Éditorial
Dans ce numéro, nous discutons de ce que le non à l’extension des autoroutes pourrait signifier pour un tournant dans le domaine des transports.
L’initiative sur la place financière a été lancée. Et le nouveau plan directeur climatique montre quelles mesures seraient nécessaires pour que la Suisse atteigne l’objectif net zéro d’ici 2035.
Nous évoquons le développement de l’électricité solaire et le fait que nous gaspillons beaucoup d’énergie, mais que les politiques ne veulent rien faire pour y remédier. La compensation des émissions de CO2 continue de faire l’objet de critiques.
Les négociations internationales sur le climat lors de la COP29 ont donné peu de résultats et les accords sur le plastique et la biodiversité ont également donné lieu à peu d’accords.
Nous montrons ce que la victoire de Trump pourrait signifier pour la protection du climat.
Plusieurs études montrent que les pays font toujours trop peu pour la protection du climat. Ils trichent également en comptabilisant leurs forêts dans les objectifs climatiques. Les émissions et la concentration de CO2 atteindront des niveaux records en 2024. Selon une nouvelle étude, la crise climatique entraînera une baisse de l’économie mondiale de près de 20 % d’ici 2050. Les scientifiques du climat lancent un nouvel avertissement : « Nous sommes au bord d’une catastrophe climatique irréversible. Il s’agit sans aucun doute d’une urgence mondiale. Une grande partie des bases de la vie sur terre est menacée. Nous entrons dans une nouvelle phase critique et imprévisible de la crise climatique ».
Nous expliquons à la fin du journal climatique pourquoi nous avons besoin de plus que de l’espoir pour sauver la planète.
Suisse
Non à l’extension des autoroutes. Oui à un tournant pour les transports ?
Les électeurs suisses ne veulent pas étendre le réseau autoroutier. 52,7% des votants ont rejeté le paquet de 4,9 milliards de francs suisses qui prévoyait l’extension de six projets ; la participation s’est élevée à 45,1%. La Suisse romande, le Tessin ainsi que de nombreux cantons alémaniques ruraux ont voté non, y compris à Bâle-Ville, Berne, Genève et Vaud, où des projets d’extension devaient être réalisés. A Saint-Gall et Schaffhouse, où des tubes de tunnel supplémentaires étaient prévus, la population urbaine a également rejeté les projets. Ce n’est que sur le Plateau et en Suisse orientale que l’extension de l’autoroute a été majoritairement approuvée.
Quelles sont les raisons du non ? L' »euphorie du béton » est terminée, estime le Tages-Anzeiger (paywall). La NZZ (paywall) parle d’une « perte totale » pour Albert Rösti, qui s’était engagé en faveur du projet. Plus d’informations sur SRF. L’enquête post-électorale de 20 Minuten et Tamedia met en lumière de nettes différences selon le sexe et le revenu. 61% des femmes se sont opposées à l’extension de l’autoroute, tout comme les personnes aux revenus les plus faibles. En revanche, les hommes (56%) et les personnes gagnant bien leur vie ont approuvé l’extension. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger et l’Wochenzeitung.
Avant la votation, on avait appris que les coûts attendus de 7,1 milliards de francs étaient nettement plus élevés que les 4,9 milliards indiqués par la Confédération, comme l’a montré K-Tipp (paywall). Plus d’informations dans la NZZ (paywall). Au préalable, plus de 340 spécialistes de la mobilité s’étaient par ailleurs prononcés contre l’extension des autoroutes, estimant qu’elle entraînerait une augmentation du trafic et des embouteillages et que les solutions alternatives de mobilité et le développement urbain ne seraient pas pris en compte (Tages-Anzeiger).
Quelles sont les revendications actuelles ? Le parti écologiste veut utiliser l’argent du fonds pour les routes nationales et le trafic d’agglomération (FORTA) pour des mesures de protection du climat : développement des transports publics, du trafic cycliste et piétonnier ainsi que protection contre le bruit et aussi adaptations au changement climatique, par exemple dans les régions de montagne. Pour réaliser cela, il faut une modification légale du fonds, que les électeurs avaient approuvée en 2017. Plus d’informations à ce sujet dans la NZZ (paywall) et le Tages-Anzeiger (paywall). Les discussions portent également à nouveau sur une tarification dynamique et sur les taxes de congestion. Au lieu de construire de nouvelles routes, le trafic devrait être géré par le biais du prix. Plus d’informations sur SRF et dans le Sonntagsblick.
Le conseiller national PS Jon Pult estime qu’un détournement de l’argent du FORTA, par exemple pour la protection du climat, n’est pas susceptible de réunir une majorité. En lieu et place, davantage d’argent du fonds doit être consacré au trafic d’agglomération, peut-on lire dans l‘hebdomadaire. Actuellement, cela représente entre 9 et 12% de l’argent annuel du FORTA, selon Pult, cette part devrait être doublée.
Quelles sont les conséquences sur la politique des transports ? La Confédération examine désormais tous les projets de construction de routes nationales. Il s’agit de 24 plans d’aménagement, dont certains sont déjà avancés, pour un volume de 18 milliards de francs, comme le rapporte la SRF. Selon l’Office fédéral des routes (OFROU), les projets doivent certes être poursuivis. Mais on examine quand et si ceux-ci seront pris en compte pour les prochaines étapes d’aménagement. Le conseiller fédéral Albert Rösti reconnaît lui aussi dans la NZZ am Sonntag (paywall) qu’un élargissement continu de l’A1 à six voies n’est actuellement plus d’actualité. La République esquisse ce à quoi pourrait ressembler la mobilité du futur.
Initiative pour la place financière : Pour des flux financiers respectueux du climat
La place financière suisse gère environ un cinquième des actifs mondiaux qui sont investis au-delà des frontières. Comme ces fonds servent également à investir dans des entreprises actives dans le secteur du charbon, du pétrole et du gaz naturel et à octroyer des crédits, la place financière suisse est coresponsable d’énormes quantités d’émissions de gaz à effet de serre.
Selon un calcul effectué par les conseillers en entreprise de McKinsey en 2022, ces émissions représentent au moins 18 fois les émissions nationales totales de la Suisse. Cela va à l’encontre de l’accord de Paris sur le climat, selon lequel les flux financiers mondiaux doivent être orientés vers un développement à faible émission de gaz à effet de serre.
Une alliance d’organisations environnementales, du PS et des Verts a maintenant lancé l’initiative sur la place financière. Elle vise à empêcher que les banques et les assurances suisses continuent à faciliter des projets qui accélèrent le changement climatique. Il reste 18 mois pour récolter les 100’000 signatures nécessaires à une votation populaire.
L’initiative « Pour une place financière suisse durable et tournée vers l’avenir » veut obliger la Confédération à s’engager en faveur d’une orientation écologiquement durable de la place financière suisse. Il s’agit de garantir que les banques, les gestionnaires de fortune, les assurances et les caisses de pension suisses alignent leurs activités commerciales à l’étranger sur les objectifs internationaux en matière de climat et de biodiversité. En outre, la loi doit exclure que des entreprises financières suisses financent ou assurent l’exploitation et l’utilisation de nouveaux gisements d’énergie fossile ou l’extension d’installations existantes. Afin de faire respecter les directives, une autorité de surveillance doit avoir les compétences pour effectuer des contrôles et délivrer des sanctions. Plus d’informations dans la Wochenzeitung (paywall) et dans la NZZ (paywall).
Jusqu’à présent, le Conseil fédéral et le Parlement ont toujours refusé d’édicter des règles climatiques contraignantes pour la place financière. Au lieu de cela, le Conseil fédéral fait confiance à des solutions sectorielles volontaires. La participation des instituts financiers au test climatique annuel de la Confédération est également volontaire. Les résultats de l’enquête actuelle ont été présentés début novembre. Il en ressort que les entreprises pétrolières, dans lesquelles les banques, les assurances et les caisses de pension continuent de détenir des participations, ont développé leurs capacités d’extraction.
Des feuilles pour la collecte de signatures peuvent être téléchargées ici.
La place financière suisse n’est pas la seule à réchauffer le climat mondial. Les négociants en matières premières qui sont basés en Suisse sont responsables d’énormes quantités de gaz à effet de serre. L’organisation non gouvernementale Public Eye montre dans un rapport que les émissions de CO2 dues au charbon, au pétrole et au gaz naturel distribués par les entreprises de matières premières étaient l’année dernière 100 fois plus importantes que celles de l’ensemble de la Suisse. Les entreprises elles-mêmes affichent des émissions nettement inférieures. Elles ne prennent généralement en compte que les émissions de leurs propres installations de production et de transport. Public Eye y ajoute également les émissions indirectes dues à la combustion des matières premières fossiles. Plus d’informations dans le Sonntagsblick (paywall).
Reculs dans la politique climatique – la Constitution peut-elle aider ?
Lors de la session d’hiver en cours, le Parlement débattra du programme d’économies du Conseil fédéral, présenté en septembre. Le Conseil national a déjà décidé de supprimer 54 millions de francs prévus dans la loi sur le climat et l’innovation (LCI) pour le remplacement des chauffages. Le Conseil des Etats pourrait décider d’autres coupes.
Ce n’est qu’en 2023 que les électeurs ont approuvé la LCI et donc un montant de 200 millions de francs par an pour remplacer les chauffages fossiles par des chauffages renouvelables. L’association Protection du climat Suisse critique le fait que le Parlement ignore de manière flagrante la volonté du peuple. Le Conseil fédéral voulait également supprimer les subventions pour les trains de nuit ainsi que pour les bus et les bateaux électriques. Il semble que ces fonds ne seront pas réduits par le Parlement.
Le Conseil fédéral s’est donné beaucoup de temps pour la mise en œuvre de la loi sur la protection climatique. L’ordonnance sur la protection du climat (OCl) entrera en vigueur début 2025, en même temps que la LCI (même si certaines parties de cette dernière ont déjà été modifiées par le Parlement). Les instruments d’encouragement prévus dans la LCI pour l’industrie et le secteur du bâtiment y seront notamment précisés. La manière dont la fonction d’exemple de la Confédération, inscrite dans la LCI, sera mise en œuvre reste ouverte. Les dispositions de mise en œuvre correspondantes « nécessitent des clarifications supplémentaires », peut-on lire à ce sujet dans les explications de l’ordonnance. Le journaliste climatique Alex Tiefenbacher fait le point sur les nouvelles règles de protection du climat dans le podcast Treibhaus.
Les mesures prises par la Suisse pour lutter contre le changement climatique sont-elles suffisantes ? Non, pensent plus de deux tiers de la population. C’est ce que révèle un vaste sondage d’opinion réalisé par l’institut GFS Berne sur mandat de la SSR. Plus de 50’000 personnes ont été interrogées entre mai et juin 2024 dans le cadre de ce sondage représentatif. Plus d’informations sur SRF.
Marcel Hänggi, initiateur de l’initiative sur les glaciers et actif au sein de Climat-Info, est lui aussi convaincu que la Suisse ne fait pas assez pour lutter contre le changement climatique. Pourtant, les bases juridiques existent bel et bien, comme il le montre dans son nouveau livre « Weil es Recht – Vorschläge für eine ökologische Bundesverfassung » (Parce que c’est juste – Propositions pour une Constitution fédérale écologique). Selon Hänggi, la Constitution fédérale offre une bonne base pour la protection du climat. Il faudrait toutefois procéder à diverses révisions pour protéger l’environnement et créer un avenir digne d’être vécu. Au passage, le livre offre un résumé éclairant de la politique environnementale suisse des dernières décennies. Plus d’informations sur SRF et dans la Wochenzeitung.
Des approches pour une meilleure protection du climat existent également au niveau entrepreneurial : de nouvelles entreprises qui investissent dans la protection du climat, l’économie circulaire ou d’autres secteurs d’avenir. En Suisse, il existe aujourd’hui déjà plus de 600 start-ups dans le domaine des cleantech, comme le montre la publication CleantechAlps.
Net zéro d’ici 2035 ? Le plan directeur climatique montre comment
L’Alliance climatique suisse, qui regroupe plus de 150 organisations suisses, met à jour le Masterplan Climat de 2016 en indiquant les mesures urgentes à prendre pour que la Suisse puisse atteindre un bilan net nul d’ici 2035, sans dépasser son budget CO2.
Le plan, qui s’appuie sur les connaissances scientifiques les plus récentes et est conçu comme un guide d’action actuel pour la politique climatique suisse, comprend 11 ensembles d’instruments politiques. Il s’agit notamment de : Taxes strictes sur les émissions, une augmentation des moyens financiers, l’échange de chauffage et l’assainissement énergétique, la réorientation des flux financiers, moins de mobilité, l’e-mobilité et le développement des transports publics, la transformation verte de l’alimentation et de l’agriculture. Le mélange d’investissements respectueux du climat et de mesures politiques doit permettre d’accélérer la transformation vers une société respectueuse du climat. La version présentée en novembre a été élaborée par des experts des organisations membres de l’Alliance climatique. La consultation s’est achevée début décembre. La version définitive sera publiée début 2025.
Les subventions fiscales nuisent au climat
Les avantages fiscaux accordés aux voyageurs ne coûtent pas seulement beaucoup d’argent à l’État, ils entraînent aussi des émissions de gaz à effet de serre supplémentaires. Des chercheurs de l’EPF de Lausanne ont calculé l’ampleur de ces effets. L’étude a porté sur la taxe sur la valeur ajoutée, l’impôt sur le revenu, l’impôt sur les huiles minérales et diverses subventions. Résultat : les pertes fiscales s’élèvent jusqu’à 4,6 milliards de francs par an. Si l’on y renonçait, on pourrait économiser chaque année jusqu’à 2,5 millions de tonnes de CO2, soit 6% des émissions totales en Suisse. Plus d’informations sur SRF.
Trois domaines se distinguent particulièrement :
- Le trafic aérien international ne doit payer ni la TVA ni l’impôt sur les huiles minérales. La Confédération perd ainsi plus de 1,3 milliard de francs de recettes fiscales par an. Sans les subventions fiscales, les émissions annuelles de CO2 seraient, selon l’étude, inférieures de 1,5 million de tonnes.
- En matière de mobilité professionnelle, les allègements fiscaux pour les trajets domicile-travail en voiture, les voitures de société et les places de parking gratuites nuisent au climat. Si ces déductions étaient supprimées, plus de 600’000 tonnes de CO2 pourraient être économisées.
- Avec la redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations (RPLP), le trafic des camions ne prend pas en charge l’ensemble des coûts externes qu’il génère. De plus, les véhicules utilitaires légers sont exemptés de la RPLP. Si le transport de marchandises devait couvrir l’intégralité des coûts externes, les émissions de CO₂ diminueraient de plus de 200’000 tonnes.
Les compensations de CO2 toujours critiquées
Le trafic motorisé est responsable d’un tiers des émissions de CO2 en Suisse. Contrairement au mazout et au gaz naturel, aucune taxe sur le CO2 n’est prélevée sur l’essence et le diesel. En lieu et place, les importateurs de carburant sont tenus par la loi de compenser une partie des émissions de gaz à effet de serre dues au trafic par des projets de protection du climat en Suisse et à l’étranger. Comme le secteur n’atteint pas les objectifs climatiques depuis des années, les règles devraient être renforcées : plus de CO2 devrait être compensé et davantage en Suisse.
Mais le Conseil fédéral a désormais renoncé à un durcissement. Cette décision a été précédée d’une rencontre entre le conseiller fédéral Albert Rösti et des représentants de l’Office fédéral de l’environnement (OFEV) et les importateurs de carburants, écrit le Tages-Anzeiger (paywall). Ces derniers ont ainsi réussi à éviter des directives plus strictes en matière de compensation de CO2. Les défenseurs du climat critiquent la « proximité problématique » du conseiller fédéral Albert Rösti et de ses experts avec le lobby des carburants.
Les affaires de compensation sont traitées par la fondation Klik (Klimaschutz und CO₂ -Kompensation), sur mandat du secteur des carburants. Pour financer les certificats, les stations-service peuvent prélever un supplément de 5 centimes maximum par litre. Comme le montre le magazine en ligne Lamm, Klik a augmenté la majoration à 8 centimes depuis le début de l’année. Toutefois, cette majoration reste très faible par rapport à la taxe CO2 sur les combustibles. Et elle est contraire à la loi. L’OFEV veut maintenant examiner la démarche de cette branche.
Klik fait actuellement aussi les gros titres (de manière négative) avec deux de ses projets à l’étranger : l’un au Ghana et l’autre en Thaïlande. Au Ghana, l’argent de la Suisse permet d’utiliser des fours de cuisson plus efficaces ; jusqu’à présent, environ 18’000 unités ont été vendues. Cela devrait permettre de réduire les particules fines nocives pour la santé et les émissions de CO₂. Une recherche de ONG Alliance Sud montre que les économies de CO2 réalisées sont bien moindres que celles prévue. Plus d’informations sur SRF. En Thaïlande, Klik finance des bus électriques qui seront mis en service à Bangkok. L’objectif est de remplacer tous les bus équipés de moteurs à combustion. Le problème est que l’entreprise thaïlandaise qui exploite les bus électriques vient d’être créée. Elle ne peut donc pas retirer elle-même les anciens bus de la circulation. Comme le montre la République, un seul bus a été mis au rebut jusqu’à présent. Il est en outre reproché au constructeur de bus d’enfreindre le droit du travail. Pour en savoir plus, consultez le Beobachter et la SRF.
Les nouvelles règles environnementales pour les bâtiments
Pour rendre le secteur du bâtiment compatible avec le climat, les cantons jouent un rôle décisif. Ils fixent les normes pour les habitations et les bureaux qui seront utilisés pendant des décennies. Les modèles de prescriptions énergétiques des cantons (MoPEC) sont essentiels à cet égard. De nombreux cantons sont toutefois en retard dans la mise en œuvre de ces règles. Jusqu’à présent, seuls 15 cantons ont révisé leurs lois sur l’énergie conformément au MoPEC 2014. Pourtant, il est temps de renforcer les règles. La Conférence des directeurs cantonaux de l’énergie a mis en consultation le projet de MoPEC 2025 à l’automne. L’un des objectifs de cette adaptation est de faire des bâtiments des « hubs énergétiques », où la production, le stockage et la consommation d’énergie sont réunis. La part d’énergie renouvelable lors du remplacement des chauffages doit être augmentée et l’efficacité énergétique des bâtiments existants améliorée.
Les organisations environnementales doutent de la capacité du secteur du bâtiment à atteindre les objectifs climatiques avec les nouveaux modèles de prescriptions.
La Fondation suisse de l’énergie demande que les modèles de prescriptions soient orientés de manière plus conséquente vers l’objectif net zéro. Et les lacunes existantes doivent être comblées. Ainsi, les prescriptions relatives à l’énergie grise et à la mobilité électrique doivent être intégrées dans le module de base que tous les cantons doivent mettre en œuvre. Les critiques portent également sur le fait que les prescriptions en matière d’énergie grise et d’électromobilité se limitent aux nouveaux bâtiments. Elles devraient également concerner les infrastructures existantes. En outre, il devrait y avoir des exigences concrètes pour le stockage de l’énergie.
L’association « energie-wende-ja » déplore que le MoPEC 2025 soit trop peu ambitieux et ne suffise pas à atteindre les objectifs climatiques. Le secteur du bâtiment devrait être climatiquement neutre d’ici 2040 au plus tard.
Le développement de l’électricité solaire se poursuit-il ?
En juin 2024, les électeurs suisses ont accepté la loi sur l’électricité (loi fédérale relative à un approvisionnement en électricité sûr reposant sur des énergies renouvelables). Bien plus rapidement que pour la loi sur la protection du climat (voir ci-dessus « Reculs dans la politique climatique »), le Conseil fédéral a adopté l’ordonnance correspondante. Début 2025, les installations photovoltaïques sur les façades et sur les toits des parkings seront davantage encouragées. Et les règles d’utilisation de l’électricité solaire produite seront assouplies. Pour les énergies renouvelables provenant d’installations en Suisse, le Conseil fédéral se contente d’une part minimale de 20%. Lors de la consultation, les associations avaient demandé une part plus élevée. Aujourd’hui, la part d’énergie renouvelable dans le mix électrique suisse est de 60%.
Le Conseil fédéral n’a pas encore décidé des mises en œuvre importantes. Ainsi, on ne sait toujours pas à combien s’élèvera la rétribution minimale de l’électricité solaire. Dans le projet du début de l’année, le Conseil fédéral avait prévu une réduction significative.
L’association professionnelle Swissolar critique le fait que le Conseil fédéral n’ait pas encore clarifié ce point. Et elle exige des tarifs minimaux appropriés, sans quoi le développement nécessaire des installations photovoltaïques risque d’être freiné. L’association économique swisscleantech salue le fait que la reconnaissance des installations solaires d’intérêt national améliore les conditions-cadres pour le développement de davantage d’électricité en hiver. Elle critique toutefois la mise en œuvre hésitante de la loi sur l’électricité, car les nouvelles règles sont introduites de manière échelonnée. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger (paywall).
La loi sur l’électricité prévoit que 35 térawattheures supplémentaires d’électricité renouvelable soient produits chaque année en Suisse d’ici 2035. Cela représente un peu plus de la moitié des besoins actuels en électricité de la Suisse. 80% de la quantité d’électricité supplémentaire peut provenir de nouvelles installations photovoltaïques, si des conditions-cadres attrayantes sont mises en place pour l’électricité solaire. C’est ce qui ressort de l’Observatoire solaire suisse de Swissolar, établi pour la première fois. Il sera à l’avenir actualisé chaque année afin de pouvoir évaluer de manière réaliste le développement de l’énergie solaire en Suisse.
Le développement des installations solaires alpines n’avance pas. Sur un total de 62 projets annoncés, 27 ne seront pas poursuivis. Selon l’Office fédéral de l’énergie, seuls quatre projets ont reçu un permis de construire définitif. Pour une installation, « Sedrun-Solar » près de Tujetsch, les travaux de construction ont commencé. Mais cela n’est pas dû en premier lieu à des oppositions, comme le montre une enquête de l’Association des entreprises électriques suisses. Les plus grands défis sont plutôt les études d’impact sur l’environnement qui prennent beaucoup de temps, le long traitement des demandes de permis de construire, les exigences en montagne ainsi que la rentabilité. Comme le montrent la SRF et la NZZ (paywall), il est beaucoup plus coûteux que prévu d’installer des panneaux photovoltaïques en montagne. Ainsi, le groupe électrique Axpo renonce à réaliser une installation malgré une autorisation juridiquement valable. Cela est d’autant plus remarquable que la Confédération prend en charge jusqu’à 60% des coûts d’investissement.
Pour l’instant, aucune installation photovoltaïque flottante ne sera autorisée sur les lacs de barrage. Le risque de dommages dus à des vents violents, des crues ou des glissements de terrain est trop important, explique le Tages-Anzeiger. Actuellement, il existe en Suisse une installation avec des panneaux flottants, sur le lac des Toules, près du Grand Saint-Bernard. Pourtant, le potentiel de production d’électricité serait bien là, comme le montre un rapport du Conseil fédéral sur les installations photovoltaïques sur les centrales hydroélectriques et les lacs de barrage.
Un grand gaspillage d’énergie – mais la politique observe
Dans le débat politique, la question d’une production d’électricité suffisamment importante domine. Les approches visant à économiser l’électricité sont négligées. En 2021, le conseiller national vert Kurt Egger a demandé un rapport au Conseil fédéral. Celui-ci devrait montrer combien d’électricité est gaspillée parce que les aérations et les éclairages fonctionnent alors qu’il n’y a personne dans la pièce ou parce que les moteurs et les processus de production tournent inutilement au ralenti. En effet, le potentiel d’économie est considérable : chaque année, 6 à 7 TWh d’électricité sont gaspillés, comme le montre le rapport « Gaspillage d’énergie lors de l’exploitation sans utilité » qui vient d’être publié. Cela correspond à 12% des trois secteurs : ménages, services et industrie. Le potentiel d’économie serait encore plus important si les secteurs de la mobilité et de l’agriculture étaient également pris en compte. Pourquoi les pertes sont-elles si élevées ? Parmi les raisons possibles, le rapport cite le manque de connaissances des consommateurs ainsi que des obstacles techniques et financiers. Les mesures possibles pour lutter contre le gaspillage sont des prescriptions sur l’efficacité énergétique des appareils et des installations ainsi que des règles légales pour les gros consommateurs et des incitations financières par le biais de conventions d’objectifs, de conseils en énergie et d’informations.
La réalité est toutefois différente. Les entreprises qui consomment beaucoup d’électricité sont soulagées financièrement : Elles sont exemptées du supplément réseau, actuellement de 2,3 centimes par kilowattheure. Cette taxe alimente un fonds avec lequel la Confédération encourage la construction d’installations solaires, de centrales hydroélectriques et de centrales éoliennes. Lorsque la réglementation a été introduite en 2009, les gros consommateurs étaient dans la ligne de mire afin de soutenir l’industrie à forte consommation d’électricité et orientée vers l’exportation.
La NZZ (paywall) montre maintenant qu’en raison de l’absence de critères précis, les hôtels de luxe, les installations de surf indoor et les toboggans aquatiques profitent également de la réduction de l’électricité. Plus de 250 entreprises peuvent obtenir de l’électricité à prix réduit, dont 30 domaines skiables, pour faire fonctionner les remontées mécaniques et les canons à neige. Mais au lieu d’endiguer cette prolifération, la réduction de l’électricité doit encore être étendue. Les difficultés économiques des aciéries suisses sont à l’origine de cette mesure. Ainsi, la Commission de l’environnement, de l’aménagement du territoire et de l’énergie du Conseil national demande que les entreprises d’acier et d’aluminium en Suisse soient exemptées pendant quatre ans d’une partie des taxes pour l’utilisation du réseau électrique. Le Parlement se prononcera à ce sujet lors de la session d’hiver en cours. Plus d’informations sur SRF et dans la NZZ (paywall).
Le thème du gaspillage d’électricité est également ignoré dans le débat sur les centrales de réserve. Les contrats avec les centrales de réserve de Birr (AG), Cornaux (NE) et Monthey (VS) courent encore jusqu’au printemps 2026. En février 2024, le Tribunal administratif fédéral avait décidé que le Conseil fédéral n’aurait pas dû accorder d’autorisation d’exploitation à la centrale de réserve de Birr. En effet, il n’avait pas pu expliquer pourquoi il fallait s’attendre à une situation de pénurie d’électricité. Le jugement n’a pas empêché la Confédération de négocier de nouveaux contrats pour la période après 2026. L’appel d’offres n’a toutefois pas abouti, les coûts proposés étant trop élevés. On apprend aujourd’hui que la Confédération continue de s’accrocher aux centrales de réserve. Comme il n’est pas possible de remplacer sans interruption les centrales de réserve existantes à partir de l’hiver 2026/27, le Conseil fédéral veut prolonger l’ordonnance sur les réserves hivernales jusqu’au 31 décembre 2030. Selon lui, il sera ainsi possible de maintenir les installations existantes en état de veille jusqu’à ce que de nouvelles centrales de réserve soient disponibles.
Date de fermeture de Beznau et discussions sur les déchets nucléaires
La centrale nucléaire de Beznau, déjà la plus ancienne du monde, devrait rester en service jusqu’en 2033. Axpo veut investir 350 millions de francs pour la poursuite de son exploitation. En 2033, la centrale nucléaire aura produit de l’électricité pendant 64 ans. Actuellement, elle produit environ 6 térawattheures d’électricité par an, ce qui correspond à 10% de la production suisse d’électricité. La même quantité d’électricité est gaspillée chaque année (voir ci-dessus : Grand gaspillage d’énergie – mais les politiques observent).
Selon le patron d’Axpo, Christoph Brand, le groupe va ainsi à la limite du possible, une poursuite prolongée de l’exploitation de Beznau étant techniquement exclue, même si on l’avait voulu politiquement et économiquement. Plus d’informations sur SRF, dans le Tages-Anzeiger et dans la NZZ (paywall).
La Fondation suisse de l’énergie (SES) salue cette décision. Selon elle, l’accélération du développement des énergies renouvelables permet de poursuivre la sortie du nucléaire. La SES souligne que grâce au développement des installations solaires sur les infrastructures existantes en Suisse, on produira d’ici 2033 plus d’électricité hivernale supplémentaire que celle qui sera supprimée par l’arrêt de Beznau.
Il faudra encore des décennies avant que les déchets radioactifs des centrales nucléaires suisses puissent être stockés dans un dépôt définitif. La Société coopérative nationale pour le stockage des déchets radioactifs (Nagra) a fait un pas dans ce sens en novembre – elle a déposé une demande d’autorisation pour un dépôt en profondeur sur le site « Nördlich Lägern » dans le canton de Zurich. La décision de choisir le site sur le territoire de la commune de Stadel avait déjà été prise il y a deux ans. Pendant 16 ans, la Nagra a étudié le sous-sol et dépensé plus de 200 millions de francs à cet effet. Les déchets nucléaires doivent être stockés à environ 900 mètres de profondeur dans une couche d’argile à Opalinus de 100 mètres d’épaisseur – pour un million d’années. C’est le temps qu’il faudra pour qu’il n’y ait plus de danger pour l’homme et l’environnement.
Les critiques estiment que ce concept est dépassé. Il faudrait plutôt promouvoir des techniques comme la transmutation, une sorte de recyclage de l’uranium. Le Conseil fédéral et le Parlement se prononceront sur le dépôt en profondeur à partir de 2029. Si un référendum est lancé – ce qui est probable – le projet sera soumis au peuple. Pour en savoir plus, voir ici et ici chez Watson et dans la NZZ (paywall).
Si la Suisse devait construire une nouvelle centrale nucléaire – comme le souhaitent le Conseil fédéral et une initiative populaire – la place dans le dépôt en profondeur ne suffirait pas. C’est ce qu’a déclaré le chef de la Nagra à la NZZ (paywall). Le dépôt en profondeur est prévu pour une quantité de déchets correspondant à 60 ans d’exploitation des centrales nucléaires existantes. D’un point de vue géologique, il serait certes possible de stocker des déchets nucléaires supplémentaires, mais en pratique, cela serait compliqué.
Décisions de la Confédération et des cantons en matière de climat
Les craintes des partisans de l’initiative sur la biodiversité se sont confirmées : La Confédération refuse de prendre des mesures efficaces contre la perte de la biodiversité. La deuxième phase du plan d’action biodiversité, décidée en novembre par le Conseil fédéral, prévoit tout juste 24 millions de francs jusqu’en 2030, soit environ 4 millions de francs par an.
Pour le premier plan d’action (2017-2023), le montant était encore deux fois plus élevé. Le financement est totalement insuffisant, critiquent les organisations environnementales Pro Natura, WWF et Birdlife. « Le financement du plan d’action est si faible qu’il doit être qualifié de totalement inapproprié. Il aurait été plus honnête de ne pas adopter de plan d’action ». Le fait que le Conseil fédéral propose avant tout des rapports, des études et des projets pilotes est également critiqué. Pourtant, des études scientifiques démontrent déjà en détail à quel point la biodiversité est en mauvais état en Suisse.
Le Conseil fédéral veut renforcer l’économie circulaire. Les nouvelles règles qui entreront en vigueur début 2025 doivent permettre de créer des bases pour fermer les cycles de matériaux. Dans le domaine de la construction, les cantons sont chargés de fixer des valeurs limites d’énergie grise pour les nouvelles constructions et les rénovations importantes de bâtiments existants. Pour les produits et les emballages, le Conseil fédéral peut fixer de nouvelles exigences. Et en outre, la Confédération doit jouer un rôle de modèle dans le cadre de ses achats et de ses constructions.
L’initiative sur l’alimentation veut obliger la Confédération à promouvoir un mode d’alimentation basé sur des aliments végétaux. Parallèlement, il s’agit de réduire la dépendance vis-à-vis de l’étranger et de garantir une eau potable propre. Le Conseil fédéral rejette cette demande, sans contre-projet. Il estime que les exigences de l’initiative ne sont pas réalisables dans le délai de dix ans qu’elle prévoit. De plus, une acceptation de l’initiative populaire aurait des conséquences importantes sur la production et la consommation de denrées alimentaires en Suisse (c’est en effet l’objectif de l’initiative). Plus d’informations dans l’Aargauer Zeitung et la NZZ (paywall).
Les électeurs valaisans ont rejeté la loi sur le climat. Elle aurait obligé le canton à atteindre la neutralité climatique d’ici 2040. La loi prévoyait en outre la création d’une « réserve climatique » dotée de 100 millions de francs, qui aurait permis de financer des mesures concrètes d’adaptation et de réduction des émissions de CO2. La majorité des partis politiques s’étaient prononcés en faveur de la loi sur le climat. Les partisans avaient argumenté en vain que le Valais, en tant que canton de montagne, était particulièrement touché par le réchauffement climatique, la fonte des glaciers et les phénomènes météorologiques extrêmes qui en découlent. Plus d’informations sur SRF et le Walliser Zeitung.
La ville de Zurich veut atteindre la neutralité climatique d’ici 2040. Un bilan intermédiaire montre à quel point le chemin pour y parvenir est long. Certes, les émissions directes de gaz à effet de serre dues au chauffage et au trafic sur le territoire de la ville diminuent légèrement. Mais les émissions indirectes augmentent plus fortement. Elles représentent 85% de tous les gaz à effet de serre, et la ville n’exerce aucune influence sur elles. L’aviation pèse lourd dans la balance. En 2023, les voyages en avion ont généré 3,3 tonnes d’équivalents CO2 par habitant. C’est plus que l’empreinte directe totale. L’augmentation des constructions fait également grimper les émissions indirectes. Pour en savoir plus, consultez le Tages-Anzeiger (paywall) et la NZZ (paywall).
Politique climatique internationale
COP29 : résultats décevants des négociations sur le climat
Les négociations de la 29e conférence des Nations unies sur le climat (COP29) à Bakou (Azerbaïdjan) ont été particulièrement tendues cette année, car il a fallu négocier le financement climatique destiné aux pays les plus pauvres. Le premier objectif de financement avait été décidé à Copenhague en 2009. A l’époque, les pays s’étaient mis d’accord pour mettre à disposition 100 milliards de dollars par an jusqu’en 2020, mais cet objectif n’a été atteint que deux ans plus tard.
Les nations pauvres et les ONG ont réclamé à Bakou 1300 milliards de dollars US par an. Un compromis minimal a finalement été trouvé : d’ici 2035, le financement climatique pour les pays pauvres sera augmenté à au moins 300 milliards de dollars US par an. Les États ne se sont toutefois pas mis d’accord sur la part de cette somme qui sera constituée de subventions et de crédits, ni sur la part qui proviendra de sources publiques.
Les représentants de nombreux pays pauvres ont été indignés « Les pays industrialisés nous envoient toujours un texte à la dernière minute, nous le font avaler et nous devons toujours l’accepter au nom du multilatéralisme », a déclaré Juan Carlos Monterrey Gómez, envoyé spécial du Panama pour le changement climatique (plus d’informations dans le Guardian). Mais certains ont souligné qu’une promesse de financement climatique insuffisante était toujours mieux que pas de promesse du tout, surtout avec l’administration Trump qui s’annonce. Plus d’informations dans le Guardian.
De nombreux commentateurs ont également jugé positif le fait qu’après des années d’impasse, des règles aient été mises en place pour un marché mondial d’échange de certificats CO2 – mais de grandes inquiétudes subsistent quant à l’intégrité de tels marchés. Plus d’informations dans le Financial Times.
Les négociations ont été mal préparées et mal dirigées par le pays hôte, l’Azerbaïdjan. Au printemps, le président de ce pays louait encore les combustibles fossiles comme un « don de Dieu ». Il n’est donc pas étonnant qu’aucun progrès n’ait été réalisé en matière d’abandon du pétrole et du gaz. Outre l’Azerbaïdjan, pays hôte, l’Arabie saoudite en est également responsable. Plus d’informations dans le NY Times (paywall). Le président de la COP 29, Mukhtar Babayev, critiqué pour sa carrière au sein de l’entreprise pétrolière nationale, a publié un éditorial dans le Guardian après les négociations, dans lequel il critiquait ouvertement différents pays occidentaux. Cela a été considéré comme très contre-productif par les experts. Des négociations multinationales réussies ne peuvent être menées à bien que si la confiance entre les négociateurs est établie dans les mois précédant et suivant les négociations. C’est là que la présidence de la COP a échoué, comme l’explique Christiana Figueres de manière impressionnante dans son podcast.
Des voix de premier plan, dont l’ancien secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon et le climatologue Johan Rockström, estiment que les négociations COP sur le climat ne remplissent plus leur objectif. « Cette lenteur des progrès est en contradiction avec la science du climat et avec les dommages et risques climatiques réels », écrivaient-ils déjà en 2023. Cette année encore, ils font des propositions concrètes pour que les négociations soient menées plus efficacement – dans leur Lettre ouverte du Club de Rome, à lire.
Carbon Brief a rédigé un résumé détaillé et complet de toutes les décisions qui ont été négociées à Bakou. Le podcast de l’économiste climatique Claudia Kemfert est également passionnant.
Accord sur la biodiversité : Trop peu de progrès
La protection du climat et celle de la nature ont longtemps été traitées comme des questions indépendantes, mais lors du sommet sur la biodiversité COP16, les chefs d’État et de gouvernement ont pris conscience de la réalité : la crise climatique ne peut être abordée sans mettre un terme à la perte de la nature.
Il y a eu quelques succès. Il est prévu de créer un fonds alimenté par des taxes sur les produits commerciaux qui utilisent du matériel génétique de plantes et d’animaux. Cela pourrait rapporter des fonds annuels allant jusqu’à 1 milliard de dollars.
Les nations se sont mises d’accord sur un nouvel organe permanent pour les peuples autochtones. Cela leur permettra pour la première fois d’être directement consultés et d’exprimer leur opinion sur les COP de biodiversité.
Cependant, les discussions ont été assombries par le manque de progrès dans la mise en œuvre du Cadre mondial de la biodiversité Kunming-Montréal, l’accord révolutionnaire « Accord de Paris pour la nature » conclu lors de la COP15 à Montréal en 2022. Depuis que les pays se sont mis d’accord sur des objectifs ambitieux de protection de la nature en 2022, le paysage politique a changé. Une étude menée par Carbon Brief et le Guardian montre que la grande majorité des pays n’ont pas respecté le délai pour présenter de nouveaux plans afin d’atteindre leurs objectifs de protection. A la fin du sommet, seules 44 parties sur 196 – moins d’un quart – avaient présenté de nouveaux plans de biodiversité. Seuls cinq des 17 « pays méga diversifiés », qui abritent 70% de la biodiversité mondiale, ont présenté un plan.
Les parties n’ont pas non plus réussi à se mettre d’accord sur la création d’un nouveau fonds dans le cadre de la COP. Le monde a besoin de 700 milliards de dollars par an pour protéger les habitats importants. Mais d’où viendra cet argent ? Les parties doivent reprendre les négociations en février 2025 à Rome. Plus d’informations sur Carbon Brief et ici et ici dans le Guardian.
Accord sur les plastiques : Pas d’accord
Une autre négociation de l’ONU s’est avérée extrêmement difficile : les nations ont négocié à Busan, en Corée du Sud, un nouvel accord visant à réduire la pollution plastique. Aucun accord n’a cependant été trouvé.
Il y avait un désaccord sur le fait de savoir si le traité devait inclure des objectifs de réduction de la production de plastique ou se concentrer uniquement sur la réduction des déchets, comme le recyclage. Plus de 100 pays souhaitaient un traité juridiquement contraignant limitant la production de plastique, et presque autant de pays voulaient éliminer complètement les produits chimiques les plus nocifs utilisés dans leur fabrication. Mais de grands pays producteurs de pétrole et de gaz, dont l’Arabie saoudite, la Russie, le Koweït et l’Iran (soutenus par les lobbyistes de l’industrie pétrochimique), se sont opposés avec véhémence à de telles restrictions.
L’exemple suivant montre à quel point il est important de s’attaquer à la production : l’Alliance to End Plastic Waste (AEPW) a été créée en 2019 par un groupe des plus grands producteurs de plastique du monde, parmi lesquels ExxonMobil, Dow, Shell, TotalEnergies et ChevronPhillips. Ils ont promis d’améliorer le recyclage du plastique et de créer une économie circulaire. Mais au cours des cinq dernières années, ils ont produit 1000 fois plus de plastique qu’ils n’en ont retiré de l’environnement. Plus d’informations dans le Guardian.
La question du financement a également posé problème lors des négociations pour un accord sur le plastique. Qui va aider les pays en développement à produire et à utiliser moins de plastique et à éliminer les déchets de manière écologique ? Cette question reste ouverte.
On s’attend à ce que les pays négocient à nouveau l’année prochaine. En attendant, certains soutiennent que les presque 100 pays qui ont fait pression pour obtenir un engagement juridiquement contraignant de réduction de la production – dont le Royaume-Uni, l’Union européenne, le Groupe africain et de nombreuses nations d’Amérique du Sud – sont en train d’élaborer leur propre accord.
Ce que la victoire de Trump signifie pour la protection du climat
Le président américain nouvellement élu Donald Trump n’a cessé de qualifier le changement climatique de « grande arnaque » pendant sa campagne électorale et son vice-président est lui aussi un menteur climatique.
Trump, qui a gagné grâce à un soutien financier considérable de l’industrie pétrolière et gazière, veut maintenant accélérer la production de combustibles fossiles. Selon une étude de Carbon Brief, cela pourrait entraîner une augmentation des émissions de quatre milliards de tonnes de CO2. A titre de comparaison, les Etats-Unis émettent environ six milliards de tonnes de CO2 par an.
Au cours de son premier mandat, l’administration Trump a supprimé plus de 100 lois et réglementations environnementales importantes, y compris toutes les réglementations climatiques pertinentes de l’ère Obama. Aujourd’hui, il a l’intention d’annuler les réglementations relatives à la réduction des émissions des centrales électriques à combustibles fossiles ainsi que des dizaines d’autres réglementations environnementales relatives à la protection des espèces et à la limitation de la pollution de l’air et de l’eau.
Trump veut vider de leur substance les agences fédérales impopulaires, notamment l’Agence de protection de l’environnement (EPA). Le projet 2025, le plan conservateur de restructuration du gouvernement fédéral, recommande de réduire considérablement le budget de l’EPA, de licencier des employés et des conseillers scientifiques et de supprimer les programmes de protection des populations pauvres dans les zones fortement polluées.
Trump a annoncé qu’il souhaitait annuler pratiquement toute la politique climatique du président Biden, y compris la principale loi américaine sur le climat, l' »Inflation Reduction Act ». Cette loi prévoit des investissements de plus de 390 milliards de dollars dans les véhicules électriques, les batteries et autres technologies énergétiques propres. Les conseillers de l’administration Biden travaillent désormais d’arrache-pied pour attribuer des subventions à hauteur de centaines de millions de dollars et finaliser les réglementations environnementales afin de garantir au moins une partie de l’agenda climatique du président Biden avant l’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche.
Il n’est pas certain que Trump parvienne à annuler l’Inflation Reduction Act. Environ 80% de l’argent dépensé jusqu’à présent l’a été dans des districts républicains du Congrès. De nouveaux emplois ont ainsi été créés, raison pour laquelle les législateurs et les dirigeants économiques veulent protéger ces investissements. Les États vont probablement devenir un rempart contre les efforts du gouvernement fédéral pour inverser la politique environnementale. C’était déjà le cas lors de la première présidence de Trump. En 2017, le gouverneur de Californie de l’époque, Jerry Brown, a rencontré le président Xi Jinping et signé une série d’accords sur le climat et l’énergie entre la Californie et plusieurs autorités nationales et gouvernements provinciaux chinois. Plus d’informations dans Nature.
Elon Musk a soutenu l’élection de Donald Trump à hauteur de 250 millions de dollars US. Musk se qualifie souvent de « respectueux de l’environnement » et de « super respectueux du climat ». La question est maintenant de savoir si les opinions de Musk sur le changement climatique pourront influencer la nouvelle administration ou s’il s’adaptera à la rhétorique de Trump. En août, Musk a déclaré : « Si nous arrêtions maintenant d’utiliser le pétrole et le gaz, nous mourrions tous de faim et l’économie s’effondrerait. Je ne pense donc pas qu’il soit juste de dénigrer l’industrie du pétrole et du gaz ». Plus dans le NY Times (paywall).
Trump veut à nouveau se retirer de l’accord de Paris sur le climat. On craint que d’autres nations soient encouragées à assouplir également leurs engagements. Lors de la COP29, les Etats-Unis et l’Argentine ont déjà assuré qu’ils quitteraient l’accord de Paris sur le climat (Deutsche Welle). Ce serait particulièrement difficile si les Etats-Unis quittaient également la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC). Il faudrait alors une majorité des deux tiers au Sénat américain pour permettre une réintégration.
Une enquête de CORRECTIV montre comment, avec l’élection de Trump, de telles idées hostiles au climat gagnent en influence en Allemagne également. Des organisations allemandes comme l’Institut Prometheus reçoivent des financements des États-Unis, notamment de la Fondation Templeton et du réseau Atlas. Ces réseaux, financés pour la plupart par des industries fossiles, s’étendent jusqu’à la politique allemande mainstream par le biais de think tanks et de conseillers, avec des liens avec la CDU et le FDP.
Plus d’informations dans le NY Times (paywall), le Guardian, la BBC, The Financial Times (paywall), le NY Times (paywall) et dans Le Temps.
La Cour internationale de justice se penche sur la politique climatique
Après des années de lobbying de la part des États insulaires, l’Assemblée générale des Nations unies a demandé l’année dernière à la Cour internationale de justice de se prononcer sur les « obligations des États en matière de changement climatique ».
La Cour suprême des Nations unies a entamé une audience de deux semaines. Il s’agissait d’examiner ce que les pays du monde entier doivent légalement faire pour lutter contre le changement climatique et aider les nations vulnérables à combattre ses effets dévastateurs. Cependant, les nations riches qui produisent beaucoup d’émissions font valoir qu’elles ont déjà pris des engagements suffisants en matière de changement climatique dans le cadre de l’Accord de Paris.
Les avis du tribunal ne sont pas contraignants. Les experts soulignent toutefois que la décision sera utilisée comme document déterminant dans les futurs processus climatiques et les négociations internationales sur le climat. Plus d’informations chez Associated Press et dans Climate Home News.
Comment les pays enjolivent leur bilan climatique avec leurs forêts
L’objectif net zéro signifie qu’un Etat ne doit pas produire plus de gaz à effet de serre qu’il ne peut en extraire de l’atmosphère et les stocker durablement. Mais qu’est-ce qui est considéré comme un puits naturel de CO2 qui ne peut pas être pris en compte dans l’objectif de réduction ? Par exemple une forêt existante ? Et qu’est-ce qui est considéré comme un puits de carbone créé par l’homme ? Par exemple, une forêt nouvellement reboisée ?
Une définition précise fait défaut dans l’accord de Paris sur le climat. C’est pourquoi de nombreux pays comptabilisent leurs forêts en fonction de leur objectif climatique. Avec la comptabilisation actuelle, les États ayant une grande part de forêts peuvent atteindre leurs objectifs climatiques nationaux sur le papier sans avoir suffisamment réduit leurs émissions réelles.
Au niveau mondial, 6 à 7 milliards de tonnes de CO₂ par an sont ainsi comptabilisées comme des réductions d’émissions, alors qu’elles proviennent de puits naturels. Cela correspond à environ 15% des émissions mondiales de CO₂. Les auteurs d’une nouvelle étude publiée dans Nature demandent désormais que les pays fassent d’urgence la distinction entre puits anthropiques et naturels dans leurs objectifs climatiques. Plus dans le Guardian, Cicero et Tages Anzeiger (paywall).
Politique climatique européenne
Le règlement européen sur la déforestation sous pression
Bien que les négociations sur le règlement de l’UE relatif à la déforestation soient déjà terminées, cette importante mesure de politique environnementale est à nouveau sous pression au sein du Parlement européen, dominé par la droite conservatrice. L’objectif du règlement est d’établir des chaînes d’approvisionnement sans déforestation. Ainsi, certains produits et biens commerciaux ne doivent être importés que s’il peut être garanti qu’ils ne sont pas liés à la déforestation et à la dégradation des forêts (plus d’informations auprès du BMEL).
La nouvelle Commission souhaite toutefois repousser d’un an l’entrée en vigueur initiale du règlement. La DIHK, par exemple, soutient ces plans et demande même un report de deux ans. D’autres règles et procédures doivent en outre être modifiées sous la pression des députés de droite, libéraux et conservateurs. Les associations environnementales sont « horrifiées« , comme le titre le WWF. L’ONG juge la démarche du PPE honteuse, les retards doivent être annulés. Autre point sensible des propositions de modification : La catégorie dite « risque zéro ». Ainsi, les Etats seraient considérés en bloc comme sans risque et exclus du règlement. Selon le DNR, 25 des 27 Etats membres s’y sont opposés en raison d’une incompatibilité avec les règles de l’OMC. Aucun accord n’a pu être trouvé jusqu’à présent. Si cela reste le cas, le règlement entrera en vigueur en janvier 2025.
La nouvelle Commission européenne est prête
Six mois après les dernières élections au Parlement européen, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen (PPE) a présenté sa nouvelle équipe. La Commission, composée de 26 commissaires, a reçu fin novembre l’approbation du Parlement – malgré des critiques parfois acerbes. Elle a été soutenue principalement par les groupes PPE, S&D et Renew. Néanmoins, avec 370 voix contre 282, le résultat a été moins convaincant que lors de son premier mandat, comme le rapporte Euractiv.
Outre la défense, la compétitivité et le commerce, la nouvelle Commission européenne met clairement l’accent sur la politique économique. Mais en même temps, la transformation industrielle, la politique énergétique, environnementale et climatique restent des défis majeurs de notre époque. Pour faire face à ces tâches, la Commission a créé plusieurs portefeuilles clés :
- L’Espagnole Teresa Ribera Rodríguez (S&D) prend la responsabilité de « Clean, Just and Competitive Transition ». Dans son rôle de vice-présidente, elle dirigera la mise en œuvre et le développement du Green Deal.
- Le Néerlandais Wopke Hoekstra (PPE) sera le commissaire chargé du « Climate, Net Zero and Clean Growth ». Son domaine de compétence comprend entre autres la promotion de la croissance économique ainsi que le respect et le développement des objectifs climatiques de l’UE.
- Jessika Roswall (PPE), de Suède, dirigera le domaine « Environnement, résilience de l’eau et économie circulaire compétitive ». Elle sera notamment chargée de promouvoir l’économie circulaire, l’adaptation au changement climatique et la politique internationale en matière de biodiversité.
- Le Danois Dan Jørgensen (S&D) sera responsable du portefeuille « Énergie et logement ». C’est la première fois qu’un commissaire est nommé pour la politique du logement, un domaine qui relevait jusqu’à présent principalement de la compétence des États membres. Il aura notamment pour mission de développer et de mettre en œuvre le premier « European Affordable Housing Plan ».
- Stéphane Séjourné (RENEW), France, dirige en tant que vice-président exécutif le domaine de travail « Prosperity and Industrial Strategy ». Le thème central sera pour lui la présentation d’un « Industrial Decarbonisation Accelerator Act » (loi sur l’accélération de la décarbonisation industrielle).
Le Danemark taxe les émissions de l’agriculture
Le Danemark est le premier pays au monde à prévoir une taxe sur les émissions de méthane des vaches et des porcs afin d’encourager la protection du climat. Cette mesure fait partie d’un paquet climatique global qui comprend notamment la plantation d’un milliard d’arbres et une réduction des émissions de gaz à effet de serre du Danemark de 1,8 million de tonnes d’équivalents CO₂ d’ici 2030. L’objectif est de réduire les émissions du pays de 70 % d’ici 2030 par rapport à 1990 et d’atteindre la neutralité climatique d’ici 2045. Jeppe Bruus, ministre danois des impôts, parle de la plus grande transformation du paysage danois depuis un siècle, rapporte Tagesschau.
La taxe sur le méthane commencera en 2030 à 300 couronnes (environ 40 euros) par tonne d’équivalent CO₂ et devrait atteindre 750 couronnes en 2035. Parallèlement, les agriculteurs bénéficieront d’allègements fiscaux, ce qui limitera les coûts réels à 120 couronnes dans un premier temps, puis à 300 couronnes par tonne. Le projet, qui nécessite des investissements de 43 milliards de couronnes (5,8 milliards d’euros), a été décidé par le gouvernement et d’autres partis. L’accord représente un compromis avec les représentants des intérêts de l’agriculture, des syndicats et des groupes environnementaux. Les agriculteurs recevront un soutien financier pour la transformation grâce au « fonds pour les espaces verts » nouvellement créé. Cela permettra de financer environ 250.000 hectares de reboisement (agarheute). Ce qui est particulier : Ce compromis s’est déroulé sans aucune protestation, comme on l’a souvent vu dans d’autres pays de l’UE ces derniers temps. Les critiques dénoncent toutefois le montant de la taxe, trop faible pour avoir un impact ( Tagblatt ).
Retournement de situation en Norvège : l’exploitation minière en eaux profondes est provisoirement stoppée
En tant que précurseur mondial, le pays scandinave du Nord voulait au début de l’année autoriser l’exploitation minière en eaux profondes afin d’en extraire des ressources naturelles. Mais le gouvernement norvégien a pour l’instant stoppé tout projet en ce sens. Le Parti socialiste de gauche, un petit parti écologiste, a demandé l’arrêt des projets comme concession pour pouvoir soutenir les plans budgétaires du gouvernement minoritaire composé du parti social-démocrate Arbeiderpartiet et du parti centriste Senterpartiet (voir à ce sujet le journal télévisé).
L’organisation environnementale WWF y voit un grand bénéfice pour la protection de l’environnement. Le WWF Norvège a une plainte en cours contre le gouvernement norvégien, sur laquelle il n’a pas encore été statué. Greenpeace reproche également au gouvernement des procédures rapides sans tenir compte des supposées « conséquences catastrophiques » pour les écosystèmes. La Deutsche Welle a mis à disposition une carte dans un rapport détaillé. Il apparaît clairement que les zones d’exploitation minière en eaux profondes initialement prévues se chevauchent fortement avec des zones sensibles. Le Premier ministre Jonas Gahr Støre ne parle que d’une suspension des plans, pas d’un arrêt.
Allemagne
Le gouvernement de l’Ampel s’effondre
Les dernières semaines de la politique allemande ont été marquées par un événement : Le gouvernement Ampel a volé en éclats. Le soir du 6 novembre, le chancelier Olaf Scholz (SPD) a limogé le ministre des Finances Christian Lindner (FDP). Le gouvernement Ampel – l’alliance tripartite entre les sociaux-démocrates, les libéraux et les Verts – est ainsi de l’histoire ancienne. Les événements se sont déroulés en arrière-plan des négociations sur le budget fédéral 2025. Le Redaktionsnetzwerk Deutschland a établi à ce sujet un aperçu chronologique complet qui mène à cette étape.
Environ une semaine auparavant, le « document économique » de l’ex-ministre des Finances a été rendu public. Il s’agit d’un concept de changement fondamental de la politique économique. Il s’agissait notamment de supprimer les objectifs de protection climatique afin de stimuler l’économie et de réduire considérablement les dépenses sociales – des exigences inacceptables pour les partenaires de coalition.
Cette démarche du FDP aurait été orchestrée et préparée depuis des semaines, comme le documente une enquête de Zeit Online (Paywall). Outre les plans secrets de sortie du gouvernement, dont le FDP devait sortir renforcé selon ses propres plans, le langage militaire de ce plan, qui a conduit à ce que l’on appelle « l’affaire du jour J », a particulièrement fait sensation. Le FDP a finalement révélé lui-même ses plans. En conséquence, plusieurs responsables de haut niveau, comme le secrétaire général Bijan Djir-Sarai et le directeur fédéral Carsten Reymann, ont démissionné.
Les principaux projets climatiques et environnementaux à la dérive
L’éclatement du gouvernement fédéral a pour conséquence que le gouvernement rouge-vert restant ne dispose actuellement d’aucune majorité parlementaire au Bundestag. C’est ainsi que des projets qui auraient dû être mis en œuvre avant la pause de Noël par le gouvernement autoproclamé « de progrès » sont bloqués.
La question de savoir si des projets importants pourront être présentés au Parlement avant les nouvelles élections de février 2025 dépend du groupe CDU/CSU. Il s’agit par exemple de la loi sur la sécurité des centrales électriques, de la nouvelle réglementation du chauffage urbain, de la loi sur le stockage du CO2, de la loi fédérale sur les forêts, de la poursuite du billet d’Allemagne et, de manière plus centrale, de la garantie du budget fédéral pour l’année prochaine, y compris l’utilisation des moyens du fonds de transformation climatique (KTF). Le Frankfurter Rundschau a rassemblé une partie des projets encore en suspens.
Le gouvernement fédéral présente un projet de loi sur la sécurité des centrales électriques
Même sans majorité au Parlement, la loi sur la sécurité des centrales électriques (KWSG) a été envoyée fin novembre aux associations pour qu’elles donnent leur avis. L’élément central : la création de flexibilités ainsi que la mise en place d’une infrastructure hydrogène par de nouvelles centrales à gaz. Celles-ci seraient nécessaires pour garantir la sécurité d’approvisionnement en cas de forte demande en période de manque d’offre des énergies renouvelables.
Les représentants de l’industrie, comme l’association allemande des énergies renouvelables (Bundesverband erneuerbare Energien), se sont prononcés en faveur d’une révision du projet « de la tête aux pieds », selon Solarserver. Le rôle de la bioénergie – un domaine d’intérêt central de l’association – en tant que source de compensation pour les énergies solaire et éolienne fluctuantes est sous-représenté et ne répond pas au besoin urgent de flexibilité. Le stockage domestique est également nécessaire. La plus grande association énergétique, BDEW, a salué le fait que le gouvernement fédéral fasse avancer le projet. Fin octobre, les associations de protection de l’environnement ont adressé une lettre ouverte au ministre Habeck (Verts) pour le mettre en garde contre la priorité accordée aux nouvelles centrales à gaz.
Congrès des Verts : Habeck est le candidat de tête
Peu après la fin du gouvernement des feux de signalisation, l’Alliance 90/Les Verts a tenu sa 50e conférence des délégués fédéraux (BDK) à Wiesbaden, qui était déjà prévue auparavant. L’élection de Robert Habeck comme « Spitzenkandidat » pour les élections au Bundestag était au premier plan. Celui-ci a été confirmé par 96 pour cent des quelque 830 délégués présents, rapporte Deutsche Welle. Il sera en tête de la campagne électorale avec la ministre fédérale des Affaires étrangères Baerbock.
Après la démission des dirigeants du parti des Verts à l’automne dernier, suite aux résultats déplorables obtenus lors des élections régionales en Thuringe, en Saxe et dans le Brandebourg, Felix Banaszak, député du Bundestag et ancien président des Verts de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, et Franziska Brantner, secrétaire d’État parlementaire au ministère de l’Économie, ont été élus à la tête du parti.
L’activiste de Fridays for Future, Luisa Neubauer, a invité le parti à protéger le climat, à fixer des normes écologiques et à faire preuve d’équité. En outre, les délégués ont voté pour l’introduction d’un fond climatique, pour une meilleure protection du climat dans le secteur des transports et pour une réforme du « frein à l’endettement » afin de permettre des investissements dans la transformation. Vous trouverez les décisions de la BDK ici.
La crise climatique visible
Intempéries meurtrières en Espagne
L’Espagne a été confrontée aux pires inondations depuis des générations après les précipitations du siècle. 230 personnes ont perdu la vie et la région de Valence a été la plus touchée. En l’espace de 24 heures, plus de 200 millimètres de pluie sont tombés du ciel en de nombreux endroits de cette province de l’est de l’Espagne, voire davantage à certains endroits. Ces intempéries ont été déclenchées par un phénomène météorologique bien connu dans le bassin méditerranéen : une goutte d’air froid. De l’air froid circule à haute altitude autour d’un tourbillon de basse pression. L’air froid entre alors en contact avec l’air chaud et humide au-dessus de la Méditerranée, ce qui déclenche de fortes précipitations. Cette année, des températures de surface records ont été mesurées en Méditerranée.
Dans le Guardian, Friederike Ott, climatologue et cofondatrice de World Weather Attribution, explique l’influence du changement climatique. Selon une première étude, les pluies extrêmes sont devenues 12% plus intenses et deux fois plus probables en raison du réchauffement. Carbon Brief a rassemblé les faits les plus importants concernant le développement de la recherche sur l’attribution et son importance.
Quelle est la raison pour laquelle tant de personnes sont mortes ? Selon la climatologue Friederike Ott, la population a été avertie trop tard, alors que les intempéries étaient déjà en cours. De nombreuses personnes se trouvaient alors déjà dans des maisons inondées ou étaient enfermées dans des parkings souterrains. Plus d’informations sur SRF, dans le Tages-Anzeiger (paywal) et chez Klimareporter.
Aux Philippines, la tempête tropicale Trami a provoqué des inondations et des glissements de terrain dévastateurs. Au moins 150 personnes ont perdu la vie. Plus d’informations sur Nau et Philippine Star.
Une chaleur record en 2024 et davantage de naissances prématurées
L’Organisation météorologique mondiale et le service Copernicus sur le changement climatique de l’UE prévoient que 2024 sera l’année la plus chaude jamais enregistrée. En octobre 2024, la température était supérieure de 1,65 °C au niveau préindustriel. Le mois d’octobre a donc été le 15e mois sur une période de 16 mois au cours duquel les températures moyennes ont dépassé le seuil de 1,5 °C fixé par l’accord de Paris.
Les vagues de chaleur mettent en danger les mères et les nourrissons, révèle une nouvelle étude publiée dans Nature. L’exposition à la chaleur augmente le risque de naissances prématurées, de mortinatalité, de malformations congénitales et de complications à la naissance. Pour cette étude, les chercheurs ont analysé 198 études provenant de 66 pays. Pour chaque augmentation de 1 ℃ de l’exposition à la chaleur, le risque d’accouchement prématuré augmentait de 4%. Les naissances prématurées sont l’une des principales causes de décès de nourrissons et de handicaps.
Nouvelles de la science du climat
Les émissions et la concentration de CO2 atteignent un niveau record
Chaque année, une multitude de rapports importants sont publiés avant les négociations sur le climat. Nous en résumons ici l’essentiel :
Le rapport 2024 sur l’état du climat rédigé par des scientifiques de renom commence par ces mots : « Nous sommes au bord d’une catastrophe climatique irréversible. Il s’agit sans aucun doute d’une urgence mondiale. Une grande partie des bases de la vie sur terre est menacée. Nous entrons dans une nouvelle phase critique et imprévisible de la crise climatique ».
Le rapport 2024 du Lancet Countdown sur la santé et le changement climatique montre qu’une action hésitante entraîne d’énormes menaces. Les populations du monde entier sont déjà confrontées à des menaces importantes pour leur bien-être, leur santé et leur survie en raison de l’évolution rapide du climat.
Le bulletin annuel des gaz à effet de serre de l’OMM, qui montre que la concentration de CO2 a atteint un nouveau sommet. La concentration atmosphérique de CO2 devrait atteindre 422,5 parties par million en 2024, soit 2,8 parties par million de plus qu’en 2023 et 52% de plus qu’avant l’industrialisation. Il s’agit probablement de la valeur la plus élevée jamais atteinte au cours des 8 à 12 derniers millions d’années.
L’année dernière, les pays n’ont guère progressé dans la maîtrise de leurs émissions de gaz à effet de serre, si bien que la planète reste sur une trajectoire de réchauffement dangereuse, selon un nouveau rapport du Climate Action Tracker.
