Net Zero and Clean Growth". Son domaine de compétence comprend entre autres la promotion de la croissance économique ainsi que le respect et le développement des objectifs climatiques de l'UE.
- Jessika Roswall (PPE), de Suède, dirigera le domaine "Environnement, résilience de l'eau et économie circulaire compétitive". Elle sera notamment chargée de promouvoir l'économie circulaire, l'adaptation au changement climatique et la politique internationale en matière de biodiversité.
- Le Danois Dan Jørgensen (S&D) sera responsable du portefeuille "Énergie et logement". C'est la première fois qu'un commissaire est nommé pour la politique du logement, un domaine qui relevait jusqu'à présent principalement de la compétence des États membres. Il aura notamment pour mission de développer et de mettre en œuvre le premier "European Affordable Housing Plan".
- Stéphane Séjourné (RENEW), France, dirige en tant que vice-président exécutif le domaine de travail "Prosperity and Industrial Strategy". Le thème central sera pour lui la présentation d'un "Industrial Decarbonisation Accelerator Act" (loi sur l'accélération de la décarbonisation industrielle).
Le Danemark taxe les émissions de l'agriculture
Le Danemark est le premier pays au monde à prévoir une taxe sur les émissions de méthane des vaches et des porcs afin d'encourager la protection du climat. Cette mesure fait partie d'un paquet climatique global qui comprend notamment la plantation d'un milliard d'arbres et une réduction des émissions de gaz à effet de serre du Danemark de 1,8 million de tonnes d'équivalents CO₂ d'ici 2030. L'objectif est de réduire les émissions du pays de 70 % d'ici 2030 par rapport à 1990 et d'atteindre la neutralité climatique d'ici 2045. Jeppe Bruus, ministre danois des impôts, parle de la plus grande transformation du paysage danois depuis un siècle, rapporte Tagesschau.
La taxe sur le méthane commencera en 2030 à 300 couronnes (environ 40 euros) par tonne d'équivalent CO₂ et devrait atteindre 750 couronnes en 2035. Parallèlement, les agriculteurs bénéficieront d'allègements fiscaux, ce qui limitera les coûts réels à 120 couronnes dans un premier temps, puis à 300 couronnes par tonne. Le projet, qui nécessite des investissements de 43 milliards de couronnes (5,8 milliards d'euros), a été décidé par le gouvernement et d'autres partis. L'accord représente un compromis avec les représentants des intérêts de l'agriculture, des syndicats et des groupes environnementaux. Les agriculteurs recevront un soutien financier pour la transformation grâce au "fonds pour les espaces verts" nouvellement créé. Cela permettra de financer environ 250.000 hectares de reboisement (agarheute). Ce qui est particulier : Ce compromis s'est déroulé sans aucune protestation, comme on l'a souvent vu dans d'autres pays de l'UE ces derniers temps. Les critiques dénoncent toutefois le montant de la taxe, trop faible pour avoir un impact ( Tagblatt ).
Retournement de situation en Norvège : l'exploitation minière en eaux profondes est provisoirement stoppée
En tant que précurseur mondial, le pays scandinave du Nord voulait au début de l'année autoriser l'exploitation minière en eaux profondes afin d'en extraire des ressources naturelles. Mais le gouvernement norvégien a pour l'instant stoppé tout projet en ce sens. Le Parti socialiste de gauche, un petit parti écologiste, a demandé l'arrêt des projets comme concession pour pouvoir soutenir les plans budgétaires du gouvernement minoritaire composé du parti social-démocrate Arbeiderpartiet et du parti centriste Senterpartiet (voir à ce sujet le journal télévisé).
L'organisation environnementale WWF y voit un grand bénéfice pour la protection de l'environnement. Le WWF Norvège a une plainte en cours contre le gouvernement norvégien, sur laquelle il n'a pas encore été statué. Greenpeace reproche également au gouvernement des procédures rapides sans tenir compte des supposées "conséquences catastrophiques" pour les écosystèmes. La Deutsche Welle a mis à disposition une carte dans un rapport détaillé. Il apparaît clairement que les zones d'exploitation minière en eaux profondes initialement prévues se chevauchent fortement avec des zones sensibles. Le Premier ministre Jonas Gahr Støre ne parle que d'une suspension des plans, pas d'un arrêt.
Allemagne
Le gouvernement de l'Ampel s'effondre
Les dernières semaines de la politique allemande ont été marquées par un événement : Le gouvernement Ampel a volé en éclats. Le soir du 6 novembre, le chancelier Olaf Scholz (SPD) a limogé le ministre des Finances Christian Lindner (FDP). Le gouvernement Ampel - l'alliance tripartite entre les sociaux-démocrates, les libéraux et les Verts - est ainsi de l'histoire ancienne. Les événements se sont déroulés en arrière-plan des négociations sur le budget fédéral 2025. Le Redaktionsnetzwerk Deutschland a établi à ce sujet un aperçu chronologique complet qui mène à cette étape.