Le 2024 UNEP Gap Report montre que les mesures climatiques actuelles entraîneraient un réchauffement d’environ 2,9°C d’ici la fin du siècle. Si toutes les contributions climatiques nationales soumises à l’ONU étaient mises en œuvre, le réchauffement serait moindre (2,4-2,6 °C), et même de 1,6-2,2 °C si tous les objectifs nets zéro promis étaient également mis en œuvre. Mais on peut se demander si ces promesses seraient mises en œuvre ou si les objectifs nets zéro n’ont été prononcés que pour suggérer une prise de conscience et une action.
Si le défi est indéniablement de taille, il existe de nombreuses possibilités d’accélérer l’atténuation du changement climatique. Ainsi, selon le rapport, les émissions mondiales pourraient être réduites de 54 % d’ici 2030, et ce pour un coût inférieur à 200 dollars par tonne d’équivalent CO₂. D’ici 2035, une réduction de 72 % serait possible dans ce cadre de coûts.
Le rapport 2024 Global Carbon Budget a été élaboré par une équipe internationale de plus de 120 scientifiques. Il prévoit pour 2024 des émissions de CO2 d’origine fossile de 37,4 milliards de tonnes, soit une augmentation de 0,8 % par rapport à 2023. Si l’on ajoute à cela les 4,2 milliards de tonnes d’émissions dues au changement d’affectation des sols (par exemple la déforestation), les émissions totales de CO2 devraient atteindre 41,6 milliards de tonnes en 2024, contre 40,6 milliards de tonnes l’année précédente.
Malgré le besoin urgent de réduire les émissions pour ralentir le changement climatique, les chercheurs estiment qu’il n’y a toujours « aucun signe » indiquant que le monde a atteint un pic dans les émissions de CO2 d’origine fossile. Au niveau mondial, on prévoit une augmentation des émissions de plusieurs combustibles fossiles en 2024 : Charbon (0,2 %), pétrole (0,9 %), gaz (2,4 %). Ils contribuent respectivement à 41 %, 32 % et 21 % des émissions mondiales de CO2 d’origine fossile.
Suivent les prévisions d’émissions pour 2025 :
– Chine (32 % des émissions mondiales) : + 0,2 %.
– États-Unis (13 % des émissions mondiales) : – 0,6
– Inde (8 % des émissions mondiales) : + 4,6
– Union européenne (7 % du total mondial) : – 3,8 %.
– Le reste du monde (38 % des émissions mondiales) : + 1,1 %.
– Le transport aérien et maritime international (3 % du total mondial) : +7,8 %.
– Au niveau mondial, les émissions dues au changement d’affectation des sols (déforestation) ont diminué de 20 % au cours des dix dernières années, mais devraient à nouveau augmenter en 2024.
Au rythme actuel des émissions, l’équipe « Global Carbon Budget » estime à 50 % la probabilité que le réchauffement climatique dépasse durablement 1,5 °C dans environ six ans. Plus d’informations dans le Guardian et ScienceDaily.
La nature peut stocker de moins en moins de CO2
Les puits de carbone naturels de la planète – les océans, les forêts et les sols – absorbaient jusqu’à présent environ la moitié des émissions produites par l’homme. Cependant, en 2023, les sécheresses et les incendies de forêt ont fait que ces puits naturels n’absorbaient presque plus de CO2, comme le montre une nouvelle étude publiée dans le Preprint. La vitesse et l’ampleur des changements font craindre à certains scientifiques que les modèles climatiques se basent sur des hypothèses trop optimistes.
L’économie se contractera de près de 20% d’ici 2050
En raison des émissions déjà émises, l’économie mondiale connaîtra une baisse de revenus de 19% au cours des 26 prochaines années, selon un nouvel article publié dans Nature. Les chercheurs ont utilisé des données empiriques provenant de plus de 1600 régions au cours des 40 dernières années afin de prévoir les dommages liés au climat. Les dommages annuels globaux s’élèveront à 38 billions de dollars américains d’ici 2049.
Ces dommages sont six fois plus élevés que les coûts nécessaires pour limiter le réchauffement global à 2 °C au cours des 26 années à venir. Les pertes les plus importantes seront subies par les pays du Sud global, qui sont les moins responsables du changement climatique.
Une alimentation saine est bonne pour la planète
L’agriculture est responsable d’environ 30% des émissions mondiales de gaz à effet de serre. En outre, elle utilise 70% de l’eau consommée dans le monde. Une consommation alimentaire élevée (en particulier de produits animaux) est l’une des principales causes de l’obésité, du diabète et des maladies cardiovasculaires. Parallèlement, plus de 800 millions de personnes souffrent toujours de la faim et près de 3,1 milliards de personnes n’ont pas les moyens de se nourrir sainement.
Le planetary health diet de la commission EAT-Lancet montre comment un changement vers une alimentation plus saine peut éliminer la faim, améliorer la santé et réduire les émissions. Une telle alimentation comprend en grande partie des aliments d’origine végétale, avec de petits compléments de poisson, de viande et de produits laitiers.
Une nouvelle étude publiée dans Nature Climate Change a calculé, sur la base de ces directives alimentaires, que les émissions mondiales de gaz à effet de serre liées à l’alimentation diminueraient de 17% si tous les habitants de la planète adoptaient une alimentation saine. Les personnes qui surconsomment actuellement (plus de la moitié de la population) économiseraient 32% des émissions mondiales en changeant de régime alimentaire. Cela compenserait largement l’augmentation de 15 % des émissions mondiales due aux personnes qui consomment actuellement trop peu.
Vérification de la réalité sur la CSC
Le captage et le stockage du carbone (CSC) sont utilisés dans de nombreux scénarios climatiques comme une technologie clé pour maintenir le réchauffement en dessous de 1,5°C. Mais nous devons être conscients de la difficulté, du coût et de la consommation d’énergie que cela implique, expliquent quatre chercheurs en systèmes énergétiques dans OneEarth. Par exemple, pour éliminer 10 gigatonnes de CO2 atmosphérique, même les meilleures méthodes proposées aujourd’hui nécessiteraient 12’000 térawattheures d’électricité ; soit plus de 40% de la production annuelle actuelle d’électricité dans le monde. Dans un éditorial publié dans Nature, les scientifiques estiment que 400 gigatonnes de CO2 devront être éliminées d’ici 2100 pour limiter le réchauffement à 1,5 °C. Les techniques actuelles d’élimination du CO2 ne représentent qu’un millionième du CO2 émis par les combustibles fossiles.
L’IA a besoin d’une quantité d’énergie incroyable
En moyenne, une requête ChatGPT consomme presque dix fois plus d’énergie qu’une recherche Google. Pendant des années, les centres de données ont affiché une consommation électrique remarquablement stable, même lorsque la charge de travail augmentait. La charge de travail des centres de données a presque triplé entre 2015 et 2019. Cependant, au cours de cette période, la demande en électricité des centres de données est restée relativement constante, autour de 200 térawattheures par an. Cela s’explique par le fait que les centres de données sont devenus de plus en plus efficaces. Maintenant que les gains d’efficacité en matière de consommation électrique ralentissent et que la révolution de l’IA prend de l’ampleur, Goldman Sachs Research estime que la demande en électricité des centres de données augmentera de 160 % d’ici 2030.
Actuellement, les centres de données consomment 1 à 2 % de l’électricité totale dans le monde, mais cette proportion devrait atteindre 3 à 4 % d’ici la fin de la décennie. Dans une série de trois rapports, les analystes de Goldman Sachs Research décrivent l’impact de cette augmentation de la demande en électricité aux États-Unis, en Europe et dans le monde. Aux États-Unis et en Europe, cette augmentation de la demande entraînera une croissance de l’électricité sans précédent depuis une génération. Dans ce contexte, les émissions de CO2 des centres de données pourraient plus que doubler entre 2022 et 2030.
Actif contre le désespoir
Il nous faut plus que de l’espoir pour sauver la planète.
Il est important que les personnes qui s’engagent pour la protection du climat acceptent et laissent s’exprimer les sentiments difficiles que sont la tristesse, la peur et l’incertitude, argumente la psychologue du climat Steffi Bednarek. Bednarek met en garde contre le fait que les messages d’espoir ne conduisent pas aux mesures décisives nécessaires. Selon elle, le meilleur moyen de motiver à l’action est de travailler ensemble au renforcement de la résilience. « Si nous avons des relations saines, nous pouvons agir de manière durable, même si quelque chose ne va pas – non pas parce que l’action est la seule issue à la détresse psychologique, mais parce que c’est la bonne chose à faire ». Plus sur DeSmog.
Aperçu des votations à venir et des initiatives :
- Les Verts récoltent des signatures pour leur initiative solaire. Elle veut rendre obligatoires les installations solaires sur les bâtiments.
- L’initiative pour la place financière veut faire en sorte que les banques et les assurances suisses ne soutiennent plus les projets qui accélèrent le changement climatique. Ce lien mène à la feuille de signatures.
Éditorial
Dans ce numéro,nous parlons du projet d’élargissement des autoroutes qui sera soumis au vote fin novembre et qu’il faut empêcher. Une fois de plus, nous devons montrer comment la politique climatique nationale de la Suisse laisse à désirer. L’électricité nucléaire a de nouveau le vent en poupe en Suisse et dans le monde.
Aux Etats-Unis, le parti démocrate fait la promotion du gaz naturel afin d’attirer davantage d’électeurs. L’énergie fossile continue d’être subventionnée à hauteur de milliards dans le monde entier. Les entreprises fossiles aiment mentir, mais sont aussi plus souvent poursuivies en justice. Le dernier rapport de l’AIE montre que l’énergie solaire deviendra la plus grande source d’électricité au monde d’ici 2033. La Chine mise sur la viande de laboratoire, tandis qu’en Occident, l’industrie de la viande empêche tout progrès. En Grande-Bretagne, la dernière centrale à charbon est en train d’être fermée et en Allemagne, le billet à 49 euros a permis aux gens de prendre davantage le train et les émissions dans le secteur des transports ont diminué de près de 5 %.
Cette fois encore, nous devons faire état de dévastations sur tous les continents. L’année dernière, les incendies de forêt ont produit autant de CO2 que l’Inde. Un nouveau rapport montre une fois de plus que la Terre se trouve déjà en dehors de la zone de sécurité pour l’humanité et que l’état des systèmes terrestres qui soutiennent la vie se détériore rapidement. Malgré tout, nous ne pouvons pas baisser les bras. Contribuer activement à la protection du climat permet de lutter contre le désespoir. Cela nous ramène au début de cet éditorial : chaque voix contre l’extension du réseau autoroutier est importante. Le vote du 24 novembre sera serré.
Suisse
Extension des autoroutes :
plus de trafic et plus de dommages climatiques
Le 24 novembre, nous voterons sur l’extension du réseau autoroutier à hauteur de 5,3 milliards de francs. Le Parlement s’était mis d’accord sur ce point à l’automne 2023 (l’UDC, le PLR et le centre étaient pour, le PS, les Verts et les Vert’libéraux contre). L’Association Transports et Environnement (ATE) et l’association Umverkehr ont lancé un référendum contre cette décision, c’est pourquoi le projet est maintenant soumis au vote.
Six tronçons d’autoroute sont concernés : Entre Berne-Wankdorf et Schönbühl BE, l’A1 doit être élargie à huit voies, entre Schönbühl et Kirchberg BE ainsi qu’entre Le Vengeron GE et Nyon VD à six voies. En outre, des tunnels autoroutiers doivent être construits à Saint-Gall, Schaffhouse et Bâle. Dans le 1er sondage SRF de début octobre, une courte majorité de 51% se prononçait en faveur de l’extension des autoroutes ; 45% étaient contre, 4% étaient encore indécis. Un sondage de 20Minuten et Tamedia avait auparavant donné une majorité de 56% en faveur de l’extension.
Les mêmes arguments sont toujours avancés en faveur de l’extension des autoroutes : moins d’embouteillages, une sécurité accrue et des avantages économiques. Cela se répète encore aujourd’hui, comme on peut le lire dans la NZZ. La mobilité est « la clé de la liberté et du progrès », a déclaré Fabio Regazzi, conseiller aux Etats du centre et président de l’Union suisse des arts et métiers. Watson rapporte que l’Office fédéral des routes (OFROU) se fait soutenir par de grandes agences de relations publiques (notamment le bureau Farner et FurrerHugi) dans sa communication sur le projet d’extension autoroutière et dépense des millions à cet effet.
Pourtant, la recherche sur la mobilité montre que des routes supplémentaires entraînent une augmentation du trafic et qu’à moyen terme, il y aura à nouveau des embouteillages. Ce trafic dit induit est attesté par de nombreuses études (voici un aperçu, dans umverkehRen n° 141, mars 2024 : Trafic induit – une vérité qui dérange). Les chiffres pour la Suisse le montrent également. Au tunnel de Baregg dans le canton d’Argovie, qui est ouvert à la circulation sur six voies depuis 2003, le trafic a augmenté de 40% jusqu’à aujourd’hui ; la population n’a augmenté que de 23% durant la même période. Et même l’Office fédéral des routes (OFROU) reconnaît, selon l’association Umverkehr, que le projet d’extension du Vengeron en Suisse romande va générer du trafic supplémentaire et que des embouteillages se formeront à nouveau dans quelques années.
Une extension va diamétralement à l’encontre des objectifs climatiques. Aujourd’hui, le trafic motorisé est responsable d’un tiers des émissions de CO2 en Suisse. Depuis des années, ce secteur ne parvient pas à atteindre les objectifs climatiques – par rapport à 1990, les émissions de CO2 n’ont diminué que de 8%. Même le Conseil fédéral a annoncé dans son message sur l’extension prévue des autoroutes que le projet entraînerait une augmentation des gaz à effet de serre.
Avec le développement des autoroutes, les coûts externes du trafic routier augmentent. Et ceux-ci sont énormes : selon le dernier calcul de l’Office fédéral du développement territorial, le trafic routier motorisé a entraîné 17,3 milliards de francs de coûts non prévus en 2021, soit plus du double de ce qui était attendu jusqu’à présent. Ces coûts comprennent les atteintes à la santé dues aux gaz d’échappement et au bruit, les dommages climatiques tels que les pertes de récoltes ou les dégâts aux forêts, la destruction de la nature et du paysage ainsi que les accidents. La raison de cette augmentation massive de coûts est entre autres une adaptation de la méthode de calcul. Ainsi, les maladies causées par la pollution de l’air comme le cancer du poumon, le diabète et la démence ont été prises en compte. Et le coût par tonne de CO2 émise est passé de 140 francs à 430 francs. Selon la NZZ (paywall), le conseiller fédéral Albert Rösti met en doute les nouveaux chiffres de son office fédéral et veut les faire vérifier par un organisme externe. Au vu du nouveau calcul, la NZZ (paywall) se demande si la Suisse devrait maintenant tripler la taxe CO2, qui est actuellement de 120 francs. Plus d’informations ici et ici dans la NZZ et sur SRF.
Les opposants à l’extension des autoroutes mettent en outre en garde contre une augmentation importante du trafic dans les villes (les projets prévus aboutissent tous dans des villes), la destruction de précieuses terres cultivables et l’accélération de l’étalement urbain. On trouvera ici les principaux arguments contre l’extension des autoroutes. L’hebdomadaire Die Wochenzeitung montre ici et ici les effets négatifs des plans d’extension d’autoroutes au niveau local.
Le président des Verts libéraux Jürg Grossen esquisse dans la NZZ (paywall) comment réduire les embouteillages sur l’A1 sans extension : avec des horaires de travail flexibles (pour atténuer les pics de trafic), la tarification de la mobilité, des systèmes de guidage numériques et une meilleure planification du développement urbain.
La votation sur les autoroutes peut également influencer d’autres projets routiers. Selon le directeur de l’OFROU Jürg Röthlisberger, un non conduirait à une « situation de départ totalement nouvelle » et remettrait en question des projets autoroutiers comme celui de l’Oberland zurichois, rapporte le Zürcher Oberländer (paywall).
2023 a été la deuxième année la plus chaude
En 2023, il a fait nettement trop chaud en Suisse : la température annuelle moyenne a été de 7,2 °C, soit 1,4 °C de plus que la moyenne des années 1991-2020. Par rapport à la période préindustrielle de 1871-1900, le réchauffement atteint déjà 2,8 °C. La forte tendance au réchauffement des dernières décennies se poursuit donc, écrit MétéoSuisse dans son rapport sur le climat. Depuis le début des mesures météorologiques officielles, des températures plus élevées n’avaient été enregistrées qu’en 2022. Certains sites, comme Bâle-Binningen et Berne-Zollikofen, ont enregistré les valeurs les plus élevées depuis le début des mesures.
Et le réchauffement se poursuit : selon MétéoSuisse, le mois d’août 2024 a été le deuxième plus chaud de l’histoire. En moyenne nationale, la température a atteint 17,1 °C, soit 2,7 °C de plus que la période de comparaison 1991-2020. Seul l’été caniculaire de 2003 avait été plus chaud, avec 17,9 °C. Dans le sud de la Suisse ainsi qu’en montagne, les records d’août 2003 ont été ponctuellement atteints ou dépassés. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger (paywall).
La chaleur a également affecté les glaciers : leur volume a diminué de 2,5% en 2024. Selon l’Académie suisse des sciences naturelles, deux raisons expliquent ce phénomène : des températures records en juillet et en août ainsi que la poussière du Sahara qui a coloré la surface de la neige et accéléré la fonte. Les chercheurs avaient espéré que les glaciers ne continueraient pas à reculer après deux années extrêmes (en 2022 et 2023, les glaciers avaient perdu conjointement 10% de leur volume). En effet, les conditions pour 2024 étaient très favorables jusqu’en juin : il y avait 30% de neige hivernale de plus que la moyenne et le début de l’été a été pluvieux. Une épaisse couche de neige peut protéger la glace plus longtemps de la chaleur estivale. Plus d’informations dans la NZZ et le Tages-Anzeiger (paywall).
La NZZ montre clairement comment ce réchauffement intense va modifier le paysage avec une visualisation pour l’année 2075 : la plupart des glaciers ont disparu, les domaines skiables sont fermés, les incendies de forêt sont plus fréquents, l’eau potable devient rare.
La biodiversité n’est pas mieux protégée
En Suisse, on ne met pas davantage de surfaces et de moyens financiers à disposition pour préserver et encourager la biodiversité. L’initiative sur la biodiversité a été rejetée à 63%. Seuls les cantons de Bâle-Ville et de Genève ont approuvé le projet. Quelles sont les raisons de ce clair refus ? La résistance de l’Union des paysans a été sous-estimée, peut-on lire dans le Tages-Anzeiger (paywall). L’initiative des partisans était trop sage et l’opposition du secteur de l’électricité au projet en a déstabilisé plus d’un, estime l‘Aargauer Zeitung. Selon le Blick, cela est dû entre autres au mélange entre protection du patrimoine et de la nature (l’initiative prévoyait également de protéger les sites et les monuments historiques particuliers).
Les initiants demandent maintenant au Conseil fédéral d’adopter un deuxième plan d’action efficace pour la biodiversité. Compte tenu des rapports de force actuels au sein du Conseil fédéral et du Parlement, il est toutefois très douteux que davantage de moyens soient consacrés à la protection de la biodiversité. C’est ce que montre le plan d’action biodiversité remanié que l’Office fédéral de l’environnement a mis en consultation auprès des offices. Comme l’écrit le Tages-Anzeiger, la Confédération veut mettre à disposition 20 millions de francs pour la diversité des espèces. Les spécialistes critiquent le fait que cette contribution est nettement trop faible et que les mesures prévues sont insuffisantes.
L’Union suisse des paysans et d’autres opposants à l’initiative ont déformé les faits et relativisé ou embelli les problèmes au cours du débat. Ils ont ainsi utilisé la même stratégie que celle employée dans la lutte contre une protection climatique efficace, explique le podcast climatique Treibhaus.
La nécessité d’agir pour protéger la biodiversité est grande. Les sites marécageux en sont un exemple. Plus de 90% des surfaces marécageuses suisses ont déjà disparu. Le reste est certes protégé grâce à l’initiative de Rothenthurm (l’armée suisse voulait construire une place d’armes sur le plateau). Mais les marais sont en mauvais état, rapporte le Tages-Anzeiger (paywall) en s’appuyant sur une étude non encore publiée de l’Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage. La surface des hauts-marais a nettement diminué entre 2017 et 2023 et les bas-marais perdent de leur humidité, ce qui a des répercussions négatives sur la flore et la faune.
Le magazine en ligne Republik résume comment les subventions publiques nuisent à la biodiversité. La publicité pour les produits animaux, que la Confédération soutient chaque année à hauteur de 39 millions de francs, est notamment examinée d’un œil critique. En 2020 déjà, une étude avait estimé à au moins 34 milliards de francs le montant des aides publiques qui menacent la biodiversité.
Le Rapport sur le développement durable 2024 montre également que la biodiversité en Suisse est en mauvaise posture. Le rapport annuel de l’ONU sur la réalisation des objectifs de durabilité constate une détérioration de la protection des surfaces importantes pour la biodiversité en Suisse. Le rapport met également en évidence les déficits importants de la Suisse en matière d’émissions de gaz à effet de serre. Plus d’informations sur infosperber.ch.
Le Conseil fédéral veut moins de protection du climat
Le Conseil fédéral a présenté un programme d’économies visant à réduire les dépenses à partir de 2027. Le plan s’attaque massivement à la protection du climat. Le Conseil fédéral s’appuie sur un rapport d’experts commandé par la ministre des Finances du PLR Karin Keller-Sutter. Le rapport n’avait été publié que deux semaines auparavant. Un aperçu sur SRF.
C’est le Programme Bâtiments qui devrait perdre le plus d’argent, soit 400 millions de francs. C’est étonnant, car il fait partie de la loi sur le climat que le peuple a acceptée en juin 2023. La proposition d’économie concerne pour moitié le programme d’impulsion pour le remplacement des chauffages (il encourage un remplacement plus rapide des chauffages à mazout ou électriques par des pompes à chaleur) et pour moitié la promotion de nouvelles technologies de réduction du CO₂. Pour ce faire, le Conseil fédéral utilise une astuce : les technologies neutres en CO2 doivent continuer à être encouragées, mais ce ne sont pas des fonds fédéraux qui doivent être utilisés à cet effet, mais une partie des recettes de la taxe sur le CO2 , ce qui permettrait de restituer moins d’argent à la population et aux entreprises. Plus d’informations à ce sujet dans la Sonntagszeitung (paywall) et ici et ici dans des contributions Linkedin de la journaliste Alex Tiefenbacherin. La NZZ (paywall) recommande de remplacer le Programme Bâtiments par des taxes d’incitation sur le CO2 avec remboursement intégral à la population.
Les transports publics doivent également faire l’objet coupes budgétaires. Ainsi, le Conseil fédéral supprime les subventions pour les trains de nuit ainsi que pour les bus et les bateaux électriques. Ces fonds, d’un montant total de 77 millions de francs, font partie de la loi CO2, que le Parlement a adoptée lors de la session de printemps. Les CFF ont déjà fait savoir que sans subvention, aucune destination de train de nuit vers Rome ou Barcelone ne pourrait être proposée. Selon le Tages-Anzeiger, le PS a déposé une plainte de surveillance contre le Conseil fédéral. Il reproche à ce dernier de « refuser de travailler sur la protection du climat ». Plus d’informations ici et ici dans le Tages-Anzeiger (paywall) et dans la NZZ.
Les coupes budgétaires prévues suscitent de vives critiques. Le PS y voit une attaque contre la Suisse sociale. Selon le parti des Verts, la majorité gouvernementale de droite veut faire reculer la protection du climat et de l’environnement de plusieurs années. Quant aux Verts libéraux, ils déplorent que l’on économise sur les investissements d’avenir. Plus d’informations sur Watson, Tages-Anzeiger (paywall) et dans la Sonntagszeitung (paywall).
A propos de la loi sur le CO2 : en juin, le Conseil fédéral avait mis en consultation l’ordonnance CO2. La République a analysé le document et est tombée sur plusieurs atténuations. Ainsi, la part des émissions pouvant être économisée à l’étranger doit être augmentée de 25% à 33%. L’obligation de compensation pour les importateurs de carburant sera assouplie. En ce qui concerne les émissions négatives, le Conseil fédéral ne veut pas de règles efficaces : pour qu’un puits de CO2 soit reconnu, le gaz à effet de serre ne doit être retenu hors de l’atmosphère que pendant 30 ans. Or, le CO2 émis aujourd’hui réchauffe le climat pendant des millénaires. Et les cimenteries, les entreprises chimiques et pharmaceutiques ainsi que d’autres entreprises qui émettent une quantité particulièrement élevée de CO2 devraient à l’avenir bénéficier d’un soutien encore plus important de la part de l’État pour la protection du climat.
En phase avec le démantèlement de la protection du climat prévu par le Conseil fédéral, le podcast sur l’effet de serre pose la question suivante : le capitalisme peut-il protéger le climat ? (La réponse est non, mais).
Dans quelle mesure ton canton et ta commune de résidence sont-ils respectueux du climat ?
Le secteur du bâtiment est responsable de 40% de la consommation d’énergie et d’environ un quart des émissions de gaz à effet de serre en Suisse. Dans ce domaine, les cantons peuvent décider eux-mêmes des mesures de protection du climat, en matière de chauffage, d’isolation ou de raccordements pour les voitures électriques. Les différences entre les cantons sont considérables, comme le montre une analyse du WWF et de la société de conseil EBP. Le canton le plus respectueux du climat est Bâle-Ville, tandis que le canton d’Appenzell Rhodes-Intérieures a le plus de retard à rattraper. Cinq domaines ont été examinés : l’efficacité des bâtiments, la chaleur renouvelable, l’électricité renouvelable, la mobilité électrique et le rôle de modèle des cantons.
Selon le WWF, des progrès considérables ont été réalisés depuis le dernier rating cantonal de 2019. C’est surtout le remplacement des anciens chauffages par des alternatives plus respectueuses du climat qui a beaucoup progressé. Pourtant, aucun canton n’est sur la bonne voie pour limiter le réchauffement climatique à 1,5 degré. Dans l’ensemble, la politique climatique de la plupart des cantons est insuffisante. Il faut agir dans la rénovation des bâtiments et le passage à l’e-mobilité. Plus d’informations sur SRF.
Quel est le niveau d’isolation des bâtiments de ton lieu de résidence ? Quelle est la quantité d’électricité solaire produite ? Combien de voitures électriques sont autorisées dans ton canton ? Les réponses à ces questions sont fournies par plus de 50 cartes interactives de la plate-forme OK Klima. Pour ce faire, des données accessibles au public sont utilisées et toutes les communes de Suisse sont évaluées en termes de respect du climat. La logique du projet : les communes et les cantons sont importants lorsqu’il s’agit de mettre en œuvre une politique climatique efficace. Ils disposent de deux tiers de l’argent public et définissent les conditions-cadres locales. Mais selon les initiateurs, ils n’exploitent pas cette marge de manœuvre. Pour que cela change, OK Klima veut assurer une plus grande transparence sur les mesures possibles et leur efficacité. Selon le classement, les villes sont plus respectueuses du climat que les zones rurales. Plus d’informations dans le Blick.
Le Conseil fédéral ignore lui aussi l’arrêt de la CEDH
En avril, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) avait reproché à la Suisse de ne pas protéger suffisamment les femmes âgées contre le changement climatique. Comme le Conseil national et le Conseil des Etats, le Conseil fédéral rejette l’arrêt. Il estime que la Suisse remplit les exigences de l’arrêt en matière de politique climatique, notamment avec la loi révisée (et édentée) sur le CO2. Le conseiller fédéral Albert Rösti ne voit « aucune nécessité d’agir ». Le Conseil fédéral ne veut pas prendre d’autres mesures pour réduire les émissions de CO₂. Le gouvernement critique également le fait qu’une association, les Aînées pour le climat, ait été autorisée à porter plainte. Le droit de recours des associations est ainsi étendu aux questions climatiques, ce qui pourrait entraver le développement des infrastructures énergétiques nécessaires.
Dans l’explication de douze pages adressée au Conseil de l’Europe, le Conseil fédéral indique également la quantité de CO2 que la Suisse serait autorisée à émettre entre 2020 et 2050 pour que l’objectif de 1,5 degré soit respecté avec une probabilité de 50%. Ce budget CO₂ s’élèverait à 1,3 ‰ de la quantité mondiale, ce qui correspond à 660 millions de tonnes d’équivalents CO₂. Cela correspond à la quantité que la Suisse émettra – en tenant compte d’une quantité considérable de certificats climatiques achetés à l’étranger – si elle respecte ses objectifs climatiques. La Suisse abrite 1,1 ‰ de la population mondiale. Le Conseil fédéral revendique donc pour la Suisse une part du budget mondial plus importante que celle convertie par habitant, bien que les pays riches se soient engagés à faire plus pour la protection du climat que les pays pauvres. Une analyse des explications du Conseil fédéral se trouve dans la République.
Greenpeace et les Aînées pour le Climat critiquent l’attitude du Conseil fédéral et les données relatives au budget CO2. Selon eux, la quantité restante de gaz à effet de serre que la Suisse est autorisée à émettre est inférieure à la moitié de cette quantité. L’organisation environnementale s’appuie sur les derniers chiffres de l’EPFZ. Greenpeace a en outre examiné à la loupe les arguments des opposants à la décision sur le climat et publié un fact check. Plus d’informations à ce sujet dans le Tages-Anzeiger et la NZZ.
Les soignants, les médecins ne comprennent pas les critiques du Conseil fédéral et du Parlement à l’encontre de l’arrêt de la CEDH. Les professionnels (réunis au sein du Consortium pour la santé durable et la transition écologique du système de santé), demandent dans une lettre ouverte au Conseil fédéral de respecter ses obligations en matière d’atténuation du changement climatique pour le bien de la santé humaine. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger.
Le nouveau numéro de ProClim Flash, le magazine de l’Académie suisse des sciences naturelles, montre à quel point les effets du changement climatique sur la santé sont importants, notamment pour la population âgée. Le magazine met en évidence les liens entre le changement climatique et la santé ainsi que les risques et les opportunités. Il répond également aux questions de savoir ce que la peur du climat, c’est-à-dire l’inquiétude persistante à propos du changement climatique, fait à notre santé et quelles mesures contre le changement climatique ont un effet positif sur la santé.
Plus de temps pour le Solarexpress
Pour que les installations solaires alpines puissent bénéficier de subventions fédérales pouvant atteindre 60% des coûts d’installation, au moins 10% de la puissance prévue doit être injectée dans le réseau d’ici fin 2025. Il est apparu très tôt que ce délai était trop court. A ce jour, seules deux installations ont reçu des autorisations définitives, comme le montre un aperçu de l’Office fédéral de l’énergie. Trois autres ont été autorisées en première instance, mais des recours ont été déposés. Pour la plupart des 50 installations photovoltaïques prévues, aucune demande de permis de construire n’a encore été déposée.
La Commission de l’environnement, de l’aménagement du territoire et de l’énergie du Conseil des Etats veut maintenant prolonger ce délai, comme le rapporte le Tages-Anzeiger. Selon sa volonté, les installations doivent pouvoir être subventionnées même si la demande de permis de construire correspondante a été mise à l’enquête publique d’ici fin 2025. Pour cette prolongation, le Parlement doit décider d’une modification de la loi. Mais l’Office fédéral de l’énergie examine actuellement si une solution ne pourrait pas être trouvée au niveau de l’approvisionnement. En juin, le Conseil fédéral avait encore exclu une adaptation par voie d’ordonnance dans une réponse à une interpellation sur une éventuelle prolongation du délai.
Dans plusieurs cantons, on discute de l’extension de l’obligation d’installer des panneaux solaires aux bâtiments existants, qui n’existe actuellement que pour les nouvelles constructions importantes. Le gouvernement zurichois souhaite que des modules PV soient installés lors de la rénovation de toits de 300 mètres carrés ou plus. A partir de 2040, l’obligation s’appliquera à toutes les grandes surfaces de toitures. Les maisons individuelles continueront d’être exemptées. Le Grand Conseil zurichois souhaite également introduire l’obligation de PV pour les façades. Pour en savoir plus, consultez le Tages-Anzeiger (paywall) et la NZZ.
De nouveaux barrages pour l’hydroélectricité ?
En Valais, le développement de l’énergie hydraulique suscite des discussions. En 2022, les politiques, les entreprises énergétiques et certaines associations environnementales s’étaient mis d’accord sur 15 projets hydroélectriques à développer en Suisse. Ceux-ci ont également été repris dans la loi sur l’électricité, qui a été adoptée en juin 2024. Le compromis trouvé lors de la « table ronde » prévoyait qu’aucun autre projet ne serait mis en avant. Mais le canton du Valais ne veut pas s’y tenir : pas moins de neuf projets hydroélectriques supplémentaires doivent être inscrits dans le plan directeur cantonal. Le plus grand d’entre eux – « Ober-aletsch gross » – prévoit une production annuelle d’électricité de 765 gigawattheures, ce qui correspond à la consommation d’environ 150 000 ménages. Le projet se situe en plein cœur du patrimoine mondial de l’Unesco Jungfrau-Aletsch. Les associations environnementales WWF et Pro Natura critiquent ces plans. Le conseiller cantonal valaisan responsable justifie ainsi l’écart par rapport à l’accord : « Tous les cantons sont libres d’examiner et de planifier d’autres projets ». C’est le Conseil fédéral qui décidera du nouveau plan directeur. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger.
Après que de petites associations environnementales aient annoncé leur opposition à certains projets de la « table ronde sur l’énergie hydraulique », des politiciens bourgeois veulent restreindre le droit de recours des associations. Ainsi, la majorité de la Commission de l’environnement, de l’aménagement du territoire et de l’énergie du Conseil des Etats veut supprimer la possibilité pour les associations de faire opposition aux projets hydroélectriques autorisés par la loi sur l’électricité. Au sein de la Confédération, le défenseur du paysage Hans Weiss critique le démantèlement prévu. Au lieu de supprimer le droit de recours des associations, l’association économique swisscleantech suggère dans la NZZ d’augmenter les capacités des tribunaux. Cela permettrait d’accélérer efficacement les procédures. Dans la NZZ, on peut également lire un bref résumé sur le droit de recours des associations.
Afin de limiter les dégâts écologiques des centrales hydroélectriques, leurs exploitants reçoivent environ 1 milliard de francs de la Confédération. Il y a dix ans, les cantons ont désigné 100 centrales devant faire l’objet d’un assainissement écologique d’ici 2030. Un rapport montre aujourd’hui que ce délai ne pourra pas être respecté. De plus, l’assainissement coûte nettement plus cher. Il faudrait « plusieurs milliards de francs » pour atténuer les dégâts écologiques des barrages. Fait important : le rapport est disponible depuis plusieurs mois, mais le conseiller fédéral Albert Rösti a empêché qu’il soit publié avant la votation sur l’initiative biodiversité. Plus d’informations dans l’Aargauer Zeitung (paywall).
Le Conseil fédéral veut faire sauter l’interdiction de construire de nouvelles centrales nucléaires
En adoptant la Stratégie énergétique 2050, le peuple suisse avait également approuvé en 2017 l’interdiction de construire de nouvelles centrales nucléaires. Le Conseil fédéral ne veut plus s’en tenir à cette décision populaire. Il veut permettre la construction de nouvelles centrales nucléaires et a annoncé à cet effet un contre-projet indirect à l’initiative populaire « Du courant en tout temps pour tous (Halte au black-out) ». Cela doit se faire au niveau de la loi (loi sur l’énergie nucléaire), une modification de la Constitution fédérale serait superflue. Avec sa décision, le Conseil fédéral suit le ministre de l’énergie Albert Rösti qui, jusqu’à son élection au Conseil fédéral, était membre du Club suisse de l’énergie, lequel se présente comme le porteur officiel de l’initiative, comme on peut le lire dans le Tages-Anzeiger. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger et la NZZ.
L’association économique Economiesuisse salue le changement de cap du Conseil fédéral, tout comme le PRD et l’UDC. Tous les autres partis critiquent cette décision. La SRF résume les critiques en disant qu’elle est hors du temps, qu’elle n’a aucun sens économique et qu’elle représente un forcing idéologique. Le président du Mitte, Gerhard Pfister, estime que la démarche du Conseil fédéral est malhonnête. Avec le contre-projet, une discussion sur le financement de nouvelles centrales nucléaires reste exclue, critique-t-il dans le Tages-Anzeiger (paywall). La Fondation suisse de l’énergie reproche au Conseil fédéral de saboter la sécurité de l’approvisionnement énergétique et l’abandon rapide du pétrole et du gaz.
Les entreprises énergétiques suisses se montrent sceptiques face à l’initiative du Conseil fédéral, car les nouvelles centrales nucléaires ne sont pas rentables. La NZZ dresse la liste des « obstacles gigantesques » à la construction de nouvelles centrales nucléaires. Les politiciens bourgeois exigent déjà de nouvelles subventions pour les exploitants. Les règles relatives au stockage final des déchets nucléaires doivent également être assouplies en faveur des exploitants de centrales nucléaires. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger, la NZZ et la NZZ am Sonntag (paywall). Pour les lobbyistes des centrales nucléaires, le contre-projet du Conseil fédéral ne va pas assez loin. Ils demandent en outre que les procédures soient raccourcies, explique le Tages-Anzeiger.
La majorité du Conseil national ne veut pas entendre parler de supprimer l’interdiction de construire de nouveaux bâtiments. Lors de la session d’automne, il a rejeté une motion similaire déposée il y a deux ans par l’UDC Thomas Burgherr. Selon un sondage représentatif de Watson, une courte majorité des votants s’oppose également à la levée de l’interdiction (51% disent non ou plutôt). Un sondage de Tamedia et 20 Minuten a abouti au résultat inverse (53% disent oui ou plutôt oui).
Le calendrier du Conseil fédéral pour lever l’interdiction de construire de nouveaux bâtiments est ambitieux. Le contre-projet devrait être mis en consultation cette année encore, et le Parlement devrait en débattre à partir de l’été 2025. Entre-temps, des doutes fondés sont apparus quant à la légitimité de nombreuses signatures déposées. Les initiants ont acheté un grand nombre de signatures à des entreprises, dont des milliers auraient été falsifiées. La Fondation suisse de l’énergie demande que le contre-projet du Conseil fédéral soit suspendu jusqu’à ce que l’on sache si suffisamment de signatures valables ont été déposées. Le Conseil fédéral n’en voit cependant pas la raison. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger (paywall) et dans la NZZ.
Décisions de la Confédération et des cantons en matière de climat
La Suisse a adapté ses recommandations alimentaires, appelées pyramide alimentaire. L’Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires (OSAV) et la Société Suisse de Nutrition (SSN) ont pris en compte non seulement les aspects d’une alimentation saine et équilibrée, mais aussi la durabilité des produits (rareté des ressources et impact sur le climat). Désormais, l’accent est davantage mis sur les fournisseurs de protéines végétales. Les légumineuses telles que les lentilles, les pois chiches, les haricots rouges et blancs sont citées en premier, avant les œufs, la viande et les autres sources de protéines. Le poisson est passé au second plan en raison des problèmes de surpêche. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger.
Dans la ville de Zurich, les gaz à effet de serre produits par l’incinération des boues d’épuration seront à l’avenir captés et déversés dans la mer du Nord. Les électeurs ont approuvé un crédit de 35 millions de francs à cet effet. Plus d’informations dans la NZZ.
Politique climatique internationale
Etats-Unis : les démocrates font la promotion du gaz naturel pour gagner des électeurs
En novembre, les Etats-Unis éliront un nouveau président. Les candidats ont des points de vue très différents sur le changement climatique. Donald J. Trump s’est moqué du réchauffement climatique en le qualifiant d' »escroquerie ». Le candidat républicain à la vice-présidence, JD Vance, a qualifié le changement climatique de « science étrange ». Cela n’a rien de surprenant. Ce qui surprend en revanche, c’est la nouvelle stratégie de communication des démocrates.
Tim Walz, le candidat démocrate à la vice-présidence, a souligné que le changement climatique était réel, mais s’est vanté du fait que la production de pétrole et de gaz avait atteint des niveaux records sous l’administration Biden. La vice-présidente Kamala Harris avait également souligné lors de son débat avec M. Trump : « Nous avons investi mille milliards de dollars dans une économie énergétique propre tout en augmentant la production nationale de gaz à un niveau historique ».
Il y a quelques mois encore, la Maison Blanche tentait de dissimuler le fait que le président Biden, qui a appelé à une transition loin des combustibles fossiles, a en réalité supervisé le plus grand boom pétrolier et gazier de l’histoire des États-Unis. Selon la U.S. Energy Information Administration, la production d’énergie en Amérique a atteint un niveau sans précédent.
Les Démocrates semblent désormais considérer que les voix des écologistes sont déjà acquises. C’est pour les indécis qu’ils doivent s’inquiéter. Beaucoup d’entre eux vivent en Pennsylvanie, un Etat décisif pour les élections, où la fracturation hydraulique est très répandue. Plus d’informations dans le NY Times (paywall).
2,6 billions de dollars de subventions nuisibles
Selon un nouveau rapport de l’organisation Earth Track, le monde dépense au moins 2,6 billions de dollars par an en subventions qui alimentent les crises du climat et de la biodiversité. Les gouvernements continuent d’accorder des allègements fiscaux, des subventions et d’autres dépenses qui vont directement à l’encontre des objectifs de l’Accord de Paris sur le climat de 2015 et de l’Accord de Kunming-Montréal de 2022 visant à enrayer la perte de biodiversité. On peut citer par exemple le soutien de l’État aux grands bateaux de pêche, qui favorisent la surpêche, et les mesures gouvernementales qui encouragent la production d’essence, d’engrais synthétiques et de monocultures. Selon le rapport, le montant total annuel des subventions nuisibles à l’environnement a augmenté de 500 milliards de dollars américains, corrigé de l’inflation, depuis la dernière publication de 2022. Cette hausse s’explique par les conséquences de la guerre en Ukraine. Plus dans le Guardian.
Le Japon continue lui aussi d’investir fortement dans les énergies fossiles. Plus d’informations sur Climate Change News et Japan Times. Plus d’un tiers (35%) des projets de l’initiative japonaise « Asia Zero Emissions Community (AZEC) » en Asie du Sud-Est se concentrent sur les technologies liées aux combustibles fossiles, selon une récente étude de Zero Carbon Analytics.
Les entreprises fossiles continuent de mentir, mais sont de plus en plus souvent poursuivies en justice
L’explosion de la plateforme pétrolière BP Deepwater Horizon dans le golfe du Mexique en avril 2010 a provoqué l’une des plus grandes catastrophes écologiques de l’histoire. Plus de 4 millions de barils de pétrole se sont déversés dans l’océan, causant d’énormes dégâts écologiques. Selon des documents récemment publiés, BP a supervisé une grande partie de la recherche universitaire sur les conséquences environnementales de la catastrophe. Une enquête de Follow the Money montre comment les études minimisent l’impact de la marée noire sur les écosystèmes marins, contredisant ainsi les résultats des recherches commandées par les autorités américaines. Ces révélations suscitent de nouvelles inquiétudes quant à l’influence croissante des entreprises sur la science et aux conflits d’intérêts potentiels. Plus d’informations dans le Guardian et sur Follow the Money.
Pourtant, les entreprises de combustibles fossiles sont confrontées à un nombre croissant de poursuites judiciaires, comme le montre une nouvelle analyse d’Oil Change International et de Zero Carbon Analytics. Le nombre de plaintes déposées chaque année dans le monde a presque triplé depuis 2015, année de la signature de l’accord de Paris sur le climat par les Nations unies. 86 plaintes ont été déposées et 40 sont en cours. Les plaintes ont été déposées par des villes, des États et d’autres organisations gouvernementales, ainsi que par des groupes environnementaux, des groupes autochtones et des particuliers. Cinquante ont été déposées auprès de tribunaux américains, 24 dans des pays européens, cinq en Australie et quatre au Nigeria.
La plus forte augmentation du nombre de litiges a été enregistrée dans les actions en compensation des dommages climatiques, qui représentent 38% des cas. La science de l’attribution y contribue. Elle permet aux scientifiques de calculer l’impact du changement climatique sur certains phénomènes météorologiques extrêmes et de quantifier les effets climatiques dus aux émissions de certaines entreprises de combustibles fossiles. Jusqu’à présent, aucune entreprise de combustibles fossiles n’a été contrainte de payer pour des dommages climatiques, mais les responsabilités potentielles sont énormes. Plus d’informations sur Climate Analytics.
L’affaire la plus avancée en matière de dommages climatiques a été portée en 2015 par un agriculteur péruvien contre le géant allemand de l’énergie RWE. RWE est accusée de contribuer aux effets climatiques qui menacent la maison de l’agriculteur dans les Andes. Dans une démarche sans précédent, des juges allemands se sont rendus au Pérou en 2022 afin de déterminer le montant des dommages causés par RWE. Le nombre de plaintes pour publicité mensongère est également en augmentation. De telles plaintes représentent aujourd’hui 16% de toutes les plaintes climatiques. Plus dans le Guardian.
Il est également encourageant de constater que l’ancien secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, a appelé les gouvernements à négocier un traité de non-prolifération des combustibles fossiles. Son leadership a été déterminant pour la mise en œuvre d’autres projets de traités importants au cours des deux dernières décennies.
En Asie, la viande de laboratoire fait l’objet d’une promotion intensive
Chaque année, 80 milliards d’animaux sont abattus dans le monde pour la production de viande. Leur élevage occupe la majeure partie des terres agricoles du monde. Elle a entraîné des zoonoses et une énorme déforestation. Elle a pollué l’air et l’eau et rejeté des gaz à effet de serre dans l’atmosphère. NY Times (paywall).
La production de viande est inefficace : nourrir une vache avec jusqu’à 100 calories de céréales ne produit qu’une calorie de bœuf. Les trois quarts de la surface agricole totale – une surface deux fois plus grande que la Chine et l’Inde réunies – sont utilisés pour la culture de fourrage ou pour le pâturage. Cela favorise la déforestation et menace les ressources en eau. Les aliments d’origine animale sont responsables d’un cinquième des émissions mondiales de gaz à effet de serre et libèrent plus de méthane que la production de pétrole et de gaz. La peste porcine africaine et les effets de la crise climatique ont rendu l’approvisionnement mondial en viande instable. Sur Carbon Brief, on peut lire un article sur la manière dont le changement climatique fait grimper les prix des denrées alimentaires dans le monde.
Notre système alimentaire actuel est en train d’entrer en collision avec les limites planétaires. La production de viande devrait augmenter de plus de 50 % d’ici 2050 par rapport à 2012, sous l’impulsion d’une population mondiale et d’une consommation de viande croissantes. C’est pourquoi la Chine et d’autres pays asiatiques souhaitent promouvoir intensivement le développement de la viande de laboratoire, par le biais d’investissements publics et de coopération scientifique.
La production de viande de laboratoire consiste à cultiver des protéines animales sans avoir besoin d’un animal vivant. Les analyses du cycle de vie montrent que les émissions de gaz à effet de serre, la consommation d’eau et les surfaces agricoles pourraient être réduites, parfois de plus de 90%. D’ici 2050, le secteur des protéines alternatives pourrait générer une croissance économique annuelle d’environ 700 milliards de dollars américains. Mais on ne sait pas encore où ces bénéfices iront. Un rapport de la National Security Commission on Emerging Biotechnology américaine conclut que la Chine est bien placée pour profiter d’une telle révolution agricole en raison de ses investissements considérables dans la recherche et le développement et de ses capacités de production dans les secteurs alimentaires existants. Plus d’informations sur Nature.
Aux États-Unis, le Center for Strategic and International Studies a soutenu dans un rapport révolutionnaire que le gouvernement devrait donner la priorité aux protéines alternatives en tant qu’industrie nationale cruciale, au même titre que les produits pharmaceutiques, les énergies renouvelables et l’IA. Mais dans les pays occidentaux, l’industrie de la viande mène un lobbying intense et efficace pour empêcher les alternatives, explique George Monbiot dans un blog.
L’Australie autorise trois nouvelles mines de charbon géantes
L’Australie a autorisé l’exploitation de trois nouvelles mines de charbon géantes. Le gouvernement travailliste d’Anthony Albanese affirme cependant qu’il réduira les autorisations pour les énergies fossiles et qu’il accélérera le développement de nouvelles énergies renouvelables. Mais les chiffres montrent le contraire. Sous le gouvernement de centre-gauche, les exportations d’énergies fossiles sont probablement plus importantes que jamais dans l’histoire de l’Australie. Et les énergies renouvelables ne se développent pas du tout aussi rapidement qu’il le faudrait pour atteindre les objectifs climatiques nationaux. Pour en savoir plus, consultez le blog de Ketan Joshi.
Beaucoup d’argent pour le nucléaire et pour l’IA
L’énergie nucléaire reçoit un grand coup de pouce de la part des 14 plus grandes banques et institutions financières du monde, qui souhaitent soutenir financièrement un triplement de la capacité nucléaire mondiale d’ici 2050. Certaines institutions financières, dont la Banque mondiale, se sont jusqu’à présent montrées réticentes à investir dans l’énergie nucléaire. Mais aujourd’hui, de grandes banques comme Bank of America, Barclays et BNP Paribas s’y engagent. Cet engagement est intervenu quelques jours seulement après l‘annonce par un fournisseur d’énergie américain de la remise en service d’une partie de la centrale nucléaire de Three Mile Island afin de produire de l’électricité à faible teneur en CO2 pour les centres de calcul de Microsoft. La centrale a connu une fusion partielle du cœur d’un de ses réacteurs en 1979, la plus grande catastrophe nucléaire de l’histoire des États-Unis. Google a cependant commandé six ou sept nouveaux petits réacteurs nucléaires afin de couvrir ses énormes besoins en énergie pour l’intelligence artificielle (IA). « Nous pensons que l’énergie nucléaire peut jouer un rôle important pour répondre à nos besoins et nous aider à satisfaire nos besoins de manière propre et 24 heures sur 24 », a déclaré Michael Terrell, directeur principal de l’énergie et du climat chez Google. Plus d’informations dans le Financial Times (paywall) ici, ici et ici.
En raison de l’énorme consommation d’énergie de ses centres de données, Microsoft génère aujourd’hui environ 30% d’émissions de plus qu’en 2020. Cela se vérifie également chez Google. Les émissions de gaz à effet de serre de Google ont augmenté de 48% depuis 2019. Plus d’informations sur Infosperber.ch, SRF et le Tages Anzeiger (paywall).
Politique climatique européenne
Le Royaume-Uni ferme ses dernières centrales à charbon
L’énergie issue de la combustion du charbon a alimenté l’industrialisation mondiale, qui a débuté au Royaume-Uni. Dans le berceau de l’utilisation du charbon, la dernière centrale à charbon a été arrêtée début octobre après plus de 140 ans. L’Etat insulaire franchit ainsi un pas important vers la sortie des énergies fossiles, qui marquaient autrefois de manière déterminante le système économique et la production d’énergie correspondante. En effet, il y a une centaine d’années, la quasi-totalité de l’électricité produite au Royaume-Uni provenait de la combustion du charbon, avant que le pétrole et l’énergie nucléaire, puis le gaz naturel depuis les années 1990 et enfin les énergies renouvelables telles que l’énergie éolienne et solaire ne prennent progressivement le relais. D’ici 2035, l’ensemble du mix électrique devra être exempt de CO2. Outre les énergies renouvelables, l’énergie nucléaire doit également continuer à fournir une contribution importante à la production d’électricité. Cela s’accompagne de nouveaux défis comme la flexibilisation du système électrique. Pour en savoir plus, consultez la BBC, la ZDF et le Tagesschau.
La Haye interdit la publicité pour les énergies fossiles
La Haye sera la première ville au monde à ne plus faire de publicité publique pour les combustibles fossiles et les services nuisibles au climat à partir de 2025, rapportent le Guardian et Bloomberg. La ville répond ainsi à l’appel du secrétaire général de l’ONU Guterres, qui voit dans les entreprises fossiles les « godfathers of climate chaos ». La Haye souhaite atteindre la neutralité climatique d’ici 2030. Faire de la publicité pour les énergies fossiles serait en contradiction avec cet objectif, selon Leonie Gerritsen, membre du conseil municipal. Les publicités politiques ou la publicité de certaines marques sont exclues. Des villes comme Edinburgh, Toronto ou Graz suivent actuellement des approches similaires. La Haye, qui n’est pas seulement le centre administratif des Pays-Bas, mais aussi le siège d’institutions internationales comme la Cour pénale internationale, pourrait servir de modèle et d’inspiration pour d’autres villes dans le monde.
Procédures judiciaires au Portugal
La Cour suprême portugaise a statué en faveur des quatre organisations environnementales et contre le gouvernement. La Cour a fait droit aux plaintes des organisations, qui soutenaient que le gouvernement n’avait pas respecté plusieurs délais pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et d’autres mesures de protection du climat depuis l’adoption de la loi sur le changement climatique en 2021.
Plus de protection du climat et de biodiversité dans l’agriculture
Une étude récemment publiée par le think tank Agora Agriculture montre que des mesures ciblées dans le secteur de l’utilisation des terres (agriculture et sylviculture) peuvent contribuer de manière décisive à réduire la crise du climat et de la biodiversité tout en apportant une valeur ajoutée à la bioéconomie. L’étude poursuit une tentative analytique intégrative pour combler les lacunes des scénarios climatiques en présentant un scénario du secteur en tant que partie du système alimentaire et de la bioéconomie dans une UE climatiquement neutre d’ici le milieu du siècle. Les auteurs soulignent quatre résultats principaux:
- L’agriculture et la sylviculture peuvent considérablement accroître leur contribution à la réalisation de la neutralité climatique, à la protection de la biodiversité, à la santé humaine et à d’autres objectifs de durabilité sociétale.
- D’ici le milieu du siècle, l’agriculture et les tourbières agricoles de l’UE peuvent réduire leurs émissions de gaz à effet de serre de 60 %, ce qui contraste fortement avec la stagnation de leurs émissions depuis toujours.
- Une utilisation efficace des terres et une demande plus durable en denrées alimentaires, en aliments pour animaux et en autres biomasses sont les principaux leviers permettant de réaliser ces potentiels de durabilité.
- La législature européenne 2024-2029 est cruciale, car elle permet de créer un environnement politique favorable.
Allemagne
Le billet à 49 euros réduit les émissions de CO2
Les personnes possédant un Deutschlandticket conduisent moins souvent. Selon une analyse d’Ariadne, le Deutschlandticket a permis de réduire les émissions de CO2 dues au trafic automobile d’environ 6,7 millions de tonnes. Cela correspond à une réduction de 4,7% des émissions totales dans le secteur des transports.
Les trajets en train ont nettement augmenté après l’introduction du ticket Allemagne, selon l’étude : le nombre de trajets de plus de 30 kilomètres a augmenté de 30,4%, tandis que le nombre de kilomètres parcourus en voiture a diminué de 7,6%. La part des trajets en train sur l’ensemble des trajets de plus de 30 kilomètres est passée d’environ 10% à 12%. Le Deutschlandticket n’a pas fondamentalement augmenté le nombre de personnes se déplaçant, mais celles-ci ont choisi d’autres moyens de transport pour effectuer leurs trajets.
Mi-septembre, les ministres des Transports de l’État fédéral et des Länder ont annoncé que le Deutschlandticket coûterait neuf euros de plus qu’actuellement, soit 58 euros par mois, à partir de 2025. L’augmentation du prix l’année prochaine réduira l’effet bénéfique. Selon l’étude, la baisse des émissions de CO2 dues au trafic automobile ne serait alors plus que de 3,6 millions de tonnes de CO2, au lieu de 6,7 millions de tonnes actuellement.
Dans l’ensemble du secteur des transports en Allemagne, environ 146 millions de tonnes de gaz à effet de serre ont été émises en 2023. Cela représente un bon cinquième de toutes les émissions au niveau fédéral. Ces dernières années, le secteur a largement dépassé les objectifs climatiques nationaux et européens. Plus d’informations sur le site de la TAZ.
La forêt allemande ne protège plus le climat
Les forêts allemandes émettent plus de gaz à effet de serre qu’elles ne peuvent en absorber grâce à leur fonction de puits de carbone. Les principales causes de cette situation sont les conséquences de la crise climatique, a déclaré le ministre fédéral de l’Agriculture Özdemir lors de la présentation des résultats du quatrième « Inventaire forestier fédéral » (BWI). Parmi ces conséquences, on compte notamment les sécheresses, la propagation de parasites tels que les scolytes ainsi que le prélèvement continu d’arbres. L’inventaire forestier fédéral est un instrument central pour l’enregistrement et l’analyse de l’état et de l’évolution des forêts allemandes. En raison de ces changements dramatiques, la forêt perd son rôle important dans la lutte contre la crise climatique, rôle pour lequel elle a été appréciée pendant des décennies. Depuis 2017, environ 41,5 millions de tonnes de stockage de carbone ont été perdues, ce qui menace également la base économique de nombreuses entreprises forestières. Le WWF Allemagne demande que les vieilles forêts de feuillus ne soient plus exploitées qu’à minima, que l’on cesse d’encourager la combustion du bois dans les centrales électriques et que l’on instaure à la place une économie circulaire dans la filière bois.
Dans ce contexte, le WWF a renouvelé sa demande de réforme de la loi fédérale sur les forêts. Celle-ci est certes inscrite dans l’accord de coalition du gouvernement fédéral, mais se heurte, selon un projet divulgué, à une résistance considérable de la part des milieux politiques et économiques. Dans un podcast, la Deutschlandfunk Hintergrund propose un aperçu des différents intérêts en présence et de la réforme de la loi. La BWI confirme toutefois que la transformation de la forêt progresse et que les arbres feuillus, par exemple, sont en train de pousser.
Les élections régionales mettent en péril la protection du climat
La Saxe, la Thuringe et le Brandebourg ont élu de nouveaux parlements régionaux au cours des dernières semaines. Dans les trois Länder, l’AfD, parti d’extrême droite, a obtenu des scores records. Dans le Brandebourg, elle est arrivée en deuxième position juste derrière le SPD et en Saxe juste derrière la CDU. En Thuringe, elle a même remporté les élections avec une nette avance et obtiendra un tiers des sièges au Landtag. Le parti détient ainsi ce que l’on appelle la minorité de blocage et peut bloquer les procédures législatives qui nécessitent une majorité des deux tiers (par exemple pour les modifications de la Constitution ou l’élection des juges). L’alliance populiste Sahra Wagenknecht (BSW), fondée au début de l’année après la scission de Wagenknecht du parti de gauche Die Linke et considérée comme très favorable à la Russie, a également connu un succès considérable.
Le BUND Saxe qualifie de décevants les résultats des mesures de protection de l’environnement et du climat en rapport avec les élections locales. L’association environnementale résume qu’en Saxe, la moitié des députés élus appartiennent désormais à des partis qui « veulent miser davantage sur les combustibles fossiles, de préférence en provenance de Russie », selon le professeur Felix Ekardt de BUND Saxe. Il existe un « risque sérieux que le développement nécessaire des énergies renouvelables et la protection du climat soient relégués au second plan ». Un aperçu de la signification des succès électoraux des populistes et de l’extrême droite en Thuringe et en Saxe est résumé dans une chronique d’Elena Matera (RiffReporter).
Congrès sur l’avenir des Verts
Lors du congrès sur l’avenir des Verts, la co-présidente du groupe parlementaire Katharina Dröge s’est exprimée devant un millier de représentants de la politique, de l’économie et de la société civile. Elle a souligné : « Il n’y a pas de sujet plus urgent que la crise climatique ». Il semble donc que l’un des thèmes centraux de la campagne électorale du Bundestag en septembre 2025 soit fixé. Lors du congrès, des propositions telles qu’un fonds d’investissement pour les infrastructures publiques de l’État fédéral, des Länder et des communes ainsi que le renforcement du programme d’action pour la protection naturelle du climat ont notamment été discutées, comme le rapporte Tagesspiegel Background (paywall). Le fonds nouvellement créé devrait par exemple promouvoir l’infrastructure hydrogène, la numérisation de l’administration ainsi que l’infrastructure ferroviaire.
Le congrès a eu lieu quelques jours après l’annonce que l’ensemble de la direction du parti ne se représentera pas au congrès de novembre et démissionnera donc. La secrétaire d’État parlementaire au BMWK, Franziska Brantner, ainsi que le député fédéral et ancien président des Verts de Rhénanie du Nord-Westphalie, Felix Banaszak, sont considérés comme des successeurs potentiels des co-présidents du parti, Ricarda Lang et Omid Nouripour. Le Tagesschau et la Deutschlandfunk donneront plus de détails à ce sujet. Le secrétaire d’État Sven Giegold, qui a travaillé de nombreuses années pour les Verts au Parlement européen, est candidat à la succession de Michael Kellner au poste de directeur fédéral (Frankfurter Rundschau).
La crise climatique visible
La chaleur croissante et comment les écoliers en souffrent
La Terre continue de se réchauffer. Selon le service Copernicus sur le changement climatique de l’UE, l’été 2024 a été le plus chaud depuis le début des relevés. De juillet 2023 à août 2024, la température mondiale a été supérieure de 1,5 degré à la valeur préindustrielle pendant 13 mois sur 14. Plus d’informations dans le NY Times (paywall) et la NZZ.
Les chercheurs s’interrogent depuis longtemps sur les raisons possibles de ce réchauffement marqué. Gavin Schmidt, climatologue de la NASA, résume l’état des connaissances dans le magazine en ligne E360. On peut imaginer entre autres des modifications du cycle solaire, l’éruption d’un volcan sous-marin et de nouvelles réglementations en matière de pollution par la navigation. Mais aucun de ces facteurs, même combinés, ne semble suffisant pour expliquer la situation. « Les choses se comportent de manière plus imprévisible que ce à quoi nous nous attendions, et cela signifie que les prévisions pour l’avenir pourraient également ne pas être aussi bonnes ». Carbon Brief fournit également un aperçu des facteurs déclencheurs de la chaleur.
Carbon Brief a examiné l’ampleur de l’impact du changement climatique sur l’éducation des enfants dans le monde. En raison des vagues de chaleur, des millions d’enfants ont été touchés par des fermetures d’écoles cette année, notamment au Soudan du Sud, en Inde, au Bangladesh et aux Philippines. Une étude de la Banque mondiale montre que la chaleur entraîne une baisse des résultats d’apprentissage. Elle a un impact direct sur le développement physique et cognitif des jeunes.
Dévastations sur quatre continents
Les événements extrêmes survenus ces dernières semaines dans le monde entier ont montré à quel point la crise climatique augmente la probabilité d’intempéries et les risques qui y sont liés. La République et le NY Times en donnent un aperçu (paywall).
Cyclones : En Asie du Sud-Est, des centaines de personnes sont mortes dans la tempête Yagi, qui s’est déplacée des Philippines et de la Thaïlande vers le Vietnam, le Laos et la Birmanie.
A quelques jours d’intervalle, deux ouragans – Helene et Milton – ont dévasté une partie des Etats-Unis. La tempête Helene a fait rage de la Floride à la Virginie et a coûté la vie à plus de 200 personnes. Auparavant, des températures records avaient été mesurées à la surface de la mer dans le Golfe du Mexique. Le changement climatique a rendu ce réchauffement 200 à 500 fois plus probable (source Guardian). Selon une étude d’attribution, les précipitations ont augmenté de 10 %. Globalement, la combustion de combustibles fossiles a rendu les tempêtes comme Hélène deux fois et demie plus probables qu’à l’ère préindustrielle.
L’ouragan Milton est passé d’une tempête de catégorie 1 à la catégorie 5, la plus élevée, en seulement douze heures. Le changement climatique a joué un rôle central dans cette évolution, comme on peut le lire dans l’Atlantic. Grâce à la température élevée de la mer, la tempête a gagné beaucoup d’énergie. Cette énergie se traduit par des vitesses de vent plus élevées. Milton a en même temps prélevé plus d’humidité dans l’atmosphère très humide et réchauffée (pour chaque degré Celsius d’augmentation de température, l’air peut absorber 7% de vapeur d’eau en plus). Comme la tempête s’est à nouveau affaiblie au-dessus du Golfe du Mexique, les dégâts ont été moins importants que prévu. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger.
Les ouragans sont-ils plus fréquents ? Non, mais leur intensité augmente, tout comme la quantité de précipitations. Ensemble, ces phénomènes entraînent des dangers nettement plus importants, peut-on lire dans le Tages-Anzeiger et dans la contribution Linkedin du climatologue Reto Knutti.
Inondations en Europe : la Pologne, la République tchèque, la Hongrie et l’Autriche ont enregistré les plus fortes précipitations depuis le début des mesures. Plus de 20 personnes ont perdu la vie. Le changement climatique a rendu un tel événement extrême deux fois plus probable, écrit le Süddeutsche Zeitung, qui s’appuie sur une étude de l’équipe de recherche World Weather Attribution.
Les inondations ne sont pas une anomalie, a déclaré Janez Lenarčič, commissaire européen à la gestion des crises. « Cela devient rapidement la norme pour notre avenir commun. L’Europe est le continent qui se réchauffe le plus rapidement au monde (source Guardian). Plus d’informations sur les intempéries en Europe sur ORF, le NY Times (paywall) et Klimareporter.
Mi-octobre, des pluies extrêmes ont provoqué d’importants dégâts dans le sud-est de la France. Dans certains endroits, il est tombé en 48 heures autant de pluie qu’en toute autre période de l’année. Plus d’informations sur la SRF et le Tages-Anzeiger.
Inondations en Afrique : Les inondations ont fait nettement plus de victimes en Afrique de l’Ouest. Le nombre de victimes est estimé à plus d’un millier et plus de six millions de personnes ont été touchées. La situation est particulièrement grave au Tchad et au Nigeria, où un barrage a cédé après de fortes pluies. Bien que l’Afrique soit à l’origine de moins de 4% des émissions mondiales de CO2, le continent est plus touché que la moyenne par les événements extrêmes. Pour en savoir plus, consultez l’organisation humanitaire OCHA, Reuters et la NZZ.
Les forêts n’absorbent presque plus de CO2
Cette année et l’année dernière, des incendies de forêt catastrophiques ont fait rage dans de nombreuses régions du monde.
Canada
L’année dernière, 150 000 kilomètres carrés de forêts ont brûlé au Canada, soit sept fois la moyenne historique et environ 4 % de la surface forestière du pays. 230 000 personnes ont dû être évacuées et des millions de Nord-Américains ont souffert de la pollution de l’air. Par moments, les nuages de fumée ont recouvert la métropole de New York, située à des milliers de kilomètres.
Une étude publiée dans Nature s’est penchée sur les raisons pour lesquelles les forêts canadiennes ont autant brûlé en 2023 : des températures supérieures à la moyenne, une fonte des neiges très précoce et un manque de précipitations, tous causés par le changement climatique, ont conduit aux incendies de forêt dévastateurs au Canada. Les incendies de l’Ouest ont été aggravés par des années de sécheresse, tandis que l’Est du Canada a connu une soudaine « sécheresse éclair ».
L’Amérique du Sud aussi brûle comme jamais auparavant
D’immenses étendues de terre ont été brûlées en Équateur, au Paraguay, au Pérou, au Brésil et dans d’autres pays par des incendies causés en grande partie par l’homme. Plus d’informations dans le Guardian. En Amazonie, le nombre de foyers d’incendie a augmenté de 43% de janvier à juillet 2024 par rapport à l’année précédente. Plus de 20 000 foyers d’incendie ont été enregistrés, le chiffre le plus élevé pour cette période depuis 2005. Plus sur Rainforest Foundation US, Reuters.
Selon une nouvelle étude, le changement climatique a multiplié par quatre ou cinq la probabilité des gigantesques incendies de forêt qui se sont propagés en juin 2024 dans les zones humides du Pantanal au Brésil.
Les forêts émettent d’énormes quantités de CO2
Les incendies de forêt du Canada comptent parmi les plus grandes sources de CO₂ au monde, comme le montre une étude publiée par Nature. En seulement cinq mois, les incendies de forêt ont provoqué quatre fois plus d’émissions de gaz à effet de serre que le Canada n’en a émis pendant une année entière en brûlant du charbon, du pétrole et du gaz – une quantité comparable aux émissions fossiles de l’Inde. Plus sur Klimareporter.de
Une nouvelle étude montre que l’année dernière, les forêts et les sols de la Terre ont absorbé nettement moins de CO2 que d’habitude. Jusqu’à présent, la végétation et les océans absorbaient chacun un quart de nos émissions de CO₂ et atténuaient ainsi le réchauffement. En raison des incendies de forêt canadiens et des sécheresses en Amazonie, la végétation et les sols n’ont en fin de compte presque pas absorbé de CO₂ l’année dernière. Ainsi, contrairement à la meilleure compréhension scientifique actuelle, il ne suffirait plus de réduire les émissions de CO₂ à zéro net pour stopper la hausse globale des températures. L’élimination du CO₂ deviendrait ainsi plus importante.
Les auteurs suggèrent que le réchauffement déjà provoqué pourrait créer une boucle de rétroaction dans laquelle les températures élevées et la sécheresse affaiblissent de plus en plus l’absorption de CO2 par les forêts et autres puits.
Les émissions dues aux incendies de forêt, aux parasites et aux tempêtes sont définis comme des émissions « non directement causées par l’homme » et ne figurent donc pas non plus dans les inventaires nationaux des gaz à effet de serre. Ainsi, les émissions globales sont nettement sous-estimées. En réalité, ces émissions devraient être comptabilisées, car les incendies criminels, la mauvaise gestion des forêts et le changement climatique sont directement dus à l’homme.
Nous savons que les forêts sont vitales pour notre survie et aussi pour la lutte contre le changement climatique. Elles absorbent le CO2, stockent l’humidité et assurent le refroidissement. Mais la manière exacte dont les forêts interagissent avec le climat est complexe. Une nouvelle étude publiée dans Nature le montre : les arbres abritent dans leur écorce des microbes qui éliminent le méthane de l’air. Cela augmente le bénéfice climatique des arbres de 10% en moyenne. Toutes ces nouvelles études renforcent une fois de plus le fait que la protection des forêts est l’une des mesures les plus importantes pour la protection du climat.
Remarque à ce sujet de Cyrill Brunner via LinkedIn : les puits de CO₂ naturels et l’élimination du CO₂ décrits ci-dessus ne sont pas la même chose. Pour le zéro carbone, seul ce dernier peut être pris en compte. Les puits de CO₂ naturels absorbent le CO₂ de l’atmosphère sans intervention humaine, par exemple une forêt naturelle, des prairies ou des océans. Les stratégies d’élimintation du CO2 sont des actions humaines visant à retirer le CO₂ de l’atmosphère et à le stocker de manière permanente, par exemple à travers le reboisement, la création d’humus, le charbon végétal ou la bioénergie avec CSC à partir de biomasse cultivée de manière durable, l’altération accélérée, le retrait direct de l’air et le stockage.
Nouvelles de la science du climat
La Terre franchit des limites planétaires sûres
La Terre se trouve déjà en dehors de la marge de manœuvre sûre pour l’humanité, et l’état des systèmes et processus terrestres qui soutiennent la vie se détériore rapidement. C’est ce que montre le nouveau Planetary Health Check Report 2024, réalisé sous la direction du Potsdam Institute for Climate Impact Research (PIK) par l’initiative « Planetary Boundaries Science ».
Ces limites planétaires délimitent un espace d’action sûr dans lequel l’humanité peut s’épanouir tout en maintenant la stabilité et la résilience de la planète. Six limites ont déjà été franchies (voir graphique), mettant en péril la stabilité des systèmes de la Terre. La septième limite, l’acidification des océans, sera probablement bientôt franchie. Plus les émissions de CO2 augmentent, plus elles se dissolvent dans l’eau de mer, ce qui rend les océans plus acides. Même en cas de réduction rapide des émissions, l’acidification se poursuit en raison du CO2 déjà émis. Par conséquent, un dépassement du seuil d’acidification des océans semble inévitable dans les années à venir.
Le rapport montre clairement que nous ne pouvons pas considérer les neuf limites de manière isolée – elles sont étroitement liées. L’acidification des océans, par exemple, influence le changement climatique et est elle-même influencée par le changement climatique, avec des conséquences importantes pour l’intégrité de la biosphère (car elle entraîne l’effondrement des réseaux alimentaires). Les activités humaines ne font qu’accentuer cette évolution négative et amènent le système terrestre au bord de l’instabilité.
Le Planetary Health Check sera désormais publié chaque année, avec pour objectif de trouver des solutions pour mieux protéger nos bases vitales. Plus d’informations sur PlanetaryHealthCheck.org, Phys.org et PIK.
Nouveaux rapports de l’AIE et de l’IRENA
Le dernier World Energy Outlook 2024 de l’AIE montre que l’énergie solaire dépassera l’énergie nucléaire, l’énergie éolienne, l’énergie hydraulique, le gaz et finalement le charbon, pour devenir la plus grande source individuelle d’électricité au monde d’ici 2033. Ce boom de l’énergie solaire contribuera à inaugurer « l’ère de l’électricité » et à reléguer les combustibles fossiles au second plan, selon l’agence. D’ici 2030, le monde est en passe d’ajouter autant de nouvelles capacités d’électricité renouvelable que ce dont disposent actuellement la Chine, l’UE, l’Inde et les États-Unis réunis. En conséquence, les émissions mondiales de CO2 atteindront bientôt un pic, probablement dès 2025.
L’IRENA a publié un rapport complet sur le coût de l’électricité renouvelable sur toute sa durée de vie. Parce qu’elles sont les moins chères, les énergies solaire et éolienne représentaient en 2023 la plus grande part de la nouvelle capacité électrique installée, soit 95%. On constate également une baisse drastique des coûts des nouvelles capacités de stockage.
Malgré ces changements positifs, le monde est en passe de réduire les émissions de CO2 de seulement 4% d’ici 2030 par rapport aux niveaux de 2023, ce qui entraînera un réchauffement de 2,4°C par rapport aux températures préindustrielles.
Quels instruments politiques créent des points de bascule positifs ?
Des économistes et des spécialistes de l’environnement ont utilisé des données provenant de 70 pays pour déterminer les instruments politiques les plus à même de promouvoir la décarbonisation. Dans leur étude, ils soulignent que la réglementation est la plus efficace pour déclencher des « points de bascule positifs ». Une fois que certains secteurs industriels sont obligés de se décarboniser, un effet en cascade se produit : l’utilisation accrue d’électricité renouvelable ou de stockage d’énergie dans un secteur stimule l’innovation et réduit les coûts de ces technologies, ce qui permet des changements plus rapides dans d’autres secteurs. Les auteurs soulignent donc que la réglementation fonctionne mieux que les taxes ou les subventions. Plus d’informations dans le Guardian.
Une autre étude publiée dans Science souligne l’importance de ces instruments de tarification. Les chercheurs ont évalué 1500 mesures climatiques mises en œuvre au cours des 25 dernières années et ont identifié les 63 mesures les plus efficaces. L’intégration d’incitations fiscales et de prix est essentielle pour obtenir une combinaison de politiques bien conçue. En Suède, par exemple, dans le secteur du bâtiment, une combinaison de tarification du CO2 et de programmes de soutien à la rénovation a permis de réduire les émissions avec succès. Les deux études s’accordent à dire qu’une bonne combinaison d’instruments politiques est nécessaire. Par exemple, la fermeture des centrales à charbon au Royaume-Uni a été couronnée de succès parce qu’elle était accompagnée d’un prix minimum pour le CO2, tandis qu’en Norvège, l’interdiction des véhicules à moteur à combustion a été la plus efficace lorsqu’elle a été combinée avec des subventions qui ont rendu les voitures électriques moins chères. Plus d’informations sur klimareporter.de.
Une autre étude montre que lorsque les véhicules très polluants sont bannis des villes, les enfants se rendent plus souvent à l’école à vélo ou à pied. En 2019, Londres a introduit une « zone à très faibles émissions » dans le centre-ville. Après l’entrée en vigueur des restrictions, deux enfants sur cinq ont changé leur façon de se rendre à l’école. La zone a depuis été étendue à l’ensemble de la ville. Plus sur Grist.
Actif contre le désespoir
Pour une meilleure communication sur le climat
La charte de Graz veut nous aider à mieux communiquer sur la crise climatique. Elle est conçue comme une orientation pour les responsables de la protection du climat dans les communes, tout comme pour les spécialistes de la recherche climatique, les expertes en transport ou les installateurs qui parlent à leurs clients de nouveaux systèmes de chauffage. « La nouvelle communication climatique active les gens et les motive à agir. L’objectif est d’obtenir des changements tant au niveau de la société qu’au niveau personnel », peut-on lire dans la charte. Plus d’informations sur Klimafakten.de.
Agir contre l’augmentation du trafic
Contribuer activement à la protection du climat permet de lutter contre le désespoir. Le vote sur l’extension du réseau autoroutier sera serré : chaque voix contre est importante. Le vote aura lieu le 24 novembre. Voici encore une fois les arguments les plus importants pour convaincre votre famille et vos amis :
Plus de routes = plus de trafic
Toute route supplémentaire entraîne une augmentation du trafic, ce que confirment d’innombrables études et expériences dans le monde entier. Les projets d’autoroutes prévus aboutissent tous dans des villes. Le trafic automobile supplémentaire n’a pas sa place. L’élargissement des voies de circulation sur l’autoroute et le trafic supplémentaire qui en résultera ne feront qu’accentuer cet effet d’entonnoir.
Coûte trop cher
Les projets sur lesquels nous votons actuellement coûtent à eux seuls 5,3 milliards de francs. Les coûts d’entretien ne sont pas encore inclus. Au total, le Conseil fédéral prévoit de dépenser 35 milliards de francs pour l’extension des autoroutes. En revanche, des économies sont prévues dans les transports publics. Ainsi, le Conseil fédéral supprime 77 millions de francs de subventions pour les trains de nuit ainsi que pour les bus et les bateaux électriques. Depuis 1990, les prix des transports publics ont doublé, alors que ceux de la voiture n’ont guère augmenté.
En contradiction avec l’objectif climatique
La Suisse veut réduire ses émissions de transport de 100% d’ici 2050. Le développement des autoroutes est en contradiction avec ces objectifs. Dans son rapport sur l’extension des autoroutes, le Conseil fédéral admet en effet sans ambages que cela entraînera une augmentation des émissions de CO₂.
Sur Umverkehr, tu trouveras encore plus d’arguments contre le développement des autoroutes.
Éditorial
Dans ce numéro, nous expliquons comment la Confédération met un frein à la protection du climat et ce qui se passe après le oui à la loi sur l’électricité. Nous offrons un aperçu factuel de l’initiative pour la biodiversité et rapportons des chiffres trompeurs sur l’utilité des nouvelles autoroutes.
Les pays riches continuent d’approuver de nombreuses nouvelles licences d’extraction de pétrole et de gaz. Des tribunaux secrets interviennent de plus en plus souvent dans la politique climatique des pays et imposent le paiement d’indemnités aux entreprises fossiles. La Cour suprême des États-Unis annule les lois environnementales, ce dont un nouveau gouvernement démocrate sous Harris/Walz pourrait également faire les frais, bien qu’il souhaite s’engager résolument pour une meilleure protection du climat.
Les effets de la crise climatique se font sentir de plus en plus violemment dans le monde entier. Nous parlons de l’été caniculaire meurtrier, des nombreux incendies de forêt et des inondations. Nous pourrions, à chaque fois, remplir tout le journal climatique avec des nouvelles sur des événements extrêmes et des « catastrophes naturelles ». Il est important que nous prenions conscience de l’impact énorme que notre société, notre économie et notre mode de vie ont sur nous. Encore et encore. Mais à trop insister, on risque de se sentir impuissant. Nous essayons de trouver un juste milieu dans le journal du climat et terminons, comme toujours, par des conseils pour lutter contre le désespoir.
Suisse
Intempéries dévastatrices et influence du changement climatique
De fortes précipitations en mai et début juin ont provoqué des inondations du lac des Quatre-Cantons au lac de Constance ainsi que le long du Rhin. Des précipitations particulièrement violentes ont touché le Misox le 21 juin et ont déclenché une lave torrentielle (plus d’informations à ce sujet dans le Tages-Anzeiger et la NZZ). Des inondations ont également eu lieu en Valais, où les fortes pluies et la fonte des neiges ont contribué à ce phénomène ; juste avant, les températures étaient estivales (plus d’informations sur MétéoSuisse et sur SRF). Fin juin, des précipitations extrêmes ont touché le Val Maggia (plus d’informations à ce sujet dans le Blick et la NZZ) et à nouveau le Valais (NZZ et Blick).
Au moins dix personnes ont perdu la vie lors des intempéries de juin. Des maisons et des routes ont été détruites et les dégâts se sont élevés à 200 millions de francs. Les articles de presse qui ont suivi se sont d’abord focalisés sur la question de savoir si certaines vallées alpines devaient être abandonnées face aux dangers et quelles autres mesures de protection étaient nécessaires, dans le Tages-Anzeiger (paywall), la Sonntags-Zeitung (paywall), ici et ici dans la NZZ, sur SRF et dans l‘hebdomadaire.
La question de l’influence du changement climatique a également suscité des discussions. Ce qui est frappant : l’augmentation des précipitations extrêmes et des glissements de terrain coïncide avec les scénarios climatiques de MétéoSuisse. Selon les prévisions établies à la demande de la Confédération, les fortes précipitations seront plus fréquentes et plus intenses en raison du réchauffement climatique. L’une des principales raisons en est que l’air plus chaud peut absorber davantage d’eau. La NZZ rapporte une étude selon laquelle, depuis 1981, les quantités de pluie estivales mesurées en l’espace de dix minutes, et de trois heures, sont devenues nettement plus intenses. Sur la SRF, dans la Südostschweiz (paywall) et dans le Blick, des spécialistes mettent en perspective les événements.
Dans l’Aargauer Zeitung, on peut lire pourquoi, face aux dangers imminents, il faut à la fois protéger davantage le climat et prendre des mesures supplémentaires pour se protéger des intempéries, et pourquoi il ne faut pas opposer ces deux tâches. Le journaliste de la Republik Elia Blülle explique pourquoi il est crucial de limiter rapidement le réchauffement climatique mondial en utilisant le concept de « limits to adaptation ». On entend par là les limites technologiques, écologiques et économiques à partir desquelles les mesures d’adaptation ne suffisent plus à maîtriser les effets négatifs du réchauffement climatique. Ces limites peuvent être atteintes dans l’espace alpin.
La chaleur – un risque sous-estimé
La NZZ rappelle que la chaleur représente un danger bien plus grand que les laves torrentielles. Elle fait référence à une étude selon laquelle, en cas de réchauffement de la planète de 2 °C, plus de 1200 personnes en moyenne meurent chaque année en Suisse à cause de la chaleur, soit quatre fois plus qu’en 1990. Dans la NZZ am Sonntag, on peut lire pourquoi la protection contre les vagues de chaleur doit être améliorée en Suisse afin que le nombre de décès dus à la chaleur n’augmente pas. Il faut agir en premier lieu dans les villes. Il s’agit de désimperméabiliser les sols, de créer des espaces verts supplémentaires et de créer des espaces rafraîchis pour tous. Le blog de l’avenir de l’ETH Zurich explique comment les villes peuvent être refroidies plus efficacement.
L’indicateur de Kimain « Décès dus à la chaleur » publié par l’Office fédéral de l’environnement montre combien de personnes meurent en Suisse des suites de la chaleur. Durant l’été 2023, 542 décès ont été attribués à la chaleur. Environ 95% d’entre eux concernaient des personnes âgées de 75 ans et plus, et près de deux tiers étaient des femmes. A titre de comparaison, plus de 47’000 personnes sont décédées en Europe en 2023 des suites de températures élevées, comme le montre une étude publiée dans « Nature Medicine ».
L’Institut Tropical et de Santé Publique Suisse (Swiss TPH) a analysé plus en détail l’été caniculaire 2023. Il en ressort que les taux de mortalité liés à la chaleur ont été les plus élevés au Tessin (13 décès pour 100’000 habitants). Dans les cantons du Valais, de Genève, de Vaud et de Bâle-Ville, ce chiffre était de 9 à 10 cas pour 100’000 habitants. Selon l’étude, dans les phases modérément chaudes, la mortalité liée à la chaleur n’augmente pas parallèlement à la température, mais moins fortement. Les chercheurs expliquent ce phénomène par des changements de comportement et des adaptations architecturales. En revanche, lors des journées chaudes et très chaudes, la mortalité a augmenté sur la période analysée.
Dans une autre étude publiée dans la revue Environmental Research, le Swiss TPH a examiné pour huit villes suisses comment les îlots de chaleur, les espaces verts et les facteurs socio-économiques influencent la mortalité. L’étude s’est basée sur les données individuelles de mortalité pour les mois chauds des années 2003 à 2016, en tenant compte pour chaque décès de l’endroit exact et donc aussi de la chaleur, de la verdure et de la prospérité de l’environnement. L’un des principaux résultats est le suivant : lors d’une journée de canicule avec une température maximale de 35 °C, 26% de personnes en plus meurent dans les îlots de chaleur urbains de Suisse que dans les autres zones urbaines. Les personnes âgées sont particulièrement menacées. Parallèlement, l’étude montre que les jeunes courent également un risque plus élevé s’ils vivent dans des quartiers moins privilégiés ; cela peut être lié à des bâtiments d’habitation mal isolés ou à une forte exposition à la chaleur pendant le travail. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger (paywall).
La Confédération freine la protection du climat
En juin 2023, les électeurs ont accepté la loi sur la protection du climat. Celle-ci stipule également que la Confédération et les cantons doivent jouer un rôle de modèle en matière de protection du climat et atteindre la neutralité climatique dès 2040, soit dix ans plus tôt que la Suisse. Pour la mise en œuvre, le département du conseiller fédéral Albert Rösti se laisse beaucoup de temps. L’ordonnance qui règle les détails ne sera mise en consultation qu’au milieu de l’année 2025, a décidé le Conseil fédéral en août. L’association Protection du climat Suisse critique cette attitude hésitante et a lancé une pétition pour que les dispositions puissent entrer en vigueur dès le début de l’année 2025. Dans le Tages-Anzeiger (paywall), on peut lire que d’autres départements retardent également la mise en œuvre, pour des raisons de coûts ou parce que les directives sont trop strictes.
Après l’arrêt sur le climat rendu par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) à l’encontre de la Suisse, la question de savoir si la politique peut faire plus pour atteindre les objectifs climatiques a fait l’objet d’un débat controversé. Et dans quelle mesure le peuple, qui a le dernier mot, empêche les mesures ambitieuses (par exemple en refusant la loi sur le CO2 en 2021). Une analyse du WWF montre aujourd’hui que le Conseil fédéral est loin d’avoir épuisé sa marge de manœuvre en matière de protection du climat. L’organisation environnementale demande que des améliorations soient apportées : à la loi sur la protection du climat (exigences posées au secteur financier et rôle de modèle de la Confédération et des cantons), à la loi sur le CO2 (montants maximaux légaux pour les taxes à affectation obligatoire, notamment pour l’obligation de compensation pour les importateurs de carburant), à la loi sur l’électricité (améliorer la sécurité de planification, par exemple pour la construction d’installations solaires sur les bâtiments), à la loi sur la protection de l’environnement (introduire des dispositions pour réduire l’empreinte dans le domaine du bâtiment lors de nouvelles constructions et de transformations). Pour que la Suisse puisse atteindre les objectifs de la loi sur la protection du climat et respecter ses engagements internationaux, des mesures supplémentaires de politique climatique sont toutefois nécessaires, selon le WWF. Le Conseil fédéral, le Parlement, les cantons et les communes sont ici appelés à agir.
Dans le Tages-Anzeiger (paywall), Helen Keller, ancienne juge à la Cour européenne des droits de l’homme, et le conseiller aux Etats socialiste Daniel Jositsch discutent de la décision de Strasbourg sur le climat. Elle la trouve « révolutionnaire », lui « erronée ». Treihauspodcast.ch analyse la décision du Parlement de ne pas suivre le jugement.
Qui finance les émissions négatives ? Le Tages-Anzeiger (paywall) se penche sur cette question. Au vu des émissions élevées de CO2, les spécialistes s’accordent à dire qu’il faut extraire de l’atmosphère de grandes quantités de gaz à effet de serre afin de limiter le réchauffement de la planète à 1,5 °C. On parle beaucoup des possibilités techniques (p. ex. l’entreprise suisse Climeworks). On oublie que les conditions financières doivent également être créées pour cela. Le cabinet de conseil Boston Consulting Group a calculé combien cela coûterait : A partir de 2050, cela représenterait chaque année 0,5 à 1 % de la performance économique. Pour la Suisse, cela représenterait 5 à 10 milliards de francs. Le WWF propose comme solution un fonds climatique auquel les émetteurs de CO2 contribueraient. La manière de loin la plus avantageuse de capter le CO2 de l’air consiste à protéger les forêts existantes et à reboiser.
A quel point la Confédération prend-elle au sérieux ses engagements internationaux en matière de protection du climat ? Pas trop. Lors de la conférence sur le climat de 2021 à Glasgow, la Suisse avait promis de stopper les aides publiques aux projets d’énergie fossile à l’étranger. Or, une enquête de la SRF montre que l’Assurance suisse contre les risques à l’exportation (SERV) soutient une nouvelle centrale à gaz au Turkménistan, pays au régime autoritaire. Pour permettre le commerce du gaz naturel malgré la promesse, la SERV a adapté ses directives. Désormais, elle peut également assurer des projets d’énergie fossile si ceux-ci servent les intérêts de la Suisse en matière de politique économique, étrangère, commerciale et de développement.
Avec l’ordonnance relative à la loi sur le CO2, le Conseil fédéral veut fixer les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre des différents secteurs jusqu’en 2030. Il a ouvert la procédure de consultation à ce sujet fin juin. En mars, le Parlement avait approuvé la loi sur le CO2 ; elle n’est toutefois pas suffisante pour que la Suisse puisse respecter ses objectifs climatiques (voir le journal du climat d’avril). L’accord de Paris sur le climat fixe un objectif de réduction de 50% par rapport à 1990. Le secteur du bâtiment doit réduire les émissions de CO2 de 50% par rapport à 1990, l’industrie de 35%, les transports et l’agriculture de 25%.
La statistique CO2 publiée début juillet montre à quel point la Suisse est éloignée de ces objectifs. En 2023, les émissions de CO2 dues au mazout et au gaz ont diminué de 8,8% par rapport à l’année précédente (l’influence des conditions météorologiques est prise en compte). Selon l’Office fédéral de l’environnement, cette réduction est surtout due à l’amélioration de l’efficacité énergétique des bâtiments et à l’utilisation accrue d’énergies renouvelables pour le chauffage. En revanche, les émissions de CO2 dues aux carburants sont restées identiques à celles de l’année précédente. Le recul par rapport à 1990 n’est que de 5,2%. Le fait que les importateurs de voitures aient atteint pour la première fois les valeurs cibles de CO2, selon l‘Office fédéral de l’énergie, n’y change rien. Plus d’informations sur SRF.
Le WWF souligne que la Suisse n’a pu réduire ses émissions de CO2 que de 27% au cours des 33 années qui ont suivi 1990. Pour réduire de moitié les émissions d’ici 2030, comme convenu au niveau international, la Suisse devrait réduire les émissions de gaz à effet de serre de 23% supplémentaires au cours des sept années restantes. La politique climatique actuelle, très timide, ne permet pas d’atteindre cet objectif. On estime ainsi que la Suisse devra acheter à l’étranger des certificats pour 50 millions de tonnes de CO2 d’ici 2030.
Même si le secteur du bâtiment atteint les objectifs de réduction, de gros efforts sont encore nécessaires pour rendre le parc immobilier climatiquement neutre d’ici 2050. Environ deux tiers de tous les immeubles collectifs et 60% des maisons individuelles utilisées comme résidences principales ne sont pas encore chauffés de manière durable, révèle la société de conseil Wüest Partner dans une étude. Pour assainir le million de maisons d’habitation d’ici 2050, des investissements de 52 à 228 milliards de francs sont nécessaires (remplacement pur et simple du chauffage ou assainissement énergétique complet). L’étude montre que les rénovations dans les immeubles locatifs entraînent des économies de coûts pour les locataires. Plus d’informations sur SRF et la NZZ (paywall).
Il y a encore un domaine dans lequel il faut agir pour protéger le climat : les bateaux de croisière. Bien que la Suisse soit un pays sans accès à la mer, plusieurs entreprises dirigent leur flotte de bateaux depuis notre pays. Aucun autre pays d’Europe ne contrôle autant de bateaux de croisière, comme le montre une enquête de Fairunterwegs, une ONG pour le tourisme durable. Ceux-ci émettent des quantités considérables de CO2. La Suisse ne voit pas la nécessité d’agir. Fairunterwegs espère des règles sur la responsabilité des entreprises et que la Confédération reprenne les directives de l’UE. Plus d’informations dans le Blick.
Quelles suites après le oui à la loi sur l’électricité ?
Le 9 juin, les citoyens ont accepté la loi sur l’électricité avec 68,7% des voix. Le projet, qui fixe des objectifs contraignants de développement des énergies renouvelables d’ici 2035, a été largement approuvé par l’ensemble du spectre politique, à l’exception du camp de l’UDC. C’est ce que montre l’analyse de la votation effectuée par l’institut de recherche gfs Berne.
Les personnes qui accordent plus d’importance à la protection de l’environnement qu’à la prospérité économique et qui rejettent l’énergie nucléaire ont été particulièrement nombreuses à voter oui. Ceux qui ont voté oui ont notamment justifié leur vote par le fait que la nouvelle loi permettrait de réduire la dépendance vis-à-vis de l’étranger. Ceux qui ont rejeté la loi craignent que les paysages ne soient défigurés et que les droits démocratiques de participation ne soient réduits. Dès le dimanche de la votation, les débats politiques sur la mise en œuvre ont commencé (voir le journal du climat de juin).
Il semble que les grands projets hydroélectriques ne se réaliseront sans doute pas aussi rapidement que certains l’espéraient avec l’adoption de la loi sur l’électricité. Deux projets en particulier continuent de susciter l’opposition : les barrages prévus sur le Trift dans l’Oberland bernois et près du glacier du Gorner en Valais. Plus d’informations à ce sujet dans le Tages-Anzeiger (paywall) et la NZZ. En revanche, le rehaussement du barrage du Grimsel se rapproche. La Fédération de pêche, le Club alpin suisse, la Fondation pour la protection et l’aménagement du paysage, Pro Natura, le WWF et Aqua Viva ont signé un accord avec les Forces motrices de l’Oberhasli (KWO). Selon cet accord, ils acceptent le rehaussement de 23 mètres des murs de barrage près de l’hospice du Grimsel. En contrepartie, des tronçons de rivière seront revitalisés, des sites secs seront revalorisés et d’autres mesures de remplacement seront prises. Il reste à savoir si d’autres organisations environnementales vont s’opposer au projet par des moyens juridiques, peut-on lire dans le Thuner Tagblatt.
Les lobbyistes du nucléaire espèrent que le Conseil fédéral lèvera l’interdiction de construire de nouvelles centrales nucléaires. Selon l’Aargauer Zeitung (paywall), le Conseil fédéral voulait déjà prendre cette décision à la mi-août – comme contre-projet indirect à l’initiative Blackout (selon laquelle toutes les énergies respectueuses du climat doivent être autorisées à l’avenir). Mais la proposition correspondante a été reportée, comme le rapporte le Tages-Anzeiger. Le conseiller fédéral Albert Rösti doit fournir des informations supplémentaires, notamment sur la question de savoir s’il est admissible de lever l’interdiction de construire de nouveaux bâtiments, décidée par le peuple en 2017.
La mise en œuvre de la loi sur l’électricité suscite également des discussions. Avant même la votation, le Conseil fédéral avait mis en consultation l’ordonnance relative à la loi sur l’électricité. La baisse des rétributions minimales pour les installations solaires qui y est proposée a suscité l’inquiétude du secteur. L’Office fédéral de l’énergie (OFEN) justifie cette adaptation par le fait que les installations solaires sont rentables grâce à la consommation propre. Swissolar critique le fait que les hypothèses de l’OFEN concernant la consommation propre sont beaucoup trop élevées. L’association professionnelle exige des rétributions minimales qui restent identiques pendant 25 ans. Cela permettrait de garantir une exploitation rentable de toutes les installations solaires sur toute leur durée, même si la consommation propre est faible. La Fondation suisse de l’énergie (SES) déplore également ce faible niveau des rétributions minimales. De plus, il manque des incitations financières et des mesures pour changer les comportements dans le domaine de l’efficacité énergétique. Enfin, la SES exige des améliorations en matière de protection de la biodiversité. Une décision du Conseil fédéral est attendue d’ici l’automne. Plus d’informations dans le Thuner Tagblatt.
Plus de solaire et nouvelles critiques sur les centrales de réserve
L’effet modérateur de la pandémie de Covid sur la demande d’énergie est terminé. En 2023, la consommation finale d’énergie en Suisse a augmenté de 0,3% par rapport à l’année précédente. La raison principale de cette hausse est la nette augmentation de 19% du trafic aérien. Selon l’Office fédéral de l’énergie (OFEN), la consommation de diesel et d’essence a également augmenté, de 0,3%. Parallèlement, la consommation de gaz naturel a diminué de 6% et celle de mazout de 3%. En contrepartie, davantage de sources d’énergie renouvelables ont été utilisées pour le chauffage. Le bois-énergie, la chaleur ambiante, le chauffage à distance et le chauffage solaire représentent désormais 11,8% de la consommation totale d’énergie. Plus d’informations sur SRF.
La production d’électricité solaire a connu une forte croissance. Selon la « Statistique de l’énergie solaire » de l’OFEN, le marché a connu une croissance de 51% en 2023. Il s’agit de la quatrième année consécutive de croissance du marché de plus de 40%. Une puissance photovoltaïque supplémentaire de 1,6 gigawatt a été installée. Au total, des panneaux solaires d’une puissance de 6,4 gigawatts étaient installés fin 2023, couvrant ainsi plus de 8% des besoins en électricité de la Suisse au cours de l’année. Pour respecter les prescriptions de la nouvelle loi sur l’électricité, l’électricité solaire devra être presque multipliée par cinq au cours des dix prochaines années. Pour en savoir plus, consultez Swissolar.
A l’exception de petits projets sur des barrages, presque tous les projets solaires alpins sont toujours en phase de planification. Deux projets disposent désormais d’une autorisation juridiquement valable, SedrunSolar et Vorab, tous deux dans les Grisons ; au-dessus de Sedrun, le début des travaux a eu lieu en août (Tages-Anzeiger). Selon la liste de l’Association des entreprises électriques suisses, 44 projets solaires alpins sont actuellement en cours de planification (dernière mise à jour 27.06.2024). Une demande de permis de construire a été déposée pour dix des installations prévues, comme le montre un aperçu de l’Office fédéral de l’énergie.
Pro Natura, la Fondation pour la protection et l’aménagement du paysage et Mountain Wilderness ont déposé une opposition contre le plus grand parc solaire prévu dans les Alpes, celui de Grengiols en Valais. Les associations environnementales critiquent le fait que le projet soit prévu dans le parc paysager du Binntal. D’autant plus que le site est un hotspot pour les oiseaux. D’ici fin 2025, les installations devront injecter une partie de l’électricité prévue dans le réseau pour que la Confédération participe aux coûts. Le temps étant compté, la Confédération étudie la possibilité de prolonger le financement par voie d’ordonnance. Plus d’informations à ce sujet dans le Tages-Anzeiger.
La loi sur l’électricité ouvre la voie au développement des centrales solaires, hydroélectriques et éoliennes. Mais pour que l’électricité parvienne aux consommateurs, il faut des lignes électriques supplémentaires. Le Conseil fédéral vient d’indiquer comment il entend accélérer l’extension des réseaux électriques. La procédure de consultation relative à la révision de la loi sur l’électricité est ouverte jusqu’en octobre. Le projet prévoit de simplifier les procédures d’autorisation pour la transformation et l’extension des réseaux électriques. L’intérêt à la réalisation de nouvelles lignes de transport doit en principe primer sur les autres intérêts nationaux. Et à l’avenir, les lignes de transport devront en principe être réalisées sous forme de lignes aériennes. La construction de lignes enterrées ne doit plus être examinée que si une ligne aérienne entraîne un rayonnement non ionisant excessif et porte atteinte à des objets de protection de la nature et du patrimoine d’importance nationale. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger (paywall).
Dans une étude, l’Association des entreprises électriques suisses (AES) met en garde contre les coûts d’extension du réseau électrique. Ce sont surtout les installations solaires décentralisées qui nécessiteraient des investissements supplémentaires. La construction de grandes centrales électriques serait moins coûteuse. L’association économique swisscleantech critique le fait que l’étude de l’AES se base sur des concepts dépassés d’extension du réseau, selon lesquels chaque kilowattheure produit doit être transporté dans le réseau. A l’avenir, le réseau électrique doit avant tout être orienté vers la demande. L’électricité qui n’est pas demandée ne doit pas être acheminée vers le réseau. De plus, grâce à des batteries de stockage moins chères et à l’e-mobilité, l’autoconsommation va augmenter et continuer à décharger le réseau. Plus d’informations sur srf.ch.
Trop chères, erronées du point de vue de la politique climatique, sans base légale : les centrales de réserve avec lesquelles la Confédération veut garantir l’approvisionnement en électricité font l’objet de nombreuses critiques. Mi-juin, un nouveau revers a été essuyé : l’Office fédéral de l’énergie a interrompu l’appel d’offres pour de nouvelles centrales de réserve à partir de 2026, car les coûts des offres étaient trop élevés. D’ici là, des centrales électriques à Birr et en Suisse romande seront prêtes à mettre en marche les générateurs à gaz ou à pétrole en cas de pénurie. L’OFEN veut désormais négocier directement avec les entreprises d’électricité. Dans la NZZ am Sonntag, on peut lire combien d’argent les entreprises d’électricité voulaient obtenir de la Confédération : Pour une puissance de 590 mégawatts (soit environ un tiers de la puissance des nouveaux modules solaires installés en 2023), 2,6 milliards de francs ont été demandés. Les consommateurs devraient payer ces coûts en prélevant une taxe sur chaque kilowattheure d’électricité consommé. A cela s’ajoute le coût des combustibles lorsque les installations sont en service.
L’industrie critique également les plans de l’office fédéral. L’association économique Swissmem a proposé au Conseil fédéral des mesures visant à réduire la demande en électricité en cas de pénurie. Mais celui-ci n’a pas donné suite, comme on peut le lire dans la NZZ. Swissmem s’engage en faveur de ce que l’on appelle une réserve de consommation. Les gros consommateurs s’engageraient à réduire leur demande ou à arrêter complètement leur production en cas d’urgence. En contrepartie, ils recevraient un dédommagement de la part de la Confédération.
La consommation de viande continue d’être encouragée
En fait, la Confédération souhaite que l’on consomme moins de viande en Suisse. Les raisons sont nombreuses : effets négatifs à long terme sur la santé humaine, émission de grandes quantités de gaz à effet de serre et atteinte à la biodiversité. Pourtant, la Confédération verse chaque année 5,4 millions de francs suisses pour la promotion des ventes de viande. Les dépenses de l’État pour la promotion des ventes de viande, de lait et d’œufs s’élèvent à 34-38 millions de francs par an. Et cela ne doit pas changer, selon la volonté du Conseil fédéral. Dans un rapport, il avait fait étudier l’impact de différents instruments de subvention. En ce qui concerne la promotion des ventes de produits animaliers, il se contente de dire qu’il n’est « pas possible de quantifier l’effet ». Le Conseil fédéral n’est pas seul dans sa position – le Conseil national et le Conseil des Etats avaient récemment décidé de poursuivre la publicité étatique pour la viande. Le Tages-Anzeiger (paywall) donne la parole aux critiques de cette décision.
Les grands distributeurs font encore plus de promotion pour les produits animaux. Leurs dépenses publicitaires sont estimées à plusieurs centaines de millions de francs par an. En Suisse, près de la moitié de la viande est vendue par le biais de réductions, peut-on lire dans le Tages-Anzeiger (paywall). En raison de cette pratique, Migros et Coop ratent leurs objectifs climatiques, montre Greenpeace dans une étude. Les deux grands distributeurs souhaitent atteindre la neutralité climatique d’ici 2050. L’organisation environnementale a calculé que 30% de l’empreinte climatique totale de la Suisse (marchandises importées comprises) passent par le comptoir des deux entreprises. Chez Coop, les produits animaux représentent 47% des émissions totales de gaz à effet de serre, chez Migros plus d’un tiers. Greenpeace souligne qu’il n’y a pas d’autre solution que de réduire l’assortiment de produits d’origine animale. Plus d’informations sur Le Temps (paywall).
Franziska Herren fait une avancée politique pour limiter la consommation d’aliments d’origine animale. Mi-août, elle a déposé les signatures nécessaires pour l’initiative sur l’alimentation. La Bernoise avait lancé l’initiative sur l’eau potable, qui avait été rejetée par le peuple en 2021. La nouvelle initiative veut obliger la Confédération à prendre des mesures qui encouragent un mode d’alimentation basé sur des aliments végétaux. Parallèlement, la dépendance vis-à-vis de l’étranger doit être réduite et l’eau potable doit être garantie. Plus d’informations dans la NZZ (paywall), le Tages-Anzeiger (paywall) et le Blick.
Biodiversité : les faits concernant l’initiative
Le 22 septembre, nous voterons sur l’initiative pour la biodiversité. Déposée il y a quatre ans par des organisations de protection de la nature et de l’environnement, elle vise à mieux ancrer la protection de nos bases vitales dans la Constitution. La Confédération et les cantons doivent être obligés de mettre à disposition davantage de surfaces et de moyens financiers à cet effet.
Le Conseil fédéral avait reconnu les préoccupations importantes des initiants et avait décidé d’élaborer un contre-projet indirect. Il voulait créer suffisamment de surfaces protégées pour garantir l’espace vital des animaux et des plantes. Mais le Parlement a rejeté le contre-projet : Le Conseil des États n’était pas prêt à un compromis et s’est opposé à toute réglementation supplémentaire. Le Tages-Anzeiger (paywall) fournit de plus amples informations sur le projet dans un article de synthèse. Si l’initiative avait été votée début août, elle aurait été acceptée de justesse, comme le montre un sondage Tamedia. 51% des personnes interrogées ont indiqué qu’elles voteraient oui. 7% sont encore indécis. Un sondage de la SRF parvient au même résultat.
La Suisse est l’un des derniers pays d’Europe en matière de protection de la biodiversité. Un tiers des espèces étudiées sont menacées ou déjà éteintes. La moitié des habitats naturels sont menacés – les cours d’eau, les marais et les surfaces agricoles sont particulièrement sous pression. Et la Suisse n’a placé qu’une petite surface sous protection ; elle se trouve en bas du classement européen, avec la Turquie et la Bosnie-Herzégovine (plus d’informations sur BirdLife Suisse). L’hebdomadaire se demande pourquoi même de nombreuses personnes de gauche ne s’intéressent pas à la diversité biologique.
La préservation et la promotion de la biodiversité sont également importantes dans la lutte contre le changement climatique. Pourquoi ? Les deux crises sont liées. L’agriculture intensive et la déforestation ne menacent pas seulement la biodiversité, mais libèrent également des gaz à effet de serre. Inversement, le changement climatique accélère la perte de biodiversité. L’Académie suisse des sciences naturelles (SCNAT) a rédigé un rapport à ce sujet.
Dans le journal en ligne infosperber.ch, deux chercheuses de l’Université de Zurich expliquent quelles adaptations fondamentales sont nécessaires pour maîtriser simultanément la crise du climat et celle de la biodiversité. Selon elles, les paradigmes du système économique actuel doivent être repensés. On peut lire sur le site de la Fondation suisse de l’énergie pourquoi la promotion de la biodiversité ne compromet pas le développement des énergies renouvelables.
L’Union suisse des paysans rejette l’initiative sur la biodiversité, la jugeant « trop extrême et inutile ». Elle la combat entre autres par une étude commandée. On y lit : « Les augmentations et les diminutions s’équilibrent pour presque tous les groupes d’organismes considérés, respectivement on constate des augmentations plus ou moins nettes ». Dans une interview accordée à la NZZ, l’auteur de l’étude a déclaré : « Il existe bien sûr encore des zones problématiques, mais le bilan global est positif ».
Les scientifiques critiquent vivement l’étude. Dans le Tages-Anzeiger (paywall), un professeur d’écosystèmes et d’évolution du paysage de l’EPFZ affirme clairement : « Tous les indicateurs montrent que la biodiversité continue de diminuer en Suisse ». Plus de détails dans le Blick et l’Aargauer Zeitung (paywall). Ce n’est pas la première publication douteuse sur la biodiversité en Suisse. En mai déjà, le magazine en ligne Republik a rapporté que l’Office fédéral de l’environnement (OFEV) avait enjolivé un rapport sur l’état de la biodiversité.
L’Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage (WSL), le centre de compétences pour la biodiversité terrestre en Suisse, a rassemblé les connaissances avérées sur l’état de la biodiversité ainsi que sur les mesures et leur succès. En voici les principaux faits :
- En Suisse, la biodiversité a subi les plus grandes pertes à partir du milieu du 19e siècle jusque dans les années 1970 et 1980.
- La plupart des séries d’observations systématiques de la biodiversité ont commencé il y a 20 à 30 ans, à une époque où l’on enregistrait déjà des pertes importantes. Durant cette période, des évolutions positives et négatives ont été observées pour différents groupes d’espèces et habitats.
- Une augmentation a surtout lieu chez les espèces généralistes. Ce sont des espèces qui sont soit compétitives, soit très flexibles lorsque l’habitat change. En revanche, les espèces spécialistes, qui sont moins flexibles face aux changements et qui dépendent souvent d’habitats très spécifiques, sont en recul.
- Pour enrayer la disparition des espèces, il faut des surfaces supplémentaires de grande qualité et garanties à long terme. Les surfaces doivent également être mieux reliées entre elles afin de permettre un échange entre les populations.
Chiffres trompeurs sur les avantages des nouvelles autoroutes
La votation sur la construction de nouvelles autoroutes aura lieu le 24 novembre. Les organisations environnementales avaient lancé un référendum contre la décision du Parlement de poursuivre l’extension du réseau des routes nationales pour 5,3 milliards de francs. Comme le montre une enquête de la NZZ am Sonntag (paywall), l’administration fédérale, qui soutient le projet, argumente avec des chiffres douteux. L’utilité économique de l’extension – principalement une réduction des heures d’embouteillage et des temps de trajet plus courts – est chiffrée à 184 millions de francs par an. Mais ce calcul s’appuie sur une ancienne formule. Cette méthode est actuellement en cours de révision et devrait entrer en vigueur dans six à douze mois ; les premiers cantons utilisent déjà la nouvelle base. Selon l’Association Transports et Environnement, cette nouvelle formule réduit l’utilité déclarée à 65 millions de francs, soit environ un tiers du montant actuellement déclaré par la Confédération. La démarche de la Confédération suscite des critiques. Il est « problématique du point de vue de la politique démocratique que la population vote en novembre sur une extension autoroutière pour laquelle une utilité économique est démontrée alors qu’elle ne sera déjà plus valable l’année prochaine », déclare le conseiller national PS Jon Pult. Plus d’informations sur nau.ch.
L’économie s’oppose à l’Initiative pour l’avenir
En février 2024, la Jeunesse socialiste suisse (JS) a déposé l’initiative « Pour une politique climatique sociale financée équitablement par l’impôt (Initiative pour un avenir) ». Cette initiative vise à introduire un impôt sur les successions de 50% (à partir d’un montant exonéré de 50 millions de francs) et à lutter contre la crise climatique avec l’argent récolté (6 milliards de francs par an selon les initiants). Avant même que le Parlement n’en discute, de riches entrepreneurs ont lancé un débat contre cette mesure. Dans la Sonntags-Zeitung (paywall) et la NZZ (paywall), ils menacent de quitter la Suisse. Si l’initiative était acceptée, les héritiers devraient vendre les entreprises en raison des impôts élevés.
Dans la Sonntagszeitung (paywall) et la NZZ (paywall), des politiciens bourgeois déclarent qu’ils veulent invalider l’initiative. Concrètement, la clause de rétroactivité doit être supprimée. Avec cette clause, les initiants veulent empêcher les riches entrepreneurs de quitter le pays après l’acceptation de l’initiative, avant que les dispositions d’exécution n’entrent en vigueur. Le Conseil fédéral a déjà laissé entendre qu’il renoncerait à un effet rétroactif lors de la mise en œuvre (si l’initiative est acceptée), rapportent l’Aargauer Zeitung et le Tages-Anzeiger (paywall). Les politiciens bourgeois rejettent un contre-projet avec un impôt modéré sur les successions. Selon un sondage représentatif de Tamedia (paywall), l’initiative est rejetée : 58% des personnes interrogées sont contre, 34% pour. Plus d’informations dans la Sonntagszeitung (paywall), la NZZ am Sonntag (paywall) et la Wochenzeitung.
Place financière : critique de l’autorégulation
Les gestionnaires de fortune des plus grandes banques et assurances suisses ne s’engagent pas assez pour l’environnement et le climat. C’est la conclusion d’une étude commandée par Greenpeace. Grâce à leurs placements financiers dans des entreprises, les instituts sont en fait en mesure d’exercer une influence sur les décisions ayant un impact sur le climat et l’environnement. Mais ils n’assument pas assez cette responsabilité, selon le rapport. Les gestionnaires de fortune renonceraient à exiger des pratiques commerciales durables. L’autorégulation de la place financière suisse n’étant pas suffisante, Greenpeace demande une réglementation claire du secteur. Pour atteindre cet objectif, une initiative est en préparation pour mettre fin aux pratiques néfastes pour l’environnement des acteurs financiers.
Le Conseil fédéral ne veut toutefois pas d’une réglementation plus stricte du secteur financier. Il a décidé fin juin de renoncer à des règles contraignantes pour se protéger du greenwashing. Il continue à faire confiance à l’autorégulation du secteur financier. En octobre dernier, il avait encore ordonné au Département fédéral des finances d’élaborer un projet visant à éviter le greenwashing. Il n’en voit désormais plus la nécessité. Dans le Tages-Anzeiger, Greenpeace critique ce changement de cap. Il est « révoltant que le Conseil fédéral ne prenne pas enfin les choses en main, alors qu’il admet lui-même que l’autorégulation de la branche ne répond toujours pas à toutes ses exigences, même après trois ans ».
L’exemple de Glencore illustre l’influence du marché financier sur les entreprises. Le groupe de matières premières basé dans le canton de Zoug voulait se séparer de son activité charbon et l’introduire en bourse dans une nouvelle société. Mais les actionnaires ont empêché cela : une majorité d’entre eux a refusé la scission, car ils ne veulent pas renoncer aux bénéfices réalisés avec le charbon. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger et la NZZ (paywall).
Décisions climat de la Confédération et des cantons
Lorsque les fabricants raccourcissent délibérément la durée de vie de leurs produits (obsolescence programmée), cela agace les consommateurs et nuit à l’environnement. Le Parlement a donné au Conseil fédéral la compétence d’agir contre ce phénomène. Il peut désormais obliger les entreprises à publier des informations sur la durée de vie des produits et sur la manière dont ils peuvent être réparés. Dans un rapport, le Conseil fédéral constate que ces déclarations peuvent réduire la consommation de matériaux et d’énergie. Le Conseil fédéral ne précise pas si cette mesure sera mise en œuvre ni dans quelle temporalité. Ce qui est clair, c’est qu’en cas d’introduction, les réglementations correspondantes de l’UE seront prises en compte afin d’éviter que la Suisse ne fasse cavalier seul. L’UE a décidé début 2024 d’introduire de nouvelles obligations concernant la réparabilité, le greenwashing et l’obsolescence programmée. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger (paywall).
Le canton de Zurich souhaite que des éoliennes soient construites sur des sites appropriés. Il y a deux ans, il était question de près de 50 zones présentant un potentiel. Désormais, la liste a été réduite à 20, écrit la NZZ (paywall). Celles-ci seraient très appropriées. Elles offrent de la place pour environ 70 éoliennes et doivent être inscrites dans le plan directeur cantonal.
Politique climatique internationale
Les tribunaux secrets attaquent la politique climatique
En octobre 2023, une petite entreprise énergétique suisse a entamé une bataille juridique qui pourrait avoir des répercussions mondiales. L’Azienda Elettrica Ticinese (AET) a déposé une plainte contre la République fédérale d’Allemagne devant un tribunal arbitral privé pour contester l’abandon du charbon par l’Allemagne d’ici 2038. L’entreprise demande une indemnisation pour la fermeture, fin 2018, d’une centrale à charbon allemande dans laquelle AET détient une participation. La procédure pourrait créer un dangereux précédent. Pour sa plainte, AET utilise le mécanisme peu connu de règlement des différends entre investisseurs et Etats, en anglais ISDS. Celui-ci a été spécialement conçu pour permettre aux investisseurs de contourner les tribunaux nationaux.
L’ISDS permet aux investisseurs étrangers de poursuivre des pays devant des tribunaux d’entreprise secrets pour obtenir des dommages et intérêts lorsqu’ils perdent des bénéfices à cause d’un instrument politique. Ces tribunaux se composent chacun de trois arbitres – souvent des avocats privés, parfois choisis par l’entreprise plaignante elle-même. Ils statuent sur les plaintes des investisseurs sans tenir compte des lois nationales ou des constitutions.
Le traité sur la Charte de l’énergie est l’un des traités internationaux qui permettent aux investisseurs d’accéder à de tels tribunaux d’arbitrage privés. De nombreux pays de l’UE se sont retirés de la Charte parce qu’ils entravent la mise en œuvre de la politique climatique. Mais la Suisse en est toujours membre. Par ailleurs, il existe environ 2500 autres accords de protection des investissements qui contiennent également des droits de plainte.
Par rapport aux tribunaux nationaux, les entreprises préfèrent souvent les tribunaux d’arbitrage, car elles ont plus de chances d’y gagner des affaires, d’obtenir des indemnités plus élevées et d’échapper à l’opinion publique critique. Le prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz qualifie l’ISDS de « terrorisme juridique » et dénonce ses effets néfastes sur la démocratie et la capacité de gouvernance des États.
Depuis les premières plaintes ISDS au début des années 1990, les investisseurs ont pu réclamer plus de 110 milliards de dollars de compensations publiques. Les entreprises fossiles sont celles qui utilisent le plus activement l’ISDS et entravent ainsi les mesures de protection du climat. On constate également un clivage nord-sud : les investisseurs des Etats-Unis, du Canada, de la Grande-Bretagne et de l’UE sont particulièrement enclins à porter plainte. L’Argentine, le Venezuela, le Mexique et l’Égypte sont les pays les plus souvent poursuivis en justice.
Les cas ISDS sont notoirement opaques – certains cas sont tenus totalement secrets ou ne sont connus que des années après leur conclusion. Afin d’apporter plus de lumière dans l’obscurité du monde de l’ISDS, les organisations non gouvernementales Powershift, Transnational Institute et Trade Justice Movement ont créé le « Global ISDS Tracker » – une nouvelle base de données qui regroupe tous les cas d’ISDS connus publiquement et leur contexte. Plus sur Klimareporter.de
La Cour suprême doit évaluer les dommages climatiques
La Cour internationale de justice de La Haye sera bientôt appelée à clarifier la responsabilité juridique des États pour les effets du changement climatique. Bien que le jugement de la Cour ne soit pas contraignant, il sera important pour des milliers de plaintes climatiques. Dans le monde entier, 2666 plaintes ont déjà été déposées. La plupart des plaignants sont des particuliers et des ONG. Ils veulent tous demander des comptes aux gouvernements et aux entreprises pour leurs promesses en matière de climat. La décision du tribunal pourrait être l’un des développements les plus lourds de conséquences pour la politique climatique depuis l’accord de Paris. Plus d’informations sur Nature. Ceux qui souhaitent s’abonner à une newsletter hebdomadaire sur les affaires judiciaires importantes en matière de climat peuvent le faire ici sur Climate Court.
Les pays riches approuvent de nombreuses nouvelles licences d’extraction de pétrole et de gaz
Les pays occidentaux ont approuvé un nombre énorme de nouvelles licences d’extraction de pétrole et de gaz, comme le montre une nouvelle analyse de l’International Institute for Sustainable Development (IISD). Les licences d’extraction qui seront attribuées cette année dans le monde entier émettront environ 12 milliards de tonnes de CO2 pendant leur durée de vie. C’est environ cinq fois plus que ce que l’ensemble de l’UE a émis en 2023. Les États-Unis sont de loin le plus grand producteur. L’administration de Joe Biden a attribué 1453 nouvelles licences de pétrole et de gaz, soit la moitié du total mondial depuis 2021 et 20% de plus que son prédécesseur Donald Trump durant son mandat. (Vous trouverez un rapport sur l’héritage climatique énorme, contradictoire et fragile de Joe Biden sur Vox).
L’industrie pétrolière et gazière continue également d’investir à grande échelle dans l’influence politique. Au cours des dix dernières années, elle a dépensé, rien qu’aux Etats-Unis, 1,25 milliard de dollars en lobbying et plus de 650 millions de dollars en contributions aux campagnes électorales, voir OpenSecrets.
L’analyse de l’IISD montre également que les entreprises fossiles ont envoyé près de 2500 lobbyistes aux négociations sur le climat à Dubaï et qu’elles ont dépensé plus d’argent dans l’exploitation de nouveaux gisements de pétrole et de gaz que jamais auparavant depuis l’accord de Paris sur le climat de 2015. Pour en savoir plus, consultez le Guaridan ici, ici et ici.
Un tribunal américain annule les lois environnementales
Au cours des deux dernières années, une série de décisions de la Cour suprême des États-Unis a considérablement affaibli le pouvoir de l’Agence de protection de l’environnement (EPA). Depuis 2022, les militants conservateurs et l’industrie fossile ont intenté de nombreuses actions en justice pour réduire les pouvoirs de l’EPA. En juin, la Cour a interdit l’application de la « doctrine Chevron« , qui est une pierre angulaire du droit administratif depuis 40 ans. Jusqu’à présent, l’interprétation de lois peu claires ou formulées de manière générale était laissée aux experts des autorités. Désormais, les tribunaux pourront en décider. Cette décision porte atteinte au pouvoir de nombreuses autorités fédérales de réglementer l’environnement, la santé publique et d’autres domaines.
Plus remarquable encore, la Cour suprême a décidé d’interdire des réglementations environnementales avant même qu’elles ne soient mises en œuvre au niveau politique. Par exemple, la Cour a interdit une proposition de règlement de l’EPA visant à protéger des millions d’hectares de zones humides contre la pollution avant même qu’elle ne soit adoptée. De la même manière, en 2022, la Cour a fortement limité la capacité de l’EPA à réglementer les émissions de gaz à effet de serre des centrales électriques, alors que cette réglementation n’était pas encore entrée en vigueur.
La Cour suprême s’immisce donc activement dans la législation. Les entreprises industrielles, les groupes d’intérêts conservateurs et les avocats républicains ont ainsi atteint l’objectif de leur stratégie de plusieurs années visant à utiliser la justice pour influencer la politique environnementale.
Ces décisions mettent non seulement en péril de nombreuses réglementations environnementales existantes, mais peuvent également empêcher les futurs gouvernements d’en adopter de nouvelles. Si Kamala Harris remporte les élections présidentielles, elle ne pourra plus faire grand-chose pour l’environnement, et en particulier pour le climat. NY Times (paywall)
D’autres décisions de justice affaiblissent également les réglementations environnementales. En juillet, un juge fédéral a décidé que le gouvernement Biden devait à nouveau accorder des autorisations pour de nouvelles installations d’exportation de gaz naturel liquéfié. En janvier, le gouvernement avait suspendu ce processus afin d’analyser l’impact de ces exportations sur le changement climatique, l’économie et la sécurité nationale. La décision d’un tribunal de district américain est la réponse à une plainte déposée par 16 procureurs généraux républicains, qui ont fait valoir que la pause équivaut à une interdiction qui nuit à l’économie de leurs États. Nombre de ces États, dont la Louisiane, la Virginie occidentale, l’Oklahoma, le Texas et le Wyoming, produisent des quantités considérables de gaz naturel. NY Times (paywall)
Les élections américaines : Harris versus Trump
Le président américain Joe Biden s’est retiré de la course à la réélection en juillet et a soutenu sa vice-présidente Kamala Harris pour lui succéder. Harris se présente avec un solide bilan en matière de changement climatique et d’environnement. En tant que sénatrice, Harris a co-soutenu le Green New Deal et, en tant que vice-présidente, elle a contribué à l’adoption du plus grand paquet climatique américain, l’Inflation Reduction Act. « L’urgence de ce moment est claire », a-t-elle déclaré lors du sommet des Nations unies sur le climat l’année dernière. « L’horloge ne fait plus seulement tic-tac, elle bat. Et nous devons rattraper le temps perdu ». Plus d’informations sur la politique climatique de Harris dans le New York Times (Paywall), The Bulletin, Guardian, Klimareporter.de
Le gouverneur Tim Walz, qui devrait devenir vice-président démocrate, a également fait beaucoup pour la protection du climat. Pour en savoir plus sur lui, consultez E&E News, Scientific American, Salon.
Le Green New Deal Network, un grand réseau de syndicats et d’organisations climatiques, soutient la candidature de Harris et Walz. D’une part, cela donne à Harris un coup de pouce de la part d’électeurs plus jeunes et de gauche, qui pourraient être décisifs pour la victoire en novembre. D’autre part, c’est une aubaine pour Trump, qui présente Harris comme une gauche radicale qui veut bloquer l’exploitation des gisements de pétrole et de gaz aux Etats-Unis. Plus d’informations sur www.insideclimatenews.org
Si Donald Trump remportait les élections en novembre, il serait dans une bien meilleure position pour démanteler les lois sur l’environnement et le climat. Il serait soutenu en cela par la Cour suprême conservatrice et d’autres alliés qui ont déjà présenté des plans concrets en ce sens dans leur projet 2025. Dans une section de 32 pages consacrée à l’Agence américaine de protection de l’environnement (EPA), ils demandent notamment l’abrogation des réglementations relatives à la pollution de l’air et la suppression du Bureau de la justice environnementale de l’EPA, qui se concentre sur la réduction de la pollution dans les zones à faible revenu et zones abritant des minorités. Ils demandent également une « diversité de points de vue scientifiques » et veulent « réformer » l’EPA en profondeur. Plus d’informations sur billmckibben.substack.com et le NY Times (paywall).
Politique climatique européenne
L’ancienne, la nouvelle présidente de la Commission
La présidente allemande de la Commission européenne, Ursula von der Leyen (CDU/PPE), a été confirmée dans ses fonctions le 18 juillet par le nouveau Parlement européen. Une large alliance de Verts, de sociaux-démocrates et de conservateurs a réélu la femme de 65 ans à la présidence de la Commission européenne avec une majorité plus nette qu’il y a cinq ans. Tagesschau a compilé un aperçu des projets de von der Leyen.