Environ une semaine auparavant, le "document économique" de l'ex-ministre des Finances a été rendu public. Il s'agit d'un concept de changement fondamental de la politique économique. Il s'agissait notamment de supprimer les objectifs de protection climatique afin de stimuler l'économie et de réduire considérablement les dépenses sociales - des exigences inacceptables pour les partenaires de coalition.
Cette démarche du FDP aurait été orchestrée et préparée depuis des semaines, comme le documente une enquête de Zeit Online (Paywall). Outre les plans secrets de sortie du gouvernement, dont le FDP devait sortir renforcé selon ses propres plans, le langage militaire de ce plan, qui a conduit à ce que l'on appelle "l'affaire du jour J", a particulièrement fait sensation. Le FDP a finalement révélé lui-même ses plans. En conséquence, plusieurs responsables de haut niveau, comme le secrétaire général Bijan Djir-Sarai et le directeur fédéral Carsten Reymann, ont démissionné.
Les principaux projets climatiques et environnementaux à la dérive
L'éclatement du gouvernement fédéral a pour conséquence que le gouvernement rouge-vert restant ne dispose actuellement d'aucune majorité parlementaire au Bundestag. C'est ainsi que des projets qui auraient dû être mis en œuvre avant la pause de Noël par le gouvernement autoproclamé "de progrès" sont bloqués.
La question de savoir si des projets importants pourront être présentés au Parlement avant les nouvelles élections de février 2025 dépend du groupe CDU/CSU. Il s'agit par exemple de la loi sur la sécurité des centrales électriques, de la nouvelle réglementation du chauffage urbain, de la loi sur le stockage du CO2, de la loi fédérale sur les forêts, de la poursuite du billet d'Allemagne et, de manière plus centrale, de la garantie du budget fédéral pour l'année prochaine, y compris l'utilisation des moyens du fonds de transformation climatique (KTF). Le Frankfurter Rundschau a rassemblé une partie des projets encore en suspens.
Le gouvernement fédéral présente un projet de loi sur la sécurité des centrales électriques
Même sans majorité au Parlement, la loi sur la sécurité des centrales électriques (KWSG) a été envoyée fin novembre aux associations pour qu'elles donnent leur avis. L'élément central : la création de flexibilités ainsi que la mise en place d'une infrastructure hydrogène par de nouvelles centrales à gaz. Celles-ci seraient nécessaires pour garantir la sécurité d'approvisionnement en cas de forte demande en période de manque d'offre des énergies renouvelables.
Les représentants de l'industrie, comme l'association allemande des énergies renouvelables (Bundesverband erneuerbare Energien), se sont prononcés en faveur d'une révision du projet "de la tête aux pieds", selon Solarserver. Le rôle de la bioénergie - un domaine d'intérêt central de l'association - en tant que source de compensation pour les énergies solaire et éolienne fluctuantes est sous-représenté et ne répond pas au besoin urgent de flexibilité. Le stockage domestique est également nécessaire. La plus grande association énergétique, BDEW, a salué le fait que le gouvernement fédéral fasse avancer le projet. Fin octobre, les associations de protection de l'environnement ont adressé une lettre ouverte au ministre Habeck (Verts) pour le mettre en garde contre la priorité accordée aux nouvelles centrales à gaz.
Congrès des Verts : Habeck est le candidat de tête
Peu après la fin du gouvernement des feux de signalisation, l'Alliance 90/Les Verts a tenu sa 50e conférence des délégués fédéraux (BDK) à Wiesbaden, qui était déjà prévue auparavant. L'élection de Robert Habeck comme "Spitzenkandidat" pour les élections au Bundestag était au premier plan. Celui-ci a été confirmé par 96 pour cent des quelque 830 délégués présents, rapporte Deutsche Welle. Il sera en tête de la campagne électorale avec la ministre fédérale des Affaires étrangères Baerbock.
Après la démission des dirigeants du parti des Verts à l'automne dernier, suite aux résultats déplorables obtenus lors des élections régionales en Thuringe, en Saxe et dans le Brandebourg, Felix Banaszak, député du Bundestag et ancien président des Verts de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, et Franziska Brantner, secrétaire d'État parlementaire au ministère de l'Économie, ont été élus à la tête du parti.