L’approbation des Verts au Parlement européen dépendait en grande partie du maintien de politiques climatiques et environnementales centrales, mais les critiques ne manquent pas. Certes, l’European Green Deal doit être poursuivi et développé par la mise en œuvre d’un « Clean Industrial Deal ». Celui-ci doit permettre d’investir des milliards dans une infrastructure et une industrie d’avenir. Reste à savoir à quoi il ressemblera exactement. Plusieurs associations environnementales allemandes ont exigé dans un document commun la garantie de la neutralité climatique de l’industrie européenne. Mais sous la pression massive de certains groupes automobiles et partis, comme le FDP allemand, l’interdiction prévue des nouvelles voitures à moteur à combustion à partir de 2035 devrait être partiellement assouplie. L’utilisation de ce que l’on appelle les e-fuels devrait rester autorisée après cette date. Ces carburants synthétiques sont toutefois critiqués pour leur inefficacité et pour la menace qu’ils représentent pour la réalisation des objectifs climatiques.
L’Alliance climatique allemande a rassemblé les critiques de grandes organisations environnementales. Les organisations environnementales font pression pour un développement socialement équitable et une mise en œuvre rapide de l’European Green Deal. L’objectif climatique pour 2040 à l’échelle de l’UE doit en outre être fixé dans les prochains mois.
La Hongrie prend la présidence du Conseil de l’UE
Le 1er juillet, la Hongrie a pris la présidence tournante du Conseil de l’UE pour le deuxième semestre 2024, sous la direction du président populiste de droite Orbán. En référence au slogan électoral de Donald Trump, la devise de la présidence du Conseil est : Make Europe Great Again. Le programme officiel désigne sept thèmes principaux pour la présidence du Conseil :
- Nouvel accord européen sur la concurrence
- Renforcer la politique européenne de défense
- Une politique d’élargissement cohérente et basée sur la performance
- Réduire la migration illégale
- Concevoir la future politique de cohésion
- Une politique agricole européenne axée sur les agriculteurs
- Relever les défis démographiques
Une chose saute aux yeux. La politique environnementale et climatique n’occupe pas de thème à part entière, plus d’informations sur le DNR. Pourtant, le gouvernement hongrois prévoit de convenir d’une position commune de l’UE pour la prochaine conférence mondiale sur le climat à Bakou, de faire progresser le développement de la géothermie dans l’Union et de poursuivre les initiatives législatives en cours, résume Euractiv. Il est pour le moins douteux que la présidence hongroise du Conseil soit ambitieuse dans la poursuite et la mise en œuvre de ces politiques. Deutschlandfunk a rédigé une analyse détaillée.
Le nouveau gouvernement britannique de retour sur la voie du climat ?
Lors des élections législatives anticipées de début juillet, Keir Starmer du parti travailliste a pu fêter une victoire écrasante. Le parti travailliste a à peu près doublé ses sièges et compte désormais 411 députés à la Chambre des communes. Starmer a ainsi mis fin au règne des conservateurs Tories après 14 ans. L’ex-Premier ministre Rishi Sunak avait récemment fait les gros titres et suscité la controverse avec sa politique énergétique et climatique rétrograde, notamment en accordant des centaines de nouvelles licences d’exploitation de pétrole et de gaz ou en ouvrant de nouvelles mines de charbon (Politico). Sunak a ainsi fait valoir que même si la neutralité climatique était atteinte en 2050, environ un quart des besoins énergétiques devraient encore être couverts par des combustibles fossiles. Sous le gouvernement Starmer, on peut en revanche s’attendre à une politique énergétique et climatique nettement plus progressiste. La BBC a établi à ce sujet une comparaison entre le parti travailliste et les approches politiques des conservateurs.
Greenpeace UK n’attribue cependant pas la meilleure note au parti travailliste dans une comparaison des exigences électorales et rappelle qu’il faut en faire plus pour lutter contre la crise climatique. CarbonBrief propose un autre aperçu.
Allemagne
Nouvelle affaire de corruption autour du ministre des Transports Wissing ?
Mi-juillet, le magazine Frontal21 de la chaîne de télévision ZDF a fait état des liens étroits entre le ministre allemand des transports Volker Wissen, son secrétaire d’État Oliver Luksic (tous deux membres du FDP) et les lobbyistes du carburant, notamment l’association « Mobil in Deutschland » dirigée par Michael Haberland. L’accent a été mis sur la campagne « HVO100 goes Germany », qui vise à autoriser et à promouvoir le carburant diesel HVO100, obtenu à partir d’huiles végétales. Les principaux représentants du FDP se sont fortement engagés en faveur de cette autorisation – avec succès. En février déjà, le ministre avait été contraint de licencier un chef de département en raison d’accusations de népotisme (tagesschau.de). Les soupçons de corruption existaient déjà en 2023, comme le rapporte Zeit Online (paywall).
Les organisations environnementales telles que la DUH expriment de fortes réserves quant au carburant diesel HVO100 : le manque d’efficacité énergétique, les coûts élevés et la forte demande d’autres secteurs, comme le transport maritime, rendent l’utilisation du HVO100 pour les voitures peu judicieuse, a également classé la journaliste scientifique Mai Thi Nguyen-Kim dans son format YouTube.
Le plan de circulation du FDP suscite à nouveau la polémique
Une décision du FDP, intitulée « Feuille de route pour l’avenir – Une politique pour la voiture« , a une nouvelle fois beaucoup fait réagir. Que les libéraux soient opposés à une limitation générale de la vitesse sur les autoroutes allemandes n’est certainement pas une nouveauté. En revanche, le fait que les jeunes puissent passer leur permis de conduire à 16 ans, que les places de parking dans les centres-villes soient si possible gratuites ou au moins proposées avec un forfait similaire au ticket à 49 euros, et que le moteur à combustion soit explicitement considéré comme un « moteur d’innovation » est certainement une nouveauté. En outre, moins de routes doivent être transformées en zones piétonnes ou en pistes cyclables et les projets de la Commission européenne concernant de nouvelles valeurs limites pour les flottes doivent être rejetés afin d’éviter « l’immobilisation de millions de véhicules ». De manière presque cynique, le PLR cite qu’il est « favorable à une politique des transports sans idéologie ».
La décision montre clairement qu’il ne faut plus guère s’attendre à des projets ambitieux de protection du climat dans le domaine des voitures particulières au cours de cette législature. « On ne peut pas faire plus de lobbying », a commenté la Deutsche Umwelthilfe, citée par le FR. Même l’ADAC souligne dans un entretien avec le TAZ le bien-fondé des pistes cyclables. Detlef Müller, spécialiste de la politique des transports, accuse le FDP de populisme en période électorale (voir Tagesspiegel). Du point de vue communal également, les projets sont vus d’un œil critique. Ainsi, le maire de Hanovre, Belit Onay (Verts), a fait remarquer à la NDR que seuls les centres-villes où l’on aime séjourner sont attractifs. Selon Onay, ce n’est pas en se focalisant sur la voiture que l’on crée la force économique des centres-villes.
Protestations climatiques sur l’île de Borkum en mer du Nord
Bien que l’accord de coalition du gouvernement fédéral stipule clairement qu’aucune nouvelle autorisation de forage pétrolier ou gazier ne doit être accordée en mer du Nord et en mer Baltique, la pression s’accroît sur le gouvernement régional de Basse-Saxe pour qu’il donne son accord à un nouveau projet. Le groupe néerlandais One-Dyas prévoit d’exploiter un nouveau gisement de gaz à proximité immédiate de la réserve naturelle et du patrimoine naturel mondial de l’UNESCO de la mer des Wadden. Du côté néerlandais, l’autorisation a certes déjà été accordée, mais en Allemagne, la demande d’autorisation est encore en cours de procédure. Selon les rapports de la NDR, le ministre de l’environnement de Basse-Saxe, Meyer (Verts), ne voit pas la possibilité d’autoriser ce projet, tandis que le ministre de l’économie, Lies (SPD), est d’un autre avis. Récemment, la Deutsche Umwelthilfe (DUH) a obtenu gain de cause devant le tribunal administratif d’Oldenburg, qui a interdit la construction d’un câble sous-marin nécessaire à l’exploitation de la plateforme de forage. L’extraction de gaz naturel a tout de même été autorisée à la mi-août, et l’ONG environnementale annonce d’autres démarches juridiques.
Dans le cadre des manifestations organisées par Fridays for Future sur l’île de Borkum, l’activiste climatique Luisa Neubauer critique l’extraction de gaz naturel prévue, la qualifiant de « début d’une nouvelle ère d’exploitation des énergies fossiles sur le territoire de l’Allemagne » (ZDF).
Débattre du budget : le feuilleton se poursuit
Début juillet, le chancelier Scholz (SPD), le ministre de l’Economie Habeck (Verts) et le ministre des Finances Lindner (FDP) sont parvenus à un accord sur le budget fédéral 2025 après plus de 80 heures de négociations. On a créé une « œuvre d’art », a déclaré le chancelier Scholz lors d’une conférence de presse. « Économie, climat, enfants : c’est le triptyque qui résume le paquet », a résumé Habeck. Le frein à l’endettement sera respecté, a déclaré Lindner. L’accord est intitulé « initiative de croissance », selon une lettre de synthèse du gouvernement fédéral. Sur le plan de la politique climatique, il a été convenu que le financement des énergies renouvelables serait transféré du très discuté Fonds pour le climat et la transformation (FCC) vers le budget ordinaire. Le programme de promotion des nouvelles constructions respectueuses du climat doit être augmenté. Le stockage souterrain du CO2 doit également être encouragé et le design du marché de l’électricité doit être adapté à l’avenir, c’est-à-dire à l’abandon des énergies fossiles et à l’utilisation totale des énergies renouvelables. L’organisation de protection de l’environnement et du développement Germanwatch salue le fait qu’il n’y ait pas eu de « coupes dramatiques » dans la protection du climat et de l’environnement. Néanmoins, l’accord n’est pas tourné vers l’avenir.
Après que l’accord ait été rompu quelques semaines plus tard en raison d’un avis juridique publié par le ministre des Finances Lindner (FDP) (plus d’informations à ce sujet sur RND, TAZ et Tagesschau), Scholz, Habeck et Linder ont dû se mettre d’accord sur une nouvelle proposition. Ils l’ont présentée à la mi-août. Les mesures de politique climatique ont été réduites d’environ quatre milliards d’euros, dont une grande partie pour les bâtiments. Le « programme d’action pour la protection naturelle du climat », qui doit notamment être utilisé pour la renaturation des marais, sera également réduit. Un aperçu est disponible sur Klimareporter. Par ailleurs, les réductions de l’aide à l’Ukraine sont également fortement critiquées (voir ZDF). La décision finale sur le budget sera prise par le Bundestag dans les semaines à venir. Il y aura certainement des changements.
Changement de paradigme dans le marché de l’électricité
Pour garantir un système électrique stable en période de développement rapide des énergies renouvelables, un « changement de paradigme » fondamental est nécessaire, constate le BMWK. En bref, un système électrique capable de réagir de manière plus flexible à l’offre et à la demande en période de production volatile d’électricité à partir d’énergies renouvelables. Depuis 2023, les acteurs de la politique, de la science, de l’économie et de la société civile discutent de la transformation du marché de l’électricité qui permettra de garantir la neutralité climatique, l’accessibilité financière et la sécurité d’approvisionnement. Le BMWK a maintenant préparé 120 pages de premières propositions, actuellement en consultation, sur la manière dont le système électrique allemand du futur pourrait se présenter.
Douze mois les plus humides depuis plus de 140 ans
Jamais depuis le début des relevés météorologiques en 1881, on n’avait mesuré autant de pluie qu’entre juillet 2023 et juin 2024. Il s’agissait donc des douze mois les plus humides. La sécheresse des années précédentes a ainsi été remplacée par une forte phase humide, selon le service météorologique allemand (DWD). Les conséquences ont été en partie dévastatrices. De grandes parties du nord, du sud-ouest et du sud de l’Allemagne ont été touchées à plusieurs reprises par de grandes inondations, par exemple depuis le début de l’année. Sur une période historique, les quantités et les périodes de précipitations sont de plus en plus variables, selon le DWD. Les appels à l’aménagement de « villes-éponges » et à l’adaptation au climat se font de plus en plus pressants, comme le décrit Klimareporter. L’une des principales raisons de l’augmentation des précipitations est la crise climatique, selon le ZDF. En effet, un air plus chaud peut stocker davantage de quantités d’eau, ce qui peut entraîner une augmentation des précipitations.
La crise climatique visible
Les effets de la crise climatique se font sentir de plus en plus violemment dans le monde entier. Nous pourrions à chaque fois remplir tout le journal climatique avec des nouvelles sur des événements extrêmes et des « »catastrophes naturelles » ». Cette avalanche d’annonces de catastrophes est difficile à digérer. Il est important que nous nous rendions compte de l’impact énorme que notre société, notre économie et notre style de vie ont sur nous. Encore et encore. Mais à trop en faire, on finit par se sentir impuissant. Dans le journal du climat, nous essayons de trouver un juste milieu qui ébranle, mais qui ne désespère pas.
Été caniculaire mortel
Comme prévu, l’été dans l’hémisphère nord (où vit 90% de la population mondiale) a provoqué des vagues de chaleur mortelles dans de nombreuses régions. Tout autour du globe, des centaines de millions de personnes ont été exposées à la chaleur : de l’Asie – où l’Inde (Klimareporter), le Pakistan (NY Times, paywall), et le Japon (Guardian) ont été particulièrement touchés – à l’Europe du Sud (CNN), en passant par l’Amérique du Nord et du Sud (NY Times, paywall ; Mexique (Le Temps), l’Afrique, le Moyen-Orient (en Arabie Saoudite, 1300 personnes qui participaient au pèlerinage islamique sont mortes, Spiegel). Dans l’Antarctique, il a également fait beaucoup trop chaud : une vague de chaleur a fait grimper la température de 10°C au-dessus de la moyenne en juillet (Guardian). L’Organisation météorologique mondiale, le Guardian et le NY Times fournissent un bon aperçu par région (paywall).
Figure : Ecarts de la température mensuelle globale par rapport à la période 1850-1900 (source : Copernicus)
De juin 2023 à juin 2024, la température moyenne mondiale a atteint son pic, mois après mois. Le seuil de 1,5 degré de l’Accord de Paris sur le climat a été atteint ou dépassé pendant 13 mois consécutifs. Sur l’ensemble de la période allant de juin 2023 à juin 2024, la température mondiale a dépassé de 1,65 degré la valeur de référence préindustrielle, peut-on lire dans le Tages-Anzeiger. En juillet 2024, la température était à peine inférieure à celle de l’année précédente, selon le service européen sur le changement climatique Copernicus. Parallèlement, deux jours de juillet 2024 ont été plus chauds que jamais, avec des températures moyennes de 17,15-17,16 °C les 22 et 23 juillet. Carbon Brief estime que 2024 sera l’année la plus chaude depuis le début des mesures.
Le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres appelle les Etats à mieux protéger les populations vulnérables. La chaleur extrême est « la nouvelle anormalité ». Partout dans le monde, des personnes lutteraient contre les effets fatals de la chaleur extrême. Les inégalités se creusent et les objectifs de développement mondiaux sont mis à mal. Plus d’informations sur Climate Home News. Il faut des mesures de protection sur le lieu de travail ainsi que des systèmes efficaces pour avertir de la chaleur. En outre, António Guterres demande une « énorme accélération de toutes les dimensions de la protection du climat », étant donné que le réchauffement climatique progresse actuellement plus rapidement que les efforts pour le combattre.
En 2023, plus de 47 000 personnes seraient mortes des suites de températures élevées rien qu’en Europe. C’est la conclusion d’une étude publiée dans « Nature Medicine ». Les chercheurs ont analysé les données de l’Office européen des statistiques sur 96 millions de décès afin d’estimer la charge de mortalité liée à la chaleur en 2023 pour 823 régions dans 35 pays européens. La Grèce, la Bulgarie, l’Italie et l’Espagne ont enregistré le plus grand nombre de décès par rapport au nombre d’habitants. Plus d’informations sur SRF.
La chaleur extrême augmente le risque de problèmes cardio-vasculaires, ce lien est connu depuis longtemps. C’est ce que confirme une nouvelle étude de synthèse pour laquelle quelque 500 travaux scientifiques ont été analysés. Les personnes âgées, les membres de minorités ethniques et les communautés moins aisées sont excessivement touchées, peut-on lire sur Inside Climate News. Les vagues de chaleur affectent également la santé mentale, montrent de nouvelles recherches. En période de forte chaleur, les personnes souffrant de problèmes psychiques sont plus nombreuses à se rendre aux urgences psychiatriques et le taux de suicide augmente, peut-on lire sur CarbonBrief.
Les incendies sont plus chauds, plus massifs, et plus tôt
La saison des feux de forêt commence plus tôt que prévu à certains endroits. Au début de l’année, alors que la saison des pluies commence normalement, un nombre record d’incendies de forêt s’est produit à la pointe nord de l’Amazonie : près de 13 500 incendies ont été enregistrés en Amazonie, un nombre jamais atteint depuis 20 ans. Les incendies se déclarent également dans des endroits qui devraient être trop humides pour le feu. Ainsi, le Pantanal, entre le Brésil et la Bolivie, brûle depuis des semaines. Le Paranal est la plus grande zone humide tropicale et l’une des régions les plus riches en espèces du monde. Plus d’informations dans le NY Times (paywall), le Guardian et la SRF.
Des températures plus élevées assoiffent l’atmosphère, qui absorbe alors davantage d’humidité du sol et de la végétation. Les forêts sèches sont plus facilement inflammables et les incendies de forêt de grande ampleur sont de plus en plus fréquents. Les vagues de chaleur et les périodes de sécheresse intenses attisent actuellement de graves incendies en Californie, en Oregon et au Canada. Plus d’informations sur insideclimatenews.org et le NY Times (paywall). La Russie a signalé une augmentation de 50 pour cent de la surface brûlée par rapport à 2023.
Les incendies de forêt extrêmes ont doublé au cours des deux dernières décennies, révèle une nouvelle étude. La plupart de ces incendies plus intenses se sont produits dans les forêts de conifères d’Amérique du Nord. Le nombre d’incendies y a été multiplié par plus de 12 au cours des 20 dernières années. Voir NY Times (paywall).
Inondations et glissements de terrain
Plus de 200 personnes ont été tuées dans des glissements de terrain en Éthiopie. Après de fortes pluies, un versant en amont d’un village s’est effondré et a enseveli les maisons sous la boue. Les voisins et les sauveteurs qui s’étaient précipités pour aider ont été touchés par un deuxième glissement de terrain. Plus d’informations dans le NY Times (paywall). Au Kerala, dans le sud de l’Inde, bien plus d’une centaine de personnes sont mortes après que des pluies torrentielles aient provoqué d’énormes coulées de boue. Plus dans le NY Times (paywall) et le Tages Anzeiger (paywall). Plus de 240’000 personnes ont été évacuées dans l’est de la Chine après que des pluies torrentielles aient fait gonfler le fleuve Yangtsé dans une grande partie du pays. Plus d’informations sur la RTS.
Nouvelles de la science du climat
Le budget CO₂ s’épuise plus vite que prévu
De nouvelles données de la Global Climate Change Initiative montrent que le budget mondial de CO₂ diminue plus rapidement qu’on ne le pensait jusqu’à présent. Au niveau mondial, 150 milliards de tonnes de CO₂ peuvent encore être émises si nous voulons respecter l’objectif de 1,5 degré avec une probabilité de 67%. Avec les émissions mondiales actuelles d’environ 40 milliards de tonnes, le budget CO₂ sera épuisé en 2028. Si l’on veut maintenir le réchauffement en dessous de 2 degrés avec la même probabilité, il reste encore 900 milliards de tonnes de CO2.
Source: Tages-Anzeiger (paywall)
Les pays pauvres ont besoin de réparations
Ceux qui ont le plus contribué à la crise climatique doivent soutenir ceux qui en souffrent le plus. Tout le monde en profiterait. L’Europe et les Etats-Unis sont historiquement à l’origine de plus de la moitié des émissions de gaz à effet de serre, alors qu’ils ne représentent qu’un huitième environ de la population mondiale. Au niveau individuel, les différences sont également énormes : selon les calculs de l’ONG Oxfam, les 10% les plus riches de la population mondiale sont responsables de la moitié de toutes les émissions de gaz à effet de serre. Font partie des 10% les plus riches tous ceux qui gagnent plus de 36’000 francs par an.
Après des décennies de pression de la part des petits Etats insulaires et d’autres pays en développement, un accord a été trouvé lors de la conférence mondiale sur le climat de 2022 pour la création d’un fonds financé par les pays riches et destiné à payer des réparations aux pays particulièrement menacés par le changement climatique. Les Etats-Unis ont promis 17,5 millions de dollars, l’Allemagne et la France 100 millions chacune. Globalement, c’est beaucoup trop peu. Une étude publiée l’année dernière dans la revue spécialisée « Nature » estime que les pays riches doivent près de 200 trilliards de dollars de compensations aux pays plus pauvres pour la crise climatique.
A titre de comparaison, en 2020 et 2021, les pays du G20 ont débloqué environ 14 trilliards de dollars d’aide à la relance pour contrer les effets de la pandémie Covid. Pour réellement générer des milliards pour le fonds, l’ONU pourrait créer un instrument obligeant les pays industrialisés à allouer un certain pourcentage de leur produit intérieur brut aux pays en développement. Ou bien certains pays pourraient taxer fortement leur industrie fossile et faire profiter des recettes à ceux qui en ont besoin en raison de la crise climatique, dans leur propre pays ou à l’étranger. Plus d’informations dans la République.
Actif contre le désespoir
« L’optimisme et l’espoir sont des muscles que nous devons entraîner », déclare le climatologue Rob Jackson. Son nouveau livre offre un paradigme sur la manière de penser le changement climatique et la santé de la planète. Plus sur Inside Climate News
Parler de la crise climatique avec sa famille et ses connaissances met beaucoup de monde mal à l’aise. Mais ne pas en parler n’est pas non plus une solution. La République propose 36 questions qui peuvent servir de base à une réflexion commune.
Vent en poupe pour la protection du climat : 80% de la population mondiale veut plus de protection du climat. Les opposants à une politique climatique efficace reçoivent trop d’attention. Cela ne changera que si le changement est organisé de manière socialement équitable. Plus sur Klima Reporter.
Aperçu des votations à venir et des initiatives :
- Initiative pour la biodiversité : 22 septembre (sur le lien entre climat et biodiversité, voir ce rapport)
- Référendum contre l’extension de l’autoroute : 24 novembre
- Les Verts récoltent des signatures pour leur initiative solaire. Elle veut rendre obligatoires les installations solaires sur les bâtiments.
- L’association Protection du climat Suisse prévoit une nouvelle initiative populaire. (Le contenu de l’initiative sera élaboré en collaboration avec des personnes intéressées et des experts.
- Cette année encore, Greenpeace veut lancer l’initiative populaire pour une place financière durable afin de mettre le secteur sur la voie du climat.
Merci et salutations chaleureuses de la part d’Anja, Thomas et Sebastian ! N’hésitez pas à faire circuler le journal sur le climat.
Éditorial
Dans l’édition de juin du journal climatique, nous évoquons le oui clair à la loi sur l’électricité et les nouveaux conflits autour de sa mise en œuvre. Le centre-droit pousse les centrales nucléaires, le jugement des Aînées pour la protection du climat fait l’objet de débats enflammés, et trois nouvelles initiatives climatiques sont recommandées à être rejetées. En outre, la protection des espèces en Suisse continue d’être négligée et minimisée par l’OFEV.
Le financement climatique fait parler de lui au niveau international. Les pays riches déclarent tout simplement l’aide au développement existante et, de plus, une grande partie de l’argent retourne dans les pays d’origine. Mais il y a aussi des points positifs : les énergies renouvelables connaissent une croissance rapide, les émissions de la Chine diminuent et les émissions mondiales pourraient bientôt baisser. De plus, la politique climatique de l’Europe dans le secteur de l’industrie influence également la Chine. L’UE peut se targuer d’un bilan positif de son Green Deal. Mais là encore, il reste beaucoup à faire, car les plans climatiques des États membres de l’UE ne sont pas sur la bonne voie.
Pendant ce temps, la crise climatique se poursuit. Les records de température, les vagues de chaleur mortelles et les inondations à grande échelle se succèdent tout autour du globe. De nouvelles études le montrent : réduire les émissions serait six fois moins cher que d’accepter la crise climatique.
Suisse
Un oui clair à la loi sur l’électricité et aussitôt de nouveaux conflits
Le peuple suisse a clairement accepté la loi sur l’électricité avec 68,7% des voix. Tous les cantons ont approuvé le projet, contre lequel l’UDC et les défenseurs du paysage avaient lancé un référendum. Elle prévoit des objectifs contraignants pour le développement des énergies renouvelables d’ici 2035. Les prévisions de vote faites au préalable ont ainsi été légèrement dépassées. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger et sur SRF. Selon le sondage réalisé par le Tages-Anzeiger (paywall), les personnes de toutes les catégories de revenus ont clairement dit oui, y compris les partisans de tous les partis (à l’exception de l’UDC).
Les organisations environnementales telles que le WWF et la Fondation suisse de l’énergie ainsi que l’association professionnelle Swissolar se réjouissent de l’issue de la votation. Selon elles, cela va accélérer l’abandon des sources d’énergie fossiles.
Même si le résultat est clair, les idées sur les mesures qu’il faut maintenant prendre en matière de politique énergétique et climatique divergent fortement :
- Energie hydraulique : la loi sur l’électricité comprend 16 projets d’énergie hydraulique sur lesquels le secteur de l’énergie s’est mis d’accord avec quelques organisations environnementales. Les entreprises énergétiques et les politiciens bourgeois exigent que ces projets soient construits rapidement. Afin que cela ne soit pas retardé par des oppositions, le droit de recours des organisations environnementales doit être encore plus limité, demande l’association de gestion des eaux dans le Tages-Anzeiger. Le conseiller aux Etats du centre Beat Rieder demande la même chose dans la NZZ.
- Energie solaire et éolienne : le Parlement discute actuellement du décret dit d’accélération. Celui-ci doit permettre de remplacer d’ici 2025 l’Express solaire et l’Express éolien et de construire plus rapidement de grandes centrales pour les énergies renouvelables. Les Verts ont lancé la semaine dernière l’initiative solaire, qui exige l’installation de panneaux solaires lors de la construction ou de la transformation d’un bâtiment. L’électricité doit être produite là où elle est nécessaire.
- Nucléaire : bien que la loi sur l’électricité stipule que les énergies renouvelables doivent être développées, les partis bourgeois et une partie de l’économie lancent un débat sur les centrales nucléaires juste après la votation (plus d’informations à ce sujet dans le prochain paragraphe). Ainsi, l’association économique Economiesuisse veut que de grandes centrales électriques, y compris des centrales nucléaires, puissent être construites en Suisse (sur Linkedin, l‘économiste et activiste Nick Beglinger critique vivement la position de l’association). Greenpeace, en revanche, exige que la centrale nucléaire de Beznau soit désormais arrêtée. La fondation pour l’énergie a lancé un appel au conseiller fédéral Rösti pour qu’il respecte la volonté de la population de sortir du nucléaire. La semaine suivant la votation, le Conseil national a rejeté un postulat de l’UDC selon lequel le Conseil fédéral aurait dû examiner de plus près la construction de centrales nucléaires. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger (paywall), la Wochenzeitung, la Handelszeitung et la NZZ.
Et le débat sur les centrales nucléaires reprend
En février, le Club Energie Suisse avait déposé l’initiative black-out « Du courant pour tous, tout le temps (stopper le black-out) ». Elle vise à lever l’interdiction de construire de nouvelles centrales nucléaires, décidée par le peuple en 2017. Il faudra encore attendre un certain temps avant que l’initiative ne soit soumise au vote, mais les centrales nucléaires suscitent déjà d’intenses discussions. Les associations économiques et les partis bourgeois demandent de rendre l’énergie nucléaire possible (voir ci-dessus). Martin Neukom, conseiller d’Etat des Verts dans le canton de Zurich, a déclaré au Tages-Anzeiger (paywall) avant même la votation qu’il n’était pas nécessaire d’interdire les centrales nucléaires. Mais pour de toutes autres raisons : il estime que l’article de loi est superflu, car il est financièrement beaucoup trop risqué d’investir dans l’énergie nucléaire. Le président de la Conférence des directeurs cantonaux de l’énergie, Roberto Schmidt, ne voit absolument aucune raison de penser à de nouvelles centrales nucléaires. Dans une interview accordée à la NZZ, il a déclaré : « A court et moyen terme, aucune nouvelle centrale nucléaire ne peut être réalisée en Suisse ». Et une nouvelle génération de réacteurs ne serait pas disponible. « Au lieu de nous disputer sur l’électricité nucléaire, nous devrions nous concentrer sur le développement des énergies renouvelables ».
La population est divisée sur la question de savoir s’il faut relancer un débat sur la levée de l’interdiction de construire des centrales nucléaires : 49% sont favorables à un débat, 47% y sont opposés. C’est ce que révèle un sondage représentatif réalisé par gfs.bern sur mandat de l’Association des entreprises électriques suisses. La majorité des personnes interrogées est en outre d’accord avec l’orientation du Conseil fédéral visant à développer les énergies renouvelables afin d’atteindre la neutralité climatique d’ici 2050. Et plus de 70% sont d’accord pour que les centrales nucléaires existantes soient exploitées le plus longtemps possible. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger et la NZZ.
Le constat n’est pas nouveau : si la Suisse veut atteindre la neutralité climatique d’ici 2050, la production d’énergies non fossiles doit être considérablement développée. Une étude de l’EPF de Lausanne qui le démontre suscite néanmoins le débat. Elle part du principe que la consommation d’électricité sera nettement plus élevée, en supposant notamment que les économies d’énergie entraînent une augmentation de la consommation. La raison en serait un effet de rebond (l’énergie et l’argent économisés seraient consommés ailleurs). Et elle arrive à la conclusion que l’objectif climatique pourrait être atteint au meilleur prix avec de nouvelles centrales nucléaires (outre le développement de l’énergie éolienne et photovoltaïque, six grandes centrales nucléaires seraient nécessaires). L’étude reconnaît elle-même que la nouvelle génération de centrales nécessaires à cet effet n’en est qu’à une phase expérimentale.
Les critiques critiquent le fait que les (faibles) coûts de production de l’électricité nucléaire retenus dans l’étude ne reposent sur aucune base. Dans le Tages-Anzeiger (paywall), Andreas Züttel, l’un des auteurs de l’étude, exige que la Suisse soit totalement autosuffisante en énergie. Il y a deux ans encore, il avait demandé le contraire dans un communiqué de presse de la Confédération : « Nous devons donc abandonner l’idée que nous pouvons couvrir tous nos besoins énergétiques avec de l’énergie renouvelable produite en Suisse ». Plus d’informations dans la Sonntagszeitung et la NZZ.
Seniors climatiques -Un jugement qui suscite un débat houleux
Les Aînées pour la protection du climat font leur entrée au cinéma. Dans le documentaire « Trop Chaud« , qui pourra également être visionné en streaming à partir de novembre 2024, elles racontent comment le processus et le jugement ont eu lieu, et ce que signifie cette décision.
Le Parlement fédéral ne s’intéresse pas à cette histoire. Le Conseil national et le Conseil des Etats rejettent l’arrêt rendu début avril par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) à l’encontre de la Suisse (une mise en perspective par des spécialistes du climat, de la politique et du droit est à lire dans la République). Les deux chambres ont approuvé une déclaration de protestation. Dans celle-ci, ils critiquent « l’activisme judiciaire » de la CEDH et l’interprétation dynamique de la Convention européenne des droits de l’homme qui est cultivée depuis un certain temps. Le Conseil fédéral est appelé à informer le Comité des ministres du Conseil de l’Europe que la Suisse ne voit aucune raison de « donner suite » à l’arrêt. En d’autres termes, le jugement de Strasbourg ne doit pas être respecté. Pour en savoir plus, voir ici et ici dans le Tages-Anzeiger, ici et ici dans la NZZ ainsi que dans le Guardian. Auparavant, le conseiller fédéral Albert Rösti avait déjà critiqué le jugement. Le ministre de l’Environnement ne voit personnellement pas la nécessité d’agir davantage en matière de politique climatique, a-t-il déclaré dans une interview à la SRF.
La déclaration du Parlement, si elle n’a pas de portée juridique, a une valeur symbolique. Et elle pourrait influencer le Conseil fédéral, qui transmettra d’ici octobre son plan d’exécution de l’arrêt au Comité des ministres du Conseil de l’Europe. La décision des Chambres a suscité de nombreuses réactions négatives. Dans la NZZ, Jörg Paul Müller, professeur émérite de droit public, qualifie la déclaration de « violation impardonnable du droit reconnu par la Suisse et donc un coup porté au principe de la primauté du droit sur la politique ». Selon lui, l’arrêt sur le climat est contraignant. L’organisation environnementale Greenpeace, qui a soutenu les aînées du climat, qualifie la déclaration d' »atteinte inadmissible à la séparation des pouvoirs ». La République parle d’un « nouvel illibéralisme » et d’une « rupture de tabou politique ». Pour le Tages-Anzeiger (paywall), il s’agit d' »un coup bas populiste sans précédent » qui nuit à l’Etat de droit.
Indépendamment du débat politique, le jugement de Strasbourg pourrait influencer les décisions de justice contre les activistes climatiques. Un pénaliste lausannois, qui représente plusieurs accusés dans des procédures pénales, est d’avis que le jugement devrait avoir des répercussions sur la jurisprudence suisse. « Si le Tribunal fédéral défend la position selon laquelle le changement climatique ne représente pas un danger et qu’il considère dans de nombreux cas comme illégales les protestations contre le manque de protection du climat, cette conception du droit et les jugements contre les activistes climatiques ne seront plus guère défendables devant la CEDH ». Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger (paywall). Et dans la NZZ, on peut lire que le jugement pourrait conduire à l’introduction d’un droit de recours des associations dans le domaine de la protection du climat. C’est ce qu’a montré Helen Keller, ancienne juge suisse à la CEDH, lors de l’audition devant la commission juridique du Conseil des Etats.
Non à trois initiatives sur le climat
Initiative pour un fonds climatique, initiative pour un avenir radieux et initiative sur la responsabilité environnementale – trois nouvelles propositions visant à agir plus rapidement et plus résolument contre le changement climatique ont été rejetées par le Conseil fédéral pour les deux premières, et par le Conseil national pour la dernière.
Le Conseil fédéral dit non à l’initiative populaire « Pour une politique énergétique et climatique équitable : investir pour la prospérité, l’emploi et l’environnement (initiative sur le fonds climatique) », déposée par le PS et les Verts. Les partis veulent obliger la Confédération à verser chaque année 0,5 à 1 % du produit intérieur brut dans un fonds. Cela rapporterait entre 3,9 et 7,8 milliards de CHF par an. La Confédération devrait ainsi soutenir, entre autres, des mesures visant à décarboniser les transports, les bâtiments et l’économie, à réduire la consommation d’énergie, à développer les énergies renouvelables et à renforcer la biodiversité. Le Conseil fédéral est d’avis que des moyens suffisants sont aujourd’hui disponibles pour le climat et la biodiversité.
Le Conseil fédéral rejette également l’initiative « Pour une politique climatique sociale financée par l’impôt (initiative pour un avenir radieux) » de la Jeunesse socialiste. Les initiants veulent introduire un impôt de 50% sur les successions et les donations à partir d’un montant exonéré de 50 millions de CHF. Les recettes annuelles de 6 à 7 milliards de CHF doivent être utilisées pour lutter contre la crise climatique de manière socialement équitable et pour restructurer l’ensemble de l’économie. Selon le Conseil fédéral, l’initiative crée de fausses incitations. Et il craint que l’introduction d’un impôt sur les successions pour les très grandes fortunes affaiblisse l’attractivité de la Suisse pour les personnes fortunées. La dernière votation sur un impôt fédéral sur les successions remonte à 2013. Celui-ci prévoyait une taxe de 10% sur les fortunes de plus de 2 millions de CHF, affectée à l’AVS. Il a été rejeté. Plus d’informations sur Watson, ici et ici sur SRF et dans la NZZ.
Les deux initiatives seront ensuite débattues par le Parlement. Une troisième intervention est déjà en discussion au Parlement : l’initiative pour la responsabilité environnementale des jeunes Verts. Ils demandent que la pollution de l’environnement en Suisse soit réduite dans un délai de dix ans de manière à respecter les limites planétaires définies scientifiquement. Cela concerne les domaines du climat, de la disparition des espèces, de la déforestation et de la pollution de l’air, de l’eau et des sols. Le Conseil national a rejeté l’intervention lors de la session d’été ; il a été renoncé à un contre-projet direct. Le Conseil des États sera le prochain à se pencher sur la question. La majorité du Conseil national est d’avis que l’initiative aurait des conséquences économiques et sociales extrêmes et qu’une mise en œuvre dans le délai de dix ans demandé n’est pas possible. Selon une étude du Conseil fédéral, l’empreinte par habitant devrait être réduite de plus de 90% par rapport à 2018 pour les gaz à effet de serre, de 70% pour la biodiversité et d’environ 50% pour l’azote. Plus d’informations sur SRF et dans la NZZ.
Moins de gaz à effet de serre et des approches de stockage
En 2022, les émissions de gaz à effet de serre en Suisse ont diminué de 3,5 millions de tonnes (7,8%) par rapport à l’année précédente, pour atteindre 41,6 millions de tonnes (calculées en équivalents CO2 ). Par rapport à 1990, les émissions étaient inférieures de 24%, comme le montre l’inventaire annuel des bâtiments à effet de serre de l’OFEV. Une baisse a surtout été observée dans le secteur du bâtiment. Cela est dû à un hiver exceptionnellement doux, qui a permis de brûler moins de gaz et de mazout. L’installation de pompes à chaleur a également porté ses fruits. Les émissions de l’industrie ont également baissé. L’installation d’un catalyseur au siège d’Arxada AG (anciennement Lonza AG) à Viège (afin que moins de gaz hilarant ne s’échappe), ainsi que les mesures recommandées par le Conseil fédéral durant l’hiver 2022/2023 pour économiser le gaz naturel ont notamment eu un impact. Plus d’informations sur Watson.
Les émissions dues aux transports sont restées pratiquement inchangées. Comme les émissions des bâtiments et de l’industrie sont en baisse, la part des transports a augmenté pour atteindre 33%. Dans l’agriculture, les émissions ont légèrement diminué ; elle est à l’origine de 16% des émissions nationales de gaz à effet de serre. La moitié de ces émissions est due à la production laitière. Dans la NZZ, on peut lire comment le projet « Klimastar Milch » vise à réduire l’empreinte CO2 du secteur. Le projet lancé par Nestlé et Emmi, deux des plus grands transformateurs de lait du pays, est soutenu par la Confédération. Il n’est toutefois pas prévu de réduire le nombre d’animaux.
Pour atteindre ses objectifs climatiques d’ici 2050, la Suisse cherche des moyens de stocker le CO2 . Selon les calculs actuels, cela représentera en 2050 environ 12 millions de tonnes par an (plus d’un quart des émissions actuelles de gaz à effet de serre), qui ne pourront pas être évitées. Dans la NZZ, on peut lire que la Suisse vise un accord avec la Norvège afin de pouvoir à l’avenir stocker du CO2 à grande échelle dans le fond marin au large des côtes norvégiennes. La technologie « Carbon capture and storage » (captage du CO2 à la source et stockage) nécessaire à cet effet n’est toutefois pas encore au point.
En Suisse aussi, la Confédération cherche des solutions pour stocker le CO2 . Cela doit être testé dans un ancien puits de forage de la Nagra à Trüllikon, dans le canton de Zurich, comme l’écrit le Tages-Anzeiger. Mais il faudra sans doute attendre encore 15 à 20 ans avant que le stockage ne soit disponible.
Les forêts suisses stockent également des gaz à effet de serre. L’hebdomadaire WOZ Die Wochenzeitung présente un rapport critique sur un projet de compensation à Davos/Prättigau. Des propriétaires forestiers y ont fait enregistrer plus de 13’000 hectares de forêt pour la compensation climatique, ce qui correspond à la surface des lacs de Zurich et de Bienne. La compagnie aérienne Swiss fait partie des acheteurs de certificats. Les spécialistes y voient surtout un potentiel de greenwashing. En effet, la performance des forêts en tant que puits de CO2 est déjà prise en compte par la Confédération dans l’obligation de réduire les émissions de CO2 . Ci-dessous, plus d’informations sur les pratiques et les technologies permettant d’éliminer le CO2 de l’air. L’association économique swisscleantech a publié une prise de position sur l’élimination du CO2 de l’atmosphère. Elle y demande qu’en cas d’émissions négatives, l’accent soit mis sur une gestion durable des forêts (charbon végétal ou produits durables à base de bois) ainsi que sur le captage lors de l’incinération des déchets et de la production de ciment. Parallèlement, le prix du CO2 pour toutes les émissions doit être augmenté de manière à couvrir les coûts externes.
Installations solaires : questions juridiques en suspens et potentiel accru
Actuellement, 48 projets solaires alpins sont en cours de planification, comme le montre une liste de l’Association des entreprises électriques suisses (dernière mise à jour 02.05.2024) ; en mars, il y en avait 47. Une demande de permis de construire a été déposée pour dix des installations prévues, comme le montre un aperçu de l’Office fédéral de l’énergie.
Quatre projets ont été autorisés par la première instance : « Vorab », « Nalps » et « Scharinas » dans le canton des Grisons ainsi que « Morgeten Solar » dans le canton de Berne. La Fondation pour la protection et l’aménagement du paysage, le Club alpin suisse et Mountain Wilderness ont déposé un recours auprès du Tribunal administratif bernois contre la décision prise dans le Simmental bernois. Au vu des nombreuses questions juridiques en suspens et de l’important effet de précédent, un examen judiciaire serait nécessaire pour clarifier le droit. Plus d’informations sur la SRF, le pv magazine, le Thuner Tagblatt et le Blick. Dans le Saanlenland, canton de Berne, les électeurs ont rejeté pour la deuxième fois le projet Solsarine, rapporte le Berner Zeitung.
Pour les installations solaires alpines qui fournissent au moins 10% de l’électricité au réseau d’ici fin 2025, la Confédération paie jusqu’à 60% des coûts. Mais même avec ces subventions, il n’est pas certain que ces installations soient rentables. SRF montre comment les coûts de construction élevés des projets alpins et les bas prix de l’électricité pèsent sur la facture.
Avant même la votation sur la loi sur l’électricité, le Conseil fédéral avait mis en consultation un projet d’ordonnance. Les tarifs minimaux qui y sont proposés inquiètent le secteur. Dans certains cas, le tarif garanti pourrait être de zéro centime par kilowattheure. L’association energie-wende-ja critique les tarifs minimaux trop bas. Plus d’informations dans le Berner Zeitung.
Bâle montre comment l’énergie solaire peut être développée sans installations au sol dans la nature. Le canton qui a l’objectif climatique le plus ambitieux de Suisse (zéro net d’ici 2037) veut étendre l’obligation d’installer des systèmes PV des bâtiments neufs aux bâtiments existants. Les propriétaires qui ne respectent pas cette obligation dans les 15 ans doivent payer une taxe de remplacement annuelle. Plus d’informations dans le Basler Zeitung. Dans le canton de Schaffhouse, une proposition similaire a été rejetée (voir Blick).
Que ce soit en montagne ou en ville : Les installations photovoltaïques profitent de l’augmentation constante du rayonnement solaire depuis 1980. MétéoSuisse montre comment, grâce à l’amélioration de la qualité de l’air et à la diminution des nuages, davantage d’énergie solaire atteint la surface de la terre. Mais cela signifie aussi qu’il fait de plus en plus chaud.
Opposition aux centrales de réserve
La consommation d’électricité en Suisse a baissé de 1,7% en 2023 pour atteindre 56,1 milliards de kilowattheures. L’Office fédéral de l’énergie ne donne toutefois pas les raisons de ce recul. Seuls les facteurs ayant un effet d’augmentation de la consommation sont mentionnés : La croissance économique et démographique ainsi que l’augmentation des besoins en chauffage par rapport à 2022.
Une analyse approfondie, qui sera publiée en octobre, devrait apporter des éclaircissements. Les raisons possibles sont l’augmentation des prix de l’électricité et les gains d’efficacité réalisés. Parallèlement, la production d’électricité a augmenté de 13,5% pour atteindre 72,1 milliards de kWh. Ce sont surtout les centrales hydroélectriques qui ont fourni plus d’énergie. En conséquence, la Suisse exporte 6,4 milliards de kWh d’électricité de plus qu’elle n’en importe : en 2022, c’était l’inverse, avec 3,4 milliards de kWh de plus importés qu’exportés.
Il n’est donc pas surprenant que la Commission fédérale de l’électricité considère la sécurité de l’approvisionnement en électricité comme « garantie ». Le ministre de l’Énergie Alfred Rösti voit les choses différemment. Son département fait avancer la construction de plusieurs grandes centrales de réserve fossiles et a lancé un appel d’offres. L’Office fédéral de la justice s’y oppose désormais, écrit la NZZ. Les juristes estiment que le plan est anticonstitutionnel. L’appel d’offres n’aurait pas dû être lancé, car il n’y a pas de base juridique. En parallèle, des experts en énergie montrent dans la NZZ qu’il existe des alternatives moins chères et plus écologiques.
Ce n’est pas le premier revers pour Rösti : en février déjà, le Tribunal administratif fédéral avait décidé que le Conseil fédéral n’aurait pas dû accorder d’autorisation d’exploitation à la centrale de réserve de Birr. Le Conseil fédéral n’avait pas pu expliquer pourquoi il fallait s’attendre à une situation de pénurie d’électricité.
La Suisse a besoin de nouveaux scénarios
L’hiver dernier a été le plus chaud jamais mesuré en Suisse. Selon le bulletin climatique de MétéoSuisse, la température moyenne en hiver (de décembre 2023 à février 2024) a été de 0,9 °C, soit 2,2 fois plus que la moyenne des années 1991-1992. C’est 2,8 °C de plus que la moyenne des années 1991-2020. Les trois mois ont été trop chauds ; l’écart le plus important par rapport à la norme a été de 4,6 °C en février.
Le changement climatique n’entraîne pas seulement une hausse des températures, mais aussi une augmentation de la fréquence des précipitations extrêmes. Le laboratoire Mobiliar pour les risques naturels de l’université de Berne peut calculer les conséquences des dommages grâce à un nouvel outil. Il en ressort que si le niveau de l’eau monte, le potentiel de dommages augmente brusquement. Une augmentation de 10% du débit des cours d’eau par rapport à la valeur maximale actuelle entraîne une augmentation de 40% des dommages aux bâtiments en Suisse. Une augmentation de 20% du débit entraîne 80% de dommages supplémentaires. Plus d’informations à ce sujet dans le Tages-Anzeiger et la NZZ.
Comment le climat évolue-t-il en Suisse ? Quelles sont les conséquences prévisibles du changement climatique ? Les scénarios climatiques que MétéoSuisse élabore régulièrement depuis 2024 répondent à ces questions. Les prévisions futures ont été actualisées pour la dernière fois en 2018. De nouveaux scénarios (Climat CH2025) sont maintenant en préparation. Ils seront disponibles fin 2025 et mettront l’accent sur l’évolution des extrêmes climatiques. Au vu des changements importants déjà observés, des ajustements significatifs sont attendus. Pour en savoir plus, voir SRF. Le changement climatique entraîne également des changements sociaux, économiques et politiques. Le projet de recherche « Scénarios socio-économiques » du National Centre for Climate Services (NCCS) étudie ce que cela signifie pour la Suisse à horizon 2100. Pour en savoir plus, consultez Infras.
La Confédération a fait étudier l’impact des mesures de lutte contre le changement climatique sur les finances publiques. Le rapport « Perspectives à long terme des finances publiques de la Suisse 2024 » part du principe que les mesures de protection du climat freineront la croissance économique, ce qui réduira les recettes publiques. L’étude présente toutefois un défaut majeur : elle néglige l’utilité des mesures de protection du climat, c’est-à-dire lorsque les dommages liés au climat peuvent être évités. Les spécialistes du climat sont convaincus qu’à long terme, les coûts de l’inaction sont six fois plus importants que les coûts des mesures prises, voir l’article ci-dessous. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger et la NZZ.
La protection des espèces est négligée et minimisée par l’OFEV
Le 22 septembre 2024, nous voterons sur l’initiative pour la biodiversité, déposée par des organisations de protection de la nature. Elle demande que la Confédération et les cantons consacrent davantage de surfaces et de moyens financiers à la sauvegarde de la biodiversité.
Le Parlement avait rejeté l’initiative et renoncé à un contre-projet. Au lieu de renforcer la protection des espèces, le Conseil national et le Conseil des Etats sont revenus sur une mesure déjà adoptée et ont supprimé des surfaces écologiques supplémentaires. Il y a trois ans, le Conseil fédéral et le Parlement avaient décidé que des ourlets et des bandes de plantes à fleurs et d’herbes sauvages seraient semés sur 3,5% des terres arables. Il s’agissait d’un élément important du paquet de mesures qui avait été ficelé juste avant la votation sur l’initiative sur les pesticides et l’initiative sur l’eau potable. Mais après le rejet des deux initiatives, le Parlement a cédé à la pression du lobby agricole et a reporté deux fois l’introduction des surfaces de promotion de la biodiversité. Aujourd’hui, la mesure a été entièrement supprimée. Plus d’informations dans le Blick, le Tages-Anzeiger (paywall) et la NZZ.
Les faits sont pourtant clairs : par rapport aux autres pays industrialisés, la Suisse présente le plus grand nombre d’espèces menacées et met sous protection la plus petite surface. Pourtant, le lobby paysan ainsi que l’OFEV appréhendent l’état de la biodiversité de manière beaucoup plus positive. La République montre comment cela est possible. Les rapports qui contiennent des faits désagréables sur la biodiversité sont « arrangés ». C’est ce que montre la comparaison du rapport officiel « Effets du plan d’action biodiversité » avec les expertises internes et externes qui ont servi de base. Les adaptations ont été effectuées par l’état-major du conseiller fédéral UDC Albert Rösti, qui dirige l’OFEV depuis 2023. Les politiciens et les organisations environnementales critiquent vivement cette procédure.
Décisions de la Confédération et des cantons
Le 9 juin, plusieurs cantons ont voté sur des interventions relatives au climat et à l’énergie (l’aperçu des résultats dans le Baublatt) :
- Le canton d’Argovie dispose désormais d’un article sur le climat dans sa constitution. Le canton et les communes sont ainsi tenus de s’engager pour limiter le changement climatique. Il manque toutefois des mesures ou des objectifs concrets.
- Dans le canton de Bâle-Campagne, la révision de la loi cantonale sur l’énergie a été adoptée. Elle prévoit d’augmenter la part des énergies renouvelables dans la consommation totale hors mobilité à au moins 70% d’ici 2030.
- Schaffhouse a refusé l’introduction d’une obligation d’utiliser l’énergie solaire. Une installation solaire aurait dû être mise en place sur les bâtiments appropriés lors de nouvelles constructions ou de transformations.
- Dans le canton de Zoug, une initiative pour le vélo a été rejetée. Elle demandait un réseau cyclable sûr, direct et continu.
La Suisse ne participe plus au programme européen d’observation de la Terre Copernicus. C’est ce qu’a décidé le Conseil fédéral au vu de la « situation financière tendue de la Confédération ». Copernicus rassemble de grandes quantités de données d’observation et fournit les bases de la recherche climatique. La Confédération espère que les spécialistes du climat continueront à avoir accès à ces données, même si la Suisse ne verse plus rien au programme. Les chercheurs suisses estiment que cette décision est à court terme et égoïste. Plus d’informations sur SRF.
Afin de rendre le vélo plus sûr et plus attrayant, de nombreux acteurs se sont réunis en Suisse. En font partie, outre les offices fédéraux, les cantons et les communes, les entreprises de transport, les fabricants de vélos, les entreprises, les associations et les hautes écoles. L’Office fédéral des routes a présenté la feuille de route vélo correspondante.
Politique climatique internationale
Financement: trop peu pour les pauvres, trop pour les riches
La plupart des pays trichent
Les pays industrialisés n’ont tenu leurs promesses d’allouer 100 milliards de dollars par an aux pays les plus pauvres que parce que, selon une nouvelle analyse de Carbon Brief, ils ont tout simplement requalifié des milliards de dollars d’aide au développement en « financement climatique ». Cela vaut également pour la Suisse.
Des milliards retournent dans les pays riches
A cela s’ajoute le fait qu’une grande partie du financement climatique pour les pays en développement est retournée aux pays donateurs, comme le montre une recherche de Reuters. Plus de la moitié des financements climatiques ont été accordés sous forme de prêts, souvent assortis de taux d’intérêt élevés et d’autres conditions qui ramènent l’argent vers les pays donateurs.
Lors de la conférence de l’ONU sur le climat qui se tiendra à la fin de l’année à Bakou, les Etats devront se mettre d’accord sur un nouvel objectif global de financement climatique. Les pays riches comme la Suisse sont mis au défi. Deux reportages de SRF à ce sujet, ici et ici.
En outre, la France, le Kenya et la Barbade ont mis en place un groupe de travail chargé d’étudier comment combler le déficit de financement climatique pour les pays du Sud. Ces pays ont besoin d’investissements à hauteur de 2,4 milliards de dollars par an d’ici 2030. Le groupe de travail envisagera des taxes sur les super-riches, sur les billets d’avion, sur les transactions financières, sur la production de combustibles fossiles et sur les bénéfices élevés des entreprises qui produisent des combustibles fossiles.
Un impôt proposé pour les milliardaires
Depuis longtemps, les économistes progressistes demandent que les milliardaires soient davantage taxés. Le gouvernement brésilien assumant désormais la présidence du G20, le monde universitaire a mis ce sujet à l’ordre du jour politique. L’économiste français Gabriel Zucman élabore ainsi une proposition pour un tel « impôt sur les milliardaires ». Celle-ci devrait être présentée aux ministres des Finances du G20 lors de leur réunion en juillet. Une telle taxe est également soutenue par la directrice du FMI, Kristalina Georgieva. Les ministres d’Allemagne, d’Afrique du Sud et d’Espagne ont signé avec le Brésil une lettre de soutien à la taxe. Les ministres soulignent qu’il faut des accords mondiaux et une coopération internationale pour que les milliardaires ne puissent pas simplement déplacer leur fortune vers des pays à faible fiscalité.
Actuellement, il y a environ 3 000 milliardaires dans le monde. Ils ne paient qu’environ 0,5 % de leur fortune au titre de l’impôt sur le revenu des personnes physiques. Un impôt de 2 % pourrait générer des recettes fiscales annuelles supplémentaires de 250 milliards de dollars à l’échelle mondiale, ce qui correspond à peu près aux dommages économiques causés par les phénomènes météorologiques extrêmes dans le monde l’année dernière. Pour en savoir plus, consultez le Guardian, Climate Change News et Heated.
La Chine et le financement climatique
La question de savoir si la Chine, en tant que pays en développement de plus en plus prospère, devrait également contribuer au financement climatique fait depuis longtemps l’objet d’un débat animé. La Chine s’est montrée peu encline à le faire lors des négociations, mais a mis en place un financement alternatif pour le climat via son fonds de coopération climatique Sud-Sud. Vous trouverez plus d’informations à ce sujet dans un long entretien avec un expert chinois sur Carbon Brief. Selon ce dernier, la plus grande contribution de la Chine pourrait être les importants investissements nationaux dans des technologies à faible émission de CO2 abordables, qui pourraient ensuite être utilisées dans le monde entier. L’Allemagne a joué un rôle similaire en subventionnant l’énergie solaire dans les années 2000, ce qui a entraîné une baisse des prix dans le monde entier.
Les pays doivent réduire les émissions pour protéger les océans
En mai, le Tribunal international du droit de la mer a publié un avis juridique : les gaz à effet de serre sont une forme de pollution marine et les gouvernements sont donc tenus de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. C’est la première fois qu’un tribunal international précise les obligations juridiques des gouvernements en matière de climat dans le cadre de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer. L’avis a été adopté à l’unanimité par 21 juges élus par les 169 pays membres de la Convention. Les plaignants pour le climat devant les tribunaux nationaux et régionaux peuvent désormais s’y référer. L’avis devrait également influencer les prochaines négociations internationales sur le climat en Azerbaïdjan, car il confère aux pays en développement concernés un plus grand pouvoir de négociation. Plus d’informations sur Inside Climate News.
Les émissions de la Chine en baisse, un tournant ?
Les émissions de CO2 de la Chine ont baissé de 3% en mars 2024. Au cours des 14 mois qui ont suivi la levée des contrôles « Zéro Covid » du pays et le redémarrage de l’économie, les émissions ont toujours augmenté. Une nouvelle analyse pour Carbon Brief indique que les émissions de la Chine ont atteint un pic en 2023 et qu’elles pourraient maintenant diminuer lentement. Le développement de l’énergie solaire et éolienne, qui a couvert 90% de l’augmentation de la demande en électricité, ainsi que la baisse de l’activité dans le secteur de la construction ont été les facteurs décisifs de la baisse en mars 2024.
La stratégie de transition énergétique de la Chine a changé radicalement en 2020, lorsque le président Xi Jinping a annoncé que la Chine devrait atteindre la neutralité carbone avant 2060. Le nouveau China Energy Transformation Outlook 2023 modélise trois scénarios pour la transition énergétique de la Chine. Dans le scénario le plus ambitieux, le secteur énergétique de la Chine sera exempt de combustibles fossiles d’ici 2055, tandis que certaines industries continueront à utiliser une petite quantité de charbon et de gaz, compensée par le captage et le stockage du carbone. Plus sur Carbon Brief.
La politique climatique de l’UE influence la Chine
Dans le cadre de son système de gestion de l’empreinte carbone, la Chine a publié une méthodologie pour calculer les émissions de gaz à effet de serre de 100 produits « importants » à forte intensité de CO2 (qui devraient être portés à 200 d’ici 2030). Il est fort probable que la Chine réagisse ainsi à l’introduction du mécanisme de compensation des émissions de CO2 de l’UE (CBAM). Le CBAM vise à garantir que les biens importés de pays ayant des objectifs moins stricts en matière de protection climatique paient le même prix pour le CO2 que les biens produits dans l’UE. Pour ce faire, des droits de douane sont appliqués à certains biens importés, en tenant compte de leurs émissions de CO2 . Le CBAM vise à inciter les partenaires commerciaux internationaux à réduire leurs émissions. C’est exactement ce qui semble se passer aujourd’hui en Chine. Plus d’informations sur Asia Financial.
Les énergies renouvelables se développent rapidement, mais pas assez vite
L’année dernière, on a assisté à une augmentation record de 560 GW de la capacité d‘énergie renouvelable, soit une hausse de 64% par rapport à 2022. Certains pays dépassent même leurs objectifs nationaux. Ceci est du au fait que les énergies solaire et éolienne sont moins chères que les combustibles fossiles. La Chine a développé plus de nouvelles capacités renouvelables que le reste du monde réuni.
Malgré ces mesures politiques et ces tendances, la capacité mondiale des énergies renouvelables ne fera qu’un peu plus que doubler d’ici 2030, et non pas tripler comme cela serait nécessaire, selon une analyse de l’Agence internationale de l’énergie. L’AIE a examiné les stratégies et objectifs nationaux de près de 150 pays et a constaté qu’ils conduiraient à la production d’environ 8 000 GW d’énergies renouvelables d’ici 2030. Cela correspond à environ 70% de ce qui est nécessaire (11 000 GW) pour tripler l’électricité produite à partir de sources renouvelables d’ici 2030. Plus dans le Guardian.
L’énergie éolienne progresse
Selon un nouveau rapport du Global Wind Energy Council (GWEC), 117 GW de nouvelle énergie éolienne ont été installés l’année dernière, soit 50% de plus que l’année précédente. Plus de 65% de ces installations ont été construites en Chine, suivie par les États-Unis, le Brésil, l’Allemagne et l’Inde. L’année dernière, la capacité totale d’énergie éolienne a dépassé pour la première fois le térawatt.
Mais, pour atteindre l’objectif mondial de tripler les énergies renouvelables d’ici 2030, il faudra atteindre deux térawatts d’ici 2030. « Il nous a fallu plus de 40 ans pour atteindre 1 TW. Maintenant, il ne nous reste que sept ans pour installer les 2 TW suivants », a déclaré le directeur général du GWEC, Ben Backwell. La croissance est fortement concentrée sur quelques grands pays. De nombreux autres pays devraient supprimer les obstacles pour pouvoir développer l’énergie éolienne. Les gouvernements devraient également se concentrer beaucoup plus sur la modernisation de leurs réseaux électriques, qui constituent en de nombreux endroits un obstacle majeur au progrès. Plus sur Reuters.
Le graphique ci-dessous montre que la Chine investit 3,7 fois plus dans les énergies renouvelables que dans les combustibles fossiles. L’Europe investit 5,5 fois plus. Les États-Unis et le Canada investissent le plus d’argent dans les combustibles fossiles. Et les pays du Moyen-Orient investissent toujours 5,4 fois plus dans les combustibles fossiles que dans les énergies propres.
Accord sur le plastique et commerce des indulgences
Il est urgent de lutter contre la pollution plastique, car elle contribue à la crise climatique, à la perte de biodiversité et à la pollution chronique. En avril, le quatrième cycle de négociations des Nations unies pour un accord mondial contre les déchets plastiques a eu lieu. Il devrait être adopté en 2025. En amont de la réunion, une nouvelle étude a clairement indiqué que seule une réduction de la production de nouveaux plastiques permettrait de réduire considérablement la pollution plastique. Selon une estimation, la production de plastique a généré en 2019 environ 6% des émissions mondiales de CO2 – autant que 600 centrales électriques au charbon. On s’attend à ce que l’utilisation du plastique, en particulier en Asie, en Afrique et en Amérique latine, puisse doubler ou tripler d’ici 2050.
24% des déchets plastiques proviennent de Coca-Cola, Danone, Nestlé, Pepsico et des entreprises de tabac Altria et Philip Morris International, selon une nouvelle étude publiée dans Science Advances. L’industrie du plastique montre peu d’intérêt à réduire sa production et veut désormais miser davantage sur les certificats plastiques. Une entreprise qui utilise ou produit du plastique peut obtenir des certificats qui correspondent à la réduction des déchets plastiques ailleurs. De tels certificats plastiques ont été lancés en 2021 avec l’initiative 3R. Verra, l’un des plus grands contrôleurs de certificats CO2 , est l’un des plus fervents défenseurs de ces certificats plastiques. Cette compensation est fortement critiquée par les défenseurs de l’environnement, car elle pose de nombreux problèmes sociaux et environnementaux, à l’instar des compensations de CO2 . Pour en savoir plus sur l’accord sur le plastique, voir Klimareporter et The Guardian ; pour en savoir plus sur les certificats plastiques, voir New Republic.
Politique climatique européenne
Les plans climatiques des États membres de l’UE ne sont pas sur la bonne voie
Afin de pouvoir comparer les politiques climatiques des États membres de l’UE, ces derniers sont tenus de présenter leurs politiques nationales en matière d’énergie et de climat pour une période de 10 ans dans les plans nationaux pour l’énergie et le climat (PNEC). Les PNEC actuels couvrent la période 2021-2030. D’ici fin juin 2024, les Etats membres devront présenter à la Commission un rapport d’avancement de leurs PNEC.
Un nouveau rapport de l’association climatique CAN Europe atteste que les plans présentés par 18 pays examinés ne sont pas suffisants pour respecter l’accord de Paris sur le climat ou les objectifs 2030 de l’UE. Cela n’est pas compatible avec le droit européen. L’association appelle donc à plus d’ambition dans les Etats membres et exhorte la Commission à faire pression pour plus de protection du climat dans les Etats membres.
Bilan positif du Green Deal de l’UE
Lors de son entrée en fonction, la présidente de la Commission Ursula von der Leyen (CDU) s’est fixé l’objectif ambitieux de faire de l’Europe le premier continent climatiquement neutre d’ici 2050. Pour réaliser ce projet, de nombreux actes législatifs ont été introduits ou actualisés dans le cadre du « Green Deal » global de l’UE. Aujourd’hui, au vu de la législature actuelle, il est possible de dresser un bilan : l’Europe s’est clairement engagée à mieux protéger le climat, mais il reste encore beaucoup à faire pour atteindre l’objectif de la neutralité climatique d’ici 2050.
Par exemple, une loi européenne sur le changement climatique a été introduite, le système européen d’échange de quotas d’émission a été réformé, les objectifs de développement des énergies renouvelables ont été augmentés, diverses directives sectorielles ont été renforcées et un fonds social pour le climat a également été créé. Cependant, tous les projets n’ont pas été mis en œuvre avec succès. Ainsi, la réforme de la directive sur la taxation de l’énergie est restée sans succès jusqu’à présent. Un rapport est disponible sur le site de la Fondation pour le droit à l’énergie environnementale.
Les résultats positifs de cette politique se font déjà ressentir. Par exemple, les émissions du secteur de l’électricité ont diminué de 20 % depuis 2019, comme le montre une analyse de Carbon Brief. En proportion, le secteur de l’électricité de tous les États membres de l’UE est plus propre qu’il y a cinq ans. L’Allemagne a obtenu le plus grand succès en termes absolus, suivie par le Portugal, la Lettonie et la France en termes relatifs. Selon Fridays for Future, le Green Deal a déjà permis de corriger la trajectoire climatique de l’UE de plus d’un degré. Malgré cela, l’UE n’est pas sur une trajectoire suffisante pour respecter les objectifs climatiques de Paris, selon le Climate Action Tracker. Les organisations environnementales comme le WWF ou le DNR demandent donc à la nouvelle Commission de faire davantage d’efforts en matière de protection du climat.
L’Europe a voté : Le virage à droite n’a pas eu lieu
Entre le 6 et le 9 juin 2024, des élections au Parlement européen ont été organisées dans les États membres de l’UE. Malgré les gains parfois importants du Parti populaire européen (PPE) conservateur (+10 sièges) et du Parti conservateur et réformateur européen (ECR) et du Parti identité et démocratie (ID) de droite (+4 et +9 sièges) au Parlement européen, le virage à droite n’a pas été aussi important que beaucoup le craignaient avant les élections (voir par exemple Euractiv ou le Centre fédéral pour l’éducation politique). Les sociaux-démocrates du S&D ont perdu quatre sièges. Les Verts et le parti libéral Renew Europe ont toutefois subi des pertes importantes. Ils devront ainsi perdre respectivement 18 et 23 sièges au cours de la prochaine législature.
En Autriche et en Allemagne notamment, le parti d’extrême droite FPÖ a enregistré une nette progression avec plus de 25 % des voix totales, tout comme l’AfD avec un peu moins de 16 %. Juste devant l’ÖVP, le FPÖ est ainsi devenu la première force en Autriche. L’AfD est arrivée en deuxième position en Allemagne. Avec une nette avance de 16 %, les nationalistes et la droite populiste du Rassemblement national sont devenus la première force en France avec plus de 31 % des voix. En Italie également, les « Fratelli d’Italia » de droite l’ont emporté avec près de 29 %. Le camp pro-européen du président Macron n’a obtenu que 15 %. Après ce cuisant revers électoral, Macron a annoncé de nouvelles élections à l’Assemblée nationale pour fin juin 2024 (Spiegel). Des informations détaillées sur les résultats peuvent être consultées ici.
Certains États membres ont toutefois connu des évolutions plus positives. Ainsi, aux Pays-Bas, sous la direction de l’ancien commissaire européen au climat Frans Timmermans, l’alliance électorale GroenLinks-PvdA a pu progresser et devenir la première force. Dans les trois pays nordiques de l’UE, le populisme de droite n’a pas non plus fait recette, comme le titre le journal télévisé.
Outre les nouvelles élections annoncées en France et d’autres changements politiques, il reste à voir quelles seront les conséquences de ces élections pour une politique climatique et environnementale progressiste et ambitieuse de l’UE. Ainsi, dans les semaines à venir, le Conseil de l’UE définira l’agenda stratégique de la nouvelle Commission.
Il faudra également voir si la présidente en exercice de la Commission, Ursula von der Leyen, mise sur une alliance au centre entre les S&D, les libéraux de Renew Europe et son PPE, ou si elle se dirige vers le bloc de droite. « Le Green Deal [est] entre les mains des conservateurs », a écrit le Tagesspiegel Background (Paywall). « C’est maintenant que le mur coupe-feu doit être dressé contre l’extrême droite », a averti le DNR.
Allemagne
Cour : le gouvernement fédéral doit fournir plus de protection climatique
L’association Deutsche Umwelthilfe a de nouveau remporté une victoire importante en déposant une plainte devant le tribunal administratif supérieur de Berlin-Brandenburg. Le tribunal a demandé au gouvernement fédéral d’élargir le « programme de protection du climat » existant par des mesures supplémentaires. Selon le tribunal, le programme actuel ne suffit pas pour atteindre l’objectif de protection climatique fixé pour 2030. Le tribunal a constaté que le programme de protection climatique 2023 souffrait de défauts méthodologiques et reposait en partie sur des hypothèses irréalistes. Le directeur fédéral de la DUH, M. Resch, voit dans ce jugement « une gifle méritée pour la pseudo-politique de protection du climat du gouvernement fédéral ».
Le jugement n’est pas encore définitif, une révision a été autorisée. Reste à savoir quel sera l’impact de la récente mise à jour de la loi fédérale sur la protection du climat, vivement critiquée par les organisations environnementales.
L’objectif climatique 2030 ne sera probablement pas respecté après tout
Il n’y a pas qu’au tribunal que le gouvernement fédéral a dû entendre qu’il n’agissait pas assez dans l’ensemble en matière de protection du climat. Le « Conseil d’experts pour les questions climatiques » (plus d’infos ici) a également présenté début juin un rapport spécial qui contredit le ministre de l’Economie Habeck. En effet, ce dernier annonçait encore en mars que les objectifs de protection du climat permettaient à l’Allemagne d’être globalement sur la voie de la protection du climat. Malgré d’importants succès en matière de protection du climat, le professeur Henning, président du conseil d’experts, est arrivé à la conclusion suivante : « Au total, nous ne pouvons pas confirmer […] la réalisation des objectifs pour les années 2021 à 2030, mais partons au contraire du principe que les objectifs ne seront pas atteints ».
Le Conseil d’experts critique le fait que les succès dans tous les grands secteurs sont moins importants que ce qui avait été annoncé dans le rapport de projection. Cela s’explique notamment par le fait que les fonds disponibles pour la transformation sont moins importants que prévu. Le conseil d’experts recommande ainsi d’examiner rapidement des mesures supplémentaires de protection du climat. Selon le ministère fédéral de l’Économie et de la Protection du climat, d’autres mesures seront prises conformément à la loi modifiée sur la protection du climat si le conseil d’experts constate l’année prochaine que l’objectif n’est toujours pas atteint. Plus d’informations sur l’expertise chez Tagesschau et Der Spiegel.
Les organisations environnementales ont critiqué la nouvelle confirmation que la politique de protection du climat du gouvernement fédéral n’est pas suffisante. Le WWF a commenté que « des estimations approximatives ne suffisent pas en matière de protection du climat », tandis que le BUND estime que les objectifs climatiques sont menacés par la « politique d’austérité draconienne » du gouvernement fédéral.
De vastes manifestations pour la protection du climat et contre l’extrême droite avant les élections européennes
Le 31 mai, Fridays for Future a appelé, dans le cadre d’une alliance d’autres associations, à une grève du climat pour les élections européennes. Selon les médias, des milliers de personnes sont descendues dans les rues d’Allemagne pour protester en faveur d’une meilleure protection du climat dans la politique européenne et pour s’opposer clairement à l’extrémisme de droite. Des appels à manifester ont également été lancés dans d’autres pays européens. L’activiste climatique Carla Reemtsma a lancé une mise en garde contre d’éventuelles alliances avec des extrémistes de droite au Parlement européen : « Les négationnistes du climat ne doivent pas être des partenaires de coalition ». Le mouvement a appelé à sortir des énergies fossiles d’ici 2035 et à doubler les investissements dans les énergies renouvelables et les industries neutres pour le climat.
Le 8 juin également, un jour avant les élections européennes en Allemagne, des dizaines de milliers de personnes sont descendues dans la rue sous le slogan « Pour une démocratie forte partout en Europe : stopper l’extrémisme de droite, défendre la démocratie« . Les organisations sociales, environnementales et syndicales ont exigé le développement de normes sociales et environnementales à l’échelle européenne ainsi que le renforcement des investissements d’avenir.
La loi sur le stockage du CO2 crée de la frustration
Le captage et le stockage du CO2 (« Carbon Capture and Storage », CCS) suscite depuis longtemps des tensions dans la politique climatique allemande. Certains y voient un élément central de la protection du climat, d’autres un danger flagrant pour l’environnement. Fin mai, le cabinet fédéral a adopté un projet de loi actualisé sur le stockage du carbone (KSpG). A l’avenir, le captage et le stockage de CO2 dans les fonds marins devraient être autorisés pour les émissions provenant de la production d’acier et de ciment ainsi que de l’incinération des déchets – des secteurs où la décarbonisation complète n’est guère possible autrement. Il devrait aussi être possible de stocker du carbone sous terre.
Les organisations environnementales émettent des réserves quant à la protection du climat et de l’environnement. La critique porte en particulier sur le fait que les émissions de la production d’électricité à partir de gaz naturel, qui pourraient être évitées par l’utilisation d’énergies renouvelables, doivent également être stockées. Le WWF a estimé qu’il s’agissait d’un « laissez-passer pour les centrales à gaz ». Le BUND y voit un affaiblissement du tournant énergétique. Des politiciens du climat issus des rangs du gouvernement ont également critiqué le projet de loi, estimant qu’il dépassait les limites du contrat de coalition. Pour en savoir plus, consultez Klimareporter, taz et FAZ.
La crise climatique visible
Records de température et vagues de chaleur mortelles
Durant l’été 2023, il n’a jamais fait aussi chaud dans l’hémisphère nord depuis 2000 ans. C’est le résultat d’une analyse des anneaux de croissance des arbres. La largeur des anneaux que forment les arbres chaque année donne une indication sur la chaleur de l’été. Pour l’étude publiée dans Nature, les températures estivales ont été reconstituées année après année. Il s’est avéré que la température de l’été dernier était supérieure d’au moins 0,5 °C à celle de l’année 246 av. J.-C., l’été le plus chaud avant le début des mesures directes de température. Plus d’informations dans la NZZ (paywall) et dans le Scientific American.
La chaleur exceptionnelle se poursuit en 2024 : en avril et en mai, les températures les plus élevées depuis le début des relevés ont été mesurées, selon le service européen de climatologie Copernicus. En avril, la température moyenne à la surface du sol était de 15,03 °C. C’est 0,67 °C de plus que la moyenne des années 1991-2020 pour le mois d’avril et 1,58 °C de plus que la période préindustrielle (1850-1900). En mai, les écarts étaient tout aussi importants. Depuis un an, une nouvelle valeur maximale a donc été enregistrée chaque mois. Le Tages-Anzeiger (paywall) fournit un aperçu de ce brusque réchauffement. Le graphique ci-contre, de Copernicus, montre à quel point les valeurs sont extrêmes.
Selon une analyse de CarbonBrief, la Terre pourrait dépasser le seuil de 1,5°C à la fin des années 2020 ou au début des années 2030. Cela ne signifie pas que la limite définie dans l’accord de Paris sur le climat sera dépassée dans un an ou même deux. Ces températures annuelles incluent l’influence à court terme des variations climatiques naturelles comme El Niño. Le dépassement de 1,5 °C se réfère plutôt au réchauffement à long terme.
Près de 70% des terres émergées de la planète se trouvent dans l’hémisphère nord. Près de 90% de la population mondiale y vit. Cela signifie que jusqu’au mois d’août, de très nombreuses personnes peuvent être exposées à une chaleur exceptionnelle. La situation en Inde est extrême. Pour la troisième fois consécutive, il y règne une chaleur exceptionnelle dès le début de l’été. Les annonces de décès se sont multipliées et il est encore difficile d’en évaluer l’ampleur. Il est clair que le changement climatique rend les périodes de chaleur extrême plus fréquentes, plus longues et plus violentes. Les scientifiques mettent en garde contre des conséquences qui pourraient mettre en danger la vie de plus d’un milliard de personnes. Pour en savoir plus, consultez Nature, le NY Times et le blog de l’auteur sur le climat Bill McKibben.
En avril, une vague de chaleur en Afrique de l’Ouest avait coûté la vie à des centaines ou des milliers de personnes, les chiffres exacts ne sont pas disponibles. Une étude du World Weather Attribution Group montre que la hausse des températures dans la région n’aurait pas été possible sans le changement climatique provoqué par l’humain. Plus d’informations sur NPR.
Le changement climatique et la chaleur qui en découle entraînent des risques supplémentaires pour la santé et la sécurité de 70% de la main-d’œuvre mondiale. C’est ce que révèle l’Organisation internationale du travail (OIT) dans un rapport. La chaleur extrême peut entraîner des coups de chaleur, une déshydratation grave et un épuisement pouvant aller jusqu’à la mort. Parallèlement, le risque d’accident augmente. La protection du travail existante ne suffit plus, constatent les auteurs de l’étude. Plus d’informations sur klimareporter.
Le podcast treibhauspodcast.ch s’intéresse également aux vagues de chaleur. Le dernier épisode montre pourquoi les chaleurs exceptionnelles deviennent dangereuses pour la santé (et même la vie) de plus en plus de personnes. Des solutions y sont présentées pour protéger les personnes contre les vagues de chaleur, comme par exemple les abris climatiques à Barcelone. Les océans se réchauffent de plus en plus
Les océans se réchauffent également de plus en plus. Depuis mai 2023, la température globale à la surface de l’océan n’a jamais été aussi élevée chaque jour, rapporte la BBC. Des eaux plus chaudes peuvent entraîner des cyclones plus violents. Et elles provoquent un blanchiment catastrophique des coraux. Les récifs coralliens sont les écosystèmes marins les plus riches en espèces. Plus de la moitié d’entre eux sont touchés par le blanchiment ; la situation est particulièrement grave dans la Grande Barrière de corail en Australie, rapporte Nature. Pour l’océanographe Mike Meredith, du British Antarctic Survey, ce sont « de véritables signes que l’environnement pénètre dans des zones où nous ne voulons vraiment pas qu’il pénètre, et si cela continue, cela aura de graves conséquences ».
Parmi les raisons du fort réchauffement de la surface des océans, les spécialistes discutent depuis longtemps de l’influence que peuvent avoir de nouvelles règles pour la navigation. Depuis 2020, la teneur en soufre du diesel des bateaux est plafonnée. Depuis lors, les bateliers émettent moins de dioxyde de soufre. Une étude de Nature montre désormais que les nouvelles règles réduisent certes de manière spectaculaire la pollution atmosphérique des navires. Mais jusqu’à présent, le dioxyde de soufre avait pour effet d’augmenter la réflexion de la lumière du soleil à la surface de l’eau. Cet effet de refroidissement a désormais disparu. Ainsi, une expérience de géo-ingénierie (via l’émission de dioxyde de soufre) menée depuis des décennies a pris fin brutalement. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger (paywall).
Inondations à grande échelle autour du globe
Des précipitations extrêmes ont provoqué de graves inondations et des ravages dans de nombreuses régions du monde. En Papouasie-Nouvelle-Guinée, un glissement de terrain a fait plus de 2000 victimes. Le Premier ministre de cette île du Pacifique a mis en cause les pluies exceptionnelles et les changements de modèles météorologiques, écrit le Guardian.
De grandes parties de l’Afrique de l’Est ont également été dévastées par de violentes précipitations. Des centaines de personnes ont été tuées et des dizaines de milliers ont perdu leur maison. Le Kenya a été durement touché, et la Tanzanie, le Burundi, la Somalie et le Rwanda sont également confrontés à des inondations. Plus d’informations dans le Guardian et sur klimareporter.
Au Brésil, de vastes zones ont été inondées. Près de 170 personnes sont mortes après de fortes précipitations et les maisons de 80 000 personnes ont été détruites. Selon une étude d’attribution, le changement climatique a rendu cet événement extrême deux fois plus probable. Plus d’informations dans le Guardian.
L’Allemagne a également été touchée par de fortes précipitations et des inondations (tagesschau et NY Times, paywall)
Nouvelles de la science du climat
Les émissions mondiales pourraient bientôt baisser
La concentration de CO2 dans l’atmosphère est passée à 419ppm, soit 50 % de plus qu’avant l’industrialisation. Mais il se peut que des années d’efforts pour une meilleure protection du climat aient enfin un peu d’effet. Il faudra sans doute encore un certain temps avant que la concentration ne redescende, mais il est fort probable que les émissions mondiales de CO₂ cessent d’augmenter. Elles ont atteint leur point culminant. C’est la conclusion à laquelle sont parvenues indépendamment trois institutions renommées (Bloomberg NEF, Carbon Brief, Climate Analytics). Le graphique de Bloomberg montre où nous en sommes et où nous devons aller. L’énergie et les transports sont les principaux responsables des émissions, et c’est dans ces secteurs que les émissions sont en baisse. Plus d’informations sur Krautreporter.
Source : Bloomberg
Réduire les émissions est 6x moins cher que d’attendre
Réduire les gaz à effet de serre pour limiter le réchauffement de la planète à 2°C est six fois moins cher que de payer les dommages qui seraient causés autrement. C’est ce que montre une nouvelle analyse publiée dans Nature. Les chercheurs du PIK ont étudié les coûts liés au climat dans 1600 régions du monde. Selon eux, le coût des dommages causés par le changement climatique s’élèvera en moyenne à 38 trilliards de dollars US par an d’ici 2049. Les pays qui souffrent déjà aujourd’hui de la hausse des températures – surtout dans les régions tropicales – devront supporter une plus grande partie du fardeau.
D’ici 2050, le changement climatique entraînera une baisse d’environ 19% du revenu par habitant dans le monde, par rapport à un monde sans crise climatique. D’ici 2100, ce serait 60%. Dans ce modèle, les dommages économiques sont encore plus élevés dans les pays à faible revenu comme le Brésil, certaines régions d’Afrique de l’Ouest et le Pakistan.
Une étude publiée dans Nature Climate Change de l’EPF de Zurich estime la perte de revenus globale à 10-12%, en supposant une augmentation de la température de 3 degrés au-dessus de la moyenne préindustrielle. Comme dans le travail du PIK, les coûts économiques sont considérés comme bien plus élevés dans les pays à faible revenu. Plus d’informations sur Forbes, Nature et NZZ (paywall).
SUV consomment 95 millions de litres de carburant par jour
Si les Sport Utility Vehicles (SUV) étaient un pays, ils seraient le cinquième plus grand émetteur de CO2 au monde. Une analyse de l’Agence internationale de l’énergie a révélé que ces grosses voitures étaient responsables de plus d’un quart de l’augmentation de la demande de pétrole en 2022 et 2023. Durant cette période, la consommation mondiale de carburant a augmenté de plus de 95 millions de litres par jour à cause des SUV. Les SUV ont en grande partie annulé les améliorations de l’efficacité des autres types de voitures. La part des SUV dans les ventes mondiales de voitures atteindra un nouveau record en 2023, avec 48%.
Mais les gens n’ont pas soudainement commencé à aimer davantage les grosses voitures. Une politique mal orientée a permis l’énorme augmentation des SUV, comme le montre une analyse de VOX. Aux Etats-Unis, plus de quatre véhicules (neufs) sur cinq vendus aujourd’hui sont des SUV et des pick-up, contre un peu plus de la moitié en 2013. Sous la pression de l’industrie automobile, le Congrès américain a décidé dans les années 90 d’introduire deux réglementations distinctes en matière d’efficacité : l’une applicable aux voitures particulières et l’autre, plus faible, aux véhicules utilitaires légers, y compris les pick-up et les SUV.
Le passage aux véhicules électriques pourrait encore accentuer la tendance aux voitures surdimensionnées. En effet, selon l’Agence américaine de protection de l’environnement, toutes les voitures électriques sont considérées comme ne produisant pas d’émissions, quelle que soit leur taille. Or, une grande batterie ou une batterie inefficace consomme beaucoup plus d’électricité. Plus d’informations sur Bloomberg, VOX. ABC News d’Australie a publié une analyse comparant les SUV et les VE.
Les gros véhicules tout-terrain et les SUV sont également de plus en plus présents sur les routes suisses. En 2019, ils représentaient près de 40% des voitures neuves. 130 000 voitures neuves de ce type ont été immatriculées, alors qu’elles n’étaient que 50 000 en 2010. Cette augmentation est bien supérieure à la moyenne européenne.
Les voitures hybrides sont nettement moins respectueuses du climat que les vehicules électriques
Cette année, environ 16,6 millions de véhicules électriques seront vendus dans le monde, selon les prévisions mondiales. L’année dernière, ce chiffre était de 14,2 millions. La part de marché mondiale de l’ensemble des véhicules électriques atteindra 19%. Cette augmentation est tirée par la Chine, où la part des voitures rechargeables est passée de 33 % l’année dernière à 44 % en avril. Les ventes de voitures électriques en Chine représentent désormais bien plus de la moitié du marché mondial. En 2023, la Chine a vendu presque trois fois plus de véhicules électriques que l’UE et cinq fois plus que les États-Unis.
Mais tous les véhicules électriques n’ont pas le même impact sur le climat. La Commission européenne rapporte que l’hybride rechargeable typique qui sera vendu en 2021 émettra plus de trois fois plus de CO2 que ce qui est déclaré. La raison principale est que les conducteurs utilisent plus d’essence et moins d’énergie de la batterie que prévu. La consommation de carburant a été mesurée directement sur un grand nombre de véhicules. Dans la pratique, l’hybride essence-plug-in typique présentait des émissions inférieures d’environ 25% seulement à celles d’une voiture à essence pure. Les émissions réelles des véhicules à essence pure et des véhicules diesel étaient également supérieures d’environ 20% aux valeurs obtenues lors des tests standard. L’augmentation actuelle des ventes de véhicules hybrides rechargeables dans le monde devrait donc être freinée par les gouvernements et les autorités de régulation. Pour en savoir plus, consultez la Commission européenne et le Guardian.
Les aliments en décomposition nuisent au climat
Environ un tiers de toute la nourriture produite finit à la poubelle et génère, en pourrissant, des gaz à effet de serre qui réchauffent le climat. S’il s’agissait d’un pays, ce gaspillage alimentaire serait la troisième plus grande source d’émissions de gaz à effet de serre au monde, selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture. Une étude réalisée en 2023 a par ailleurs révélé que les gaz à effet de serre provenant des pertes et des déchets alimentaires représentaient près de la moitié de toutes les émissions du système alimentaire. De nouvelles recherches publiées dans Environmental Research Letters, montrent qu’un refroidissement insuffisant dans la chaîne d’approvisionnement entraîne chaque année jusqu’à 620 millions de tonnes de déchets alimentaires, générant ainsi 1,8 milliard de tonnes d’équivalents CO2. Selon l’étude, l’augmentation du refroidissement lors du traitement et du transport des aliments ainsi que le raccourcissement des chaînes d’approvisionnement pourraient réduire considérablement les émissions et éviter les pertes alimentaires dans le monde entier. Plus d’informations sur Carbon Brief.
Nouveau rapport de synthèse sur les émissions négatives
Le nouveau rapport sur l’élimination du CO2 donne un aperçu de l’état actuel de l’élimination du CO2 . Les techniques d’élimination du dioxyde de carbone, plus connue sous l’expression anglaise carbon dioxide removal (CDR) ou émissions négatives, retirent déjà de l’atmosphère 2 milliards de tonnes de CO2 par an. Actuellement, nous émettons environ 40 milliards de tonnes chaque année. Plus de 99,9 % des émissions négatives proviennent de la plantation d’arbres et de la reforestation. Le grand intérêt des pays les plus émetteurs pour les forêts tropicales en tant que compensation climatique a conduit à ignorer les besoins des personnes qui dépendent de ces forêts, peut-on lire dans un éditorial de Nature. Plus de 60% des surfaces boisées dans les pays en développement fournissent des certificats de CO2 sans que cela ait un impact sur le bien-être économique des communautés forestières.
Si le CDR doit être utilisé d’une manière plus « durable », par exemple sans provoquer de déforestation ou menacer la biodiversité, la quantité de CDR est beaucoup plus faible. Néanmoins, entre 7 et 9 milliards de tonnes de CO2 devront être retirées chaque année d’ici 2050 pour respecter l’objectif de 1,5 degré.
Le rapport constate que la capture et le stockage direct du carbone dans l’air (Direct Air Carbon Capture and Storage, DACCS) suscite le plus d’intérêt auprès des grands investisseurs. De grandes start-up dans le domaine de la CDR, comme Climeworks et Carbon Engineering, ont reçu des investissements de Microsoft, Airbus, Chevron, JP Morgan. Des installations expérimentales plus importantes sont les Regional Direct Air Capture Hubs aux États-Unis (qui a été financé par le gouvernement à hauteur de 3,5 milliards de dollars) et Mission Innovation (une initiative internationale visant à permettre aux technologies CDR d’atteindre une réduction nette de 100 millions de tonnes de CO2 par an dans le monde d’ici 2030). Plus d’informations sur Carbon Brief, SRF, le New Yorker (paywall) et sur l’entreprise suisse Climeworks sur Notre Temps.
Le prix agit sur CO2
L’échange de quotas d’émission et les taxes sur le CO2 sont efficaces, montre une nouvelle méta-analyse publiée dans Nature. Il existe dans le monde plus de 70 instruments politiques permettant de fixer un prix pour le CO2 – systèmes d’échange de quotas d’émission, taxes et impôts – mais leur contribution à la réduction des émissions reste controversée dans les milieux scientifiques et politiques. L’étude a évalué l’efficacité de 21 de ces mécanismes de prix. Pour au moins 17 d’entre eux, l’introduction d’un prix du CO2 a entraîné des réductions d’émissions, bien que les prix aient été faibles dans la plupart des cas. Les réductions d’émissions se situent entre 4 % et 15 %.
Dans les systèmes pilotes d’échange de quotas d’émission en Chine, la réduction de CO2 a atteint 13,1%. C’est nettement plus que dans le système d’échange de quotas d’émission de l’UE (-7,3 %) ou par la taxe sur le CO2 en Colombie-Britannique (-5,4 %). Et ce, malgré les prix très bas des systèmes chinois. Il s’agit probablement d’une conséquence des coûts d’évitement plus faibles en Chine, ainsi que des conditions politiques différentes dans les pays. L’efficacité des mécanismes de prix est fortement influencée par d’autres mesures politiques. Plus d’informations sur Nature et Klimareporter.
Actif contre le désespoir
Il faut un optimisme tenace
Ils se sentent désespérés, abattus et en colère, ont déclaré de nombreux scientifiques du climat au Guardian, car ils travaillent sur la crise climatique depuis des décennies et ne voient toujours pas assez d’action. Christiana Figueres, directrice de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques de 2010 à 2016, a écrit dans un éditorial du Guardian : « Je partage leurs sentiments de désespoir. Un sentiment de désespoir est compréhensible, mais il nous prive de notre capacité d’action et empêche la coopération radicale dont nous avons besoin. Nous avons tous le droit de pleurer la perte d’un avenir sans la crise climatique. C’est une perte profonde et difficile. Mais un deuil qui s’arrête au désespoir est une fin que moi et beaucoup d’autres ne sommes pas prêts à accepter. Nous avons aussi la responsabilité – et la possibilité – de construire l’avenir autrement. Cela demandera une action collective beaucoup plus courageuse ». Mais elle aussi doute parfois : « Peu après avoir pris mes fonctions de responsable climat de l’ONU en 2010, j’ai déclaré aux journalistes que je ne pensais pas qu’un accord mondial sur le climat serait possible de mon vivant. Mais immédiatement après, elle a dû changer d’attitude pour préparer les pays de manière proactive aux négociations climatiques de Paris. « C’était une bougie dans l’obscurité que j’ai utilisée pour allumer une étincelle chez beaucoup d’autres. J’utilise encore aujourd’hui la bougie de l’optimisme tenace – et je ne suis pas la seule. Un monde dans lequel nous dépassons 1,5 °C n’est pas gravé dans la pierre ».
Comment accélérer la lutte contre le changement climatique
Ion Karagounis du WWF fait cinq propositions concrètes dans le TA Magazine (paywall) pour y parvenir : Imposer la protection du climat par le biais des tribunaux, accélérer les procédures d’autorisation, intensifier l’activisme, créer des conseils de l’avenir et un comité d’experts pour la politique climatique.
Changer la politique climatique au niveau local
L’Alliance pour le climat lance le nouveau projet OK Klima en partenariat avec l’Alliance Digitale. OK Klima vise à rendre la politique climatique des cantons et des communes suisses plus ambitieuse grâce à la transparence et à la participation. La nouvelle plateforme doit permettre aux autorités et aux politiciens de voir comment leurs communes et cantons se situent par rapport aux autres et de s’inspirer des bonnes pratiques. https://www.ok-klima.ch/
Aperçu des votations à venir et des initiatives :
- Initiative pour la biodiversité : 22 septembre (sur le lien entre climat et biodiversité, voir ce rapport)
- Référendum contre l’extension de l’autoroute : 24 novembre
- Initiative solaire : Les Verts récoltent des signatures pour leur initiative solaire. Elle veut rendre obligatoires les installations solaires sur les bâtiments.
- Initiative sur la place financière : le lancement pourrait avoir lieu cet été.
- Cette année encore, l’Alliance pour le climat veut lancer l’initiative populaire pour une place financière durable, afin de mettre le secteur sur la voie du climat.
Éditorial
Dans cette édition, nous rendons compte de la victoire révolutionnaire des Aînées pour le climat à la Cour européenne des droits de l’homme et donnons un aperçu des nombreuses affaires judiciaires en cours dans le monde. Nous expliquons pourquoi le vote de la loi sur l’électricité est si important et pourquoi la loi sur le CO2 qui a été adoptée et la mise en œuvre de la loi sur le climat sont trop faibles.
L’Allemagne va de l’avant avec les énergies renouvelables, mais freine toujours des quatre fers sur les lois européennes importantes (le FDP nous salue). D’importantes nouvelles lois européennes comme la loi sur la chaîne d’approvisionnement et la loi sur la restauration de la nature ont certes été adoptées, mais elles ont été considérablement affaiblies. Les énergies renouvelables se développent rapidement dans le monde entier et le président Biden va de l’avant avec les véhicules électriques.
Alors que la politique avance tantôt en avant, tantôt en arrière, le réchauffement climatique s’accentue nettement. Et la circulation océanique menace de s’effondrer, ce qui aurait des conséquences catastrophiques. Les femmes souffrent particulièrement du réchauffement, et s’y adapter devient de plus en plus difficile. C’est justement parce que tout cela est si effrayant que nous avons besoin de courage pour espérer. C’est pourquoi nous concluons la rubrique Actif contre le désespoir avec des idées inspirantes issues de la philosophie et de la politique.
Suisse
Les Aînées pour le climat gagnent leur procès
La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) reproche à la Suisse de ne pas protéger suffisamment les femmes âgées contre le changement climatique (le communiqué de presse de la CEDH en français et en anglais.) La Cour a donné raison à la plainte de l’association Klima-seniorinnen, qui estimait que leur droit à la vie et à la vie privée et familiale n’était pas respecté parce que la Suisse n’atteignait pas les objectifs de réduction des émissions. Voici les principaux points de l’arrêt :
- La Suisse a violé l’article 8 (droit à la vie privée et familiale) de la Convention européenne des droits de l’homme.
- Les femmes âgées ont un statut de victime, c’est-à-dire qu’elles sont excessivement touchées par le changement climatique.
- La Suisse a refusé à tort l’accès au tribunal aux Aînées pour le Climat (plusieurs instances jusqu’au Tribunal fédéral avaient rejeté la plainte de l’association ou n’étaient pas entrées en matière sur le fond).
Le tribunal se prononce également sur la politique climatique de la Suisse :
- La Suisse n’a pas respecté ses obligations au titre de la Convention des droits de l’homme en ce qui concerne le changement climatique.
- Elle n’a pas atteint ses objectifs insuffisants de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
- Les mesures prises par les autorités suisses sont arrivées trop tard et ne suffisent pas à atténuer les effets du changement climatique.
L’arrêt est un cas de référence qui a de l’importance pour les 46 Etats du Conseil de l’Europe. Il s’agit de la première affaire climatique portée devant la CEDH. Il n’est pas possible de faire appel de cette décision. L’arrêt est particulièrement important car il indique la voie à suivre pour les futures décisions de la Cour européenne des droits de l’homme, mais aussi des autorités judiciaires nationales à travers l’Europe, dans les affaires climatiques en cours et à venir. D’autres affaires climatiques soumises à la Cour européenne avaient été ajournées jusqu’à ce que la Grande Chambre se prononce sur le cas suisse.
Quelles sont les conséquences concrètes de l’arrêt ? Le représentant de la Confédération devant la CEDH, Alain Chablais, a estimé que l’arrêt obligeait la Suisse à prendre des mesures. L’organisation environnementale Greenpeace Suisse, qui a soutenu les Ainées pour le climat, estime également que la Suisse doit agir. Les objectifs climatiques actuels doivent être améliorés afin de protéger suffisamment les droits de l’homme. Le jugement est un signal d’alarme pour le Conseil fédéral et le Parlement.
Les réactions au jugement sont diverses ; un aperçu ici dans le Tages-Anzeiger. Le PS et les Verts se voient confirmés dans l’idée que la Suisse doit faire plus pour lutter contre le changement climatique. Le PRD ne voit pas la nécessité d’agir et l’UDC demande que la Suisse se retire du Conseil de l’Europe. Des juristes s’opposent à cette interprétation des partis bourgeois. Le professeur de droit Sebastian Heselhaus de l’université de Lucerne souligne dans le Blick que le jugement est contraignant. « La Suisse doit faire plus pour la protection du climat ». C’est également ce que confirme l’Office fédéral de la justice, qui a clairement indiqué que le jugement devait être appliqué. Evelyne Schmid, professeure de protection des droits de l’homme (droit international) à l’université de Lausanne, estime que l’État a un devoir à remplir. « La politique, c’est-à-dire le Conseil fédéral, mais aussi les parlements et les gouvernements au niveau fédéral, cantonal et communal, doivent maintenant agir », déclare-t-elle à Watson.
Dans une première analyse juridique, des avocats allemands soulignent que le tribunal crée de facto une nouvelle action collective pour la protection des droits de l’homme face à la crise climatique. En outre, le tribunal pose pour la première fois des exigences matérielles et procédurales à un « concept global de protection du climat » protégeant les droits de l’homme.
La votation sur la loi sur l’électricité polarise les esprits
La votation sur la loi sur l’électricité (loi fédérale sur la sécurité de l‘approvisionnement en électricité grâce aux énergies renouvelables, acte modificateur unique), qui aura lieu le 9 juin, promet d’être serrée. La loi, sur laquelle le Conseil national et le Conseil des Etats se sont mis d’accord à l’automne 2023, doit fixer des objectifs contraignants de développement des énergies renouvelables jusqu’en 2035. Les défenseurs du paysage (Bündnis Natur & Landschaft Schweiz, Verein Freie Landschaft Schweiz et Fondation Franz Weber) avaient lancé un référendum contre cette mesure.
Avec la loi sur l’électricité, les nouvelles énergies renouvelables, principalement le soleil et le vent, doivent fournir 35 térawattheures (TWh) d’électricité par an d’ici 2035, et 45 TWh d’ici 2050. Actuellement, les besoins annuels en électricité de la Suisse s’élèvent à 60 TWh. En contrepartie, des assouplissements sont prévus en matière de protection de la nature : Dans les régions qui se prêtent à l’exploitation de l’énergie solaire et éolienne, les installations énergétiques doivent avoir la priorité sur la protection de l’environnement et d’autres intérêts nationaux. Vous trouverez un aperçu du projet dans le Blick.
Le Conseil fédéral et les grands partis politiques ont soutenu la loi, à l’exception de l’UDC. Les délégués de cette dernière ont décidé en mars de voter non. Le conseiller fédéral Albert Rösti, qui soutient la loi, avait tenté en vain, lors de l’assemblée de l’UDC, de faire approuver la loi en invoquant une meilleure sécurité d’approvisionnement et une plus grande indépendance. L’automne dernier encore, une majorité du parti avait soutenu la loi. La conseillère nationale UDC Magdalena Martullo-Blocher, qui a participé au changement d’opinion, a déclaré qu’il n’était pas possible de garantir un approvisionnement en électricité sûr avec des installations solaires et des éoliennes, « car il faut toujours du soleil ou du vent ». Plus d’informations sur SRF, dans le Tages-Anzeiger ici et ici (paywall) et dans la NZZ ici et ici (paywall).
Le Tages-Anzeiger met en garde contre une sous-estimation des opposants à la loi et rappelle la votation sur la loi CO2 , que l’UDC avait fait échouer sans le soutien d’autres partis. Toujours dans le Tages-Anzeiger (paywall), on peut lire comment la votation suscite des discussions parmi les écologistes. Dans le Zeit (paywall), Georg Klingler, spécialiste du climat chez Greenpeace, et Hans Weiss, défenseur du paysage, se livrent à un débat sur la loi sur l’électricité.
Les arguments des partisans (comité OUI de tous les partis et de l’économie ainsi que l’alliance des grandes organisations environnementales) :
- La loi sur l’électricité crée un approvisionnement en électricité fiable et abordable et renforce la sécurité d’approvisionnement.
- La loi sur l’électricité accélère le rythme de la transition énergétique, notamment en ce qui concerne l’énergie solaire. Elle fournit de meilleures conditions pour les installations solaires sur les toits et les façades.
- La loi crée des incitations pour réduire le gaspillage d’électricité et augmenter l’efficacité énergétique.
- Pour pouvoir produire davantage d’électricité en hiver, il faut accepter de faire des concessions en matière de protection de la nature (en construisant de nouvelles centrales hydroélectriques à accumulation ou en augmentant la capacité des lacs de retenue existants).
- Aucune installation énergétique ne peut être construite dans les biotopes d’importance nationale.
Arguments des opposants à la protection du paysage :
- La priorité accordée à la production d’électricité par rapport à la protection de la nature, prévue dans l’acte modificateur unique, est anticonstitutionnelle. On craint notamment la construction d’éoliennes en forêt.
- L’accent devrait être mis sur les installations solaires sur les bâtiments, mais l’obligation de construire des installations solaires sur les nouveaux bâtiments ne s’applique qu’à partir d’une surface de bâtiment de plus de 300 m2 .
- En dehors des biotopes d’importance nationale, de nouvelles installations énergétiques sont possibles, bien qu’il existe des alternatives respectueuses de l’environnement sur les infrastructures ainsi que des possibilités d’économie d’énergie.
L’objectif de développer rapidement la production d’électricité renouvelable d’ici 2035 est réalisable d’un point de vue technologique, économique et écologique. C’est la conclusion d’une étude de l’Université de Genève, financée par un programme de recherche de la Confédération. Les gains d’efficacité et l’augmentation de la consommation d’électricité par les voitures électriques et les pompes à chaleur ont été pris en compte. L’étude part en outre du principe que les centrales nucléaires seront arrêtées en Suisse d’ici 2035. La majeure partie de l’augmentation concerne les installations solaires. Pour atteindre l’objectif de développement, des investissements annuels de 1,4 à 1,7 milliard de francs seraient nécessaires. Plus d’informations dans la NZZ.
Avec la nouvelle loi CO2 , la Suisse n’atteint pas son objectif climatique
Lors de la session de printemps, le Conseil national et le Conseil des Etats se sont mis d’accord sur une nouvelle loi CO2 qui manque de courage. Le Conseil des Etats s’est imposé sur les points controversés. La loi fixe pour la période 2025-2030 la manière dont la Suisse doit réduire de moitié les gaz à effet de serre par rapport à 1990, conformément à l’accord de Paris sur la protection du climat. Pour atteindre cet objectif, la Suisse aurait dû passer à la vitesse supérieure en matière de politique climatique. Au lieu de cela, elle a renoncé à prendre des mesures supplémentaires (un aperçu dans le Tages-Anzeiger et chez das Lamm) :
- Objectif de réduction : la loi renonce à un objectif national. Le Conseil fédéral peut désormais fixer par ordonnance la part de la réduction de CO2 qui doit être réalisée en Suisse. Le conseiller fédéral Albert Rösti veut proposer une quote-part de 66%. Le reste de la réduction doit être réalisé par le financement de projets climatiques à l’étranger, ce qui nécessite l’achat de 40 à 50 millions de certificats (pour chaque tonne de CO2 ).
- Les stations de recharge : Les infrastructures de recharge pour les voitures électriques, par exemple dans les immeubles collectifs et les parkings publics, ne sont pas subventionnées par l’État fédéral.
- Valeurs limites des véhicules : la loi ne prévoit pas d’objectifs intermédiaires annuels pour réduire de manière linéaire les émissions de CO2 des nouvelles voitures de tourisme d’ici 2030.
- Taxe sur le CO2 : la taxe d’incitation sur le mazout et le gaz naturel ne sera pas augmentée. Un tiers de cette taxe continuera d’être affecté au Programme Bâtiments.
- Carburants : il n’est pas nécessaire d’ajouter des carburants renouvelables à l’essence et au diesel.
- Trafic aérien : une taxe pour les vols en jets d’affaires ou privés a été rejetée.
- Les entreprises : désormais, toutes les entreprises peuvent se faire exempter de la taxe sur le CO2 . A condition qu’elles s’engagent à réduire leurs émissions de CO2 .
La Suisse est le seul pays à miser aussi fortement sur les réductions d’émissions à l’étranger. Jusqu’à présent, la Confédération a signé des accords avec onze pays. Ils stipulent que les émissions de CO2 économisées en Thaïlande, au Ghana, au Pérou ou en Géorgie, par exemple, peuvent être prises en compte par la Suisse. De nombreux projets de protection climatique à l’étranger ne tiennent pas leurs promesses et souvent, ils ne sont pas supplémentaires et auraient donc été réalisés même sans soutien. C’est là que Jürg Füssler, de l’entreprise de conseil en environnement INFRAS et expert sur le marché des certificats, met en évidence les défauts des compensations à l’étranger, où se situent les problèmes.
Les critiques des spécialistes et des associations de protection de l’environnement à l’encontre de la loi sur le CO2 adoptée sont donc nombreuses.
Reto Knutti, chercheur en climatologie à l’ETHZ, estime que les mesures prises pour atteindre les objectifs de réduction de CO2 sont insuffisantes. Il fait remarquer qu’il n’y a plus de compensation bon marché à l’étranger dans un monde net zéro, car tous les Etats doivent stopper les émissions de CO2 . L’association économique swisscleantech déplore que la loi sur le CO2 contredise la loi sur la protection du climat adoptée l’année dernière. Celle-ci prescrit une trajectoire linéaire de réduction des émissions de CO2 , les objectifs intermédiaires devant être atteints en premier lieu par des réductions d’émissions dans le pays. Dans le Tages-Anzeiger et la NZZ, l’association avait expliqué les avantages de la réduction dans le pays.
La NZZ (paywall) commente : « La voie particulière de la Suisse en matière de protection du climat mène à l’erreur ». La quantité de certificats que la Suisse doit acheter (40 à 50 millions de tonnes de CO2 d’ici 2030) rend difficile le choix et le suivi sérieux des projets de compensation. Le WWF exige que la Suisse se retire des affaires de compensation. Pour en savoir plus, cliquez ici et ici dans le Tages-Anzeiger.
Le Parlement s’est montré un peu plus ouvert à la réforme sur un point : il a approuvé un postulat demandant que la taxe CO2 soit à l’avenir remboursée à la population de manière plus visible. Jusqu’à présent, les crédits sont accordés une fois par an avec la facture de primes des caisses maladie. Cela n’est pas perçu par beaucoup. Dans le but d’augmenter l’acceptation de cette taxe d’incitation, le Conseil fédéral doit maintenant examiner une nouvelle méthode de remboursement.
Critique de la mise en œuvre de la loi sur le changement climatique
En janvier 2024, le Conseil fédéral avait mis en consultation l’ordonnance relative à la loi sur la protection du climat (OCI). Celle-ci met en œuvre la loi sur le climat et l’innovation (LCl), acceptée par le peuple en juin 2023. La consultation dure jusqu’au 1er mai et l’ordonnance devrait entrer en vigueur début 2025. L’Association suisse pour la protection du climat critique le fait que la LCI soit édulcorée sur des points centraux. Ainsi, le Conseil fédéral renonce à des règles contraignantes pour la place financière et se contente à la place de tests volontaires. Et ce, bien que la LCI stipule que la Confédération veille à ce que la place financière suisse apporte sa « contribution effective » à la protection du climat. En ce qui concerne l’aviation, le Conseil fédéral ne précise pas non plus si, pour atteindre les objectifs climatiques, il entend prendre en compte uniquement les émissions de CO2 ou l’impact climatique global des avions (qui est environ trois fois plus important). Selon la volonté du Conseil fédéral, les compagnies aériennes peuvent décider de la procédure qu’elles choisissent.
L’initiative pour un fonds climatique, lancée par le PS et les Verts, a été déposée en février. Elle demande que 0,5 à 1 % du produit intérieur brut soit versé chaque année dans un fonds climatique. Ce fonds doit permettre de promouvoir une politique énergétique et climatique socialement équitable. Actuellement, cela représenterait 4 à 8 milliards de francs par an. Concrètement, cet argent doit servir à soutenir les énergies renouvelables, l’assainissement des bâtiments et les véhicules électriques, et à développer les transports publics. La biodiversité et les formations initiales et continues doivent également être encouragées. Plus d’informations dans la NZZ (paywall) et le Tages-Anzeiger.
Après l’adoption de la loi sur la protection du climat, l’association Protection du climat Suisse prévoit de lancer une nouvelle initiative populaire. L’association justifie cette démarche par le fait que les mesures prises jusqu’à présent par la Suisse ne sont pas suffisantes. Le contenu de l’initiative doit être élaboré en collaboration avec les personnes intéressées. Un sondage doit fournir les premiers éléments de réponse. Plus d’informations dans le Blick.
Les agriculteurs et le changement climatique
Marcel Dettling, agriculteur et nouveau président de l’UDC, se révèle être un négationniste du climat dans une interview accordée à la NZZ am Sonntag (paywall). Selon lui, le climat n’a cessé de changer « au fil des siècles ». Il met en outre en doute l’influence de l’homme sur le changement climatique ; selon lui, ce dernier ne peut d’ailleurs plus être arrêté. Le climatologue Reto Knutti corrige les faits sur Linkedin. Plus d’informations sur SRF et Watson.
Le conseiller fédéral Guy Parmelin a veillé à ce que les agriculteurs suisses puissent continuer à faire le plein sans payer d’impôts. Selon les recherches de la NZZ am Sonntag (paywall), le conseiller fédéral UDC a stoppé un projet visant à supprimer les subventions qui vont à l’encontre de la politique climatique suisse. Sur proposition de Parmelin, le Conseil fédéral approuve le maintien de la subvention controversée. Il y a six ans déjà, le Contrôle fédéral des finances avait critiqué le remboursement de l’impôt sur les huiles minérales prélevé sur les carburants.
Il y a aussi des agriculteurs qui prennent au sérieux la menace du changement climatique. Un groupe d’agriculteurs des cantons de Zurich, Schwyz, Genève, Neuchâtel et Vaud s’en prend à la Confédération pour son inaction en matière de protection du climat. Les agriculteurs, représentés par le réseau des avocats du climat, ont déposé une plainte en ce sens auprès du Département fédéral de l’environnement, des transports, de l’énergie et de la communication (DETEC). Selon eux, la politique climatique insuffisante menace la liberté économique et la garantie de propriété des agriculteurs. En effet, les périodes de sécheresse plus fréquentes et plus longues, dues au changement climatique, limitent la productivité des sols. Les paysans ont demandé au DETEC de prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher de telles violations de leurs droits fondamentaux. Plus d’informations sur Watson.
Au lieu de provoquer des émissions de CO2 , l’agriculture peut stocker les gaz à effet de serre dans le sol. Le programme Agroimpact vise à rendre les fermes plus respectueuses du climat. L’agriculture régénérative, qui consiste à utiliser moins d’engrais et à labourer pour constituer plus d’humus, y joue un rôle important. Plus d’informations dans la NZZ.
L’hiver dernier a également été beaucoup trop chaud
Les températures exceptionnellement élevées persistent. L’hiver 2023/2024 a été le plus doux jamais enregistré depuis le début des mesures en 1864. Selon MétéoSuisse, la température moyenne de décembre 2023 à février 2024 atteint 0,9 °C. Cela représente 2,8 °C de plus que les valeurs moyennes de 1991-2020 (période normale). Par rapport à la période de référence préindustrielle 1871-1900, l’hiver a été 2,9 °C plus chaud. Les trois mois ont été trop doux. L’écart a été particulièrement important en février, avec un plus de 4,6 degrés par rapport à la norme. Pour en savoir plus, consultez MétéoSuisse et le Tages-Anzeiger.
Le développement des énergies renouvelables suscite le débat
Quelle est la part d’électricité solaire dans ta commune ? Quelle est la consommation d’électricité par rapport à la localité voisine ou à la Suisse ? Et combien de voitures électriques sont en circulation ? Les réponses à ces questions sont fournies par le Energie Reporter d’Energie Suisse. Il permet d’observer et de comparer l’évolution de l’avenir énergétique au niveau communal. En ce qui concerne le développement des énergies renouvelables, les projets solaires et éoliens continuent de faire parler d’eux.
Electricité solaire : Actuellement, 47 projets solaires alpins sont encore en cours de planification, comme le montre une liste de l’Association des entreprises électriques suisses (état au 26 mars 2024). Ce sont sept de moins que fin janvier. L’un des projets retirés était prévu à Oberiberg, SZ. Les électeurs y avaient rejeté une installation dans la région d’Ybrig (plus d’informations sur Watson). Un deuxième concerne la station de sports d’hiver de Splügen-Tambo ; EWZ y a suspendu les travaux de planification suite aux critiques des milieux touristiques (Südostschweiz). Et Axpo ne poursuit pas un projet solaire à Glaris Sud, dans la région de Friiteren, notamment en raison des dangers naturels et parce que des espèces d’oiseaux menacées auraient été affectées.
Une demande de permis de construire a été déposée pour huit des installations prévues, comme le montre un aperçu de l’Office fédéral de l’énergie. Des associations de protection de l’environnement ont déposé des recours contre deux d’entre elles : celle située dans la région du Gantrisch, près de l’alpage de Morgeten (Tages-Anzeiger, paywall), et celle de Gondo, VS (Südostschweiz).
A Saanen, un projet rejeté par les électeurs devrait être relancé sous une forme légèrement réduite, rapporte le Thuner Tagblatt (paywall). Dans cet article de journal, on trouve également un aperçu des douze projets solaires encore prévus dans l’Oberland bernois. Et au lac de Walenstadt, les entreprises électriques du canton de Zurich et les St.Gallisch-Appenzellische Kraftwerke AG ont repris la planification d’un projet solaire dans une ancienne carrière. Il y a dix ans, les entreprises avaient déjà suivi le projet, mais celui-ci avait été stoppé. La carrière fait partie de l’Inventaire fédéral des paysages, sites et monuments naturels (IFP) ; une expertise de la Commission fédérale pour la protection de la nature et du paysage avait classé l’installation solaire prévue comme une atteinte grave à la nature digne de protection au bord du Walensee. Selon la loi révisée sur l’énergie (Solarexpress), les installations solaires ne sont pas exclues dans les zones IFP. Le projet, qui doit fournir de l’électricité à 2700 ménages, se heurte à une résistance, rapporte le Blick. Plus d’informations dans le Südostschweiz (paywall).
Comment expliquer la résistance aux installations solaires dans les régions de montagne ? Parce que les Alpes sont conquises et que l’argent des entreprises d’électricité n’attire plus, explique Romed Aschwanden du WWF Zoug dans le journal Zeit. Les installations peuvent nuire au tourisme, et en même temps, on construit davantage d’installations photovoltaïques en plaine. Pour l’Aargauer Zeitung (paywall), cela est dû en premier lieu à la méfiance de la population de montagne envers les entreprises d’électricité. Et dans une interview avec la NZZ (paywall), Ruedi Kriesi, qui promeut la construction de grandes installations solaires en montagne avec la communauté d’intérêts (IG) Solalpine, estime que le temps a été trop court pour aller chercher la population locale sur le plan émotionnel. De plus, les organisations de protection de la nature se livrent à une critique fondamentale.
Energie éolienne : un autre projet d’énergie éolienne a subi un revers. Dans le cas du parc éolien « Bel Coster » prévu dans le Jura vaudois, le Tribunal fédéral a déclaré invalide le plan d’affectation intercommunal. Le projet doit maintenant être remanié et des clarifications supplémentaires concernant la protection des oiseaux et des eaux doivent être effectuées au préalable. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger.
A Hinwil, ZH, la population a accepté une modification du règlement de construction et de zone qui rend impossible la construction d’éoliennes sur le territoire de la commune. Selon la règle, les éoliennes devraient se trouver à un kilomètre des propriétés habitées ou partiellement habitées. Cette disposition doit encore être approuvée par la direction cantonale des travaux publics. Il n’est pas certain qu’elle le fasse. En effet, l’Office cantonal du développement territorial a fait savoir au préalable que les prescriptions communales en matière de distance entre les éoliennes ne sont pas considérées comme pouvant être approuvées. Des personnes proches de l’UDC ont déposé des interventions comparables pour des distances minimales dans différentes communes du canton de Zurich. Pour en savoir plus, consultez ici et ici le Tages-Anzeiger.
Existe-t-il des possibilités pour que les éoliennes soient acceptées par la population locale ? Oui, par exemple en permettant aux citoyens d’y participer. Dans ce modèle, la majorité d’une installation éolienne appartient aux habitants. La valeur ajoutée reste dans le village, les participants peuvent participer aux décisions. De tels projets sont prévus à Escholzmatt, LU, et à Wikon, AG. En Allemagne, plusieurs « parcs éoliens citoyens » de ce type ont déjà été réalisés. Pour en savoir plus, cliquez ici et ici sur SRF et dans le Zofinger Tagblatt (paywall).
L’écologiste Robert Wade propose une autre voie dans la NZZ (paywall). Les énergies renouvelables comme le vent et le soleil devraient être utilisées comme des biens communs. Le droit d’utiliser le vent serait alors la propriété des pouvoirs publics. A l’instar des modèles citoyens, la population locale en profiterait également. Aujourd’hui, ce sont uniquement les propriétaires terriens qui reçoivent de l’argent des entreprises d’électricité. Wade fait référence à l’exemple de l’Irlande, où la constitution stipule que toutes les ressources naturelles, y compris l’air et toute forme d’énergie potentielle, appartiennent à l’État.
Pénurie d’électricité, accord européen sur l’électricité et
centrales nucléaires
En automne 2022, le Conseil fédéral avait décidé de construire une centrale à gaz de réserve à Birr, dans le canton d’Argovie. Elle est raccordée au réseau depuis mars 2023 et serait utilisée en cas de pénurie d’électricité. Le contrat avec GE Gas Power court encore jusqu’en avril 2026, les coûts pour la durée de trois ans s’élèvent à 470 millions de CHF. Le Tribunal administratif fédéral a décidé que le Conseil fédéral n’aurait pas dû accorder d’autorisation d’exploitation à la centrale. Il a donné raison à une riveraine qui, avec le soutien de la Grève du climat Suisse, s’était opposée à cette décision en raison du bruit et des nuisances environnementales. Le tribunal constate que le Conseil fédéral n’a pas pu expliquer sur la base de quelles hypothèses il avait supposé une grave situation de pénurie. Des références générales à la situation politique en Europe ou à des centrales nucléaires à l’arrêt en France n’ont pas suffi. Plus d’informations sur SRF, Wochenzeitung et Tages-Anzeiger.
Si la centrale de Birr doit continuer à être utilisée comme réserve, le Conseil fédéral devra mieux justifier pourquoi cela est nécessaire. Cela ne devrait toutefois pas être plus facile. Car au moins cet hiver, la Suisse a eu plus qu’assez d’électricité en hiver, comme l’a analysé le président du PVL Jürg Grossen. Ainsi, d’octobre 2023 à mars 2024, il y a eu plus d’exportations d’électricité vers l’Europe que d’importations. Selon Grossen, cela est dû à des barrages bien remplis et à des températures douces, mais aussi à une consommation d’électricité en baisse et au développement de l’énergie solaire. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger.
Les centrales de réserve compliquent les négociations avec l’UE sur un accord sur l’électricité. En effet, si les exploitants de centrales qui ne fonctionnent pas reçoivent de l’argent, cela pourrait enfreindre le droit des aides d’Etat de l’UE. Selon la volonté de l’UE, l’électrification et la décarbonisation doivent coûter le moins possible. Si les centrales de réserve surdimensionnées sont indemnisées, cela irait à l’encontre de l’objectif. Pour en savoir plus, cliquez ici et ici dans la NZZ (paywall).
Pourtant, la Confédération continue de miser sur de telles centrales d’urgence. Un appel d’offres pour la période à partir de 2026, lorsque les contrats avec Birr et d’autres centrales plus petites arriveront à échéance, s’est terminé fin mars. Le groupe électrique Axpo a participé à l’appel d’offres. Il veut construire une centrale à gaz à Auhafen, sur le territoire de la commune de Muttenz. Axpo a annoncé que la centrale fonctionnerait avec un combustible synthétique neutre en CO2. C’est actuellement un vœu pieux : de tels combustibles n’étant pas disponibles pour le moment, on utiliserait du gaz naturel. Avec une puissance de 340 mégawatts, elle correspond à la centrale de Birr. Pour en savoir plus, voir ici et ici dans le Tages-Anzeiger.
Parallèlement, Axpo a annoncé qu’elle étudiait une prolongation de la durée de vie de la centrale nucléaire de Beznau. Beznau a été mise en service en 1969 et est la plus ancienne installation au monde. Jusqu’à présent, Axpo voulait arrêter définitivement la centrale nucléaire vers 2030. La Fondation suisse de l’énergie estime que les projets d’Axpo sont inutiles et dangereux. D’ici deux ans, le développement de l’énergie solaire et éolienne aura déjà remplacé la production des centrales nucléaires de Mühleberg, Beznau 1 et 2. Pour en savoir plus, voir SRF, Tages-Anzeiger (paywall), Sonntagszeitung (paywall) et NZZ (paywall).
Avec les plans d’Axpo, un postulat du président du PLR Thierry Burkart, adopté par le Conseil des Etats lors de la dernière session, gagne en actualité. L’intervention demande au Conseil fédéral d’examiner quelles « conditions-cadres réglementaires et financières » devraient être créées pour que les centrales nucléaires existantes puissent être exploitées le plus longtemps possible. Dans l’optique de la sécurité d’approvisionnement, la construction de nouvelles centrales nucléaires doit également être examinée. Plus d’informations sur SRF et dans la NZZ (paywall).
Des représentants du ministère français des Affaires étrangères se sont récemment exprimés auprès de journalistes internationaux en faveur d’une forme indirecte d’investissement dans de nouvelles centrales nucléaires. Le pays, qui veut construire 14 nouveaux réacteurs, a suggéré que des pays comme la Suisse, qui ne réalisent pas eux-mêmes de nouvelles centrales nucléaires mais importent de l’électricité nucléaire de France, participent aux coûts. La Fondation suisse de l’énergie considère les déclarations de la France comme une tentative de faire supporter à d’autres Etats les coûts excessifs du secteur nucléaire. La France construira les centrales nucléaires de toute façon. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger et la NZZ am Sonntag.
Mauvaises incitations en matière de consommation d’énergie
Selon la Constitution, la Confédération doit veiller à une utilisation économe de l’énergie. Comme le montre une étude commandée par la Fondation suisse de l’énergie (SES), c’est souvent le contraire qui se produit : de nombreuses dispositions légales encouragent la consommation d’énergie au lieu de la réduire. L’enquête menée par le bureau de conseil EBP a identifié plus de 100 incitations erronées. Si ces incitations erronées étaient éliminées, il serait possible d’économiser beaucoup d’énergie. Rien que pour sept domaines étudiés de manière approfondie, on pourrait économiser jusqu’à 10 TWh par an. Cela correspond à près de 5% de la consommation totale d’énergie en Suisse. Il s’agit de ces sept incitations erronées:
- Frais de base forfaitaires pour les tarifs d’électricité : Grâce au forfait, plus la consommation d’énergie est élevée, plus le prix payé par kilowattheure diminue.
- Les tarifs d’électricité statiques : Les tarifs d’électricité n’incitent pas à consommer l’électricité lorsqu’elle est bon marché et disponible en quantités suffisantes.
- Absence de taxe CO2 sur les carburants du trafic routier : les coûts externes pour l’environnement et la santé causés par les émissions ne sont pas pris en compte dans le prix du carburant.
- Exonération des véhicules utilitaires légers de la RPLP : les véhicules utilitaires de moins de 3,5 tonnes sont exonérés de la redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations (RPLP). Les coûts environnementaux ne sont pas pris en compte dans le prix des transports.
- Des conventions d’objectifs trop peu ambitieuses pour les entreprises : Les entreprises qui souhaitent être exemptées de la taxe sur le CO2 peuvent conclure une convention d’objectifs avec la Confédération. Celles-ci ne suffisent pas à atteindre les objectifs climatiques de la Suisse.
- Déduction pour les pendulaires : les particuliers peuvent déduire de leur revenu imposable les frais de déplacement vers leur lieu de travail. Cela a pour conséquence que beaucoup acceptent de parcourir de plus grandes distances entre leur domicile et leur lieu de travail.
- Trafic aérien international exonéré d’impôts : les vols internationaux sont exonérés à la fois de l’impôt sur les huiles minérales et de la TVA, ce qui entraîne une baisse des prix et une augmentation de la demande.
La SES exige que le Conseil fédéral, le Parlement et l’administration fédérale corrigent immédiatement les importantes incitations erronées et orientent systématiquement la législation de la Confédération vers la sécurité d’approvisionnement, les objectifs de protection du climat et les économies d’énergie. Plus d’informations sur SRF, ee-news et NZZ (paywall).
Le virage climatique de l’aviation soulève des questions
L’aviation peut-elle atteindre la neutralité climatique d’ici 2050 ? Oui, indique le Conseil fédéral dans un rapport. Il arrive à la conclusion que l’objectif fixé dans la loi sur la protection du climat peut être atteint. Mais en partant de l’hypothèse douteuse que le trafic aérien n’augmentera plus d’ici 2050. Le rapport a choisi « une représentation indépendante de l’évolution de la demande » et examine le potentiel de réduction des émissions de CO2 par rapport à la situation de départ en 2019. Cela signifie que la croissance attendue de l’aviation est niée. Les autorités internationales prévoient en Europe une augmentation allant jusqu’à 3% par an. En Suisse, le trafic aérien a augmenté de 8,5% par an entre 1990 et 2019.