L'activiste de Fridays for Future, Luisa Neubauer, a invité le parti à protéger le climat, à fixer des normes écologiques et à faire preuve d'équité. En outre, les délégués ont voté pour l'introduction d'un fond climatique, pour une meilleure protection du climat dans le secteur des transports et pour une réforme du "frein à l'endettement" afin de permettre des investissements dans la transformation. Vous trouverez les décisions de la BDK ici.
La crise climatique visible
Intempéries meurtrières en Espagne
L'Espagne a été confrontée aux pires inondations depuis des générations après les précipitations du siècle. 230 personnes ont perdu la vie et la région de Valence a été la plus touchée. En l'espace de 24 heures, plus de 200 millimètres de pluie sont tombés du ciel en de nombreux endroits de cette province de l'est de l'Espagne, voire davantage à certains endroits. Ces intempéries ont été déclenchées par un phénomène météorologique bien connu dans le bassin méditerranéen : une goutte d'air froid. De l'air froid circule à haute altitude autour d'un tourbillon de basse pression. L'air froid entre alors en contact avec l'air chaud et humide au-dessus de la Méditerranée, ce qui déclenche de fortes précipitations. Cette année, des températures de surface records ont été mesurées en Méditerranée.
Dans le Guardian, Friederike Ott, climatologue et cofondatrice de World Weather Attribution, explique l'influence du changement climatique. Selon une première étude, les pluies extrêmes sont devenues 12% plus intenses et deux fois plus probables en raison du réchauffement. Carbon Brief a rassemblé les faits les plus importants concernant le développement de la recherche sur l'attribution et son importance.
Quelle est la raison pour laquelle tant de personnes sont mortes ? Selon la climatologue Friederike Ott, la population a été avertie trop tard, alors que les intempéries étaient déjà en cours. De nombreuses personnes se trouvaient alors déjà dans des maisons inondées ou étaient enfermées dans des parkings souterrains. Plus d'informations sur SRF, dans le Tages-Anzeiger (paywal) et chez Klimareporter.
Aux Philippines, la tempête tropicale Trami a provoqué des inondations et des glissements de terrain dévastateurs. Au moins 150 personnes ont perdu la vie. Plus d'informations sur Nau et Philippine Star.
Une chaleur record en 2024 et davantage de naissances prématurées
L'Organisation météorologique mondiale et le service Copernicus sur le changement climatique de l'UE prévoient que 2024 sera l'année la plus chaude jamais enregistrée. En octobre 2024, la température était supérieure de 1,65 °C au niveau préindustriel. Le mois d'octobre a donc été le 15e mois sur une période de 16 mois au cours duquel les températures moyennes ont dépassé le seuil de 1,5 °C fixé par l'accord de Paris.
Les vagues de chaleur mettent en danger les mères et les nourrissons, révèle une nouvelle étude publiée dans Nature. L'exposition à la chaleur augmente le risque de naissances prématurées, de mortinatalité, de malformations congénitales et de complications à la naissance. Pour cette étude, les chercheurs ont analysé 198 études provenant de 66 pays. Pour chaque augmentation de 1 ℃ de l'exposition à la chaleur, le risque d'accouchement prématuré augmentait de 4%. Les naissances prématurées sont l'une des principales causes de décès de nourrissons et de handicaps.
Nouvelles de la science du climat
Les émissions et la concentration de CO2 atteignent un niveau record
Chaque année, une multitude de rapports importants sont publiés avant les négociations sur le climat. Nous en résumons ici l'essentiel :
Le rapport 2024 sur l'état du climat rédigé par des scientifiques de renom commence par ces mots : "Nous sommes au bord d'une catastrophe climatique irréversible. Il s'agit sans aucun doute d'une urgence mondiale. Une grande partie des bases de la vie sur terre est menacée. Nous entrons dans une nouvelle phase critique et imprévisible de la crise climatique".
Le rapport 2024 du Lancet Countdown sur la santé et le changement climatique montre qu'une action hésitante entraîne d'énormes menaces. Les populations du monde entier sont déjà confrontées à des menaces importantes pour leur bien-être, leur santé et leur survie en raison de l'évolution rapide du climat.
Le bulletin annuel des gaz à effet de serre de l'OMM, qui montre que la concentration de CO2 a atteint un nouveau sommet. La concentration atmosphérique de CO2 devrait atteindre 422,5 parties par million en 2024, soit 2,8 parties par million de plus qu'en 2023 et 52% de plus qu'avant l'industrialisation. Il s'agit probablement de la valeur la plus élevée jamais atteinte au cours des 8 à 12 derniers millions d'années.