Le Conseil fédéral voit la principale mesure technique pour réduire les émissions de CO2 dans l’utilisation de carburants d’aviation durables ; les avions à hydrogène et électriques ne pourraient réduire les émissions que de manière marginale d’ici 2050. Leur production est toutefois très gourmande en énergie et ils ne sont pas disponibles à grande échelle jusqu’à nouvel ordre. Actuellement, les carburants d’aviation durables ne couvrent que 0,2% des besoins annuels de l’industrie aéronautique. Le Conseil fédéral admet lui aussi qu’il faudra plus de temps que jusqu’en 2050 pour remplacer complètement les carburants fossiles. Il part du principe que 10% à 23% maximum des émissions de CO2 d’origine fossile ne pourront pas être évités. Celles-ci doivent être extraites de l’atmosphère et stockées. Les effets dits « non CO2 » causés par le trafic aérien (notamment la formation de traînées de condensation) ne sont pas pris en compte.
Swiss mise elle aussi sur le captage et le stockage du CO2 . La compagnie aérienne a signé un contrat avec la start-up Climeworks de l’ETHZ. Les entreprises n’ont donné aucune indication sur la quantité de CO2 filtrée ni sur les coûts. Aujourd’hui, l’élimination d’une tonne de CO₂ coûte entre 600 et 1000 dollars. Pour donner un ordre de grandeur, une personne se rendant à New York en classe économique génère ainsi environ 2 tonnes de CO2 . Ceci montre également à quel point Swiss prend la protection du climat au sérieux : La compagnie aérienne maintient les vols intérieurs controversés entre Genève et Zurich, comme l’a expliqué le patron de Swiss, Dieter Vranckx, dans une interview au « Sonntagsblick » ; le Tages-Anzeiger en dit plus à ce sujet.
Lufthansa, la société mère de Swiss, a récemment conclu un accord avec Climeworks pour compenser un total de 40 000 tonnes de CO2 sur quatre ans. A titre de comparaison, le groupe aérien a émis l’an dernier 23 millions de tonnes de CO2 . Swiss et Lufthansa sont les premières compagnies aériennes pour lesquelles Climeworks veut capter du CO2 . L’entreprise a déjà conclu des contrats avec 170 entreprises clientes, dont Swiss Re, UBS, JP Morgan et Microsoft. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger et la NZZ (paywall).
Les voitures émettent plus de CO2 que les fabricants ne le disent
Les voitures à essence et diesel émettent en moyenne environ 20% de CO2 de plus par kilomètre que ce qu’indiquent les constructeurs (Tages-Anzeiger ici et ici (paywall). C’est la conclusion d’une étude portant sur 600 000 voitures nouvellement immatriculées dans l’espace européen en 2021. L’écart est particulièrement important pour les modèles hybrides plug-in : ils émettent en moyenne trois fois et demie plus de CO2 parce que les conducteurs ne rechargent que rarement la batterie et remplissent plutôt le réservoir d’essence.
La Suisse est également à la traîne en ce qui concerne les véhicules électriques. D’ici 2025, une voiture neuve sur deux devrait être une voiture à prise. L’association de la mobilité électrique Swiss E-Mobility estime que cet objectif sera nettement manqué. La barre des 50% par an ne sera atteinte qu’en 2029. Pourquoi en est-il ainsi ? Parce que les stations de recharge à domicile font défaut et qu’elles ne sont pas suffisamment encouragées par les pouvoirs publics, estiment les spécialistes du secteur. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger (paywall). En 2023, 21% des voitures neuves vendues étaient des voitures purement électriques, 9,2% des hybrides plug-in. Le secteur s’attendait à une croissance plus forte. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger (paywall).
Comment le marché financier s’oppose à la protection du climat
Les banques et les assurances suisses assument-elles leur responsabilité climatique ? C’est la question à laquelle répond une étude de Greenpeace. La réponse est non : le secteur financier ne profite pas suffisamment des possibilités de s’engager pour une meilleure protection du climat lors des assemblées générales des entreprises dont il détient des actions. Les banques et les assurances contreviendraient ainsi à leurs promesses de faire pression, en tant qu’investisseurs actifs, pour une orientation plus durable des entreprises. Ainsi, l’UBS a presque toujours voté dans le sens des entreprises et a par exemple refusé de restreindre le financement de projets d’extraction de pétrole et de gaz. Pour en savoir plus, voir le média en ligne tippingpoint et la RTS. Cette année encore, Greenpeace veut lancer, avec d’autres organisations, l’initiative populaire pour une place financière durable, afin de mettre le secteur sur la voie du climat.
La Confédération pourrait obliger le secteur financier à protéger davantage le climat. Mais le Conseil national a refusé, lors de la session de printemps, de donner plus de compétences au Conseil fédéral pour rendre les flux financiers des banques et des assurances plus respectueux du climat. Une motion de Gerhard Andrey allant dans ce sens a été rejetée. Le secteur financier peut ainsi continuer à se donner des règles volontaires sur la manière dont il entend atteindre les objectifs climatiques de Paris. Jusqu’à présent, les banques et les assurances n’ont fait que peu de progrès avec leurs règles. Alliance Sud, le WWF et Greenpeace critiquent la décision du Conseil national.
Les entreprises dont la Banque nationale suisse détient des actions ont émis 10,2 millions de tonnes de CO2 l’année dernière. Deux autres millions de tonnes proviennent des obligations d’entreprises détenues par la BNS. Cela correspond à environ un quart des émissions nationales de la Suisse. Ces chiffres sont tirés du dernier rapport sur la durabilité de la BNS. Dans sa politique de placement, la BNS ne tient pas compte de critères de politique climatique, mais s’en tient exclusivement à des objectifs de politique monétaire et de politique de change. Ce n’est qu’en matière d’émissions internes que la BNS se fixe des objectifs climatiques. Ainsi, les émissions de CO2 doivent être réduites de 50% d’ici 2030 par rapport à l’année de référence 2017. En 2023, les émissions s’élevaient à 2860 tonnes de CO2 ; les voyages en avion des collaborateurs et la fabrication des billets de banque ont notamment pesé dans la balance. Cela correspond à environ 0,02% des gaz à effet de serre générés par les placements financiers. Plus d’informations dans la NZZ (paywall).
Une étude parue dans Communications Earth & Environment montre que la Banque nationale devrait tenir compte des risques climatiques dans sa politique monétaire. Les chercheurs démontrent que le changement climatique peut mettre en danger la stabilité des prix, l’une des tâches principales des banques nationales. Plus d’informations dans un post Linkedin de Georg Klingler de Greenpeace.
Politique climatique internationale
Le monde entier en procès pour le climat
Les Aînées suisses pour le climat ne sont pas les seules à vouloir plus de protection du climat : de plus en plus souvent, on se bat pour plus de protection du climat dans les salles d’audience du monde entier. Nous résumons ici quelques-uns des cas juridiques les plus passionnants :
Plus de 30 plaintes contre l’industrie pétrolière américaine
Il y a six ans, des villes californiennes ont commencé à traîner en justice des compagnies pétrolières. Elles reprochent à ces entreprises d’avoir trompé le public pendant des décennies en niant ou en minimisant les dangers de la crise climatique. A ce jour, une trentaine de plaintes de ce type ont été déposées aux Etats-Unis par des villes, des Etats et des tribus indigènes. Ils veulent ainsi obtenir que l’industrie pétrolière paie pour les coûts du changement climatique.
Pour s’en protéger, les compagnies pétrolières ont tenté de transférer les plaintes vers des tribunaux fédéraux, nettement plus favorables aux entreprises. L’année dernière, la Cour suprême des États-Unis a toutefois refusé à trois reprises d’entendre les arguments en faveur d’un transfert de ces affaires. La tactique de retardement des compagnies pétrolières a donc échoué pour le moment et les affaires judiciaires peuvent se poursuivre. Plus d’informations dans Grist.
Les États américains veulent demander des comptes aux compagnies pétrolières
Les actions civiles mentionnées ci-dessus sont certes importantes, mais le système judiciaire américain est lent et prend souvent des décisions qui vont dans le sens de l’industrie. L’Etat fédéral du Vermont veut maintenant emprunter une nouvelle voie pour contraindre l’industrie pétrolière à payer les énormes dégâts causés par les inondations de l’été dernier. Les catastrophes climatiques doivent à l’avenir être traitées comme des décharges de déchets toxiques. La loi Superfund des Etats-Unis exige que les entreprises chimiques qui ont pollué un site doivent payer pour la dépollution complète. Le Vermont veut désormais appliquer cette loi aux dommages climatiques. Plusieurs autres Etats veulent procéder de la même manière. Sans surprise, l’industrie pétrolière a promis d’aller en justice si elle devait être tenue responsable de ses dommages. Plus d’informations sur E&Enew et Grist.
Un grossiste en viande poursuivi en justice – la viande végétalienne aussi
Le géant brésilien de l’alimentation JBS, le plus grand grossiste en viande au monde, a été poursuivi par le procureur général de New York pour avoir trompé le public sur son impact environnemental afin d’augmenter ses ventes. Le groupe a promis d’atteindre zéro émission nette de gaz à effet de serre d’ici 2040. Mais cela était trompeur, car le groupe voulait en même temps augmenter la production de viande et n’avait en outre pas pris en compte dans son objectif climatique les émissions dues à la déforestation de l’Amazonie et à ses chaînes d’approvisionnement. JBS a été associé à plusieurs reprises à la déforestation illégale de l’Amazonie. Plus sur Reuters.
Ce n’est pas contre la viande, mais contre les substituts de viande végétaliens que l’on veut agir en Suisse. Début 2023, le Département fédéral de l’intérieur a déposé un recours auprès du Tribunal fédéral. Il ne doit plus être permis que les substituts de viande végétaliens soient appelés « viande », par exemple « Planted Chicken ». Si le Tribunal fédéral décidait dans les mois à venir d’interdire l’animal dans les noms de produits végétaliens, la Suisse serait le premier pays à prendre une telle mesure, mais des efforts similaires sont en cours dans d’autres pays. En 2017, les juges suprêmes de l’UE ont déjà prononcé une telle interdiction dans le cas des produits laitiers. La République en parle en détail.
Autres nouvelles sur le thème de la viande : les banques américaines sapent leurs propres engagements climatiques en finançant des groupes de viande, de produits laitiers et d’aliments pour animaux, selon un rapport des Amis de la Terre. Plus d’informations dans le Guardian.
Une compagnie aérienne coupable de greenwashing
Un tribunal néerlandais a décidé que la compagnie aérienne KLM avait donné une « image trop rose » de la durabilité du transport aérien. L’affaire a été portée devant la justice par des organisations environnementales dans le cadre de la réglementation européenne sur la publicité mensongère. Le jugement ne contient toutefois pas d’invitation à corriger les déclarations, mais seulement une demande à KLM d’être « honnête et concrète » dans ses futures communications. Plus d’informations sur DW.
Un climatologue gagne un procès en diffamation
Le célèbre climatologue Michael Mann a obtenu plus d’un million de dollars américains dans un procès contre deux auteurs de blogs conservateurs. Les blogueurs avaient remis en question les recherches de Mann et l’avaient comparé à un violeur d’enfants condamné. Le jugement pourrait servir d’avertissement à ceux qui attaquent les scientifiques du climat. Plus d’informations sur Nature.
De plus en plus de pays quittent le traité sur la Charte de l’énergie
La Grande-Bretagne s’est retirée du traité sur la Charte de l’énergie, suivant ainsi l’Allemagne, la France, l’Espagne et d’autres pays européens. L’accord commercial multilatéral a été conclu en 1994 afin d’encourager les investissements occidentaux dans les secteurs énergétiques des anciens pays soviétiques. Parallèlement, l’accord permet aux investisseurs de poursuivre les gouvernements en justice si des changements dans la politique énergétique risquent d’affecter leurs bénéfices. Les groupes pétroliers en ont profité pour freiner la transition énergétique. Ainsi, le groupe énergétique allemand RWE se réfère au traité pour poursuivre en justice le gouvernement néerlandais en raison de son projet d’abandon de la production d’électricité à partir du charbon. La Suisse est toujours membre du Traité sur la Charte de l’énergie, pour en savoir plus, cliquez ici et ici.
Les obstacles au plan de Biden pour les véhicules électriques
Aux États-Unis, le transport produit plus d’émissions que tout autre secteur. Le gouvernement Biden a introduit de nouvelles limites d’émissions afin de promouvoir l’électrification des transports. Pour que les nouvelles limites d’émissions de gaz soient respectées, il faudrait que 56% des nouvelles voitures vendues d’ici 2032 ne produisent pas d’émissions et que 16% supplémentaires soient des voitures hybrides.
La nouvelle réglementation est ambitieuse, car la part des véhicules électriques dans les ventes de voitures neuves est aujourd’hui d’à peine 8% aux Etats-Unis. Cependant, plusieurs facteurs pourraient faire échouer le plan de Biden. Les véhicules électriques font désormais partie du combat culturel américain. Un sondage Gallup montre que 71% des républicains n’achèteraient pas de voiture électrique, contre seulement 17% des démocrates. Donald Trump s’exprime de plus en plus brutalement sur les véhicules électriques et leur impact sur l’économie américaine. Il affirme qu’ils « détruisent » l’industrie automobile américaine et qualifie les véhicules électriques de « tueurs » d’emplois.
Selon un rapport du Sierra Club, deux tiers des concessionnaires automobiles américains ne vendent pas de véhicules électriques. Plusieurs raisons expliquent la résistance des concessionnaires : Les marges bénéficiaires pour les VE sont plus faibles. Plus important encore, les concessionnaires réalisent près de la moitié de leurs bénéfices avec l’entretien des véhicules. Il y a moins de pièces pour les véhicules électriques, ils doivent aller beaucoup moins souvent à l’atelier et sont moins chers à entretenir que les voitures et les camions à énergie fossile.
L’industrie pétrolière s’oppose également aux nouvelles valeurs limites. On s’attend à ce qu’une coalition d’entreprises fossiles et d’avocats républicains porte plainte contre la nouvelle réglementation.
Malgré les nombreux obstacles, la nouvelle réglementation est une étape importante. Les véhicules électriques sont le segment qui connaît la plus forte croissance sur le marché automobile américain. On s’attend à ce qu’une vague de modèles moins chers et plus performants arrive sur le marché dans les années à venir. Plus dans le NY Times (paywall).
Les investissements dans les énergies renouvelables augmentent
Les investissements dans la transition énergétique atteindront un niveau record de 1,8 billion de dollars en 2023, selon le dernier rapport de BloombergNEF. C’est certes trois fois plus qu’en 2019, mais ce n’est toujours pas suffisant pour atteindre l’objectif climatique de 1,5 degré.
La plus forte croissance a été enregistrée dans le domaine des transports électrifiés. La Chine a investi le plus avec 676 milliards de dollars (38% du total mondial). L’UE, les États-Unis et le Royaume-Uni investissent ensemble encore plus que la Chine en 2023. En Allemagne, la deuxième plus grande économie de l’OCDE, la part des énergies renouvelables dans la consommation totale d’électricité a considérablement augmenté en 2023, passant d’environ 45 % à près de 53 %. L’objectif du gouvernement d’atteindre une part de 80 % d’énergies renouvelables d’ici 2030 reste à portée de main, mais le développement de l’énergie éolienne doit être accéléré. Dans les pays en développement, le manque d’investissement reste important. Plus d’informations sur BloombergNEF, renewableenergyworld.com et le World Economic Forum.
Politique climatique européenne
Les énergies renouvelables ont le vent en poupe dans toute l’UE
L’UE va de l’avant avec les énergies renouvelables. En 2023, les émissions de CO2 dans le secteur de l’électricité ont diminué de 19% par rapport à l’année précédente et, avec une part de 44%, la barre des 40% de la production d’électricité verte a été franchie pour la première fois. C’est ce que montre le nouveau rapport du think tank indépendant Ember. La production d’électricité à partir du charbon s’est effondrée de plus d’un quart et l’énergie éolienne a pour la première fois produit plus d’électricité que les centrales à gaz. La directrice du programme Brown avertit que l’heure n’est pourtant pas à la complaisance et que l’accent doit être mis davantage sur le développement plus rapide de l’énergie éolienne et solaire.
Le « German Vote » fait s’effriter la crédibilité de l’Allemagne
Sans la voix de l’Allemagne, il est difficile d’obtenir la majorité nécessaire selon le droit européen pour faire passer de nouveaux projets de loi européens. Ces derniers temps, il est souvent arrivé que l’Allemagne approuve des mesures pendant les négociations en trilogue (outre le Parlement européen et le Conseil de l’UE, des représentants de la Commission européenne sont également impliqués). Mais peu avant les votes décisifs au Conseil de l’UE, l’Allemagne a fait marche arrière et s’est abstenue. De facto, une telle abstention équivaut à un vote négatif. Ces derniers mois, c’est surtout le FDP, le plus petit parti au gouvernement, qui a souvent mis son veto à la dernière minute, notamment en ce qui concerne la législation sur l’environnement et le climat (par ex. concernant les valeurs limites de CO2 pour les camions ou le règlement européen sur les emballages). Cela irrite les autres États membres, car l’Allemagne n’est plus un partenaire fiable et les processus législatifs sont inutilement prolongés. Ce comportement est appelé le « German Vote » dans le langage courant. Pour en savoir plus, voir ZDF et Handelsblatt.
La loi européenne sur la chaîne d’approvisionnement arrive
La loi européenne sur la chaîne d’approvisionnement vise à introduire des normes à l’échelle européenne pour le respect de l’environnement, du travail et des droits de l’homme par les entreprises. Malgré un compromis en décembre 2023, l’Allemagne a de nouveau fait marche arrière début février, poussée par le FDP. Selon le FDP, la proposition de compromis est trop bureaucratique et contraignante pour les entreprises européennes. Ce nouveau « vote allemand » a provoqué des remous dans toute l’Europe quelques jours seulement avant le vote final au Conseil. Néanmoins, un nouveau compromis a pu être trouvé en mars, même sans l’accord de l’Allemagne. Plus d’informations sur le processus dans la FAZ.
Mais par rapport à la proposition initiale de la Commission et au compromis âprement négocié de décembre 2023, le projet a été considérablement affaibli : seules les entreprises employant plus de 1000 personnes et réalisant un chiffre d’affaires de plus de 450 millions d’euros devront à l’avenir s’assurer que les droits et les normes de l’UE sont respectés tout au long de la chaîne d’approvisionnement. Les organisations environnementales ont vivement critiqué cet affaiblissement ainsi que le rôle du gouvernement fédéral dans ce contexte. Le Deutscher Naturschutzring a rassemblé une analyse des critiques et des informations complémentaires. Des organisations de défense des droits de l’homme comme Amnesty International ont également clairement critiqué le gouvernement fédéral.
Les entreprises fossiles doivent participer au financement climatique
La conférence mondiale sur le climat de cette année, qui se tiendra en novembre à Bakou, en Azerbaïdjan, se concentrera principalement sur les discussions relatives au financement international du climat. La question centrale est de savoir combien les pays industrialisés prospères devraient payer aux pays plus pauvres du Sud mondial pour faire face aux effets dévastateurs de la crise climatique. Dans un communiqué de presse commun, les ministres des Affaires étrangères de l’UE se sont prononcés en faveur de la recherche de sources de financement nouvelles et innovantes, notamment dans l’industrie fossile ou les secteurs à fortes émissions, afin de soutenir le financement climatique dans le Sud. En outre, les pays relativement riches comme la Chine ou les pays du Moyen-Orient devraient également contribuer au financement climatique, selon les ministres de l’UE. Selon l’OCDE, les besoins financiers des pays pauvres s’élèvent à plus de mille milliards d’euros par an. Pour en savoir plus, consultez Reuters et E3G.
Le Parlement européen est élu pour la 10e fois
Du 6 au 9 juin 2024, quelque 360 millions de citoyens européens seront appelés à élire leurs représentants au Parlement européen. Les derniers sondages indiquent que les partis de droite, en particulier, peuvent s’attendre à obtenir plus de voix. Euractiv et Politico compilent les derniers sondages électoraux. Les partis de droite et d’extrême droite sont sceptiques, voire clairement opposés à une protection ambitieuse de l’environnement et du climat. Selon les derniers résultats de l’Eurobaromètre, seules 16 % des personnes interrogées ont cité « la protection du climat et de l’environnement » comme thème le plus important pour l’UE. Pour en savoir plus, voir Clean Wire Energy. Cela correspond à une réduction de moitié par rapport à l’enquête Eurobaromètre réalisée avant les élections européennes de 2019. Il ne s’agit donc plus que du quatrième thème le plus important. Le numéro un est le thème de la migration, suivi de la situation internationale et de l’inflation. Les associations environnementales comme le WWF tentent d’obtenir plus de soutien en menant des campagnes publiques sur le thème de l’environnement. La définition d’un objectif climatique pour l’année 2040 et les mesures politiques appropriées pour sa mise en œuvre sont attendues comme des priorités de la politique climatique pour la prochaine législature de l’UE.
Allemagne
Objectifs d’émissions 2023 respectés, mais…
Mi-mars, le ministre de la protection du climat Habeck a présenté les chiffres des émissions pour l’année 2023. Les émissions totales ont baissé de plus de dix pour cent par rapport à l’année précédente, grâce au fort développement des énergies renouvelables. Les associations environnementales déplorent que ce succès ne soit guère dû à des changements structurels, mais surtout à un hiver doux et à une économie affaiblie par des crises comme la guerre en Ukraine (voir DNR). Comme on pouvait s’y attendre, les secteurs du bâtiment et des transports ont une nouvelle fois manqué les objectifs annuels. Selon les nouvelles prévisions, il est potentiellement possible d’atteindre les objectifs de 2030 grâce à une nouvelle législation. Toutefois, l’objectif d’atteindre la neutralité climatique d’ici 2045 n’est pas encore en vue. Les secteurs du bâtiment et des transports y contribuent de manière significative. La DUH a vivement critiqué le rapport.
Les installations solaires nécessitent moins de surface non construite
Il est souvent difficile de réaliser de nouvelles installations solaires sur des surfaces libres, car il y a souvent des conflits d’utilisation avec l’agriculture ou avec la protection de la nature. Une nouvelle étude de l’Öko-Institut montre que les objectifs de développement de l’énergie solaire pourraient être atteints même sans installations sur des surfaces libres. Des installations PV sur des surfaces préexistantes et déjà imperméabilisées (p. ex. toits, parkings, bordures, zones industrielles) pourraient couvrir l’augmentation nécessaire. Une large coalition d’associations environnementales demande depuis des années que l’on se concentre davantage sur ces surfaces et que l’on introduise par exemple une « norme pour les toits solaires » ambitieuse (voir DNR).
Le Climate Action Network Europe (CAN Europe) a publié début avril un rapport comparatif sur le développement de l’énergie solaire sur les toits dans l’UE. Dans l’ensemble, la tendance en matière de développement de l’énergie solaire est positive.
Un an après : L’Allemagne sans électricité nucléaire
Le 15 avril, le premier anniversaire de l’abandon de l’énergie nucléaire en Allemagne approche. Après de longues tergiversations, les trois dernières centrales nucléaires allemandes encore en service ont été arrêtées en avril 2023. Les craintes de black-out, de hausse des prix de l’électricité ou de retour de l’électricité produite à partir de charbon ne se sont pas vérifiées. En Allemagne, les nouveaux tarifs d’électricité n’ont pas été aussi avantageux depuis longtemps – ils sont même moins chers qu’avant le début de la guerre en Ukraine (voir FAZ) – et la part des énergies renouvelables dans le mix électrique ne cesse d’augmenter. Ainsi, en 2023, la part des énergies renouvelables dans la production d’électricité était déjà de 56%. Pour en savoir plus, consultez l‘Office fédéral des statistiques.
Faire avancer la transformation pour la grande industrie
Le gouvernement fédéral veut accélérer la transformation des grandes installations industrielles vers la neutralité climatique grâce à ce que l’on appelle des contrats de protection climatique : Le gouvernement prend en charge une partie des coûts de transformation et les entreprises les remboursent dès que les investissements sont rentabilisés. Tant les associations économiques que les associations de protection de l’environnement et du climat saluent l’introduction de cet instrument comme un élément supplémentaire pour atteindre la neutralité climatique. Plus d’informations sur Tagesschau.de et sur Klimaschutzverträge.info.
La crise climatique visible
Le réchauffement climatique s’accélère
Il est de plus en plus évident que le réchauffement de la planète s’accélère. Entre 1970 et 2008, la Terre s’est réchauffée d’environ 0,18 °C tous les dix ans. Au cours des quinze dernières années, de 2009 à 2023, le rythme a presque doublé, passant à 0,3 °C.
Cependant, il y a toujours eu des inquiétudes scientifiques selon lesquelles le réchauffement accru de ces dernières années était également dû principalement à des facteurs naturels, tels que certaines activités volcaniques et El Nino, ainsi que des événements de taches solaires accrus. Or, le professeur Housefather, un physicien climatique renommé, a démontré, en se basant sur les dernières estimations des spécialistes de l’atmosphère, que l’accélération du réchauffement est exclusivement due aux émissions de gaz à effet de serre.
Les derniers chiffres de l’agence américaine pour l’étude du climat NOAA montrent que les concentrations mondiales de CO2 , de méthane et de N2 O – les trois principaux gaz à effet de serre – ont atteint des valeurs record l’année dernière. La teneur en CO2 de l’atmosphère est supérieure de 50% aux valeurs préindustrielles, celle du méthane de 160%.
Avec la réduction de la pollution de l’air – des aérosols qui d’une part nuisent à la santé, mais qui d’autre part refroidissaient l’atmosphère – le réchauffement s’accélère davantage. Plus sur Carbon Brief.
Des températures toujours beaucoup trop élevées
En 2023, la température moyenne mondiale était supérieure de 1,45 degré à son niveau pré-industriel (1850 à 1900). C’est ce que montre le rapport « State of the Global Climate » de l’Organisation météorologique mondiale (OMM). Des valeurs record ont été atteintes pour de nombreux indicateurs climatiques tels que les températures de surface, le réchauffement et l’acidification des océans ou l’élévation du niveau de la mer. « Les sirènes retentissent pour tous les indicateurs importants. Et les changements s’accélèrent », a déclaré le secrétaire général de l’ONU António Guterres. Plus d’informations sur SRF et le Tages-Anzeiger (paywall).
Des températures bien trop élevées ont également été mesurées début 2024. De juin 2023 à mars 2024, les températures moyennes à la surface des terres et des océans ont dépassé les records précédents pendant les dix mois, comme le montrent les derniers chiffres de Copernicus, le service européen de surveillance du changement climatique. La température moyenne mondiale pour les douze derniers mois, d’avril 2023 à mars 2024, est supérieure de 1,58 degré à la moyenne préindustrielle. Plus d’informations ici et ici dans le NY Times (paywall) et dans le Zeit.
Les océanographes observent avec inquiétude l’augmentation de la température des océans. Cette augmentation est particulièrement marquée dans l’Atlantique Nord, comme le montrent les données de l’agence américaine pour le climat NOAA. Plus d’informations dans le NY Times (paywall) et la NZZ (paywall).
Le graphique suivant montre à quel point cette évolution est exceptionnelle : Source : NZZ / https://climatereanalyzer.org/clim/sst_daily/
Un reportage du NY Times (paywall) sur l’Afghanistan illustre les conséquences de la sécheresse. Le pays est particulièrement menacé par le changement climatique. En l’absence de pluie depuis plusieurs années, la population de régions entières est déplacée. Des millions d’enfants souffrent de malnutrition et aucune amélioration n’est en vue.
Le changement climatique rend les vagues de chaleur plus probables et modifie en même temps leur déroulement. Une étude publiée dans Science montre que les vagues de chaleur se propagent plus lentement et durent donc plus longtemps. Au cours de chaque décennie entre 1979 et 2020, la vitesse de propagation des vagues de chaleur s’est ralentie d’environ huit kilomètres par jour. Elles durent désormais en moyenne quatre jours de plus. Cela a un impact important sur la santé humaine, soulignent les auteurs de l’étude. Plus les vagues de chaleur se maintiennent longtemps à un endroit, plus les personnes sont exposées longtemps à des températures potentiellement mortelles. Plus d’informations dans le NY Times (paywall).
L’adaptation au climat devient plus difficile
Les efforts actuels pour faire face aux effets de la crise climatique dans le monde entier ne sont pas suffisants. Et ce que l’on appelle l’écart d’adaptation (différence entre les mesures nécessaires et celles déjà mises en œuvre) ne cesse de se creuser, comme le montre le dernier rapport du GIEC. Une étude de CarbonBrief montre désormais clairement que les mesures d’adaptation perdent nettement de leur efficacité dans un climat de plus en plus chaud.
Les chercheurs se concentrent sur les options d’adaptation en rapport avec la pénurie d’eau dans l’agriculture. Si la température mondiale augmente de 2 degrés, l’effet des mesures d’adaptation diminue d’un quart. En cas d’augmentation de 4 degrés, les mêmes mesures ne sont plus que deux fois moins efficaces. Parmi les mesures étudiées figurent le choix d’espèces végétales mieux adaptées ou la réduction du travail du sol.
Les résultats montrent qu’une adaptation climatique efficace n’est possible que si des mesures ambitieuses sont prises en même temps pour limiter le réchauffement à 1,5 °C. L’adaptation au climat n’est pas une alternative à la réduction et ne doit pas être utilisée comme prétexte pour retarder les efforts de réduction des gaz à effet de serre, soulignent les auteurs de l’étude. Plus d’informations sur CarbonBrief.
Nouvelles de la science du climat
La circulation océanique vitale va-t-elle bientôt basculer ?
La dérive nord atlantique (en anglais « Atlantic Meridional Overturning Circulation » (AMOC)) permet à d’énormes quantités d’eau de circuler dans l’Atlantique et de réguler ainsi également le climat. Le Gulf Stream, si important pour le climat européen, fait partie de ce système de circulation. Depuis quelques années déjà, les scientifiques observent que cette circulation perd de sa force. Une nouvelle étude publiée dans Science Advances confirme que l’AMOC se dirige vers un point de basculement. Si ce point est dépassé, elle s’effondrera.
Les conséquences seraient catastrophiques. En Europe du Nord, de la Grande-Bretagne à la Scandinavie, on assisterait par exemple à un refroidissement des températures hivernales de 10 °C à 30 °C en un siècle. En l’espace d’une ou deux décennies, le climat deviendrait complètement différent. En outre, la ceinture de précipitations tropicales se déplacerait considérablement. Ces effets, et bien d’autres encore, d’un effondrement de l’AMOC sont connus depuis longtemps, mais n’avaient pas encore été montrés dans un modèle climatique aussi détaillé.
En 2023, une étude publiée dans Nature concluait que le point de basculement pourrait très probablement (niveau de confiance de 95%) être atteint dès 2025 et 2095. La nouvelle étude soutient ces résultats et confirme également les préoccupations antérieures selon lesquelles les modèles climatiques surestiment systématiquement la stabilité de l’AMOC.
Stefan Rahmsdorf, spécialiste du climat et des océans, commente : « Au vu des conséquences, le risque d’un effondrement de l’AMOC doit être évité à tout prix. La question n’est pas de savoir si nous sommes sûrs que cela se produira. La question est que nous devons l’exclure avec une probabilité de 99,9 %. Une fois que nous aurons un signal d’alarme clair, compte tenu de l’inertie du système, il sera trop tard pour faire quoi que ce soit ».
Stefan Rahmsdorf explique plus en détail les points de basculement dans Republik : Monteriez-vous dans un avion qui a une probabilité de 10 pour cent de s’écraser ? De nombreux rapports mettent en garde avec insistance contre les points de basculement, comme le rapport de l’OCDE sur les points de basculement climatiques de décembre 2022 et le rapport sur les points de basculement mondiaux publié en décembre 2023. Pour en savoir plus, voir aussi Real Climate et le Tagesanzeiger (paywall).
Comment fonctionne la dérive nord atlantique :
L’eau chaude de surface provenant de l’équateur circule vers les hautes latitudes. Là, l’eau rencontre des vents forts et des températures froides de l’air, qui la rendent plus froide et plus dense. Ces eaux froides et denses descendent dans les profondeurs de l’océan, puis sont à nouveau transportées vers le sud en profondeur, créant ainsi une boucle en forme de tapis roulant.
L’augmentation des pluies, la fonte des glaces du Groenland et l’eau de fonte des glaciers sur les continents diluent l’Atlantique Nord. Cela entraîne une baisse de la salinité et de la densité de l’eau de mer : elle devient plus légère et descend donc beaucoup plus lentement vers les profondeurs. Or, c’est précisément ce mouvement de descente qui est un moteur décisif de l’AMOC. S’il s’affaiblit de plus en plus, la circulation s’arrête. La dernière fois que cela s’est produit, c’était il y a environ 12’000 ans, et cela avait alors déclenché une période glaciaire en Europe.
Illustration de Caesar et al., Nature 2018
Les femmes souffrent davantage du changement climatique
La chaleur extrême rend certaines des femmes les plus pauvres du monde encore plus pauvres. C’est la conclusion d’une étude de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). Pour ce faire, les données météorologiques et de revenu de 24 pays à revenu faible et moyen ont été analysées. Certes, le stress dû à la chaleur est coûteux pour tous les ménages ruraux. Mais pour les ménages dirigés par une femme, les conséquences sont plus graves. Ainsi, les ménages dont le chef est une femme perdent 8% de plus de leur revenu annuel que les autres ménages.
L’une des raisons est que les effets de la crise climatique accentuent les inégalités existantes chez les femmes. Elles sont moins nombreuses à posséder des terres. Par conséquent, elles ont moins accès à des services essentiels tels que le crédit, l’assurance récolte et les services de conseil agricole qui les aident à s’adapter au changement climatique.
Selon l’étude de la FAO, les femmes sont également plus touchées par les effets à long terme du réchauffement climatique : Si la température moyenne augmente d’un degré, les ménages dirigés par des femmes perdent 34% de revenus en plus que les autres ménages. Les ménages féminins sont également plus touchés par les inondations. Plus d’informations dans le Guardian et le NY Times (paywall).
La déforestation et l’impact complexe des forêts sur le climat
La déforestation se poursuit
Selon le World Resources Institute (WRI), une surface presque aussi grande que la Suisse a été déboisée l’année dernière dans le monde entier. Cela correspond à dix terrains de football par minute. Au Brésil et en Colombie, la déforestation a heureusement nettement diminué, de 36% et 49% respectivement par rapport à l’année précédente. Néanmoins, le Brésil fait toujours partie, avec la République démocratique du Congo et la Bolivie, des trois pays qui abattent le plus de forêts tropicales. Ensemble, ces trois pays ont été responsables de plus de la moitié de la destruction totale dans le monde l’année dernière. Plus d’informations dans le Guardian.
Les forêts peuvent avoir un effet rafraîchissant ou réchauffant
Une étude de Nature datant de 2021 a montré que la plupart des zones boisées sont plus nuageuses. Cela fait baisser les températures, car davantage de lumière solaire est réfléchie. Un nouvel article de Nature met en évidence un autre effet rafraîchissant : Dans les forêts, l’évaporation de l’eau est augmentée par la transpiration, ce qui refroidit l’environnement. Le reboisement peut donc à la fois capter le CO2 et faire baisser les températures locales.
Mais l’impact des forêts sur le climat est complexe. Une autre étude montre que le reboisement des forêts permet certes de stocker du CO2 , mais qu’il peut aussi réchauffer l’environnement, surtout si la surface de la terre est devenue plus sombre à cause de la nouvelle forêt. L’effet dit d’albédo, ainsi que les effets sur l’ozone, le méthane et les aérosols, font que l’effet climatique net du reboisement est, selon les cas, de 15 à 30 % inférieur à celui de la simple prise en compte du CO2 stocké. Plus d’informations sur The Conversation et sur Inside Climate News.
Nos forêts aussi sont menacées
Les forêts de nos régions sont également menacées. Cela n’est pas seulement dû à une exploitation accrue, à la chaleur et à la sécheresse, mais aussi à l’attaque de parasites tels que les scolytes ou les buprestes des hêtres, ainsi que de parasites et de champignons. Si les arbres sont affaiblis par des extrêmes climatiques, ils ne peuvent plus se défendre aussi bien contre eux. Il faut maintenant étudier quelles espèces pourront à l’avenir prospérer dans nos forêts. Pour en savoir plus, consultez le site de l’Öko-Institut.
Les scientifiques de l’Öko-Institut ont également une position claire sur la question de savoir si le bois des forêts doit continuer à être utilisé pour la production d’énergie. « Il faudrait vraiment y mettre fin. Du point de vue des gaz à effet de serre, il est toujours préférable de stocker le carbone, dans les forêts – si elles sont saines – ou sous forme de produits en bois à longue durée de vie », explique le Dr Klaus Hennenberg. « En outre, les émissions liées à la combustion du bois sont nettement plus élevées que celles du gaz naturel ou du mazout, avec 367 kilogrammes de CO2 par kilowattheure d’énergie produite. Dans ce cas, elles sont respectivement de 202 et 288 kilogrammes de CO2 par kilowattheure. Nous devons d’abord sortir des énergies fossiles et ensuite de la combustion du bois – d’ailleurs aussi parce qu’elle produit des particules fines qui nuisent à la santé ». Une alternative judicieuse à l’énergie du bois serait par exemple la pompe à chaleur, qui fonctionne à l’électricité renouvelable. Pour en savoir plus, consultez l’Öko-Institut.
Actif contre le désespoir
Beaucoup d’entre nous se sentent toujours désespérés par le poids des mauvaises nouvelles et la lenteur des changements politiques. Le désespoir et le « c’est trop tard de toute façon » ne nous font pas seulement nous sentir mal. Cela nous démotive également pour passer à l’action. C’est ce que montre une nouvelle étude menée auprès de 60 000 personnes du monde entier.
C’est également l’avis du célèbre chercheur américain Michael Mann dans son nouveau livre. Ce ne sont pas seulement les négateurs du climat, mais aussi les désespérés qui saperaient la protection du climat. Le chercheur en sciences atmosphériques Adam Sobel explique que la peur de l’avenir et de la crise climatique fait désormais partie de la condition humaine. L’important, selon lui, est de continuer à s’engager.
Grâce à la démocratie directe de la Suisse, nous pouvons (et devons !) toujours nous engager activement. Les initiatives et votations suivantes sont d’actualité :
- Loi sur l’électricité : 9 juin
- Initiative pour la biodiversité : 22 septembre (sur le lien entre climat et biodiversité, voir ce rapport)
- Référendum contre l’extension de l’autoroute : 24 novembre
- Initiative sur la place financière : le lancement pourrait avoir lieu cet été.
L’application CO 2-Footprint Coach te permet d’analyser et de réduire ton empreinte carbone.
Last but not least, une citation tirée d’un article de Barbara Bleisch et de quatre autres philosophes dans le Tagesanzeiger (paywall). Ils ont testé les principaux arguments du débat sur le climat :
« Le moment et surtout l’ampleur de nombreuses conséquences du changement climatique ne sont en effet pas du tout fixés. Dans le meilleur des cas, nous pourrions encore réussir à maintenir une grande partie de la planète habitable et à assurer un avenir prospère pour nous et les autres espèces. Dans le pire des cas, nous laisserons derrière nous une Terre durablement dévastée. La différence entre ces scénarios est énorme et suffit amplement à justifier une action décisive ».
Éditorial
L’édition de février s’est elle aussi allongée. Dans ce numéro, nous expliquons en détail comment la loi sur le CO2 est une occasion manquée de protéger le climat de manière ambitieuse. Et à quel point les approches discutées autour de la promotion des énergies renouvelables sont différentes. Nous expliquons les enjeux mondiaux des élections dans de nombreux pays. Nous attirons l’attention sur les émissions oubliées du secteur militaire, les records climatiques de 2023 et la fonte rapide des glaciers aux pôles. Nous résumons les nouveaux récits du déni climatique. Nous mettons également en perspective les nouveaux objectifs climatiques de l’UE. Nous présentons des solutions farfelues et indiquons des options d’action face à la crise climatique.
Suisse
La loi CO2 reste édentée
La loi révisée sur le CO2 doit fixer pour la période 2025-2030 les instruments avec lesquels la Suisse réduit de moitié les gaz à effet de serre par rapport à 1990, conformément à l’accord de Paris sur la protection du climat. Lors de la session de décembre, le Conseil national a adopté une version un peu moins décourageante que le Conseil des États auparavant. Ainsi, une plus grande partie des réductions d’émissions doit être réalisée à l’intérieur du pays. La construction d’infrastructures de recharge pour les voitures électriques doit être soutenue par les recettes de la taxe sur les carburants. Comme le Conseil des Etats, le Conseil national veut renoncer à une augmentation de la taxe sur le CO2 ainsi qu’à une taxe sur les vols en jet privé. Plus d’informations sur srf.ch.
Lors de la prochaine session d’hiver (26.2. au 15.3.2024), le Conseil des Etats traitera pour la deuxième fois de la loi CO2 . Si l’on s’en tient à la volonté de la commission consultative (CEATE), le Conseil des Etats campe sur ses positions et ne se rallie pas au Conseil national. Le Conseil des Etats rejette un objectif de réduction en Suisse, ce qui entraînerait encore plus de certificats étrangers. Et il ne veut pas non plus entendre parler d’un soutien financier pour les stations de recharge. Plus d’informations sur cash.ch.
Dans la NZZ (paywall), Marcel Hänggi, père de l’Initiative des glaciers, explique pourquoi un objectif national ambitieux doit être ancré dans la loi sur le CO2 . La loi sur la protection du climat (LC), qui a été acceptée par le peuple en été 2023, fixe des objectifs de réduction concrets à partir de 2031. A partir de cette date, les réductions devront être réalisées dans le pays. Les objectifs ne peuvent toutefois être atteints que si les émissions baissent suffisamment dans le pays dès 2030. Dans le cas contraire, c’est-à-dire en renonçant à un objectif national, les objectifs ne seraient pas atteints et la volonté populaire serait ainsi bafouée, explique Hänggi.
Avant même que le Conseil national et le Conseil des Etats ne se soient mis d’accord sur la loi révisée sur le CO2 , les Chambres se penchent déjà sur une initiative pour une « nouvelle loi sur le CO2 légère et efficace ». C’est sous ce titre que Gerhard Pfister, président du parti du centre, avait déposé une initiative parlementaire. Elle prévoit une taxe d’incitation sur toutes les émissions de gaz à effet de serre à partir de 2030, donc également sur l’essence et le diesel. En janvier, la Commission de l’environnement, de l’aménagement du territoire et de l’énergie (CEATE) du Conseil des Etats a rejeté de justesse cette intervention. Pour en savoir plus, cliquez ici et ici dans le Tages-Anzeiger.
Comment la loi sur le
changement climatique est-elle mise en œuvre ?
En été 2023, la loi sur la protection du climat (LC) a été acceptée dans les urnes. Le Conseil fédéral a maintenant présenté l’ordonnance avec laquelle il entend réaliser les programmes d’encouragement prévus à hauteur de 3,2 milliards de francs. Selon le projet mis en consultation, les prescriptions devraient entrer en vigueur début 2025. En ce qui concerne le soutien au remplacement du chauffage, l’accent doit être mis sur les immeubles collectifs, car l’aide cantonale est trop peu efficace dans ce domaine. Le remplacement des chauffages électriques inefficaces par des systèmes de chauffage renouvelables constitue une deuxième priorité. En revanche, le Conseil fédéral a reporté les mesures visant à permettre à l’administration fédérale de remplir le rôle de modèle exigé par la LC.
En automne déjà, l’Association suisse pour la protection du climat (qui avait retiré l’initiative sur les glaciers au profit de la loi sur la protection du climat) avait critiqué la lenteur de la mise en œuvre de la loi. Elle craint maintenant que la LC soit édulcorée sur des points centraux.
Encore un vote sur la politique énergétique et d’autres
initiative pour le climat
Le peuple sera appelé à se prononcer sur l’introduction de la « loi fédérale sur la sécurité de l’approvisionnement en électricité grâce aux énergies renouvelables » (acte modificateur unique). L’Alliance Nature & Paysage Suisse, l’Association Paysage Libre Suisse et la Fondation Franz Weber ont déposé mi-janvier suffisamment de voix pour le référendum. Le réseau Carnot-Cournot, un groupe de réflexion composé de partisans de l’énergie nucléaire, a également récolté des signatures contre la loi.
En automne, le Conseil national et le Conseil des Etats s’étaient mis d’accord sur des objectifs contraignants de développement des énergies renouvelables d’ici 2035 et, en contrepartie, sur un assouplissement de la protection de la nature. Les organisations qui ont récolté les signatures soulignent qu’avec l’acte modificateur unique, l’intérêt pour la construction de grandes installations énergétiques passe systématiquement avant la protection de la nature et du paysage. Cela est en contradiction avec la Constitution. Plus d’informations à ce sujet dans le Tages-Anzeiger et ici et ici (paywall) dans la NZZ. Dans l’hebdomadaire, on peut lire pourquoi les Verts du canton des Grisons estiment que les paysages alluviaux sont ainsi menacés et pourquoi ils rejettent la loi. Dans la NZZ (paywall), Hans Weiss, pionnier de la protection du paysage et l’une des têtes du comité référendaire, explique pourquoi il combat le décret sur le manteau.
La loi sera soumise au vote le 9 juin. Les partisans avancent d’ores et déjà leurs arguments. L’acte modificatif est une étape essentielle pour un approvisionnement énergétique sûr et renouvelable. Il permet de respecter les objectifs climatiques et garantit des conditions-cadres fiables ainsi qu’une sécurité de planification. Plus d’informations dans la NZZ (paywall), auprès de la Fondation suisse de l’énergie, du WWF et de l’association energie-wende-ja.
Il faudra encore attendre environ deux ans avant de voter sur une autre initiative climatique : l’initiative populaire « pour un avenir » de la Jeunesse socialiste suisse (JS). Les signatures nécessaires ont été déposées début février. L’initiative populaire veut introduire un impôt sur les successions de 50%. L’initiative vise les personnes très fortunées – l’impôt ne doit être prélevé qu’à partir d’un montant exonéré de 50 millions de CHF. Les initiants estiment que cela permettrait de mettre à disposition environ six milliards de CHF par an pour lutter contre la crise climatique et restructurer l’ensemble de l’économie. La dernière votation sur un impôt national sur les successions a eu lieu en 2015. A l’époque, 71% des votants avaient refusé de prélever une taxe de 20% sur les héritages et les donations. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger.
Chaleur record et ses
conséquences
En 2023, la Suisse a connu la deuxième année la plus chaude depuis le début des mesures. La température annuelle moyenne a été supérieure de 1,4 degré à celle de la période allant de 1991 à 2020, selon le bulletin climatique 2023 de MétéoSuisse. Par rapport à la période de 1961 à 1990, la température annuelle a augmenté de 2,6 degrés.
La population suisse perçoit les changements climatiques, comme le montre une enquête de l’Office fédéral de la statistique. 41% des personnes interrogées jugent les changements importants, 48% les jugent légers. Les femmes ressentent plus fortement le changement climatique que les hommes.
Le réchauffement climatique a fait monter la limite pluie/neige en Suisse. Au cours des 150 dernières années, elle est montée de 200 à 700 mètres, particulièrement en hiver, écrit le Tages-Anzeiger (paywall). Entre 1871 et 1900, la limite moyenne pluie/neige en hiver se situait encore à l’altitude des villes de Berne, Bâle ou Zurich. Entre-temps, elle a grimpé jusqu’à l’altitude d’Einsiedeln (883 mètres au-dessus du niveau de la mer). En été également, les couches d’air se réchauffent jusqu’à des altitudes élevées. Ainsi, l’isotherme zéro degré au-dessus de la Suisse a atteint en août l’altitude record de 5298 mètres. Pour déterminer l’altitude de l’isotherme zéro degré, des ballons météorologiques sont lancés depuis 1954 depuis Payerne. Pour en savoir plus, consultez MétéoSuisse.
Un reportage du NY Times montre comment le réchauffement, la sécheresse croissante en été et la fonte des glaciers affectent l’agriculture de montagne en Suisse (paywall).
2200 décès évitables dus aux particules fines et au dioxyde d’azote
En Suisse, la pollution de l’air entraîne chaque année la mort de milliers de personnes. Si notre pays respectait les directives actuelles de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en matière de qualité de l’air, plus de 2200 de ces décès pourraient être évités chaque année. Cela correspond à environ 23’850 années de vie perdues. C’est la conclusion d’un rapport de l’Institut tropical et de santé publique (Swiss TPH) commandé par l’Office fédéral de l’environnement. En outre, quelque 9000 cas de maladies pulmonaires chroniques, 5000 cas de démence et 1100 cas d’asthme chez les adultes pourraient être évités chaque année.
L’étude est motivée par le renforcement des directives de l’OMS en matière de qualité de l’air pour les particules fines et le dioxyde d’azote. Les nouvelles valeurs, en vigueur depuis 2021, ont été adaptées sur la base de nouvelles connaissances scientifiques. La Suisse ne les a pas encore mises en œuvre. Les valeurs limites d’immission actuelles de l’ordonnance sur la protection de l’air s’alignent sur les directives de l’OMS de 2005. Les poussières fines proviennent des chauffages au bois dans les ménages, de l’industrie, du trafic motorisé (moteurs à combustion et usure des pneus) et de l’agriculture. Les oxydes d’azote sont générés par les moteurs diesel, l’agriculture (ammoniac) et l’industrie. En 2023, la Commission fédérale de l’hygiène de l’air avait recommandé d’adopter les valeurs indicatives de l’OMS. Selon l’OFEV, il faudra toutefois attendre quelques années avant que cette recommandation soit appliquée. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger.
Doutes sur la réduction volontaire des émissions de CO2 par l’industrie
Selon la loi sur le CO2 en vigueur, les entreprises en Suisse qui consomment beaucoup d’énergie peuvent se faire exempter de la taxe sur le CO₂. La condition est qu’elles se fixent un objectif de réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre. Or, un rapport du Contrôle fédéral des finances montre que les objectifs ne sont « pas assez ambitieux ». De plus, les mêmes exigences s’appliquent depuis le début de ce régime d’exception, bien que la taxe sur le CO₂ ait été augmentée plusieurs fois dans le même temps. Une réduction de 12% des émissions de CO₂ a été convenue avec les entreprises participantes. Celle-ci a certes été dépassée avec une baisse de 19%. Mais durant la même période, l’ensemble de l’industrie suisse a émis 20% de CO₂ en moins. C’est pourquoi le Contrôle des finances conseille de renforcer les exigences imposées aux entreprises participantes.
Economiesuisse et d’autres associations économiques rejettent cette critique. La réduction de CO2 de l’ensemble de l’industrie ne tient pas compte du fait que des entreprises ont délocalisé leur production à l’étranger ou l’ont abandonnée. La fermeture de la raffinerie de Collombey, qui a émis beaucoup d’émissions, en est un exemple. Le Contrôle des finances rejette les critiques des associations.
Le constat du Contrôle des finances est également pertinent car, avec la révision de la loi sur le CO2 , toutes les entreprises peuvent désormais participer au programme d’exemption de la taxe. Plus d’informations ici, ici et ici (paywall) dans le Tages-Anzeiger, dans la NZZ et sur srf.ch.
L’approvisionnement en électricité toujours en ligne de mire
La Suisse veut multiplier par six la production d’électricité à partir du soleil, du vent, du bois et du biogaz d’ici 2035. Des chercheurs des universités de Genève et de Berne ainsi que des EPF de Lausanne et de Zurich ont analysé comment cet objectif peut être atteint. Leur étude met en évidence trois stratégies permettant de couvrir les besoins futurs en électricité tout en créant des milliers d’emplois. Dans les trois possibilités, l’électricité solaire représente la plus grande part (70-88%). Une variante se concentre sur les sites les plus productifs et mise davantage sur l’énergie éolienne. Une autre comprend également, dans une plus large mesure, des installations de biomasse. Selon la stratégie, les investissements annuels nécessaires se situent entre 0,5 et 2,1 milliards de francs. La variante avec une plus grande part d’éolien serait la plus avantageuse, celle avec plus de biomasse la plus chère.
A court terme, le Conseil fédéral propose une autre voie pour garantir l’approvisionnement en électricité. Il mise sur des centrales de réserve à combustible fossile. Les contrats que la Confédération a conclus pour des installations à Birr, Cornaux et Monthey courent jusqu’en 2026. Un nouvel appel d’offres est en cours pour la période suivante. Mais l’intérêt des entreprises d’électricité est faible, le risque financier étant trop important. Le Conseil fédéral est maintenant allé dans le sens des entreprises. A l’avenir, les exploitants des centrales de réserve ne devront pas payer eux-mêmes l’étude de projet et les prestations préalables nécessaires ; les coûts seront pris en charge par les consommateurs. Les spécialistes et les activistes du climat soutiennent que les centrales de réserve fossiles sont inutiles et contredisent la loi sur la protection du climat adoptée par le peuple. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger.
Electricité solaire : en 2023, la construction de nouvelles installations photovoltaïques en Suisse s’est encore accélérée. Selon l’association professionnelle Swissolar, 40% de puissance en plus ont été installées par rapport à l’année précédente. Cela permet une production d’électricité d’environ 6 TWh pour l’année en cours, ce qui correspond à environ 10% de la consommation d’électricité en Suisse. La croissance a concerné aussi bien les petites que les grandes installations. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger.
Le développement des installations solaires alpines est moins rapide. Le Parlement a voulu l’accélérer avec l’offensive solaire. Pour obtenir les subventions promises, qui peuvent atteindre 60% des investissements, les installations doivent fournir de l’électricité d’ici fin 2025. Selon une liste de l’Association des entreprises électriques suisses, 54 projets solaires alpins sont en cours de planification. Mais seuls sept d’entre eux ont fait l’objet d’une demande de permis de construire, comme le montre un aperçu de l’OFEN. Depuis 2023, la population des communes d’implantation a approuvé 16 projets de construction, tandis que plus d’une dizaine de projets ont été rejetés, écrit l’Aargauer Zeitung.
Le ministre de l’énergie Albert Rösti a maintenant déclaré dans le Tages-Anzeiger que le délai pourrait être prolongé. Il a déclaré qu’on trouverait « certainement une solution pour que les projets puissent être réalisés avec les subventions ». Les détracteurs de l’offensive solaire issus de l’UDC sont d’avis qu’une décision du Parlement est nécessaire pour une prolongation.
Trois autres projets solaires ont subi un revers : Les assemblées communales de Surses (GR), Hasliberg (BE) et Albinen (VS) ont rejeté des projets de parcs solaires. A Surses/Savognin, la centrale électrique de la ville de Zurich voulait produire de l’électricité pour 20’000 ménages sur une surface de plus de 90 terrains de football. La NZZ voit dans ce refus un « symbole des difficultés de la politique climatique suisse » ; plus d’informations dans le Tages-Anzeiger. Dans la station de ski d’Hasliberg, une installation était prévue pour 4500 ménages, à Albinen pour 17’000 ménages ; plus d’informations dans le Bund (paywall), nau.ch et energate.
Deux projets solaires dans les Grisons ont franchi une étape : aucune opposition n’a été déposée contre les demandes de permis de construire pour les centrales solaires de Klosters et de Laax ; la décision de construire des autorités est attendue pour la fin de l’été, écrit le Südostschweiz (paywall). En revanche, plusieurs organisations de protection de l’environnement ont déposé une opposition contre l’installation dans la région de Gantrisch (Alp Morgeten) (Tages-Anzeiger, paywall).
Le Tages-Anzeiger espère que le rejet des projets solaires conduira la Confédération à stopper l’offensive solaire et à développer les installations PV sur les bâtiments existants. Dans la NZZ, Boris Previsic, de l’institut de recherche uranais Kulturen der Alpen, explique pourquoi il estime que les installations solaires alpines sont judicieuses et pourquoi il veut supprimer les petites centrales hydroélectriques afin d’enrayer la perte de biodiversité. Le Tages-Anzeiger (paywall) montre l’ampleur du potentiel de l’électricité solaire le long des autoroutes.
Le développement de l’énergie hydraulique estégalement retardé. En ce qui concerne le projet de lac de retenue du Trift, les deux organisations environnementales Aqua Viva et Grimselverein ont déposé un recours contre l’octroi de la concession. Elles argumentent que la zone entourant le plus grand lac glaciaire naturel de Suisse doit être inscrite à l’inventaire fédéral des zones alluviales d’importance nationale et donc placée sous protection. Plus d’informations dans le Beobachter et sur srf.ch.
En revanche, l’énergie éolienne doit aller de l’avant. Depuis le 1er février 2024, l’Offensive Energie Eolienne est en vigueur. Le Conseil fédéral a décidé d’adapter l’ordonnance sur l’énergie en conséquence. En juin 2023, le Parlement s’était mis d’accord sur la loi fédérale urgente qui accélère les procédures d’autorisation pour les installations éoliennes d’intérêt national (Windexpress). Désormais, ce sont les autorités cantonales qui délivrent les autorisations de construire, et non plus les communes comme jusqu’à présent. Les recours au Tribunal fédéral ne sont plus recevables que pour les questions juridiques d’importance fondamentale. Plus d’informations sur nau.ch.
Comme le montre srf.ch, onze projets éoliens actuellement en cours de planification et de procédure d’autorisation pourraient bénéficier du Windexpress. S’ils étaient réalisés, ils permettraient d’alimenter en électricité près de 150 000 ménages. Cela correspond à la moitié de l’augmentation visée par le Windexpress. Mais selon les spécialistes de la branche, la loi ne permettra pas de réaliser de nouvelles installations ; les procédures sont encore trop longues.
L’Association suisse pour un paysage libre veut empêcher que les règles d’autorisation soient simplifiées. Les défenseurs du paysage ont lancé une initiative populaire visant à inscrire dans la Constitution que les « communes concernées et fortement touchées » doivent obligatoirement voter sur les projets éoliens. Une deuxième initiative de l’association demande d’interdire les nouvelles éoliennes prévues en forêt ou à une distance de 150 mètres maximum de la forêt ou de surfaces légèrement boisées. Une clause rétroactive est également prévue : Les installations construites après le 1er mai 2024 et qui ne répondent pas aux nouvelles exigences doivent être démolies. Les associations environnementales comme le WWF et Greenpeace rejettent ces initiatives et craignent un nouveau retard dans la transition énergétique. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger (paywall) et le Solothurner Zeitung (paywall). La NZZ am Sonntag (paywall) dresse le portrait d’Elias Vogt, président de l’association « Freie Landschaft Schweiz ».
Les éoliennes représentent un danger pour les oiseaux. Mais quel est l’impact sur les populations d’oiseaux par rapport à celui des installations d’extraction de pétrole et de gaz ? C’est la question à laquelle répond une nouvelle étude publiée dans « Environmental Science & Technology », pour laquelle un recensement des oiseaux aux États-Unis entre 2000 et 2020 a été analysé. Durant cette période, l’énergie éolienne et les installations d’extraction de pétrole et de gaz se sont massivement développées. L’étude montre que les nouveaux forages de pétrole ou de gaz réduisent considérablement la population d’oiseaux. En revanche, les chercheurs n’ont constaté aucun effet négatif pour les éoliennes, que ce soit sur la taille des populations d’oiseaux ou sur le nombre d’espèces d’oiseaux présentes. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger.
Les 100’000 signatures requises pour une initiative populaire sur l‘énergie nucléaire ont été récoltées. Intitulée « Du courant pour tous, à tout moment (stopper le black-out) », l’initiative vise à lever l’interdiction de construire de nouvelles centrales nucléaires décidée par le peuple en 2017. L’initiative a été lancée par le Club suisse de l’énergie. Derrière elle se trouve la famille Aegerter avec le milliardaire Daniel, son frère et ses parents. Un portrait de la famille et de son combat pour l’énergie nucléaire est à lire dans la NZZ am Sonntag (paywall). Le président de l’association-cadre de la branche électrique suisse rejette l’initiative. Une discussion sur le nucléaire n’apporte rien, il faut davantage d’énergie renouvelable, a-t-il déclaré à la NZZ am Sonntag (paywall). Plus d’informations dans 20 minutes.
L’énergie produite à partir
d’hydrogène est-elle propre ?
L’hydrogène permet de faire rouler des véhicules et de remplacer directement le gaz naturel et le charbon dans les processus industriels qui nécessitent une énergie importante. L’Europe veut promouvoir cette source d’énergie, la Suisse cherche à se connecter à un réseau d’hydrogène transnational. Ainsi, l’exploitant du gazoduc suisse, Flux Swiss, veut utiliser son réseau pour l’hydrogène. Une demande en ce sens a déjà été déposée auprès de l’UE, rapporte la NZZ. Swiss Flux demande que la Confédération et l’UE participent aux investissements nécessaires à la conversion.
Mais cette technologie comporte des risques, comme l’explique Anthony Patt, professeur à l’ETHZ pour la protection et l’adaptation au changement climatique, dans un article. Pour la production d’hydrogène vert, la variante la plus propre, on utilise de l’énergie renouvelable. Ce processus est toutefois très inefficace. Lorsque l’hydrogène est utilisé pour produire de la chaleur ou de l’électricité, plus de la moitié de l’énergie utilisée est perdue. Une utilisation directe de l’électricité, par exemple par des pompes à chaleur dans le secteur du bâtiment, est donc beaucoup plus efficace. Si l’hydrogène est produit à partir de gaz naturel, il présente un mauvais bilan climatique. Mais les capacités de production d’hydrogène vert dépendent directement de la quantité d’électricité renouvelable disponible. « Nous devrions tous être prudents avec l’hydrogène », exige le professeur de l’ETH, « et ne l’utiliser que là où il n’y a pas de meilleures alternatives ». Il s’agit avant tout de processus industriels nécessitant des températures très élevées, mais pas du secteur du bâtiment ou des voitures. Plus d’informations dans la NZZ (paywall). Follow the Money raconte comment les lobbyistes ont vendu l’hydrogène comme solution aux personnalités politiques européennes.
Comment la démolition de
bâtiments nuit au climat
Année après année, des milliers de maisons sont démolies en Suisse, et la tendance est à la hausse. Cela n’a pas seulement des conséquences sociales, mais aussi écologiques. Le magazine en ligne Republik et le réseau de recherche « Correctiv » réalisent une série à ce sujet. Elle montre que les nouvelles constructions de remplacement (démolition et reconstruction d’un bâtiment) réduisent certes les besoins en énergie et les émissions de gaz à effet de serre lors de l’exploitation des bâtiments. Mais en même temps, les nouvelles constructions nécessitent de grandes quantités de matériaux de construction, dont la production requiert beaucoup d’énergie et de ressources, ce que l’on appelle l’énergie grise. De plus, la démolition de bâtiments existants génère des quantités considérables de déchets : Le bâtiment et le génie civil sont responsables de plus de 80% de la production totale de déchets en Suisse. Un tiers des émissions de CO2 d’un bâtiment sont dues à la construction, deux tiers à l’exploitation. Sur la base de projets de construction concrets, il est calculé que la rénovation de bâtiments existants est rentable d’un point de vue écologique.
Extension controversée de l’autoroute et politique des transports socialement
acceptable
L’Association Transports et Environnement (ATE) et l’association Umverkehr ont déposé un référendum contre l’extension de l’autoroute. Lors de la session d’automne 2023, le Parlement avait approuvé 5,3 milliards de francs pour élargir certains tronçons de l’A1 à six ou huit voies. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger et sur srf.ch.
Indépendamment de la votation attendue cet été ou cet automne sur l’extension de l’autoroute, le Parlement a déjà décidé que d’autres étapes d’extension devraient suivre. Après le Conseil national, le Conseil des Etats a également approuvé en décembre une motion visant à élargir l’A1 à au moins six voies sur toute sa longueur entre Berne et Zurich et entre Lausanne et Genève. Le ministre des transports Albert Rösti a parlé « d’un signal pour l’avenir ». Le Parlement décidera des différents projets d’extension et le peuple également, si un référendum est à nouveau lancé contre les décisions. Plus d’informations sur srf.ch et nau.ch.
Au 30 septembre 2023 – l’Office fédéral de la statistique choisit toujours cette date de référence – 6,45 millions de véhicules routiers motorisés circulaient en Suisse. Les trois quarts d’entre eux sont des voitures de tourisme. Cela correspond à une augmentation d’environ 40’000 unités par rapport à l’année précédente. Si les véhicules supplémentaires étaient alignés pare-chocs contre pare-chocs, on obtiendrait une colonne de 175 km de long. Le nombre de nouvelles immatriculations a augmenté de 12% pour atteindre 256’000. Dans un cas sur cinq, il s’agissait d’une voiture purement électrique. Les véhicules hybrides rechargeables (hybrides plug-in) ont représenté 9% de toutes les nouvelles immatriculations.
Que faut-il pour que la politique climatique soit socialement acceptable ? C’est ce que montre Caritas Suisse dans une prise de position sur les transports. Si une taxe sur le CO2 devait être introduite sur l’essence et le diesel, une grande partie des recettes devrait être redistribuée à la population. Les personnes à bas revenus seraient ainsi récompensées pour leur comportement respectueux du climat. Pour soutenir les ménages financièrement plus faibles, Caritas suggère la création d’un fonds social climatique. Celui-ci pourrait être alimenté par les recettes des systèmes d’échange de quotas d’émission ou par un éventuel mobility pricing. Il faudrait en outre introduire des tarifs sociaux pour les transports publics afin que les personnes en situation financière précaire puissent profiter des offres respectueuses du climat. A cet égard, la CarteCulture de Caritas pourrait servir de justificatif.
Étude Helion sur le comportement environnemental
Dans quelle mesure les Suisses estiment-ils que leur comportement est respectueux du climat ? Qu’est-ce qui les empêche de vivre de manière plus écologique ? Et où faut-il mettre l’accent dans la politique climatique ? Les réponses sont fournies par une étude de l’institut de recherche Sotomo. L’entreprise solaire Helion, une filiale de l’importateur automobile AMAG, a commandé cette enquête représentative auprès de 3000 personnes. Elle montre que la population veut plus de rapidité dans les mesures contre le changement climatique et pour la mise en œuvre du tournant énergétique. Les énergies renouvelables comme l’éolien et le solaire sont développées trop lentement.
La majorité des personnes interrogées (56%) estime qu’elles se comportent de manière plus respectueuse du climat que le reste de la population suisse. Les personnes âgées de 18 à 35 ans ont une empreinte CO2 plus importante que le reste de la population. Cela s’explique par le fait que les jeunes prennent en moyenne nettement plus l’avion. Plus d’informations à ce sujet dans le Tages-Anzeiger et sur srf.ch.
Décisions de la Confédération et des cantons en matière de climat
Les consommateurs doivent être informés si des denrées alimentaires ont été importées par avion. C’est ce que demande une initiative parlementaire. Les fruits, les légumes, le poisson et la viande seraient concernés. Le transport aérien de denrées alimentaires a une forte empreinte environnementale. L’organisation environnementale WWF et la Fondation pour la protection des consommateurs saluent l’obligation de déclaration. Elle est rejetée par la CI Commerce de détail, qui représente les intérêts de Migros, Coop et Denner. Les petits commerçants sont également contre ; ils craignent une charge administrative supplémentaire. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger.
Depuis début février, le célèbre modèle climatique et météorologique ICON est à la disposition de toutes les personnes intéressées sous une licence « open source ». Cela a été rendu possible par une équipe de recherche d’Allemagne et de Suisse avec la participation de l’Empa. Ils souhaitent ainsi rendre la science plus transparente et déclencher de nouvelles impulsions dans la recherche.
Le conseil municipal de Zurich veut capturer et stocker le CO2 des boues d’épuration. Cela doit contribuer à ce que la ville atteigne la neutralité climatique d’ici 2040. Il est prévu de sécher et d’incinérer les boues d’épuration. Le CO2 qui en résulte doit être filtré, liquéfié et transporté vers le nord de l’Europe pour y être stocké à long terme dans le fond marin. Le conseil municipal et les électeurs décideront des investissements nécessaires de 35 millions de francs et des coûts annuels de 14 millions de francs. La nouvelle installation devrait être mise en service dès 2028. Plus d’informations sur srf.ch et dans la NZZ.
Politique climatique internationale
Année électorale mondiale
Plus de 40 pays, dans lesquels vit environ la moitié de la population mondiale – dont les États-Unis, l’Inde et l’Afrique du Sud – vont élire leurs dirigeants cette année. Voici l’essentiel en ce qui concerne la politique climatique :
États-Unis et Royaume-Uni : la politique climatique en jeu
Les républicains et les démocrates sont très éloignés les uns des autres en ce qui concerne la crise climatique. Alors que le président Biden a signé la principale loi américaine sur le climat, l’Inflation Reduction Act, l’ancien président Trump, qui sera très probablement le candidat républicain, a fait sortir les États-Unis de l’accord de Paris. Les républicains ont préparé une stratégie globale intitulée Projet 2025 si Trump récupère la Maison Blanche. Le plan prévoit d’annuler les lois sur le climat et de stimuler la production de combustibles fossiles. Plus d’informations dans le Guardian.
Le climat pourrait également jouer un rôle dans les élections en Grande-Bretagne. Ils sont devenus un point de discorde central entre le parti travailliste et le parti conservateur au pouvoir, qui est à la traîne dans les sondages. Le Premier ministre Rishi Sunak a supprimé certaines des mesures les plus ambitieuses de la politique climatique du pays. Plus d’informations sur le Guardian et sur Carbon Brief.
Inde, Indonésie et Afrique du Sud : l’avenir du charbon
En Afrique du Sud, les élections pourraient influencer la rapidité avec laquelle le pays se tourne vers les énergies renouvelables. Un affaiblissement de la position de force de l’African National Congress (ANC) au pouvoir pourrait accélérer le développement des énergies renouvelables. L’actuel ministre de l’énergie – l’un des leaders les plus puissants du parti – défend farouchement l’utilisation du charbon dans le pays. De nombreux électeurs sont en colère contre l’ANC parce qu’il n’est pas en mesure de gérer une crise énergétique.
Les élections en Indonésie et en Inde semblent laisser moins de place à l’alternance. L’actuel Premier ministre Narendra Modi sera probablement réélu et pourra poursuivre sa politique favorable au charbon.
En Indonésie, aucun des candidats à la présidence n’a présenté de plan de transition vers les énergies renouvelables. Le pays est de loin le plus grand exportateur de charbon au monde.
Mexique, Venezuela et Russie : du pétrole sur le bulletin de vote
La campagne présidentielle de Claudia Sheinbaum au Mexique est un exercice d’équilibre entre la protection du climat et la dépendance de son pays au pétrole. L’actuelle maire de Mexico est certes une climatologue, mais elle est aussi une protégée de López Obrador, dont le gouvernement tente de renforcer le rôle du secteur pétrolier. Sheinbaum, considérée comme la favorite des élections de juin, a promis de s’engager pour la protection du climat. On ne sait toutefois pas dans quelle mesure l’héritage pétrolier d’Obrador influencera sa politique.
L’industrie pétrolière figure également sur les bulletins de vote au Venezuela et en Russie, où elle donne de la force aux dirigeants autoritaires. La réélection de Vladimir Poutine – et son désintérêt pour la protection du climat – semble inéluctable.
Le Venezuela a certes libéré cinq prisonniers politiques en octobre, mais le principal candidat de l’opposition n’est toujours pas autorisé à se présenter. Cela peut paraître contradictoire, mais investir dans le secteur pétrolier vénézuélien pourrait contribuer à l’assainir. L’industrie pétrolière publique est dans un état désastreux et n’est pas en mesure de respecter les mesures de sécurité minimales, avec des conséquences désastreuses pour l’environnement. Plus d’informations dans le New York Times (paywall).
Biden stoppe temporairement les autorisations d’exportation de GNL
L’administration Biden a temporairement suspendu les autorisations d’exportation de gaz naturel liquéfié (GNL). Elle prévoit de prendre en compte l’impact sur le climat lors du nouvel examen. Le représentant de la Maison Blanche pour le climat, Ali Zaidi, a indiqué que la décision de la COP28 sur les combustibles fossiles et les voix des jeunes étaient les principales raisons de cette décision.
Cette décision concerne le projet controversé Calcasieu Pass 2, qui permettrait aux Etats-Unis, déjà premier exportateur de gaz naturel au monde, d’expédier encore plus de gaz naturel liquéfié à l’étranger. Les militants pour le climat se battent depuis des mois contre ce projet sur la côte de Louisiane.
Le gouvernement Biden est également critiqué par les activistes climatiques qui s’opposent à l’approbation du projet de forage Willow en Alaska et du pipeline Mountain Valley en Virginie occidentale. Plus d’informations dans le New York Times (paywall).
La consommation américaine de charbon tombe à un niveau record
Les émissions de gaz à effet de serre ont diminué de 1,9 % aux États-Unis en 2023. La raison principale est la baisse des émissions de charbon, qui ont diminué d’environ 8 %. Les compagnies d’électricité ont fermé plus d’une douzaine de centrales à charbon et les ont remplacées par du gaz naturel ainsi que par de l’énergie éolienne et solaire. La baisse des émissions est bien en deçà de ce qui serait nécessaire. Pour le reste de la décennie, les émissions annuelles doivent diminuer plus de trois fois plus vite qu’en 2023 afin d’atteindre l’objectif climatique du pays pour 2030. Plus dans le New York Times (paywall).
Les énergies renouvelables se développent, mais pas assez vite
Selon le dernier rapport de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), l’expansion des énergies renouvelables a atteint un nouveau record en 2023, avec près de 510 GW. Par rapport à 2022, ce volume a doublé. La croissance a été principalement tirée par l’expansion en Chine, mais aussi en Europe, aux États-Unis et au Brésil. Le photovoltaïque a représenté les trois quarts de l’augmentation totale.
Avec les mesures existantes (un scénario de l’AIE qui ne suppose aucune mesure supplémentaire, mais qui met en œuvre toutes les mesures convenues jusqu’à présent), près de 3700 GW de nouvelles capacités seront ajoutés entre 2023 et 2028 (dont 60% seraient créés en Chine). C’est à peu près autant que toutes les capacités renouvelables existantes en 2022. Si ce rythme est maintenu jusqu’en 2030, la capacité mondiale en énergies renouvelables sera multipliée par 2,5 d’ici 2030. C’est beaucoup, mais pas assez pour respecter l’objectif de triplement convenu à Dubaï.
Parmi les nombreux défis, l’AIE cite le manque d’investissements dans les infrastructures de réseau, ce qui entraîne des goulets d’étranglement dans le réseau. De plus, il y a un manque de possibilités de financement abordables dans les pays émergents et en développement en dehors de la Chine.
Le rapport Global Energy Monitor montre que l’énergie solaire et éolienne dans les pays d’Asie du Sud-Est a connu une croissance de 20% en 2023. La région atteindra assez certainement son objectif de produire 35% de son électricité à partir d’énergies renouvelables d’ici 2025, voire le dépassera. Le Vietnam fait figure de pionnier et dispose de plus de deux fois la capacité solaire et éolienne de tous les autres pays d’Asie du Sud-Est réunis. Malgré cette augmentation rapide, la demande en électricité croît encore beaucoup plus vite. Par conséquent, les capacités en combustibles fossiles de la région sont toujours en croissance.
Empreinte climatique militaire
De nombreux médias ont fait état d’un nouveau rapport selon lequel les 60 premiers jours de la guerre israélienne dans la bande de Gaza, en réponse à l’attaque du Hamas du 7 octobre, ont généré des émissions de CO2 équivalentes à la combustion d’au moins 150 000 tonnes de charbon. Cela met en évidence une lacune importante dans les accords sur le climat.
Les émissions de gaz à effet de serre causées par les guerres et le secteur militaire sont toujours largement ignorées. Dans les derniers rapports du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) – qui totalisent plus de 8 000 pages – le secteur militaire est mentionné exactement trois fois et aucune information n’est disponible sur l’ampleur de ces émissions militaires.
Selon une estimation datant de 2022, l’armée est l’un des plus gros consommateurs de combustibles fossiles au monde et est responsable, selon les estimations, de 5,5 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Il s’agit probablement d’une sous-estimation, car les grandes armées telles que la Chine, l’Arabie saoudite, la Russie et Israël ne fournissent pas de rapports sur leurs émissions, tandis que d’autres (par exemple, les pays de l’UE) n’en fournissent qu’une partie.
Les émissions militaires à l’étranger sont exclues du protocole de Kyoto de 1997 et également de l’accord de Paris de 2015 – au motif que les données sur la consommation d’énergie des armées pourraient menacer la sécurité nationale.
Des scientifiques et des groupes environnementaux veulent augmenter la pression sur l’ONU et forcer les armées à publier toutes leurs émissions et à mettre fin à l’exemption de longue date. Plus d’informations sur Reuters, Scientists for Social Responsibility, ECDPM et Die Zeit.
Déforestation rapide dans la région du Cerrado au Brésil
La déforestation dans le Cerrado brésilien a augmenté de 43% l’année dernière. Cette immense savane tropicale joue un rôle important dans le stockage du CO2 et dans le régime des eaux en Amérique du Sud. Selon les données du gouvernement brésilien, plus de 7 800 km² ont été déboisés l’année dernière. Cela correspond à la superficie des cantons de Berne et de Zurich réunis. C’est un revers pour le président Lula qui, depuis son entrée en fonction en janvier dernier, s’est engagé à réduire la destruction de la forêt tropicale.
L’optimisme en Amazonie s’estompe, car Lula s‘éloigne de ses priorités climatiques et fait avancer les plans d’une autoroute asphaltée à travers le cœur de l’Amazonie occidentale. Les routes accélèrent massivement la déforestation. Une étude publiée en novembre estime que la construction de la route asphaltée augmenterait la déforestation de 60% d’ici 2100. Plus dans le Financial Times (paywall).
Politique climatique européenne
Nouvel objectif climatique intermédiaire
La Commission européenne veut réduire d’ici 2040 un total de 90% des gaz à effet de serre par rapport à 1990. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) de l’UE exige une réduction des émissions au moins équivalente, idéalement de 95%. L’organisation faîtière de nombreuses associations environnementales au niveau de l’UE, CAN Europe, exige même 100%. Entre-temps, une opposition se forme sur la manière de mettre en œuvre l’objectif – par exemple sur le rôle du captage, de l’utilisation et du stockage du CO2 (voir Euractiv). Le think tank Climate Analytics qualifie l’objectif 2040 d’insuffisant, car l’objectif de réduction pour 2030 n’est pas augmenté. Cela serait nécessaire pour respecter l’objectif de 1,5 degré. En outre, les experts critiquent le fait que l’abandon nécessaire des énergies fossiles n’est pas pris en compte de manière adéquate et que la réduction effective des émissions sans le secteur « utilisation, changement et foresterie des terres » n’est que de 84% d’ici 2040. Pour en savoir plus, consultez le site de la Commission européenne.
Au plus bas : la Norvège autorise l’exploitation minière controversée en eaux profondes
Le Parlement norvégien a approuvé les plans du gouvernement visant à faire de la Norvège le premier pays au monde à autoriser l’exploitation minière très controversée en eaux profondes sur une surface plus grande que la Grande-Bretagne. Ainsi, des matières premières, principalement des métaux rares comme le cobalt et le manganèse, seront à l’avenir exploitées sur les fonds marins de la mer de Norvège, sous prétexte de protéger le climat (les matières premières sont notamment utilisées pour la décarbonisation).
Source : BBC
L’UE et la Grande-Bretagne ont actuellement interdit cette pratique, rapporte la BBC. 120 hommes et femmes politiques européens ont adressé une lettre ouverte aux décideurs norvégiens afin d’attirer leur attention sur les risques pour l’environnement, la nature et le climat. La Norvège change ainsi de feuille de route. En 2018, le gouvernement du pays appelait encore, dans le cadre du High Level Panel for a Sustainable Ocean Economy, à une protection minutieuse des mers et déclarait vouloir gérer de manière durable toutes les surfaces maritimes de sa zone d’influence d’ici 2025. Plus d’informations sur Nature.
Le nouveau gouvernement polonais s’attaque à la protection du climat
Ces dernières années, la Pologne, dirigée par le parti national-conservateur PiS, s’est régulièrement distinguée par une politique énergétique et climatique rétrograde. Désormais, le nouveau gouvernement, une large alliance autour de Donald Tusk, soutient le nouvel objectif climatique pour 2040 conformément aux recommandations du Conseil européen du climat d’au moins 90% de réduction des gaz à effet de serre par rapport à 1990. Plus d’informations sur Politico. Le succès du nouveau gouvernement polonais en matière de protection du climat et de transition énergétique sera visible dans les mois à venir. Clean Energy Wire fournit à ce sujet une analyse détaillée des objectifs et des défis.
Moins de greenwashing dans l’UE à partir de 2026
Le Parlement européen a approuvé le règlement interdisant à partir de 2026 les « allégations vertes », c’est-à-dire les désignations telles que « neutre pour le climat » ou « respectueux de l’environnement » basées sur la compensation. Une méthode souvent utilisée pour prétendument compenser les émissions de CO2 consiste à planter des arbres, sans que des critères spécifiques tels qu’un monitoring soient mis en place. L’interdiction est principalement motivée par le fait que la publicité avec ces désignations est trompeuse et induit les consommateurs en erreur. À l’avenir, les produits ne pourront porter ces mentions que s’ils ont été certifiés par un système fiable tel que l’écolabel européen. Plus d’informations sur le site du Guardian et du BEE.)
Allemagne
Le budget est prêt
Après une lutte acharnée, le Bundestag s’est mis d’accord début février sur le budget fédéral 2024. Les lacunes de financement pour les mesures de protection climatique ont été le point crucial. Suite à un jugement de la Cour constitutionnelle fédérale, les fonds initialement prévus pour la lutte contre la pandémie de Covid-19 ne pouvaient pas être utilisés pour la protection du climat, de sorte qu’il a fallu chercher de nouveaux moyens de financement. Le gouvernement fédéral a notamment pu se mettre d’accord pour augmenter la taxe sur les billets d’avion pour les vols de transit et pour imposer des conditions plus strictes au « Bürgergeld ». Le budget fédéral, qui s’élève désormais à 477 milliards d’euros, comprend des investissements de plus de 70 milliards d’euros et un nouvel endettement de 39 milliards d’euros, rapporte le Tagesschau.
Le frein à l’endettement souvent évoqué est respecté. Le budget doit encore être approuvé par les Länder au Bundesrat. Les partis de l’Union, la CDU et la CSU, ont toutefois retardé son adoption. Plus d’informations auprès du gouvernement fédéral. L’Alliance climatique allemande, organisation faîtière de nombreuses associations environnementales et sociales, critique le « budget d’austérité » et demande une nouvelle réglementation du frein à l’endettement afin de transformer l’économie.
Les protestations des agriculteurs paralysent les centres-villes
Une partie des plans d’économie du gouvernement fédéral prévoyait de supprimer les avantages fiscaux en vigueur depuis des décennies pour le « diesel agricole » – des subventions pour l’utilisation du diesel dans l’agriculture. Cela a déclenché début janvier des protestations massives des agriculteurs dans toute la République fédérale (voir RBB24). Ils étaient des milliers à protester avec leurs tracteurs dans de nombreux centres-villes et sur les autoroutes pour le maintien de l’allègement fiscal lié aux énergies fossiles. Cela a entraîné des problèmes de circulation à grande échelle. Malgré les protestations, le gouvernement fédéral va supprimer progressivement cet avantage fiscal d’ici 2026 (voir Handelsblatt). De nombreux groupes de droite et d’extrême droite s’étaient également mêlés aux agriculteurs (une analyse à ce sujet chez Correctiv). Entre-temps, le parquet enquête sur des soupçons de coercition après que des manifestants aient empêché le ministre de l’Économie Habeck de quitter un ferry au cours d’un voyage privé.
Inondations historiques dans le nord de l’Allemagne
Dans le nord de l’Allemagne, les inondations le long des grands fleuves comme la Weser et l’Elbe ne sont pas rares. Mais des inondations telles que celles qui se sont produites autour de la nouvelle année n’ont jamais été d’une telle ampleur, a souligné le ministre-président de Basse-Saxe, Stephan Weil (SPD). Il y voit les conséquences de la crise climatique croissante (voir Zeit Online). Cette région située au nord-ouest de l’Allemagne a été particulièrement touchée. Les inondations ont été provoquées par de fortes précipitations persistantes. Depuis le début des relevés météorologiques, aucun mois de décembre n’a été aussi pluvieux dans le nord de l’Allemagne. On a mesuré près de 45% de précipitations en plus que d’habitude, écrit le ministère de l’environnement de Basse-Saxe. La chaîne de télévision NDR a préparé des photos de l’ampleur de la catastrophe ainsi que des données et des faits.
Une taxe sur le CO2 plus élevée et un nouveau refus de l’argent pour le climat
Dans le cadre du compromis sur le budget fédéral, le prix du CO2augmentera de cinq euros de plus que prévu initialement. Depuis le 1er janvier 2024, une taxe de 45 euros par tonne est prélevée sur la consommation de matières premières fossiles (mazout, gaz naturel, essence et diesel), contre 30 euros auparavant. Cela génère des recettes supplémentaires et doit inciter davantage à passer à des technologies respectueuses du climat. En contrepartie, la discussion a porté sur l’utilisation de l’argent climatique comme remboursement du prix du CO2 dans les secteurs du bâtiment et des transports. Il incombe au ministre des Finances Lindner de mettre au point un mécanisme permettant de verser l’argent climatique. En tout état de cause, aucun remboursement des recettes n’est actuellement prévu dans le budget. Lindner a de nouveau souligné qu’il était peu probable que l’argent du climat puisse être versé au cours de la législature actuelle. Plus d’informations sur RP online. Greenpeace a entre-temps fait sensation avec une action et demande, avec d’autres associations environnementales et sociales, que les citoyens soient soulagés par l’argent du climat.
La stratégie du gouvernement fédéral en matière de centrales électriques fait sensation
La coalition « feu tricolore » a pu se mettre d’accord début février sur la stratégie tant attendue en matière de centrales électriques. Les plans du ministre de l’Économie Habeck ont été fortement limités. Au lieu des 24 gigawatts initialement prévus, il est désormais prévu de construire 10 gigawatts de nouvelles centrales au gaz naturel, qui devront être converties à l’hydrogène vert entre 2035 et 2040. Celles-ci seront principalement réservées aux périodes de pointe, c’est-à-dire lorsque la demande d’électricité est particulièrement élevée et que les énergies renouvelables ne suffisent pas à la couvrir. L’objectif déclaré du gouvernement fédéral est de produire idéalement 100% de l’électricité à partir de sources renouvelables d’ici 2035. Les sociétés d’exploitation de ces centrales à gaz reçoivent de l’argent de l’Etat si elles retiennent des capacités de production – de fait, ces centrales seront à l’arrêt la plupart du temps. Sur les 20 prochaines années, les coûts sont estimés à 16 milliards d’euros. L’UE doit encore approuver ces plans. Si les groupes énergétiques saluent cette stratégie, elle suscite l’inquiétude des associations environnementales. Une partie de la stratégie consiste à autoriser à l’avenir le « Carbon Capture and Storage » (CCS), c’est-à-dire le captage et le stockage du CO2, par exemple dans les fonds marins, pour le gaz naturel fossile. Les associations environnementales s’y opposent. Elles craignent les lock-in fossiles (la dépendance aux matières premières fossiles) et les dommages causés à la nature. Et elles estiment que la réalisation des objectifs climatiques est menacée. Une évaluation de la stratégie est disponible sur le site de Klimareporter.
La crise climatique visible
Le pic de température en 2023 bat tous les records
2023 a été de loin l’année la plus chaude depuis le début des relevés il y a environ 150 ans. Les températures sur la Terre ont été en moyenne de 1,48 degré plus élevées qu’à l’époque préindustrielle, montrent les analyses de Copernicus, le service climatique de l’UE. Le précédent record de 2016 a été dépassé de 0,14 °C à 0,17 °C. Le mois de janvier 2024 a également été plus chaud que jamais (axios.com).
CarbonBrief a rassemblé les données les plus récentes sur les océans, l’atmosphère et la température de surface de la Terre. Voici les principaux résultats :
– En 2023, les températures se situaient entre 1,34 °C et 1,54 °C au-dessus des valeurs préindustrielles.
– Entre juin et décembre, des records de température ont été battus chaque mois dans le monde entier.
– Le mois de septembre a battu de 0,5 °C le précédent record pour ce mois.
– Il s’agit de la première année où la température moyenne mondiale des terres a dépassé de plus de 2 °C le niveau préindustriel.
– Dans 77 pays – dont la Chine, le Brésil, le Bangladesh, l’Allemagne, le Japon, le Mexique, la Corée du Sud et l’Ukraine – cette année a été la plus chaude depuis le début des relevés. Ces pays comptent 2,3 milliards d’habitants, soit environ 30% de la population mondiale.
– En 2023, les températures moyennes mondiales à la surface des océans étaient pour la première fois supérieures de plus de 1 °C aux valeurs préindustrielles.
– Le niveau de la mer a atteint un niveau record. Depuis 1900, il a augmenté de 20 centimètres ; au cours des trois dernières décennies, la hausse s’est nettement accélérée.
L’ampleur du réchauffement a surpris les climatologues. « Ce que nous avons vu en 2023 dépasse toutes les dimensions », déclare Gavin Schmidt, du Goddard Institute for Space Studies de la Nasa, à titre représentatif. « Ce qui s’est passé l’année dernière est sans précédent et nous inquiète ». Les chercheurs sont en train de décrypter les causes de ce saut de température. Il s’agit notamment de l’augmentation des gaz à effet de serre (ils ont atteint un pic en 2023), du phénomène météorologique El Niño, de l’éruption du volcan Hunga Tonga et également de la faible émission de soufre par l’industrie navale et de la réduction des émissions d’aérosols en général. Plus d’informations dans le Guardian, le NY Times (paywall) et le Tages-Anzeiger (paywall).
En 2023, le réchauffement s’est rapproché de la limite haute fixée par l’accord de Paris sur le climat, à savoir 1,5 °C. Certes, l’accord ne définit pas explicitement le dépassement de l’objectif climatique, mais le Conseil climatique de l’ONU et de nombreux experts considèrent cet objectif comme une moyenne sur 20 ans. Si la valeur est dépassée au cours d’une année, cela ne signifie pas que l’objectif n’a pas été atteint. Néanmoins, ce record de température confirme que la politique climatique actuelle a échoué et qu’une nouvelle approche est nécessaire. Plus d’informations dans Foreign Policy (paywall).
La fonte des glaciers aux pôles s’accélère énormément
Dans le dernier journal climatique, nous avons déjà parlé en détail de la fonte des glaciers aux pôles. Les glaciers du Groenland rétrécissent aujourd’hui deux fois plus vite que dans les années 1980, comme le montre une nouvelle étude publiée dans Nature Climate Change. Depuis 2000, les températures dans l’Arctique ont également augmenté deux fois plus vite que la température moyenne mondiale.
Une nouvelle étude montre que la calotte glaciaire du Groenland perd en moyenne 30 millions de tonnes de glace par heure. C’est 20 % de plus que ce que l’on pensait jusqu’à présent. Il s’agit de la première étude qui a également déterminé le recul des glaciers sous la surface de l’océan. Les techniques utilisées jusqu’à présent n’ont pu déterminer que les pertes de glace qui se retrouvent dans l’océan et font monter le niveau de la mer. Elles ne pouvaient toutefois pas expliquer le recul des glaciers, qui se trouvent déjà en grande partie sous le niveau de la mer dans les fjords étroits entourant l’île.
Les auteurs craignent que l’eau douce supplémentaire qui s’écoule dans l’Atlantique Nord ne menace la stabilité de la circulation atlantique. Une partie de ce système de circulation est le Gulf Stream, si important pour le climat européen. Il transporte de l’eau chaude vers les côtes européennes. L’eau douce dilue l’eau de surface de la mer, diminue la salinité et donc la densité de l’eau. En raison de cette densité plus faible, l’eau descend plus lentement en profondeur, où elle redescend vers le sud. Or, c’est précisément ce mouvement d’abaissement qui est un moteur décisif de la circulation atlantique, qui perd déjà en force. Selon une étude publiée il y a quelques années, elle est actuellement plus faible qu’au cours des 1600 dernières années. Cela pourrait également réduire la capacité des océans à absorber le CO2, car la circulation transporte les eaux de surface riches en CO2 vers les eaux profondes. Plus d’informations sur le Groenland dans le Guardian et Klimareporter. Le Guardian propose un bon article de synthèse sur la situation dans l’Antarctique.
Nouvelles de la science du climat
Les négationnistes climatiques utilisent de nouveaux récits
Le négationnisme climatique sur YouTube a radicalement changé ces dernières années, comme le montre une nouvelle étude du Center Countering Digital Hate. Les chercheurs ont recueilli les transcriptions de plus de 12 000 vidéos YouTube liées au climat, publiées entre 2018 et 2023.
Dans le passé, le déni s’est concentré sur deux fausses affirmations : « Le réchauffement climatique n’a pas lieu » et « L’homme n’est pas responsable du réchauffement climatique et du changement climatique ».
Les récits négationnistes actuels se concentrent sur trois points : 1) « Les solutions climatiques ne fonctionneront pas », 2) « La science du climat et le mouvement climatique ne sont pas fiables », 3) « »Les effets du réchauffement climatique sont bénéfiques ou inoffensifs ». En 2018, ces schémas narratifs ne représentaient encore « que » 35 % de toutes les contributions des négationnistes sur YouTube. Aujourd’hui, ils en représentent la grande majorité (70 %).
Les négationnistes du climat ont accès à un vaste public mondial via des plateformes numériques. Ils peuvent ainsi affaiblir de plus en plus le soutien public aux mesures de protection du climat, en particulier chez les jeunes spectateurs. Une enquête du Pew Research Center a révélé que YouTube est la plateforme de médias sociaux la plus utilisée aux États-Unis par les jeunes de 13 à 17 ans.
Environ un tiers des jeunes américains pensent que le réchauffement climatique est « utile ou inoffensif », que « la politique climatique fait plus de mal que de bien ». Ils pensent également que « la science du climat et le mouvement climatique ne sont pas fiables » et que le changement climatique est « une escroquerie destinée à contrôler et à opprimer les gens ». 45% des garçons adolescents ont déclaré que « les politiciens exagèrent l’urgence de la politique climatique ». Et 34% de tous les adolescents et 23% des adultes américains ont déclaré : « La Terre entre dans une nouvelle ère glaciaire ». Pour en savoir plus, consultez le communiqué de presse du CCDH dans cette étude publiée dans Nature.
Les grandes cultures avec plus de variétés réduisent les émissions, augmentent les
revenus et rendements
En combinant la culture des céréales avec d’autres produits de récolte, les rendements pourraient être augmentés de près de 40%. En même temps, près de 10% de carbone en plus serait séquestré dans le sol et les émissions nettes de gaz à effet de serre seraient réduites de plus de 90%. Ces résultats étonnants proviennent d’une grande expérience de terrain de six ans dans la Grande Plaine du Nord de la Chine, une région qui couvre 70% des terres arables du pays et produit 23% des céréales. Il s’agit de l’une des régions les plus intensivement cultivées au monde.
Les chercheurs ont notamment testé l’ajout de patates douces et de légumineuses comme les arachides et le soja. La diversification des variétés cultivées dans la région permettrait d’augmenter la production de céréales de 32%, et grâce aux légumineuses fixant l’azote, le besoin en engrais synthétiques serait réduit de 3,6 millions de tonnes.
Les agriculteurs des plaines du nord de la Chine pourraient compenser près de 6% des émissions annuelles de gaz à effet de serre du pays rien qu’en cultivant davantage de plantes différentes. En outre, les agriculteurs gagneraient en moyenne 20% de plus. Pour en savoir plus, consultez Anthropocene Magazine et Nature Communications.
Le pâturage est pire pour le climat
Les bovins élevés en pâturage représentent 33% de la production mondiale de viande bovine. Une nouvelle étude montre que les animaux nourris à l’herbe ont une empreinte climatique nettement plus élevée que ceux qui sont nourris avec des aliments concentrés. Les auteurs n’ont pas seulement pris en compte les émissions liées à la production de fourrage, les émissions de méthane des vaches et les émissions liées à la production directe. Ils ont également pris en compte le « coût d’opportunité du CO2 » : le CO2 qui a été perdu lors de la conversion d’un habitat naturel (par ex. la forêt) en pâturages. Selon l’étude, ces coûts représentent plus de la moitié de l’empreinte. Elle est en moyenne 40% plus importante que celle de la viande d’animaux nourris avec des aliments concentrés.
Le pâturage sur des sols compactés, érodés et surfertilisés est particulièrement néfaste. Les sols suisses ne sont pas non plus en bon état. De nombreuses études démontrent que tous les types de viande de bœuf et de produits laitiers sont plus nocifs pour l’environnement que les alternatives végétaliennes. Si l’on renonçait à la viande et que l’on renaturait les pâturages, il serait possible de stocker davantage de CO2.
Malgré la clarté des études, les groupes de viande et de produits laitiers n’hésitent pas à commercialiser leurs produits comme étant respectueux du climat. Des groupes comme McDonald’s, Tyson Foods et Nestlé se sont fixés des objectifs climatiques ambitieux, sans pour autant vouloir réduire de manière significative leurs ventes de viande et de produits laitiers. Parallèlement, ces grandes entreprises mènent un lobbying intensif et souvent très efficace pour influencer la législation agricole et climatique. Pour en savoir plus, consultez le Washington Post et Anthropocene Magazine.
Des idées folles pour la protection du climat
De plus en plus de personnes prennent conscience des grands dangers de la crise climatique. De plus en plus de scientifiques et de start-up bricolent donc des solutions dignes de la science-fiction.
Les scientifiques sont très préoccupés par l’état des pôles, comme le montre une nouvelle approche d’un groupe de glaciologues. Ils proposent de construire de gigantesques « rideaux » sous-marins afin d’empêcher l’eau de mer chaude d’accélérer la fonte. Certains scientifiques doutent de la faisabilité de ce projet et affirment que la géo-ingénierie dans l’Antarctique pourrait nuire à l’écosystème marin. Les partisans affirment toutefois que « toutes les idées de géo-ingénierie sont folles, jusqu’à ce que l’on pense à ce qui pourrait se passer si nous ne faisions rien ». Plus d’informations sur Nature (paywall).
Un groupe d’astronomes et de physiciens mène des recherches sur un parasol géant dans l’espace. Celui-ci doit être placé entre la Terre et le Soleil de telle sorte qu’environ 2% du rayonnement solaire n’atteigne jamais la Terre. Les scientifiques veulent maintenant construire un prototype afin de tester la faisabilité du concept. Le parasol, qui devrait être à peu près aussi grand que l’Argentine, ne pourrait pas être lancé en tant qu’unité unique en raison de son poids immense, mais il faudrait construire un réseau de petits parasols. Plus d’informations dans le New York Times (paywall).
Un autre groupe veut trouver une solution contre les proliférations d’algues de plus en plus fréquentes. Le grand tapis d’algues brunes qui se forme régulièrement dans le Golfe du Mexique offre refuge et nourriture aux animaux marins. Mais les proliférations d’algues ont perdu leur équilibre. En raison du réchauffement climatique, les pluies s’intensifient et entraînent des inondations plus fréquentes. L’humus et l’eau riche en nutriments issus de l’agriculture intensive sont ainsi emportés vers la mer. Durant l’été 2018, le tapis d’algues s’étendait de la côte ouest de l’Afrique jusqu’au Golfe du Mexique sur 8000 kilomètres et comprenait environ 20 millions de tonnes d’algues sargasses. Les tapis d’algues se décomposent dans la mer ou s’échouent sur les côtes où elles pourrissent. Comme les algues contiennent des métaux lourds, notamment de l’arsenic, elles ne peuvent pas être utilisées comme engrais ou aliments. Mais les tapis d’algues stockent beaucoup de CO2, , selon les estimations, 3 millions de tonnes. Des chercheurs et une start-up veulent désormais collecter les algues à l’aide de robots et les stocker au fond de la mer à 2000-4000 m de profondeur. Plus d’informations dans le Guardian et le Tages Anzeiger (paywall).
On craint souvent que les projets de géo-ingénierie détournent l’attention des mesures de protection du climat plus importantes et plus réalistes. Une nouvelle étude montre qu’il est peu probable que le fait de parler de géo-ingénierie dans le discours public conduise au rejet de mesures plus larges de protection du climat. Mais la question reste de savoir quelle est l’influence de l’opinion publique dans les décisions relatives à la géo-ingénierie. Souvent, les intérêts particuliers sont plus influents, craint l’un des auteurs de l’étude. Plus d’informations dans le magazine Anthropocene.
Vérifier l’intensité en CO2 sur une nouvelle carte électrique
Un site web très cool montre l’intensité en CO2 de la production d’électricité dans les différents pays européens.
Actif contre le désespoir
Options d’action face à la crise climatique
Dans le magazine en ligne Republik, l’écrivaine, historienne et activiste américaine Rebecca Solnit dresse une liste de dix suggestions sur la manière dont nous pouvons aborder la crise climatique avec espoir : Parce que les révolutions prennent du temps, mais qu’elles se produisent parfois beaucoup plus rapidement que prévu. Et aussi parce que l’échec peut être étonnamment fructueux. Son dernier livre, « Not Too Late« , s’adresse aux personnes qui cherchent des réponses et des possibilités d’action face à la crise climatique.
Initiative solaire : PV obligatoire pour les nouvelles constructions
Produire des installations PV là où l’on a le plus besoin d’énergie. C’est ce que veut l’initiative solaire du parti des Verts. Elle demande l’obligation d’installer des panneaux solaires sur les nouveaux bâtiments. Sur les bâtiments existants, de l’électricité devra être produite dans les 15 ans suivant l’acceptation du projet. L’initiative populaire sera bientôt lancée. Les personnes qui souhaitent la soutenir dès maintenant peuvent s’inscrire en tant que sympathisant(e) en cliquant sur ce lien.
Merci et salutations chaleureuses de la part d’Anja, Thomas et Sebastian !
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Éditorial
Ce numéro est particulièrement volumineux. Cela s’explique par le fait qu’en novembre s’est tenue la 28e conférence internationale sur le climat (COP28), la plus importante négociation internationale sur la crise climatique. La COP est toujours précédée de nombreuses nouvelles publications, appels et initiatives qui sont lancés. Tous dans l’espoir d’obtenir un meilleur résultat lors des négociations. Nous avons résumé pour vous les résultats des négociations et les études et rapports les plus importants. Bien sûr, comme toujours, vous trouverez également un résumé de la politique climatique suisse et de la politique climatique à l’étranger. Pour que vous ne soyez pas complètement abattus après toutes ces (globalement) mauvaises nouvelles, nous voulons désormais terminer notre journal climatique par une rubrique contre le désespoir. Vous y trouverez des conseils contre le blues climatique et des informations sur la manière dont vous pouvez vous engager.
Suisse
Que faut-il attendre du nouveau Parlement en ce qui concerne la loi sur le CO2 ?
Comme prévu, les élections fédérales ont entraîné d’importants changements au Parlement. Les Verts et les Verts libéraux ont perdu au total douze sièges au Conseil national et au Conseil des Etats. Il y a quatre ans, ces deux partis avaient gagné 26 sièges. Cette année, c’est l’UDC qui a réalisé les plus gros gains avec 9 sièges supplémentaires, tandis que le PS a progressé de deux sièges.
Les analyses des élections montrent que : Le fossé ville-campagne s’est creusé (Tages-Anzeiger), l’UDC a fortement progressé, notamment en Suisse romande, tandis que les Verts y ont beaucoup perdu (Tages-Anzeiger et NZZ, paywall), et les agriculteurs ont encore accru leur influence (Tages-Anzeiger).
Le glissement vers la droite se manifeste surtout au Conseil national (graphiques de l’Office fédéral de la statistique, OFS), les déplacements sont moins importants au Conseil des Etats (OFS). Pour que les Verts, les Verts libéraux et le PS puissent s’imposer au Conseil national, ils ont besoin de presque toutes les voix du parti du centre, calcule le Tages-Anzeiger (paywall).
L’impact des élections sur la politique climatique suisse se fera sentir en premier lieu avec la loi sur le CO2. Sa révision a été rejetée par le peuple en 2021. Au cours de la dernière semaine de la session d’hiver, le Conseil national débattra de la loi qui fixe les objectifs climatiques de 2025 à 2030. La question centrale est de savoir si le Conseil national corrige les décisions prises en automne par le Conseil des États. Celui-ci s’était contenté d’incitations pour réduire de moitié les émissions de gaz à effet de serre par rapport à 1990. Un tiers de la réduction de CO2 doit être obtenu à l’étranger grâce à des certificats de protection climatique controversés et souvent inefficaces.
La Commission de l’environnement, de l’aménagement du territoire et de l’énergie (CEATE) du Conseil national a légèrement amélioré la variante du Conseil des Etats sur quelques points. Ainsi, elle veut ancrer une limite supérieure de 25% pour les réductions d’émissions à l’étranger. Une nouvelle taxe doit être prélevée sur les vols en jet privé et en jet d’affaires. Et l’installation de stations de recharge, par exemple dans les immeubles collectifs et sur les parkings publics, doit être encouragée financièrement. Comme le Conseil des États, la commission du Conseil national veut renoncer à une augmentation de la taxe sur le CO2. La redistribution actuelle de deux tiers à la population et aux entreprises ne devrait pas être modifiée. Plus d’informations sur watson.ch et swisscleantech.
Le référendum contre l’arrêté manteau aura-t-il lieu ?
La probabilité que les électeurs votent sur l’arrêté manteau a augmenté. Après la nouvelle Alliance Nature & Paysage Suisse, c’est au tour de la Fondation Franz Weber de soutenir le référendum contre la « Loi fédérale sur la sécurité de l’approvisionnement en électricité grâce aux énergies renouvelables ». Cette loi, adoptée par le Conseil national et le Conseil des Etats lors de la session d’automne, fixe des objectifs contraignants pour le développement des énergies renouvelables et assouplit les dispositions relatives à la protection de la nature. Ainsi, les installations énergétiques dans les régions qui se prêtent à l’exploitation de l’énergie solaire et éolienne doivent avoir la priorité sur la protection de l’environnement et d’autres intérêts nationaux. La Fondation Franz Weber s’oppose à la destruction de la nature et du paysage et souhaite que le Parlement établisse, dans un deuxième temps, un équilibre entre la promotion des énergies renouvelables et la protection de la nature et du paysage. L’Association suisse pour un paysage libre combat également l’arrêté manteau. Les organisations ont jusqu’au 18 janvier 2024 pour récolter les 50’000 signatures nécessaires. Les grandes organisations de protection de la nature ainsi que la Fondation suisse pour l’énergie ne soutiennent pas le référendum, car il retarderait le tournant énergétique. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger et la NZZ (paywall).
Vers la neutralité climatique grâce au stockage de CO2 dans la mer ?
Le Conseil fédéral considère qu’il est « inévitable » d’exporter à l’avenir le CO2 produit en Suisse à l’étranger et de le stocker dans les fonds marins. Seules ces technologies à émissions négatives permettraient d’atteindre les objectifs climatiques. Afin d’éliminer les déchets sous forme de CO2 à l’étranger, le Conseil fédéral veut ratifier un amendement correspondant au Protocole de Londres. La convention internationale de 1972 protège les mers contre la pollution due à l’immersion de déchets et d’autres substances. Afin de permettre le stockage du CO2 dans les fonds marins, le protocole avait été adapté en 2009.
La Confédération part du principe qu’en 2050, malgré l’objectif du zéro net, environ 12 millions de tonnes de CO2 seront produites, ce qui correspond à un quart des émissions actuelles de CO2 de la Suisse. La majeure partie de ces émissions doit être captée directement à la source, par exemple dans les cimenteries ou les usines d’incinération des ordures ménagères. La technologie sous-jacente du « Carbon Capture and Storage » – la capture et le stockage du CO2 – est encore peu éprouvée à ce jour. Le Conseil fédéral estimant que les capacités de stockage du CO2 en Suisse sont trop faibles, l’accent est mis sur l’exportation.
Les représentants des usines d’incinération des ordures ménagères et des cimenteries saluent la décision du Conseil fédéral, car elle augmente la sécurité de la planification et du droit. L’Alliance pour le climat, qui regroupe plus de 140 organisations, souligne que la Suisse doit réduire de grandes quantités d’émissions évitables afin d’atteindre ses objectifs climatiques. Les fonds marins ne peuvent pas résoudre ce problème. Plus d’informations sur srf.ch, et ici et ici (paywall) dans le Tages-Anzeiger.
La Confédération mise davantage sur les compensations liées au CO2 – malgré les critiques
Le Conseil fédéral a déjà conclu des accords climatiques avec 15 pays afin que la Suisse puisse comptabiliser les émissions de CO2 réalisées à l’étranger dans son objectif de réduction. Les plus récents de ces accords ont été signés avec le Chili, le Kenya et la Tunisie (voir la liste actuelle). Le magazine du Tages-Anzeiger (paywall) examine à la loupe quelques-uns des projets financés par la Suisse. Il en ressort que certains projets, comme les installations de biogaz au Malawi, n’économisent que peu de CO2, car beaucoup ne fonctionnent pas ou pas correctement. D’autres, comme les fours de cuisson au Pérou ou les bus électriques en Thaïlande, ne remplissent pas un critère important pour être comptabilisés en Suisse : ils ne sont pas additionnels. Cela signifie qu’ils auraient été financés même sans l’argent de la Suisse. Caritas Suisse a fait une analyse critique des fours de cuisson au Pérou.
Suite à l’article sur South Pole paru dans le New Yorker (paywall), la situation du leader mondial de la compensation volontaire des émissions de CO2, dont le siège est à Zurich, s’est encore aggravée. D’abord, l’entreprise de certification Vera a annoncé qu’elle suspendait le projet phare de South Pole au Zimbabwe, Kariba, et qu’elle enquêtait sur les reproches formulés dans le New Yorker. Puis South Pole a stoppé la vente des certificats Kariba, et peu après, le cofondateur et chef de l’entreprise, Renat Heuberger, ainsi que Bastien Girod, responsable des solutions climatiques pour l’Europe de l’entreprise et conseiller national des Verts, ont démissionné. Plus d’informations sur srf.ch (ici et ici) et dans le Tages-Anzeiger.
Les entreprises qui se présentent comme climatiquement neutres dans leur publicité à l’aide de certificats CO2 doivent revoir leurs pratiques. La Commission Suisse pour la Loyauté (CSL), un organe d’autorégulation du secteur de la communication, a accepté deux plaintes de la Fondation pour la protection des consommateurs. La fondation avait dénoncé le fait que des affirmations publicitaires telles que « climatiquement neutre » (dans le cas d’un fournisseur de mazout) ou « climatiquement positif » (pour un fabricant d’aliments pour bébés) étaient trompeuses. Les publicités avec des promesses climatiques sont trompeuses, constate la CSL. Pour prendre sa décision, elle s’appuie sur le code de la publicité de la Chambre de commerce internationale. Celui-ci remet en question, outre les affirmations climatiques, les modèles commerciaux des entreprises qui proposent des compensations climatiques. Si des entreprises contreviennent au jugement de la Commission pour la loyauté, celle-ci ne peut pas prendre de sanctions. Le Secrétariat d’État à l’économie (Seco) dispose en revanche de cette compétence. La Fondation pour la protection des consommateurs y avait également déposé des plaintes. Le Seco n’a pas encore donné de réponse. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger (paywall).
Les installations solaires alpines à l’aube d’une phase décisive
On voit maintenant à quelle vitesse le Solarexpress progresse : Dans certaines communes, des décisions ont été prises concernant les projets et des demandes de permis de construire ont été déposées pour les premiers projets. Parallèlement, de nouveaux projets continuent d’être présentés. On trouve de bons articles de synthèse dans la Berner Zeitung, sur srf.ch, dans le Tages-Anzeiger, la NZZ et la Südostschweiz (paywall).
Lors des votations au niveau communal, on peut observer le schéma suivant : Lors des assemblées communales (avec vote ouvert), l’approbation est plus élevée que lors des votations (anonymes) aux urnes. Et les petites communes disent souvent plus clairement oui, la contribution aux finances communales jouant ici probablement un rôle.
Les projets suivants ont été approuvés lors d’assemblées communales : à Grengiols, VS (électricité pour 40’000, voir Tages-Anzeiger) ; Lütschental, BE (3000 ménages, Berner Zeitung, paywall) ; Adelboden (3000 ménages, ee.news) ; Lenk, BE (3000 ménages, Berner Zeitung, paywall) ; Schattenhalb, BE (4500, Berner Zeitung, paywall) ; Laax (2200 ménages, Südostschweiz) ; Klosters (3500 ménages, Südostschweiz, paywall) ainsi qu’à Tujetsch, Disentis, Samedan et Poschiavo (Südostschweiz, paywall).
Ces projets ont été rejetés lors d’assemblées communales : Illanz/Glion, GR (électricité pour 14’000 ménages, Südostschweiz) ; Disentis, GR (10’000 ménages, Südostschweiz, paywall) et Saanen (15’000 ménages, Berner Zeitung, paywall).
Actuellement, trois installations solaires alpines sont mises à l’enquête publique en Suisse (état au 12 décembre 2023, l’OFEN fournit un aperçu actuel). Elles ont déjà été approuvées par les communes. Oberwil, BE (Alp Morgeten, électricité pour 3000 ménages, oppositions de la Fondation pour la protection et l’aménagement du paysage, du Club alpin suisse et de Mountain Wilderness, Sonntagszeitung paywall) ; Scuol, GR (20’000 ménages, Südostschweiz) ; Sedrun, GR (6300 ménages, Tages-Anzeiger).
En outre, quelques nouveaux projets ont été présentés : à Grindelwald, BE (deux sites, de l’électricité pour 7000 ménages au total, Berner Zeitung) ; Lauterbrunnen, BE (3000 ménages, Berner Zeitung) ; Urnerboden, GL (3000 ménages, Tages-Anzeiger). Voici un aperçu de l’Association des entreprises électriques suisses de toutes les installations photovoltaïques prévues et d’autres projets visant à développer les énergies renouvelables.
Pour que les installations photovoltaïques alpines construites dans le cadre du projet Solarexpress soient indemnisées par la Confédération à hauteur de 60% des coûts d’investissement, elles doivent injecter au moins 10% de l’électricité prévue dans le réseau d’ici fin 2025. Des conseillers nationaux du PLR, du centre et du PS veulent maintenant prolonger ce délai de trois ans, jusqu’en 2028, comme le rapporte la NZZ am Sonntag (paywall). L’intervention devrait être votée lors de la session d’hiver en cours.
Mais la pression du temps, le refus de la population ou l’opposition des associations environnementales ne sont pas les seuls facteurs qui remettent en question les installations solaires alpines. Le plus grand obstacle pour la plupart des projets est la rentabilité, peut-on lire dans la NZZ. « Malgré les subventions, la construction et l’exploitation économique de ces installations sur les surfaces libres des hautes Alpes seraient difficiles ».
Nouveau parc éolien, énergie nucléaire et un modèle controversé de mix électrique
Le premier parc éolien du canton a été inauguré en novembre à Sainte-Croix, dans le canton de Vaud. Il aura fallu 25 ans entre la première étude de faisabilité et l’ouverture. Les six éoliennes installées fournissent de l’électricité à environ 5000 ménages. Avec le parc éolien de Sainte-Croix, la Suisse compte 47 éoliennes en service, contre plus de 1300 en Autriche. Plus d’informations sur ee.news.ch.
En automne, le conseiller aux Etats et président du PLR Thierry Burkart avait déposé un postulat dans lequel il demandait au Conseil fédéral de rédiger un rapport afin d’examiner, entre autres, la construction de nouvelles centrales nucléaires. Le Conseil fédéral a décidé d’accepter le postulat. Il ne s’agit pas d’un précédent pour lever l’interdiction actuelle de construire de nouvelles centrales nucléaires. Mais le Conseil fédéral lance ainsi une discussion à ce sujet. Plus d’informations dans l’Aargauer Zeitung (paywall) et la Sonntagszeitung. Dans la NZZ, le patron d’Axpo, Christoph Brand, explique clairement que la construction de nouvelles centrales nucléaires n’est actuellement pas rentable d’un point de vue économique. Compte tenu des risques financiers importants, des subventions publiques sont nécessaires. Celles-ci pourraient même être plus élevées que celles pour les installations solaires alpines, pour lesquelles la Confédération prend en charge jusqu’à 60% des coûts d’investissement.
Avec Power Switcher, le groupe énergétique Axpo met à disposition un instrument permettant de modéliser le mix électrique du futur. Les personnes intéressées peuvent créer leurs propres scénarios. Axpo a ainsi créé deux scénarios propres, avec pour objectif un approvisionnement en électricité respectueux du climat et garanti, tout en étant le moins dépendant possible des importations d’électricité en hiver. L’un des scénarios mise sur le développement de l’énergie nucléaire.
La NZZ (paywall), qui a été la première à rendre compte de l’outil d’Axpo, conclut sur la base de la modélisation que de nouvelles centrales nucléaires sont nécessaires pour un approvisionnement fiable en électricité si la Suisse ne veut pas compter sur des importations importantes d’électricité ou d’hydrogène. Les installations PV dans les Alpes et sur les toits ne seraient en revanche pas rentables. L’association « energie-wende-ja » arrive à une autre conclusion. Selon elle, le Power Switcher prend en compte des coûts trop élevés pour le photovoltaïque et trop bas pour le nucléaire. De plus, la conclusion de la NZZ est erronée. L’association économique swisscleantech le souligne également.
La Suisse est-elle en train de rattraper son retard en matière d’hydrogène ?
L’hydrogène peut apporter une contribution importante à la réduction nette à zéro des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050, dans le monde entier et en Suisse également. La condition est qu’il soit produit à partir de sources d’énergie renouvelables et non fossiles. Dans ce contexte, la Suisse est dépendante des importations de l’étranger, comme le souligne le Conseil fédéral dans son rapport « Hydrogène. Etat des lieux et options d’action pour la Suisse ». Pour que cela soit possible, un « accès à l’infrastructure européenne du réseau d’hydrogène est central ». Le Conseil fédéral part du principe que les importations seront possibles à partir de 2035.
L’hydrogène sera utilisé là où il n’existe aucune autre alternative renouvelable. Selon le Conseil fédéral, entre autres pour la production de chaleur industrielle à haute température, dans les transports terrestres, aériens et maritimes ou comme stockage saisonnier d’énergie pour la production d’électricité. swisscleantech estime que ces données sont insuffisantes. L’association demande que l’on étudie beaucoup plus précisément où l’hydrogène doit être utilisé. Jusqu’à ce que l’hydrogène puisse être importé, il devrait être limité aux processus industriels qui nécessitent beaucoup d’énergie. Plus d’informations dans la NZZ (paywall).
Concertation sur l’extension des autoroutes et les nouvelles approches de la mobilité
Le référendum lancé par l’Association transports et environnement (ATE) et l’association Umverkehr contre l’extension de l’autoroute a abouti. Lors de la session d’automne, le Parlement avait accordé 5,3 milliards de francs pour élargir l’A1 à six ou huit voies sur certains tronçons. Une votation populaire sur l’extension aura donc lieu en 2024. Lors de la récolte des signatures nécessaires, il est apparu clairement que de nombreuses personnes ne comprenaient pas pourquoi la Confédération voulait investir des milliards dans des autoroutes en pleine crise climatique et détruire des pans entiers de précieuses terres cultivables, indiquent les organisations environnementales. Plus d’informations dans le Blick.
A partir du 1er janvier 2024, les propriétaires de voitures électriques paieront eux aussi un impôt sur les automobiles et contribueront ainsi à l’entretien des routes nationales et du fonds pour le trafic d’agglomération. Le Conseil fédéral a décidé de supprimer l’exonération fiscale et de mettre les véhicules électriques sur un pied d’égalité avec les véhicules diesel et essence. Avec la diffusion croissante des véhicules électriques, les pertes fiscales ont augmenté. Au premier semestre 2023, une voiture neuve importée sur quatre était purement électrique. Sur 100 voitures immatriculées en Suisse, 3 sont actuellement des véhicules purement électriques. Plus d’informations à ce sujet dans la NZZ. Une analyse des données du Tages-Anzeiger (paywall) confirme que la part des véhicules électriques est plus élevée dans les communes aisées que dans le reste de la Suisse.
Dans les négociations internationales, la Suisse s’engage à limiter les subventions en faveur des énergies fossiles. Toutefois, le Conseil fédéral l’y autorise toujours. Il a ainsi décidé que les tracteurs et les dameuses continueraient à se faire rembourser l’impôt sur les huiles minérales pour le diesel (environ 80 centimes par litre). Les entreprises forestières, la pêche professionnelle et les entreprises de transport concessionnaire en profitent également. Chaque année, ces branches sont subventionnées à hauteur de 65 millions de francs. Plus d’informations sur nau.ch et dans le Tages-Anzeiger.
A quoi ressemble une mobilité respectueuse du climat ? Des chercheurs de l’ETH sont en train de la développer pour la ville de Zurich. Les premiers résultats du projet « E-Bike-City » montrent que l’espace réservé aux voitures serait nettement réduit. Dans ce scénario, près de la moitié des voies de circulation seraient réservées aux vélos, vélos électriques et trottinettes électriques. Les véhicules à moteur ne circuleraient plus que sur des routes à sens unique sur de nombreux tronçons. L’objectif est également de rendre les routes plus sûres pour les cyclistes. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger.
L’association Umverkehr veut obtenir des changements similaires par la voie politique et a déposé à cet effet des « initiatives pour le climat urbain » dans plusieurs villes et communes. A Saint-Gall, une contre-proposition du parlement de la ville a été adoptée. Celui-ci prévoit de créer 200 000 m² d’espaces verts supplémentaires et de la place pour les piétons, les cyclistes et les transports publics. A Bâle, la demande populaire a été rejetée fin novembre. Le PS et les Verts avaient argumenté en vain qu’il s’agissait d’une mesure indispensable pour lutter contre le réchauffement climatique qui nuit à la santé. Les partis bourgeois se sont opposés aux restrictions du trafic automobile et à la suppression de places de stationnement. Plus d’informations dans le Basler Zeitung et le Tages-Anzeiger.
Le Tribunal fédéral annule deux jugements contre des activistes climatiques
Les activistes climatiques qui avaient bloqué le hall d’entrée d’un centre commercial à Fribourg en 2019 ne seront pas condamnés. Le Tribunal fédéral a confirmé une décision du Tribunal cantonal qui avait annulé une condamnation en première instance. Le Ministère public de Fribourg avait fait recours contre cette décision. Le Tribunal fédéral est arrivé à la conclusion que la pression exercée sur des tiers lors de l’action n’était pas suffisante pour condamner les personnes qui y ont participé pour contrainte. Pendant le blocage, les visiteurs auraient pu entrer et sortir du centre commercial par d’autres entrées et sorties. La liberté de réunion exige que l’Etat fasse preuve d’une certaine tolérance lors de rassemblements non autorisés mais non violents. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger et la NZZ (paywall).
Le Tribunal fédéral a également acquitté des militants écologistes dans un deuxième cas. Ils avaient occupé pendant plusieurs mois une colline près d’Eclépens, VD. Ils voulaient ainsi empêcher le groupe cimentier Holcim d’y extraire des roches pour la production de ciment. En mars 2021, la police cantonale vaudoise a évacué la colline, mais les activistes n’ont pas décliné leur identité. Ils ont été condamnés par le Ministère public à des peines de prison ferme allant jusqu’à trois mois et à des amendes. Le Tribunal fédéral reproche maintenant au ministère public et aux tribunaux vaudois d’avoir refusé aux participants le droit à un procès. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger.
La BNS critiquée pour sa participation à des entreprises de fracturation hydraulique
La Banque nationale suisse détient des participations dans près de 70 entreprises qui extraient du pétrole ou du gaz par fracturation ou qui transportent des combustibles fossiles extraits par fracturation. Les investissements de la BNS dans ces entreprises s’élèvent à neuf milliards de dollars américains. C’est ce que révèle un rapport de la Coalition BNS, un regroupement d’organisations et de particuliers sous l’égide de l’Alliance pour le climat. La BNS ne s’exprime pas sur les différents placements, mais justifie les investissements dans les entreprises par le fait qu’elle se retire en contrepartie des entreprises de charbon. La coalition exige que la BNS s’en tienne à ses propres critères et se retire de la fracturation. Plus d’informations sur Bloomberg (paywall).
Afin d’obliger la Banque nationale à protéger davantage le climat, cinq conseillers nationaux ont déposé des initiatives parlementaires identiques. Ils demandent que la BNS soit obligée par la loi de prendre en compte les risques climatiques et environnementaux dans sa politique monétaire. La Commission de l’économie du Conseil national a rejeté l’intervention avec la voix prépondérante de son président. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger.
Décision de la Confédération et des cantons en matière de climat
Le Conseil fédéral veut réviser la stratégie d’adaptation au changement climatique. Parallèlement, un nouveau plan d’action doit être élaboré pour la période allant jusqu’à 2030. Un rapport de contrôle sur la mise en œuvre du plan d’action actuel montre que les mesures prises jusqu’à présent sont efficaces. La contribution à la réduction des risques liés au climat est jugée moyenne à grande. En outre, 50 projets ont été soutenus, dont les solutions sont très utiles. Il s’agit par exemple de la détection précoce de la sécheresse, de la surveillance des dangers naturels, du développement de bases pour le développement des forêts ou de recommandations pour la protection contre la chaleur.
Saint-Gall met à disposition un crédit spécial de 59 millions de francs pour poursuivre et développer les programmes actuels de promotion de l’énergie. C’est ce que prévoit un contre-projet à l’initiative pour un fonds de protection climatique du PS, qui a été acceptée par les votants. Avec son initiative, le PS voulait créer un fonds doté de 100 millions pour promouvoir les systèmes de chauffage durables et l’assainissement énergétique des bâtiments. L’initiative a été rejetée. Plus d’informations dans le Tagblatt.
Le canton de Zurich tire un bilan intermédiaire positif de la loi sur l’énergie, en vigueur depuis septembre 2022, qui encourage le remplacement des chauffages fossiles par des systèmes neutres pour le climat. Plus de 800 chauffages ont été remplacés, un tiers par des pompes à chaleur à sonde géothermique et un tiers par des pompes à chaleur air-eau, 15% par des raccordements au chauffage à distance. La part des nouveaux chauffages fossiles s’élève encore à 4% ; plus de la moitié d’entre eux sont autorisés pour une durée limitée, jusqu’à ce qu’un raccordement au chauffage à distance soit disponible sur le site. Auparavant, les chauffages existants avaient été majoritairement remplacés par des systèmes fossiles.
Politique climatique internationale
Good COP, bad COP
La 28e conférence internationale sur le climat s’est tenue cette année à Dubaï. Le président de la COP, Sultan Al Jaber, avait déjà fait l’objet de nombreuses critiques avant la conférence, car il est également le chef de l’entreprise pétrolière et gazière Adnoc, qui veut continuer à investir dans de gigantesques opérations pétrolières et gazières. Le nombre de lobbyistes pétroliers présents n’a donc jamais été aussi élevé.