L'année dernière, les pays n'ont guère progressé dans la maîtrise de leurs émissions de gaz à effet de serre, si bien que la planète reste sur une trajectoire de réchauffement dangereuse, selon un nouveau rapport du Climate Action Tracker.
Le 2024 UNEP Gap Report montre que les mesures climatiques actuelles entraîneraient un réchauffement d'environ 2,9°C d'ici la fin du siècle. Si toutes les contributions climatiques nationales soumises à l'ONU étaient mises en œuvre, le réchauffement serait moindre (2,4-2,6 °C), et même de 1,6-2,2 °C si tous les objectifs nets zéro promis étaient également mis en œuvre. Mais on peut se demander si ces promesses seraient mises en œuvre ou si les objectifs nets zéro n'ont été prononcés que pour suggérer une prise de conscience et une action.
Si le défi est indéniablement de taille, il existe de nombreuses possibilités d'accélérer l'atténuation du changement climatique. Ainsi, selon le rapport, les émissions mondiales pourraient être réduites de 54 % d'ici 2030, et ce pour un coût inférieur à 200 dollars par tonne d'équivalent CO₂. D'ici 2035, une réduction de 72 % serait possible dans ce cadre de coûts.
Le rapport 2024 Global Carbon Budget a été élaboré par une équipe internationale de plus de 120 scientifiques. Il prévoit pour 2024 des émissions de CO2 d'origine fossile de 37,4 milliards de tonnes, soit une augmentation de 0,8 % par rapport à 2023. Si l'on ajoute à cela les 4,2 milliards de tonnes d'émissions dues au changement d'affectation des sols (par exemple la déforestation), les émissions totales de CO2 devraient atteindre 41,6 milliards de tonnes en 2024, contre 40,6 milliards de tonnes l'année précédente.
Malgré le besoin urgent de réduire les émissions pour ralentir le changement climatique, les chercheurs estiment qu'il n'y a toujours "aucun signe" indiquant que le monde a atteint un pic dans les émissions de CO2 d'origine fossile. Au niveau mondial, on prévoit une augmentation des émissions de plusieurs combustibles fossiles en 2024 : Charbon (0,2 %), pétrole (0,9 %), gaz (2,4 %). Ils contribuent respectivement à 41 %, 32 % et 21 % des émissions mondiales de CO2 d'origine fossile.
Suivent les prévisions d'émissions pour 2025 :
- Chine (32 % des émissions mondiales) : + 0,2 %.
- États-Unis (13 % des émissions mondiales) : - 0,6
- Inde (8 % des émissions mondiales) : + 4,6
- Union européenne (7 % du total mondial) : - 3,8 %.
- Le reste du monde (38 % des émissions mondiales) : + 1,1 %.
- Le transport aérien et maritime international (3 % du total mondial) : +7,8 %.
- Au niveau mondial, les émissions dues au changement d'affectation des sols (déforestation) ont diminué de 20 % au cours des dix dernières années, mais devraient à nouveau augmenter en 2024.
Au rythme actuel des émissions, l'équipe "Global Carbon Budget" estime à 50 % la probabilité que le réchauffement climatique dépasse durablement 1,5 °C dans environ six ans. Plus d'informations dans le Guardian et ScienceDaily.
La nature peut stocker de moins en moins de CO2
Les puits de carbone naturels de la planète - les océans, les forêts et les sols - absorbaient jusqu'à présent environ la moitié des émissions produites par l'homme. Cependant, en 2023, les sécheresses et les incendies de forêt ont fait que ces puits naturels n'absorbaient presque plus de CO2, comme le montre une nouvelle étude publiée dans le Preprint. La vitesse et l'ampleur des changements font craindre à certains scientifiques que les modèles climatiques se basent sur des hypothèses trop optimistes.
L'économie se contractera de près de 20% d'ici 2050
En raison des émissions déjà émises, l'économie mondiale connaîtra une baisse de revenus de 19% au cours des 26 prochaines années, selon un nouvel article publié dans Nature. Les chercheurs ont utilisé des données empiriques provenant de plus de 1600 régions au cours des 40 dernières années afin de prévoir les dommages liés au climat. Les dommages annuels globaux s'élèveront à 38 billions de dollars américains d'ici 2049.
Ces dommages sont six fois plus élevés que les coûts nécessaires pour limiter le réchauffement global à 2 °C au cours des 26 années à venir. Les pertes les plus importantes seront subies par les pays du Sud global, qui sont les moins responsables du changement climatique.
Une alimentation saine est bonne pour la planète
L'agriculture est responsable d'environ 30% des émissions mondiales de gaz à effet de serre. En outre, elle utilise 70% de l'eau consommée dans le monde. Une consommation alimentaire élevée (en particulier de produits animaux) est l'une des principales causes de l'obésité, du diabète et des maladies cardiovasculaires. Parallèlement, plus de 800 millions de personnes souffrent toujours de la faim et près de 3,1 milliards de personnes n'ont pas les moyens de se nourrir sainement.
Le planetary health diet de la commission EAT-Lancet montre comment un changement vers une alimentation plus saine peut éliminer la faim, améliorer la santé et réduire les émissions. Une telle alimentation comprend en grande partie des aliments d'origine végétale, avec de petits compléments de poisson, de viande et de produits laitiers.
Une nouvelle étude publiée dans Nature Climate Change a calculé, sur la base de ces directives alimentaires, que les émissions mondiales de gaz à effet de serre liées à l'alimentation diminueraient de 17% si tous les habitants de la planète adoptaient une alimentation saine. Les personnes qui surconsomment actuellement (plus de la moitié de la population) économiseraient 32% des émissions mondiales en changeant de régime alimentaire. Cela compenserait largement l'augmentation de 15 % des émissions mondiales due aux personnes qui consomment actuellement trop peu.
Vérification de la réalité sur la CSC
Le captage et le stockage du carbone (CSC) sont utilisés dans de nombreux scénarios climatiques comme une technologie clé pour maintenir le réchauffement en dessous de 1,5°C. Mais nous devons être conscients de la difficulté, du coût et de la consommation d'énergie que cela implique, expliquent quatre chercheurs en systèmes énergétiques dans OneEarth. Par exemple, pour éliminer 10 gigatonnes de CO2 atmosphérique, même les meilleures méthodes proposées aujourd'hui nécessiteraient 12'000 térawattheures d'électricité ; soit plus de 40% de la production annuelle actuelle d'électricité dans le monde. Dans un éditorial publié dans Nature, les scientifiques estiment que 400 gigatonnes de CO2 devront être éliminées d'ici 2100 pour limiter le réchauffement à 1,5 °C. Les techniques actuelles d'élimination du CO2 ne représentent qu'un millionième du CO2 émis par les combustibles fossiles.
L'IA a besoin d'une quantité d'énergie incroyable
En moyenne, une requête ChatGPT consomme presque dix fois plus d'énergie qu'une recherche Google. Pendant des années, les centres de données ont affiché une consommation électrique remarquablement stable, même lorsque la charge de travail augmentait. La charge de travail des centres de données a presque triplé entre 2015 et 2019. Cependant, au cours de cette période, la demande en électricité des centres de données est restée relativement constante, autour de 200 térawattheures par an. Cela s'explique par le fait que les centres de données sont devenus de plus en plus efficaces. Maintenant que les gains d'efficacité en matière de consommation électrique ralentissent et que la révolution de l'IA prend de l'ampleur, Goldman Sachs Research estime que la demande en électricité des centres de données augmentera de 160 % d'ici 2030.
Actuellement, les centres de données consomment 1 à 2 % de l'électricité totale dans le monde, mais cette proportion devrait atteindre 3 à 4 % d'ici la fin de la décennie. Dans une série de trois rapports, les analystes de Goldman Sachs Research décrivent l'impact de cette augmentation de la demande en électricité aux États-Unis, en Europe et dans le monde. Aux États-Unis et en Europe, cette augmentation de la demande entraînera une croissance de l'électricité sans précédent depuis une génération. Dans ce contexte, les émissions de CO2 des centres de données pourraient plus que doubler entre 2022 et 2030.
Actif contre le désespoir
Il nous faut plus que de l'espoir pour sauver la planète.
Il est important que les personnes qui s'engagent pour la protection du climat acceptent et laissent s'exprimer les sentiments difficiles que sont la tristesse, la peur et l'incertitude, argumente la psychologue du climat Steffi Bednarek. Bednarek met en garde contre le fait que les messages d'espoir ne conduisent pas aux mesures décisives nécessaires. Selon elle, le meilleur moyen de motiver à l'action est de travailler ensemble au renforcement de la résilience. "Si nous avons des relations saines, nous pouvons agir de manière durable, même si quelque chose ne va pas - non pas parce que l'action est la seule issue à la détresse psychologique, mais parce que c'est la bonne chose à faire". Plus sur DeSmog.
Aperçu des votations à venir et des initiatives :
- Les Verts récoltent des signatures pour leur initiative solaire. Elle veut rendre obligatoires les installations solaires sur les bâtiments.
- L'initiative pour la place financière veut faire en sorte que les banques et les assurances suisses ne soutiennent plus les projets qui accélèrent le changement climatique. Ce lien mène à la feuille de signatures.