La COP28 a-t-elle été un succès ? Tout dépend du point de vue que l’on adopte. Au vu des nombreux conflits et guerres, des fossés qui se creusent régulièrement au sein des pays, c’est un petit miracle que 200 pays se réunissent chaque année pour trouver des solutions de manière démocratique et consensuelle. Chaque année, c’est un grand combat. Un tour de force pour tous ceux qui participent aux négociations. Et cette année encore, quelques bonnes décisions ont été prises. De ce point de vue, la COP28 a été un succès. Mais si l’on pose la question de savoir si les pays ont pris des décisions permettant d’améliorer l’avenir de tous et de s’attaquer réellement à la crise climatique, la réponse est clairement non. Voici le plus important :
De l’argent pour les victimes : beaucoup s’attendaient à ce qu’un point central de la dispute soit le financement d’un fonds pour les dommages et les pertes, qui aiderait les pays en développement à faire face aux conséquences du changement climatique – mais dès le premier jour, les pays riches ont promis 700 millions de dollars pour le fonds. Mais les règles convenues pour le fonds sont plus faibles qu’espéré. Une objection de dernière minute de la délégation américaine au texte consensuel a forcé une modification du mécanisme de financement, qui « invite » seulement les pays riches à contribuer au nouveau fonds, mais ne les oblige pas à le faire.
L’abandon des énergies fossiles est explicitement mentionné dans le texte final pour la première fois depuis 30 ans. Un premier projet d’accord de la COP28, ne demandait qu’une réduction volontaire de la production et de la consommation de combustibles fossiles et a été critiqué comme étant « totalement insuffisant ». Après une série de réunions entre diplomates de haut niveau, Sultan Al Jaber a annoncé un nouvel accord : Pour la première fois, le monde s’est mis d’accord sur l’abandon des combustibles fossiles. Bien qu’il s’agisse d’un grand pas, nombreux sont ceux qui ne sont pas satisfaits du résultat : L’accord accorde au gaz naturel un rôle central en tant que carburant de transition et reste vague sur la date à laquelle cet abandon des énergies fossiles devrait avoir lieu.
Développer les énergies renouvelables : Les pays se sont mis d’accord pour tripler la capacité des énergies renouvelables d’ici 2030 et pour augmenter l’efficacité énergétique de 4 % chaque année. Il est donc tout à fait normal que les objectifs généraux de réduction soient désormais étayés par des mesures concrètes. En marge de la COP28, 23 pays se sont également engagés à tripler la capacité énergétique nucléaire mondiale d’ici 2050 par rapport à 2023. Il s’agit notamment des États-Unis, du Canada, du Japon, de la Corée du Sud, des Émirats arabes unis, du Royaume-Uni et de la France.
L’objectif de réduction pour 2035 est fixé : d’ici là, les émissions mondiales doivent avoir diminué de 60% et chaque pays doit apporter une contribution appropriée. Début 2025 au plus tard, tous les États doivent soumettre à l’ONU leurs nouveaux plans de protection du climat (NDC) pour cette période et expliquer comment ils comptent atteindre l’objectif.
Le financement du climat reste un sujet difficile. Patrick Hofstetter, expert en protection climatique du WWF, déclare à ce sujet : « Pour pouvoir atteindre les objectifs communs et pour une meilleure protection contre les conséquences de la crise climatique, les pays en voie de développement ont besoin de toute urgence du soutien des pays industrialisés riches. C’est pourquoi un accord doit être conclu lors de la prochaine conférence sur le climat à Bakou, en Azerbaïdjan, qui prévoit une augmentation significative du financement international pour le climat. Comme la Suisse ne remplit déjà pas ses obligations, des fonds supplémentaires doivent être générés le plus rapidement possible. Une solution serait de faire payer les responsables de la crise ».
Plus d’informations sur la COP28 chez Klimareporter, SRF, Greenpeace, de nombreux articles dans le Guardian et un article très détaillé dans Carbon Brief.
La Chine et les Etats-Unis signent un pacte sur le réchauffement climatique
Les États-Unis et la Chine ont signé un pacte pour lutter ensemble contre le réchauffement climatique. L’accord prévoit de tripler la production d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelables d’ici 2030, mais ne contient que des déclarations insuffisantes sur l’efficacité énergétique et ne dit rien sur l’énergie nucléaire. Les deux pays se sont engagés à réaliser cinq mégaprojets de CSC (capture et stockage du carbone) d’ici 2030. La Chine a en outre déclaré qu’elle fixerait des objectifs de réduction pour toutes les émissions de gaz à effet de serre – une amélioration par rapport aux objectifs actuels qui ne prennent en compte que les émissions de CO2. Plus d’informations dans le New York Times (paywall) et le gouvernement américain.
Les émissions de la Chine vont baisser en 2024
Les émissions de CO2 de la Chine ont explosé au cours des dernières décennies. Mais selon une analyse de Carbon Brief, les émissions de la Chine devraient diminuer en 2024. On ne sait pas encore si cette baisse sera durable. Alors que les émissions de CO2 sont reparties à la hausse en 2023 après avoir atteint leur niveau le plus bas pendant la stratégie « zéro carbone », les énergies renouvelables ont été développées à un niveau record. Parallèlement, la Chine continue à construire de nombreuses nouvelles centrales à charbon. Les experts s’attendent à un bras de fer entre l’industrie du charbon du pays et les nouveaux groupes d’intérêt pour les énergies renouvelables. Si la Chine continue à développer ses capacités en matière d’énergies renouvelables à ce rythme, elle pourrait connaître une baisse continue de l’utilisation des combustibles fossiles et des émissions.
Les exportations de GNL des États-Unis sont aussi mauvaises que celles de charbon
Jusqu’en 2016, les exportations de gaz naturel liquéfié (GNL) en provenance des États-Unis étaient interdites en Europe. Depuis, les exportations ont rapidement augmenté, en partie en raison de la croissance rapide de la production de gaz de schiste. Aujourd’hui, les États-Unis sont le plus grand exportateur de GNL. Le gouvernement américain du président Biden a prévu de développer massivement les infrastructures d’exportation de GNL. Jusqu’à présent, sept grands terminaux d’exportation ont été construits et au moins 20 autres sont prévus.
Un nouveau document détermine dans un calcul de cycle de vie les émissions de gaz à effet de serre du GNL exporté. La plus grande source d’émissions est le méthane non brûlé qui s’échappe lors de l’extraction ou du transport. Mais les émissions de CO2 dues à l’extraction du gaz de schiste, très gourmande en énergie, jouent également un rôle important. L’analyse réfute l’argument selon lequel le GNL génère moins d’émissions que le charbon : dans tous les scénarios étudiés, les émissions totales de gaz à effet de serre du GNL sont supérieures à celles du charbon, de 24% à 274%.
Le World Energy Outlook 2023 de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) est plein d’espoir. Il montre que la croissance de la consommation de gaz s’est considérablement ralentie et que la demande va soit stagner soit diminuer. Cela signifie que certaines des nombreuses installations d’exportation de GNL en cours de construction seront confrontées à un surplus de gaz. Plus d’informations dans le New Yorker et le Guardian.
Une catastrophe climatique majeure toutes les trois semaines aux États-Unis
Le cinquième bilan climatique national des Etats-Unis montre que la crise climatique cause chaque année des dommages directs de 150 milliards de dollars dans tout le pays, et la tendance est à la hausse. Entre 2018 et 2022, le pays a connu 89 catastrophes climatiques qui ont causé plus d’un milliard de dollars de dommages, dont des sécheresses, des inondations, de fortes tempêtes et des incendies de forêt. Cela correspond à une catastrophe toutes les trois semaines. Le gouvernement américain a annoncé plus de 6 milliards de dollars pour financer les infrastructures, l’énergie propre et la résilience climatique. Plus dans Nature (paywall).
Les banques ont injecté plus de 150 milliards de dollars dans les entreprises fossiles en 2022
Une nouvelle base de données sur le site web carbonbombs.org présente 425 projets d’extraction de charbon, de pétrole et de gaz. Chacun de ces projets émettra plus d’un milliard de tonnes de CO2 sur toute sa durée de vie. A titre de comparaison, c’est plus de 20 fois plus que ce que la Suisse a émis en 2022.
Près de 300 de ces installations sont déjà en service. Au moins 128 de ces « bombes à carbone » ne sont pas encore en service. Au cours de leur cycle de vie, elles émettront au total près de 300 milliards de tonnes de CO2. Ces émissions de gaz à effet de serre pourraient encore être évités.
Deux des mines de charbon prévues appartiennent à Glencore, le géant suisse des matières premières dont le siège est à Baar, ZG. Glencore continue de tirer un grand profit du charbon. L’année dernière, le bénéfice d’exploitation ajusté rien que pour sa mine la plus importante, El Cerrejón dans le nord de la Colombie, s’est élevé à 3,6 milliards de dollars.
Entre 2016 et 2022, les banques, principalement aux États-Unis, en Chine et en Europe, ont accordé des financements à ces entreprises et projets fossiles pour un montant de 1,8 trillion de dollars. En 2022, cela représentait plus de 150 milliards de dollars. Il s’agissait en grande partie de financements généraux d’entreprises et non de crédits directs pour des projets d’extraction de combustibles fossiles. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger (paywall) et le Guardian.
Les gouvernements s’accordent sur l’élimination progressive de l’éclairage fluorescent
Lors de la COP5 de la Convention de Minamata sur le mercure, 147 gouvernements se sont mis d’accord pour interdire toutes les lampes fluorescentes à partir de 2027. L’accord, s’il est pleinement mis en œuvre, permettra d’éviter l’émission de 2,7 gigatonnes de CO2 d’ici 2050, l’éclairage LED étant beaucoup plus efficace sur le plan énergétique. De plus, 158 tonnes de mercure en moins seront rejetées dans l’environnement, à la fois par les ampoules elles-mêmes et par les émissions évitées des centrales électriques au charbon. Plus d’informations de clasp et CAN International.
Les perspectives énergétiques mondiales 2023 de l’AIE
L’Agence internationale de l’énergie (AIE) a publié en octobre son World Energy Outlook 2023. Les principaux messages sont les suivants:
- Les énergies renouvelables se développent rapidement. D’ici 2030, il y aura au moins dix fois plus de véhicules électriques en circulation et la moitié de l’électricité totale proviendra des énergies renouvelables. Le changement est « inéluctable ».
- La demande chinoise en combustibles fossiles atteint un pic en 2025 dans tous les scénarios. Cela s’explique par une croissance plus faible, l’utilisation rapide des énergies renouvelables et la transition vers une économie moins gourmande en énergie.
- En 2023, les investissements dans les énergies renouvelables étaient 1,8 fois plus élevés que ceux dans les combustibles fossiles, et d’ici 2030, ils seront entre 2,5 et 10 fois plus élevés.
- Le captage et le stockage du carbone (CSC) n’est qu’une petite partie de la solution. Le CSC ne se développe pas aussi rapidement que les autres technologies et ne devrait pas servir de prétexte pour éviter de réduire les émissions des combustibles fossiles.
- 80-85% de la croissance de la nouvelle production d’électricité en Afrique d’ici 2030 sera probablement due aux énergies renouvelables.
- Mais il en faudra bien plus pour rester dans l’objectif de 1,5 degré. Avant tout, « des investissements accrus dans tous les aspects d’un système énergétique propre » : tripler la capacité des énergies renouvelables, doubler leur efficacité et réduire de 75% les émissions de méthane.
Un nouveau rapport de Climate Analytics montre en outre que les émissions mondiales de gaz à effet de serre pourraient commencer à baisser dès l’année prochaine si les taux de croissance actuels de l’énergie solaire et éolienne et des véhicules électriques se maintiennent. L’étude prévoit un pic pour le charbon en 2023, pour le gaz en 2024 et pour le pétrole en 2025.
Criminalisation des protestations climatiques
L’année dernière, les médias ont beaucoup parlé des autocollants et des manifestations pour le climat. Souvent, les actions et les activistes ont été présentés comme des extrémistes et la cause des protestations, l’urgence de la crise climatique ayant été reléguée au second plan. Ce n’est pas un hasard. Le réseau mondial Atlas, influent mais peu connu, regroupe des centaines d’organisations et de groupes de réflexion conservateurs, libéraux et néo-libéraux. Le réseau Atlas s’engage stratégiquement pour que les protestations climatiques soient présentées comme extrêmes et dangereuses dans les médias, la politique et la justice. Dans le podcast Drilled, la journaliste climatique Amy Westervelt se penche sur la criminalisation des protestations climatiques. Plus d’informations à ce sujet dans la WOZ.
Politique climatique européenne
Accord sur la directive relative aux bâtiments
Peu avant la fin de l’année, le Parlement européen et les États membres de l’UE se sont mis d’accord sur l’un des derniers dossiers en suspens du programme « Fit for 55 », la directive européenne sur les bâtiments (EPBD). Le secteur du bâtiment doit être soumis à des exigences plus strictes en matière d’efficacité et de protection climatique dans toute l’Europe. Les normes d’efficacité minimales pour les bâtiments particulièrement inefficaces ont été au cœur des débats houleux. Selon la proposition de la Commission européenne, ces normes auraient exigé que les bâtiments résidentiels et non résidentiels très inefficaces soient progressivement rénovés d’ici une année de référence afin d’économiser davantage d’énergie et donc de coûts. Dans la décision finale, les exigences ont toutefois été considérablement affaiblies. Les organisations environnementales craignent que les objectifs d’efficacité affaiblis ne garantissent pas une protection suffisante contre le changement climatique et la pauvreté énergétique (voir CAN Europe ou NABU). La directive révisée prévoit également l’introduction progressive de l’obligation d’utiliser l’énergie solaire dans toute l’UE ainsi que l’interdiction de subventionner les chauffages fossiles à partir de 2025 et de les exploiter à partir de 2040. Pour en savoir plus, consultez Euractiv.
La France refuse de payer les pénalités pour erreur climatique
En 2020, la France aurait dû atteindre une part de 23% d’énergies renouvelables dans sa consommation totale d’énergie. Le gouvernement français s’y était déjà engagé en 2009 suite à une directive européenne. Cet objectif n’a pas été atteint. Le non-respect des directives de l’UE fait désormais peser la menace de « pénalités » – mais Paris refuse et entre en confrontation avec la Commission européenne, comme on peut le lire dans Le Monde. La France devrait acheter des parts d’énergies renouvelables aux pays qui ont dépassé leurs objectifs. Selon les estimations, les coûts s’élèveraient à environ 500 millions d’euros, selon la ministre de l’Energie Pannier-Runacher. Reste à savoir si la France est désormais menacée d’une procédure d’infraction devant la Cour de justice de l’UE.
Malgré une baisse des émissions : L’objectif climatique de l’UE n’est pas en vue
Dans un nouveau rapport, l’Agence européenne pour l’environnement (AEE) prévoit que les émissions de l’UE auront certes baissé en 2022 par rapport à l’année précédente, mais que l’objectif de réduction de 55% par rapport à 1990 ne sera pas atteint en 2030. Les efforts consentis jusqu’à présent par les États membres dans le cadre de plus de 3.000 mesures différentes ne permettraient d’atteindre qu’une réduction de 43% des émissions. Si les mesures encore prévues sont mises en œuvre, une réduction de 48% serait possible – mais il y a tout de même un écart de sept points de pourcentage par rapport à l’objectif 2030. Jusqu’à présent, l’UE a émis 31% de gaz à effet de serre en moins qu’en 1990. L’année prochaine, les États membres devront soumettre de nouveaux plans nationaux pour l’énergie et le climat (PNEC). Selon l’AEE, ces plans sont essentiels pour atteindre les objectifs de protection du climat.
Défis croissants pour le marché de l’électricité grâce aux énergies renouvelables
Même si le rythme de la protection du climat en Europe est trop lent, comme décrit ci-dessus, les énergies renouvelables pour la production d’électricité continuent de se développer. Cela pose de nouveaux défis au marché de l’électricité de l’UE, comme le souligne un rapport de l’AEE. En 2030, 42,5 % de l’électricité produite dans l’UE devrait provenir de sources renouvelables. Les États membres doivent désormais flexibiliser leurs systèmes électriques en raison de la fluctuation de l’alimentation en électricité et développer le transport transfrontalier de l’électricité.
Les flux financiers européens continuent de réchauffer le climat
L’organisation ActionAid International a publié un nouveau rapport à l’occasion du lancement de la 28e conférence mondiale sur le climat à Dubaï. Il en ressort que les entreprises et les institutions financières basées dans l’UE sont responsables d’une grande partie des financements nuisibles au climat – bien que l’UE s’engage au niveau international pour de nouveaux flux financiers orientés vers la protection du climat. Ainsi, depuis l’accord historique de Paris, un total de 327 milliards de dollars américains aurait été injecté dans les pays en voie de développement pour financer des activités dans le domaine des combustibles fossiles et de l’agriculture industrielle, ce qui va à l’encontre de la protection du climat.
Qui sont les plus gros pollueurs du système européen d’échange de quotas d’émission ?
Une nouvelle analyse de Carbon Market Watch montre que seules 30 entreprises européennes sont responsables de plus de la moitié des émissions du système européen d’échange de quotas d’émission (ETS). Dans le cadre du système ETS, les grandes entreprises industrielles et le secteur de l’énergie achètent aux enchères des droits d’émission. Ceux-ci sont progressivement réduits afin de parvenir à une réduction constante des gaz à effet de serre. Mais des droits d’émission gratuits sont également octroyés, ce qui permet aux entreprises industrielles de rester compétitives par rapport à leurs concurrentes hors de l’UE.
Le secteur de l’énergie est certes responsable de la majorité des émissions, mais il paie également pour ses droits d’émission. Les entreprises de secteurs tels que la production d’acier, de ciment ou de produits pétrochimiques reçoivent toutefois d’énormes quantités de droits d’émission gratuits. Par exemple, le géant de l’acier ArcelorMittal a reçu en 2022 des certificats d’émission gratuits d’une valeur de 3,7 milliards d’euros, tandis que le géant du ciment Heidelberg a reçu 1,9 milliard d’euros. L’organisation demande donc qu’à l’avenir, pour atteindre les objectifs climatiques, on ne distribue plus de droits de pollution gratuits et que toutes les entreprises paient.
Allemagne
Une décision épique de la Cour constitutionnelle fédérale conduit l’Allemagne à la crise budgétaire
Le 15 novembre, la Cour constitutionnelle fédérale a décidé que les fonds non utilisés pour lutter contre la pandémie de Covid-19 ne pouvaient pas être réaffectés à la protection du climat. Le groupe parlementaire CDU/CSU avait porté plainte, car cela serait contraire à la Loi fondamentale et aux règles d’endettement qui y sont définies. Ces 60 milliards d’euros auraient dû être affectés au Fonds pour le climat et la transformation, qui devait financer différentes mesures de lutte contre la crise climatique – par exemple le financement de chauffages respectueux du climat ou des investissements dans l’infrastructure ferroviaire. Cela fait trébucher les négociations budgétaires et est considéré par l’opposition comme une « claque » pour le gouvernement fédéral. Il n’est pas possible de contracter de nouvelles dettes en raison du frein à l’endettement ancré dans la Loi fondamentale. Le gouvernement fédéral a donc dû revoir ses plans pour le prochain budget fédéral. Quatre semaines après le jugement, le chancelier Scholz, le vice-chancelier Habeck et le ministre des Finances Lindner se sont mis d’accord sur une nouvelle proposition. Les grands projets de transformation pour l’industrie devraient être maintenus comme prévu. Les associations sociales ont critiqué le fait que des économies seraient faites ailleurs, principalement au détriment des citoyens. Pour financer les dépenses, le prix national du CO2 pour le chauffage et le carburant sera augmenté et les subventions nuisibles au climat seront réduites dans une faible mesure. Des représentants de l’économie allemande, du marché financier et de la société civile allemande ont lancé un appel ouvert au gouvernement fédéral pour que le financement de la protection du climat et de la transformation soit assuré à long terme. Plus d’informations sur ZEIT Online, Tagesschau et une analyse détaillée sur Lage der Nation.
Il faut davantage de protection du climat dans les bâtiments et les transports
La loi fédérale sur la protection du climat (KSG) stipule qu’en cas de non-respect des limites d’émission annuelles, des « programmes d’urgence » comprenant des mesures appropriées doivent être immédiatement adoptés afin que le secteur concerné retrouve le chemin du climat. Le secteur du bâtiment a déjà manqué trois fois de suite ses objectifs, le secteur des transports deux fois. Les ministères compétents ont certes défini des programmes d’urgence, mais ceux-ci sont insuffisants, comme l’a déjà souligné le Conseil d’experts pour les questions climatiques – un organe chargé d’examiner et de contrôler la mise en œuvre de la LCC – dans une expertise.
L’association allemande pour l’environnement et la protection de la nature (Bund für Umwelt und Naturschutz Deutschland) et l’association allemande pour l’aide à l’environnement (Deutsche Umwelthilfe) ont alors attaqué le gouvernement fédéral en justice et ont obtenu gain de cause : Les programmes d’urgence sont insuffisants et ne répondent pas aux exigences de la loi sur la protection du climat. Le gouvernement fédéral est désormais tenu d’apporter des améliorations immédiates et de présenter des mesures politiques supplémentaires pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Le jugement peut toutefois encore être contesté par les ministères concernés et n’a donc pas encore force de loi. D’autres actions en justice, par exemple concernant le programme global de protection du climat 2023 du gouvernement fédéral, sont encore en attente. Là aussi, on doute que les mesures proposées répondent aux exigences du KSG. Pour en savoir plus, consultez ZDF ou RND.
BMWK présente sa stratégie industrielle
Sur la voie de la neutralité climatique, il est indispensable que l’industrie allemande se décarbonise également pour atteindre un bilan net nul. Fin octobre, le ministère de l’Économie et de la Protection du climat (BMWK) a présenté sa nouvelle stratégie industrielle. Le ministre Habeck s’est clairement prononcé en faveur du maintien du site industriel à l’avenir. La stratégie décrit les défis de la transformation et propose des mesures pour assurer la pérennité de l’industrie à moyen et long terme.
Les associations environnementales comme le WWF déplorent que le système européen d’échange de quotas d’émission continue d’être considéré comme l’instrument phare de la transition. Dans l’ensemble, il manque un « grand ensemble », selon l’organisation environnementale. Il faudrait notamment accélérer la suppression des subventions nuisibles au climat et lier les aides publiques à la transformation à des conditions. La Fédération de l’industrie allemande et la Chambre de commerce et d’industrie allemande critiquent le fait que les obstacles bureaucratiques devraient être réduits et que la compétitivité sur les marchés internationaux devrait être mieux garantie.
De grands pas vers l’approvisionnement en hydrogène
Pour s’affranchir des combustibles fossiles, l’hydrogène est essentiel pour l’industrie lourde qui travaille à très haute température. Les plans du gouvernement fédéral pour le réseau central d’hydrogène ont été publiés mi-novembre. Ils visent à lancer la construction de conduites d’hydrogène dans le cadre de la transition énergétique. Il est prévu de reconstruire ou de construire plus de 9 700 kilomètres de réseau d’ici 2032, principalement pour alimenter les grandes entreprises industrielles qui dépendent de l’hydrogène et qui utilisent encore aujourd’hui des combustibles fossiles. L’importation d’hydrogène via la mer du Nord doit ainsi être assurée. Plus de la moitié du réseau doit être exploité par la transformation de conduites de gaz existantes. Les coûts totaux sont estimés à près de 20 milliards d’euros. Pour en savoir plus, consultez le Tagesschau et le Zeit Online ainsi que le site de la FNB.
La crise climatique visible
Un quart de la population mondiale a souffert de la chaleur extrême l’année dernière
Au cours des 12 derniers mois, la température moyenne mondiale a été de 1,32 degré Celsius supérieure à la valeur de départ préindustrielle. Il s’agit de la température la plus chaude que notre planète ait connue depuis 125 000 ans. La majeure partie de ce réchauffement, environ 1,28 degré, est due à l’influence humaine. Les variations naturelles causées par des processus météorologiques tels qu’El Niño y ont beaucoup moins contribué.
Une personne sur quatre a été exposée à des vagues de chaleur extrêmes, persistantes et dangereuses l’année dernière. En Afrique, les conditions météorologiques extrêmes ont tué au moins 15 000 personnes en 2023. Plus sur Climate Central report, Carbon Brief, Copernicus Climate Change Service bulletin, Nature (paywall).
La fonte des glaciers du Groenland et de l’Antarctique s’accélère considérablement
Groenland
Les glaciers du Groenland rétrécissent aujourd’hui deux fois plus vite que dans les années 1980, comme le montre une nouvelle étude publiée dans Nature Climate Change. Depuis 2000, les températures dans l’Arctique ont également augmenté deux fois plus vite que la température moyenne mondiale.
Les glaciers périphériques des montagnes côtières ont reculé deux fois plus vite entre 2000 et 2021 qu’avant le début du siècle, selon une étude publiée dans Nature Climate Change. La glace qui fond dans la mer depuis le Groenland est l’un des facteurs qui contribuent le plus à l’élévation du niveau de la mer dans le monde. Les glaciers périphériques constituent un système d’alerte précoce pour le reste de la neige et de la glace du Groenland. Ces glaciers ne représentent qu’environ 4% de la couverture glaciaire totale du Groenland, mais sont responsables d’environ 14% de la perte de glace sur l’île. Cela pourrait changer si la calotte glaciaire elle-même devenait instable.
La côte nord du Groenland est soutenue par des plateformes de glace flottantes qui empêchent les glaciers appartenant à l’inlandsis de s’écouler dans l’océan Arctique. Selon une autre étude publiée dans Nature Communications, le volume de ces plateformes glaciaires a diminué de plus de 35% depuis 1978. La glace fond principalement par le bas à mesure que l’océan se réchauffe. Trois plateformes de glace au nord du Groenland se sont déjà presque entièrement effondrées, toutes au cours des 20 dernières années. Après cette fonte, la perte de glace du glacier derrière la plate-forme a plus que doublé. Plus d’informations sur Spektrum, NY Times (Paywall), Coastal Care.
Antarctique occidental
L’Antarctique est presque deux fois plus grand que l’Australie. De nouveaux résultats de recherche indiquent que le continent se réchauffe deux fois plus vite que ce qu’indiquaient jusqu’à présent les modèles climatiques utilisés dans les rapports climatiques de l’ONU. Le courant marin profond de l’Antarctique, qui influence le climat tout autour du globe, ralentit déjà en raison de la fonte des eaux. Cet effet pourrait s’accentuer dans les décennies à venir.
L’ampleur de la fonte qui se produira au cours de ce siècle n’est désormais plus sous le contrôle de l’humanité, selon une nouvelle étude publiée dans Nature Climate Change. Les chercheurs ont utilisé un modèle informatique à haute résolution de la mer d’Amundsen pour effectuer l’évaluation la plus complète à ce jour du réchauffement dans cette région. Leurs résultats indiquent qu’une fonte importante de l’Antarctique occidental est garantie au cours de ce siècle, quelle que soit la vitesse à laquelle le monde renonce aux combustibles fossiles qui alimentent le changement climatique. L’analyse montre que la banquise flottante de la mer d’Amundsen fondra trois fois plus vite au cours de ce siècle qu’au siècle dernier. Comme au Groenland, la perte de cette glace signifie que les calottes glaciaires sur terre peuvent glisser plus rapidement dans l’océan.
La calotte glaciaire de l’Antarctique occidental perd environ 80 milliards de tonnes de glace par an. Certains indices du passé laissent penser que la rupture de l’Antarctique pourrait être beaucoup plus rapide que prévu et plus sporadique et violente que régulière et prévisible. L’Antarctique occidental contient suffisamment de glace pour faire monter le niveau de la mer jusqu’à 5 mètres. Mais nous ne savons pas quelle quantité va fondre et à quelle vitesse. Plus d’informations sur SRF, Klimareporter, Guardian, Tages-Anzeiger (paywall), The Conversation.
Menace des forêts par les incendies et les sécheresses
Canada
Au Canada, les incendies de forêt ont brûlé cette année une surface presque quatre fois plus grande que celle de la Suisse (plus de 180’000 km2 ). Près de 1,5 milliard de tonnes de CO2 ont été libérées- plus que les émissions du Canada et de l’Allemagne réunies. En raison de décennies de déforestation industrielle à grande échelle, d’une mauvaise gestion des forêts et du réchauffement climatique, les forêts émettent désormais 180 millions de tonnes de CO2 chaque année depuis le début des années 2000, au lieu de l’absorber et de le stocker, comme le montre une nouvelle analyse inquiétante. Bien que le Canada se présente volontiers comme un pays vert et respectueux de l’environnement, il continue de miser sur le développement de l’industrie fossile : il construit des pipelines, se moque de l’idée de laisser les combustibles fossiles dans le sol et arrête régulièrement les activistes climatiques. Plus d’informations sur SRF et Spektrum.de.
Amazonie
La forêt amazonienne, par laquelle transite un cinquième de l’eau douce mondiale, souffre d’une énorme sécheresse qui dure depuis des années. Depuis le début de l’année, des incendies de forêt ont ravagé plus de 46’000 km2 de l’Amazonie, une surface plus grande que la Suisse. L’air est devenu dangereux pour la santé de millions de personnes en raison des gigantesques dégagements de fumée et, parallèlement, les grands fleuves s’assèchent à une vitesse record. Les conditions plus sèches accélèrent à leur tour la destruction de la forêt tropicale la plus grande et la plus riche en espèces du monde. Plus d’informations sur MSN et le New York Times (paywall).
Toundra arctique
De nouvelles recherches indiquent que la toundra arctique, qui était un puits de carbone, est en train de devenir une source d’émissions de méthane. Lorsque le pergélisol dégèle, le carbone fixé dans le sol peut s’échapper dans l’atmosphère sous forme de méthane. Des études ont montré que la probabilité de points chauds de méthane augmente d’environ 30 % dans les endroits où des incendies de forêt se sont déclarés au cours des 50 dernières années. Cette probabilité passe à près de 90% lorsque le feu est adjacent à l’eau. Plus d’informations sur Environmental Research.
Nouvelles de la science du climat
CO2 concentration aussi élevée qu’il y a 3 millions d’années
Selon l’Organisation météorologique mondiale, la concentration de CO₂ dans l’atmosphère a atteint 417,9 ppm (parties par million – particules de CO₂ par million de particules) en 2022. La concentration est désormais 50% plus élevée que le niveau préindustriel. Des concentrations de CO₂ aussi élevées ont été observées pour la dernière fois il y a trois à cinq millions d’années. La température moyenne mondiale était alors de deux à trois degrés plus élevée et le niveau de la mer était de 10 à 20 mètres plus haut. Plus dans le Süddeutsche (paywall).
Nous explosons notre budget CO 2
Une nouvelle étude publiée dans Nature sur l’objectif de 1,5 degré part du principe que le budget CO2 lié à la consommation n’est que de moitié environ par rapport aux estimations précédentes. La nouvelle étude utilise des données plus récentes et des modèles améliorés. Si nous voulons que le réchauffement climatique ne dépasse pas 1,5 degré, avec une probabilité de 50%, l’humanité ne peut plus émettre que 247 milliards de tonnes de CO₂. Ensuite, les émissions devront avoir diminué jusqu’à un niveau net de zéro. Au niveau mondial, environ 40 milliards de tonnes de CO2 sont actuellement émises chaque année, et la tendance est toujours à la hausse. Cela signifie que le budget restant sera épuisé dans environ six ans. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger (paywall), la BBC et le NY Times (paywall).
Une nouvelle étude montre que le climat est probablement beaucoup plus sensible
Le Dr James Hansen est synonyme de science du climat. Sa déclaration devant le Congrès américain en 1988 a attiré l’attention du public sur ce sujet à l’époque. Son dernier document part du principe que le climat est beaucoup plus sensible au CO2 qu’on ne le pensait jusqu’à présent. Le document présente plusieurs aspects.
Sensibilité climatique : La sensibilité climatique est une estimation de l’ampleur du réchauffement de la planète si la teneur en CO2 de l’atmosphère doublait par rapport à la moyenne préindustrielle. Actuellement, l’atmosphère contient presque exactement 50 % de CO en plus. Pendant des décennies, l’estimation centrale était de trois degrés Celsius ; cela signifie qu’un doublement de la teneur en CO2 entraîne un réchauffement de trois degrés. Hansen et ses co-auteurs ont maintenant calculé, sur la base de nouvelles données, un réchauffement de 4,8 degrés Celsius.
Accélération de la crise : En outre, les auteurs constatent une accélération du réchauffement. Certains autres scientifiques ont remis en question cette affirmation, d’autres, dont les auteurs d’un rapport faisant autorité sur l’état du climat, ont également constaté une accélération.
Meilleure qualité de l’air = plus de réchauffement climatique : dans le monde entier, la qualité de l’air s’est nettement améliorée depuis de nombreuses années grâce à une réglementation plus stricte. C’est une bonne chose, car les polluants atmosphériques tuent chaque année des millions de personnes. Mais une partie des particules fines refroidit le climat : elles bloquent le rayonnement solaire, ce qui neutralise une partie du réchauffement que nous provoquons. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) estime le refroidissement à environ 0,5 degré Celsius en moyenne. Hansen et ses collègues donnent une estimation nettement plus élevée. Les aérosols pourraient refroidir la planète de 1,5 degré Celsius. Si la pollution atmosphérique et donc la teneur en particules fines diminuent, le monde se réchauffe d’autant plus vite. Plus l’influence de ces particules est grande, plus les émissions de gaz à effet de serre doivent être réduites de manière drastique pour stabiliser la température globale. « Nous espérons avoir tort », a commenté l’un des coauteurs de l’étude. Plus d’informations dans le Guardian, Insideclimatenews. Le Dr Hansen et ses co-auteurs ont tenu une conférence de presse au cours de laquelle ils ont expliqué en détail les résultats de l’étude.
Les plus riches sont les principaux responsables du changement climatique
Les 1% les plus riches du monde sont responsables de plus d’émissions de CO2 que les 66% les plus pauvres. Leurs émissions proviennent de super yachts, de jets privés, de villas, de vols spatiaux ainsi que d’investissements dans des entreprises qui extraient des combustibles fossiles. Un nouveau rapport d’Oxfam estime que les émissions produites par les 1 % les plus riches en 2019 pourraient suffire à causer la mort de 1,3 million de personnes en raison de la chaleur entre 2020 et 2100.
Mais il n’y a pas que les super-riches. Nous en faisons aussi partie. Les 10 % les plus riches sont responsables de la moitié de toutes les émissions mondiales et sont donc la clé pour mettre fin à la crise climatique. Parmi les 10 % les plus riches du monde, on trouve la plupart des classes moyennes des pays industrialisés, c’est-à-dire tous ceux qui gagnent plus de 40 000 USD par an. Plus d’informations dans le Guardian ici, ici et ici et sur SRF.
Des médecins et des climatologues mettent en garde
Dans la revue « BioScience », des scientifiques ont une fois de plus publié un cri d’alarme. La publication culmine avec l’avertissement que vers la fin de ce siècle, la patrie de trois à six milliards d’êtres humains pourrait être rendue pratiquement inhabitable par des vagues de chaleur et le manque de nourriture. Les auteurs considèrent que les valeurs extrêmes de l’année 2023 font partie d’une série de 35 « signes vitaux » de la Terre. De même, le InterconnecteInterconnected Disaster Risks report 2023 de l’Université des Nations Unies conclut que le monde se dirige rapidement vers des points de basculement à plusieurs endroits.
Le rapport 2023 du Lancet examine les relations entre la santé et le changement climatique dans cinq domaines clés et fournit l’évaluation la plus récente de ces relations. Parallèlement, les professionnels de la santé ont publié un éditorial commun dans plus de 200 revues médicales en octobre. Ils y appellent à reconnaître que le changement climatique et la perte de biodiversité sont indissociables et doivent être abordés ensemble. C’est la seule façon de préserver la santé humaine et d’éviter une catastrophe mondiale. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) doit déclarer l’urgence sanitaire mondiale. Il s’agit du niveau d’alerte le plus élevé de l’OMS, qui ne s’applique actuellement qu’à la menace de la poliomyélite. Plus dans le Guardian ici et ici , l’ONU, ZDF, Spektrum et Süddeutsche Zeitung.
De nouveaux rapports de l’ONU révèlent d’énormes lacunes dans la protection du climat
Les trois nouveaux rapports d’écart de l’ONU mettent en évidence les lacunes dramatiques qui doivent être comblées dans la protection du climat.
Rapport sur l’écart des émissions
Le rapport Emissons Gap du PNUE classe les mesures prises dans le monde l’année dernière pour lutter contre le changement climatique. Il conclut que, bien que certains progrès aient été réalisés, le monde est toujours en train de se diriger vers un réchauffement d’environ 2,7 °C d’ici 2100. Selon le rapport, le monde est également sur le point de dépasser l’objectif de 1,5 °C fixé par l’accord de Paris. Pour en savoir plus, consultez Carbon Brief et Klimareporter.
Rapport sur l’écart de production
- Le rapport du PNUE sur l’écart de production montre que la plupart des pays les plus producteurs n’abandonnent pas les énergies fossiles, bien au contraire. La production mondiale de pétrole et de gaz devrait même continuer à augmenter jusqu’en 2050. Des pays comme les États-Unis, le Canada, la Russie et l’Arabie saoudite estiment qu’en 2030, ils produiront plus du double de la quantité de combustibles fossiles compatible avec une limitation du réchauffement à 1,5 degré. Si les prévisions actuelles sont exactes, les États-Unis, la Russie et l’Arabie saoudite produiront en 2030 plus de pétrole et de gaz que jamais auparavant dans leur histoire. Selon un rapport de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), si les producteurs de pétrole et de gaz veulent respecter l’accord de Paris, ils devront consacrer 50 % de leurs dépenses d’investissement aux énergies propres d’ici 2030. L’année dernière, ils n’ont dépensé que 2,5 %. Pour en savoir plus, voir le Climate Reporter, Guardian, Inside Climate News.
Rapport sur l’écart d’adaptation
Les conséquences du réchauffement climatique dans le monde sont indéniables et les coûts augmentent rapidement. Le rapport Adaptation Gap Report du PNUE évalue dans un nouveau rapport le coût des dommages causés par le changement climatique. La conclusion est décevante. Les financements internationaux pour la protection contre les vagues de chaleur, les inondations et les sécheresses ne représentent que 5 à 10 % des besoins actuels et ont même diminué ces dernières années, alors que les phénomènes météorologiques extrêmes ne cessent d’augmenter. Le professeur Saleemul Huq, éminent chercheur en adaptation décédé en octobre, a résumé la situation mondiale en ces termes : « Nous sommes désormais dans l’ère des pertes et des dommages causés par le changement climatique. Chaque jour, chaque semaine, chaque mois et chaque année, la situation va s’aggraver partout à partir de maintenant. Chaque pays sera affecté, et chaque pays est, dans une certaine mesure, non préparé ». Plus sur SRF, Guardian, New York Times (paywall).
Les poissons : les protecteurs cachés du climat
Pour finir, une chose étonnante : les poissons mésopélagiques, qui vivent dans les océans entre 200 et 1.000 mètres de profondeur environ, apportent une contribution importante, encore trop peu étudiée, au stockage du carbone. Chaque jour, environ 90 % de tous les poissons (en poids) de l’océan migrent des profondeurs vers la surface pour se nourrir. Ce faisant, ils consomment d’énormes quantités de plancton. Ils le digèrent et le rejettent en profondeur, où il tombe au fond de l’océan et se fixe dans les sédiments. Les scientifiques veulent maintenant découvrir combien de carbone ces poissons stockent avant que ces zones plus profondes ne soient également victimes de la pêche. Plus d’informations dans Hakei Magazine.
Actif contre le désespoir
« L’avenir est fait de courage », écrit Ronja von Wurmb-Seibel dans son livre « Wie wir die Welt sehen – Was negative Nachrichten mit unserem Denk machen und wie wir sich befreit davon » (2022). Pour que vous ne soyez pas complètement abattus par toutes ces mauvaises nouvelles, nous voulons désormais terminer notre journal climatique par une rubrique contre le désespoir. Vous y trouverez des conseils contre le blues climatique et des informations sur la manière dont vous pouvez vous engager.
En bonne compagnie
- Nous ne pouvons aborder la crise climatique qu’ensemble. Il est important d’en parler sans cesse, même avec des personnes qui ne sont peut-être pas très intéressées ou même sceptiques. Par exemple avec les proches lors du repas de Noël. A cela s’ajoutent ces conseils de discussion et ces conseils généraux de Psychologist4Future.
Et ils sont très nombreux à s’engager. Le journal en ligne Republik a par exemple lancé une nouvelle initiative pour le climat : Republik – Challenge accepted : La crise climatique est là. La situation est grave. Ensemble, nous nous penchons sur la question : Comment sortir de cette crise ? De manière curieuse, critique et constructive. Avec des articles, des débats, des événements en continu.
https://www.republik.ch/challenge-accepted
Devenir actif
En ce moment, les initiatives populaires suisses suivantes sont en cours.
- L’initiative pour le climat demande la création d’un fonds climatique financé par la caisse fédérale (0,5 à 1% du PIB, soit 3,5 à 7 milliards de francs par an). Cet argent doit servir à financer des mesures climatiques telles que l’énergie solaire, l’assainissement des bâtiments (la Suisse a plus de chauffages au mazout que tout autre pays européen). La sécurité de l’approvisionnement devrait ainsi également être améliorée. Les Etats-Unis ont créé un fonds similaire, de même que l’UE, dans le cadre de son New Green Deal.
- L’Initiative pour l’avenir veut un nouvel impôt sur les successions pour les investissements dans la transition énergétique et la protection du climat. Les premiers 50 millions restent exonérés d’impôts, ensuite le taux d’imposition est de 50 pour cent.
- En outre, un référendum national est en cours contre l’extension des autoroutes décidée par le Parlement (coût : 5,3 milliards de francs).
Merci et meilleures salutations de la part d’Anja et Thomas !
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Suisse
Les citoyens ont également voté pour la loi sur le climat
Mi-juin, la loi sur la protection du climat, le contre-projet indirect à l’initiative sur les glaciers, a été acceptée par 59% des votants. L’analyse Vox de l’institut de recherche GFS Berne montre que la loi a désormais également été approuvée par la majorité des électeurs proches du PLR (66%) et du centre (64%). Dans les milieux du centre et du PLR, le besoin urgent d’agir dans le domaine de la protection de l’environnement et du climat a été une raison fréquente de voter oui. Avec 42,5 %, la participation a été nettement plus faible qu’en 2021 lors de la votation sur la loi CO2 (59,7 %), qui avait été rejetée. Selon GFS Bern, la participation était surtout nettement plus faible chez les personnes qui se positionnent à droite, voire à l’extrême droite. Plus d’informations sur srf.ch.
La mise en œuvre de la loi sur la protection du climat pourrait toutefois être retardée. Le conseiller fédéral Rösti ne veut pas que la loi sur la protection du climat entre en vigueur avant 2025, ce que critiquent les initiateurs de l’initiative sur les glaciers. Ils estiment que l’ordonnance nécessaire pourrait déjà être adoptée d’ici avril 2024. Celle-ci doit notamment concrétiser la manière dont les subventions pour le remplacement des chauffages fossiles et le développement de nouvelles technologies seront versées. Plus d’informations dans le Blick.
Dans le magazine du Tages-Anzeiger (paywall), Marcel Hänggi, co-initiateur de l’initiative pour les glaciers et membre de l’équipe de campagne pour la loi sur la protection du climat, écrit sur sa rencontre avec le conseiller national UDC Michael Graber, qui a dirigé la campagne du non. Il y expose à quel point leurs points de vue divergent sur des faits fondamentaux concernant le changement climatique, mais reconnaît néanmoins des points communs.
Le Conseil des Etats est découragé par la loi sur le CO2
Dans le cadre de la loi sur le CO2 , le Conseil des Etats se contente d’incitations pour réduire de moitié les émissions de gaz à effet de serre par rapport à 1990. Il renonce à des interdictions et à des taxes plus élevées pour atteindre l’objectif. C’est ce que le Conseil fédéral avait déjà proposé dans son message sur la loi. Après le non de justesse à la loi sur le CO2 en 2021, le Conseil fédéral a misé sur une protection du climat aussi indolore que possible, avec des subventions et des incitations.
Le Conseil des Etats a fait de nouvelles concessions par rapport à la proposition du Conseil fédéral (voici les mesures en détail). Ainsi, un tiers de la réduction de CO2 devrait être atteint avec des certificats de protection climatique à l’étranger. Le Conseil fédéral avait proposé un plafond de 25%. Diverses études montrent que ces projets n’ont généralement que peu ou pas d’effet. Le site Tages-Anzeiger (paywall) calcule que la part qui devrait être compensée à l’étranger est même d’environ 60% si l’on ne considère que les années 2025 à 2030, c’est-à-dire la durée de validité de la nouvelle loi sur le CO2 .
Le Conseil des Etats veut également moins de protection climatique sur d’autres points. Ainsi, les voitures nouvellement immatriculées en 2030 pourront émettre à hauteur de 45% des émissions de gaz à effet de serre de 2021. La commission consultative avait demandé une réduction de 75%, le Conseil fédéral de 55%. Le Programme Bâtiments devrait ainsi disposer de moins d’argent provenant de la taxe sur le CO2 . En outre, il est prévu de renoncer à la promotion des stations de recharge pour les voitures électriques dans les immeubles collectifs et les entreprises. Plus d’informations sur srf.ch, Tages-Anzeiger, Wochenzeitung (paywall) et nau.ch. Le magazine en ligne Lamm explique la loi CO2 dans une série de podcasts en trois parties.
La proposition du Conseil des Etats suscite des critiques. Dans le Blick, Reto Knutti, chercheur en climatologie à l’ETHZ, prévient que les mesures approuvées par le Conseil des Etats ne permettront pas d’atteindre les objectifs climatiques à long terme. L’association économique swisscleantech critique également les mesures décidées par le Conseil des Etats, les jugeant insuffisantes. Selon elle, le Conseil mise sur des compensations à l’étranger, alors que la population a accepté en juin la loi sur la protection du climat. L’association demande au Conseil national, qui va maintenant considérer la loi, de fixer un objectif national et de renforcer l’incitation par une augmentation progressive de la taxe CO2 sur les combustibles.
Alors que le Conseil des Etats veut renoncer aux interdictions, les cantons misent sur cet instrument : selon le Tages-Anzeiger, ils veulent interdire les nouveaux chauffages à énergie fossile au plus tard à partir de 2030. C’est ce que propose la Conférence des directeurs cantonaux de l’énergie (EnDK). Cette mesure fait partie d’une révision globale des modèles de prescriptions énergétiques pour les cantons.
Critique croissante des compensations de CO2
Alors que le Conseil des Etats mise davantage sur les compensations à l’étranger dans le cadre de la loi sur le CO2 , les critiques à l’encontre de cet instrument se multiplient. Des chercheurs de l’ETH reprochent à la Suisse d’encourager des échecs connus en matière de développement afin d’atteindre ses objectifs climatiques. Ils examinent un programme dirigé par la Suisse au Malawi, en Afrique du Sud-Est, qui implique des installations de biogaz chez des producteurs laitiers. Celles-ci doivent transformer le fumier de vache en biogaz, qui peut être utilisé pour la cuisson ou la production d’électricité. Les émissions ainsi économisées peuvent être créditées à la Suisse. La Suisse a conclu des accords similaires à celui avec le Malawi avec plus de dix autres pays, dont le Pérou, le Ghana, le Sénégal et le Vanuatu (voir ici la liste complète). Les chercheurs mettent en garde contre le fait que de telles installations de biogaz sont encouragées depuis des années par de nombreuses organisations, alors qu’elles tombent en panne après peu de temps dans la majorité des cas. Elles manquent d’eau, de ressources, ou de savoir-faire pour les exploiter et les entretenir. Plus d’informations à ce sujet dans la NZZ (paywall).
2023 ne sera probablement pas une élection climatique
Il y a quatre ans, les Verts et les Vert’libéraux ont gagné ensemble 26 sièges supplémentaires a Conseil national et au Conseil des Etats. Cela ne se reproduira pas le 22 octobre, lorsque les élections fédérales auront lieu. Selon le baromètre électoral de la RTS publié le 11 octobre, l’UDC (2,5 points de pourcentage) et le PS (1,5) gagnent du terrain. Les Verts (-3,5), les Vert’libéraux et le PLR (1 point chacun) perdront des voix. Les 32’000 personnes interrogées ont cité les primes d’assurance maladie (51%), le changement climatique (36%) et l’immigration (35%) comme les trois principaux défis politiques. Le sondage électoral réalisé par Tamedia à la mi-septembre a dressé un tableau similaire. Selon l’analyse de la NZZ (paywall), la répartition des sièges au Conseil national et au Conseil des Etats n’entraînera toutefois qu’un changement relativement léger vers la droite.
En 2019, quelque 100’000 personnes ont participé à la manifestation pour le climat à Berne juste avant les élections. Cette année, fin septembre, ils étaient environ 60’000 à réclamer davantage de protection du climat. En vue des élections, l’Alliance pour le climat, qui a organisé la manifestation, a exigé « un parlement qui prenne la crise climatique au sérieux ». Plus d’informations sur srf.ch.
La Fondation suisse de l’énergie (Schweizerische Energie-Stiftung, SES) a analysé les positions des six principaux partis en matière de politique énergétique. A l’exception de l’UDC, le tournant énergétique a été adopté par tous les partis. La SES constate toutefois l’absence de certains thèmes dans les programmes électoraux et les prises de position des partis. Ainsi, les partis ne se prononcent ni sur le démantèlement du réseau de gaz fossile ni sur un calendrier contraignant de fermeture des centrales nucléaires. Les Verts sont également le seul parti à miser sur la suffisance pour atteindre les objectifs climatiques.
Décret manteau : plus d’énergie renouvelable et de pression sur l’environnement
Lors de la session d’automne, le Conseil national et le Conseil des Etats se sont mis d’accord sur l’acte modificateur unique (loi fédérale sur la sécurité de l’approvisionnement en électricité grâce aux énergies renouvelables). Des objectifs contraignants de développement des énergies renouvelables sont ainsi fixés. Les nouvelles énergies renouvelables, principalement le solaire et l’éolien, doivent fournir 35 térawattheures (TWh) par an d’ici 2035, et 45 TWh d’ici 2050. Actuellement, les besoins annuels en électricité de la Suisse s’élèvent à 60 TWh. En contrepartie, la pression exercée sur la nature va augmenter. Dans les régions qui se prêtent à l’exploitation de l’énergie solaire et éolienne, les installations énergétiques devront avoir la priorité sur la protection de l’environnement et d’autres intérêts nationaux. La protection des biotopes d’importance nationale sera affaiblie par des dispositions d’exception, concrètement sur les tronçons à débit résiduel dans les zones alluviales protégées à l’échelle nationale et sur les contreforts des glaciers.
Les députés se sont également mis d’accord sur les deux points qui ont fait l’objet de divergences jusqu’à la fin : le débit résiduel et l’obligation d’installer des panneaux solaires. L’obligation de l’énergie solaire pour les nouvelles constructions a été rejetée, seuls les grands toits et les façades devront à l’avenir être équipés de panneaux solaires. Le PS et les Verts s’étaient engagés en vain en faveur d’une obligation générale d’installer des panneaux solaires sur les toits et les façades des nouvelles constructions et des rénovations de grande échelle. Les centrales hydroélectriques ne pourront réduire les débits résiduels qu’en cas de menace de pénurie d’électricité.
Pour parvenir à un compromis, le PBD comme la gauche ont dû faire des concessions. Le conseiller national du centre Nicolo Paganini a bien résumé l’ambiance : « A la fin des négociations, personne n’est malheureux, mais personne n’est non plus totalement satisfait ». Plus d’informations sur srf.ch, le Tages-Anzeiger, la NZZ (paywall) et la Wochenzeitung.
L’association économique swisscleantech salue le fait que le Parlement ait « posé les jalons d’un approvisionnement en électricité sûr et renouvelable ». La Fondation suisse de l’énergie (SES) soutient également la loi, mais regrette les reculs en matière de protection de la nature.
Une centrale à accumulation mentionnée dans l’acte modificateur unique fera l’objet de discussions : le projet Gornerli près de Zermatt. Avec 14 autres installations, il devrait permettre de disposer de plus d’électricité en hiver. La Fondation pour la protection du paysage a déjà annoncé dans la NZZ (paywall) qu’elle combattrait par tous les moyens ce projet qui empiéterait sur l’une des dernières zones glaciaires intactes.
L’Alliance Nature & Paysage Suisse veut lancer un référendum contre l’acte modificateur unique. Hans Weiss, ancien directeur de la Fondation pour la protection et l’aménagement du paysage, et Philippe Roch, ancien directeur de l’Office fédéral de l’environnement, sont les membres fondateurs de la nouvelle organisation. Ils ont jusqu’au 18 janvier pour récolter 50 000 signatures. L’alliance critique le fait que le décret manteau viole la Constitution. L’intérêt public de la protection du paysage serait à l’avenir moins important que la construction de grandes installations de production d’électricité. Ils se sont appuyés sur les déclarations du professeur Alain Griffel, spécialiste du droit public à l’université de Zurich – un portrait de lui dans la NZZ am Sonntag (paywall). Les grandes organisations de protection de la nature ne veulent pas soutenir le référendum.
Électricité solaire : une initiative, de nouveaux projets et un refus du Valais
Les Verts veulent introduire l’obligation d’installer des panneaux solaires, à laquelle le Parlement a renoncé dans l’acte modificateur unique, par le biais d’une initiative populaire. L’initiative « solaire » lancée en août exige qu’un an après son adoption, des modules PV soient installés sur les nouvelles constructions et les rénovations de toitures. Après 15 ans, une installation solaire doit également être installée sur les maisons existantes en Suisse. Font exception les cas où l’installation est incompatible avec la protection des monuments ou disproportionnée pour d’autres raisons. Selon le Tages-Anzeiger (paywall), le PS soutient la proposition.
L’Association des entreprises électriques suisses (AES) a compilé le fait que 36 installations solaires alpines sont déjà prévues (état fin août). Elles veulent toutes profiter des fonds fédéraux du « Solar-Express ». Selon le Tages-Anzeiger (paywall), Axpo veut créer un parc solaire à Hoch-Ybrig, dans le canton de Schwyz. Sur une surface de 12 terrains de football, 12 gigawattheures d’électricité devraient être produits chaque année, ce qui correspond à la consommation de 2600 ménages. Les services industriels d’Interlaken étudient une installation solaire nettement plus grande sur le lac de Brienz : pour produire environ 100 gigawattheures d’électricité solaire, il faudrait installer des modules photovoltaïques flottants sur une surface de 250 terrains de football, écrit le Berner Zeitung (paywall). A Meiringen-Hasliberg, le fournisseur d’énergie bâlois IWB prévoit, selon le Berner Zeitung, une installation qui devrait fournir de l’électricité à 4500 ménages. Et à Savognin GR, l’EWZ veut construire une installation pour fournir de l’électricité à 20 000 foyers, selon le Tages-Anzeiger (paywall).
Les premiers projets ont entre-temps reçu l’accord des communes d’implantation. Selon le Tages-Anzeiger, une courte majorité des électeurs de Scuol (GR) a approuvé le projet d’installation solaire alpine « ScuolSolar ». L’installation, dont le coût s’élève à 100 millions de francs, doit fournir de l’électricité à 20 000 ménages. A Poschiavo (GR), les électeurs se sont également prononcés de justesse en faveur d’une installation au col de la Bernina. Là aussi, 20 000 ménages devraient bénéficier d’une production d’électricité solaire. Les associations de protection de l’environnement s’opposent au projet, qui se situe entre un marais d’importance nationale et une réserve naturelle nationale. Entre-temps, les deux entreprises d’électricité Repower et EWZ, qui avaient d’abord manifesté leur intérêt, se sont retirées. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger (paywall) et dans la NZZ (paywall).
Le refus de l’électorat valaisan d’accélérer les autorisations pour les grandes centrales solaires alpines a fait les gros titres et suscité de nombreuses discussions. Les Verts avaient lancé un référendum contre la loi adoptée par le parlement cantonal. Cette votation était un premier test pour le « Solar-Express » décidé au pas de charge par le Parlement. Le non indique que beaucoup craignent la construction de centrales solaires dans un environnement montagneux intact, sans qu’il soit possible de déposer des recours.
Le non valaisan à la loi sur l’énergie solaire a été l’occasion pour les partisans de l’énergie nucléaire d’exiger une prolongation de la durée de vie des installations existantes ainsi que la construction de nouvelles centrales. Plus d’informations à ce sujet dans le Tages-Anzeiger (ici et ici), la NZZ (paywall) et la Wochenzeitung.
A propos de l’énergie nucléaire : une étude de l’ETHZ sur l’approvisionnement en électricité de la Suisse, commandée par l’association économique Economiesuisse, a suscité le débat. L’étude se base sur l’hypothèse que d’ici 2025, les énergies solaire et éolienne fourniront environ 30% de moins que ce qui a été estimé par les politiques. Pour la NZZ (paywall), l’étude montre que l’approvisionnement en électricité sera d’autant plus avantageux, stable et sûr que les quatre centrales nucléaires existantes fonctionneront longtemps. La tendance de l’étude est également positive en ce qui concerne la construction d’une nouvelle centrale nucléaire. Dans le Tages-Anzeiger (paywall), Christian Schaffner, coauteur de l’étude, est en désaccord. Dans les scénarios étudiés, le développement des énergies renouvelables, en particulier du photovoltaïque, est le pilier central. La construction d’une nouvelle centrale nucléaire serait la variante la plus chère et comporterait de grandes incertitudes quant aux coûts de construction et au calendrier.
Critique des centrales de réserve fossiles
Le Conseil fédéral veut qu’en plus des centrales hydroélectriques, de nouvelles centrales de réserve, des groupes électrogènes de secours et des installations de couplage chaleur-force puissent participer à la réserve d’électricité. La loi sur l’approvisionnement en électricité doit être adaptée en conséquence ; la consultation à ce sujet est ouverte jusqu’au 20 octobre 2023. La Fondation suisse de l’énergie (SES) et le WWF rejettent les adaptations proposées. Les deux ONG critiquent le fait que le Conseil fédéral se concentre sur l’extension des centrales électriques fossiles et qu’avec le projet de loi, il ouvre la porte à l’exploitation de ces centrales. La crise climatique ne permet pas d’investir davantage dans l’infrastructure énergétique fossile. De plus, la Suisse dispose déjà aujourd’hui d’une énorme puissance de réserve sans centrales fossiles de réserve. La SES et le WWF critiquent en outre le fait que le Conseil fédéral veuille renoncer aux ventes aux enchères pour réduire la consommation. L’association energie-wende-ja rejette également la révision et critique le fait que des investissements soient ainsi réalisés pour des capacités de réserve non nécessaires. Les moyens financiers pourraient être utilisés de manière plus appropriée pour le développement de la production d’électricité renouvelable et des technologies et capacités de stockage, dont le besoin est urgent.
Des milliards pour l’extension des autoroutes
Le réseau autoroutier suisse doit être développé à hauteur de 5,3 milliards de francs. Le Parlement s’est mis d’accord sur ce point lors de la session d’automne. L’A1 doit être élargie à huit voies entre Berne-Wankdorf et Schönbühl (BE), à six voies entre Schönbühl et Kirchberg (BE) et entre Le Vengeron (GE) et Nyon (VD). Des tunnels autoroutiers seront en outre construits à Saint-Gall, Schaffhouse et Bâle. Les partisans ont soutenu que cela permettrait d’éviter les embouteillages. Une minorité a évoqué en vain les résultats de la recherche sur la mobilité, selon laquelle la conduite automobile devient plus attrayante à court terme grâce à des capacités supplémentaires. Mais par la suite, davantage de personnes utiliseraient la voiture, ce qui provoquerait à nouveau des embouteillages. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger (paywall) et dans la NZZ (paywall).
L’Association Transports et Environnement (ATE) et l’association Umverkehr ont lancé un référendum contre l’extension des autoroutes. L’extension est obsolète et trop chère. Ils estiment qu’après l’approbation de la loi sur la protection du climat, il convient plutôt de marquer un temps d’arrêt dans la construction routière. Le délai pour récolter 50’000 signatures pour le référendum s’étend jusqu’au 18 janvier 2024. Plus d’informations sur watson.ch.
Un autre tronçon de l’A1 sera élargi à six voies à partir du printemps 2024 : celui entre Luterbach et Härkingen dans le canton de Soleure. En 2015, le Conseil fédéral avait fixé les conditions de l’élargissement. En décembre 2020, le Département des transports a rendu une décision d’approbation des plans, ce qui correspond à une autorisation de construire. Des recours ont été déposés auprès du Tribunal administratif fédéral, qui les a rejetés ou n’en a accepté qu’une partie, comme l’a indiqué l’Office fédéral des routes (OFROU).
Le principe de transparence des coûts ne s’applique pas au trafic routier, comme l’a montré une nouvelle fois un débat au Grand Conseil zurichois. Il y a onze ans, un député GLP avait demandé par le biais d’une initiative parlementaire que la transparence des coûts soit appliquée au trafic routier. L’intervention a été clairement rejetée, comme l’écrit la NZZ (paywall). Les nouveaux calculs de l’Office cantonal de la mobilité sur les coûts externes du trafic routier n’ont rien changé. Rien que dans le canton de Zurich, les dommages climatiques et environnementaux, les atteintes à la santé, les pertes de récoltes dans l’agriculture ainsi que les dommages aux bâtiments représentent un peu plus de 1,2 milliard de CHF de coûts non considérés. Si ces coûts étaient répercutés sur les taxes de circulation, comme le demandait l’initiative, l’impôt sur les véhicules à moteur passerait de 400 francs en moyenne par voiture aujourd’hui à 2000 francs par an.
Températures record et recul des glaciers
L’été 2023 a été en Suisse le cinquième plus chaud depuis le début des mesures en 1864. La moyenne des températures de juin à août a été supérieure de 1,6 °C à la norme 1991-2020 dans l’ensemble du pays, comme le constate MétéoSuisse dans son bulletin climatique. Par rapport à la période préindustrielle 1871-1900, des températures supérieures de 2,3 °C ont été mesurées en été. Ce qui est frappant, c’est l’accumulation d’étés chauds ces dernières années : 2015, 2017, 2018,2019, 2022 et maintenant 2023.
L’automne a également commencé beaucoup trop chaud : le mois de septembre a été le plus chaud en Suisse depuis le début des mesures, écrit MétéoSuisse. La moyenne nationale était de 14,3 °C. C’est 3,8 °C de plus que la norme 1991-2020. Les spécialistes du climat parlent d’un saut quantique. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger et sur srf.ch. Un temps anticyclonique ensoleillé et persistant durant la première moitié du mois de septembre a contribué à ce résultat; plus d’informations sur ce fameux anticyclone Omega dans le Tages-Anzeiger (paywall).
Cette année encore, les températures records ont eu raison des glaciers. En 2023, ils ont perdu 4% de leur volume, comme le montrent les derniers chiffres de la Commission suisse pour l’observation de la cryosphère. Il s’agit du deuxième plus fort recul depuis le début des mesures. L’année précédente, la perte avait atteint 6%. Au cours de ces deux années extrêmes, les glaciers suisses ont donc perdu 10% de leurs glaces. Les raisons de la fonte des glaciers de cette année sont les mêmes que celles de l’année précédente : peu de neige en hiver et des températures plus élevées en été. Pour en savoir plus, consultez le Tages-Anzeiger (ici et ici), la NZZ (paywall) et le Spiegel.
Grèves climatiques ont conduit à des changements de comportement
Près d’un tiers des Suisses ont changé leurs habitudes quotidiennes suite à la grève climatique Fridays for Future lancée par Greta Thunberg. Une étude de l’EPFL montre qu’environ 30% des personnes interrogées ont changé leurs habitudes de transport, d’achat et de recyclage suite aux protestations. Pour cette étude, quelque 1200 personnes âgées de 18 à 74 ans n’ayant pas participé aux grèves ont été interrogées à la suite des manifestations d’octobre et de novembre 2019. Les chercheurs voulaient ainsi déterminer si le mouvement avait entraîné des changements concrets de comportement. Les personnes interrogées ont déclaré avoir davantage cherché des alternatives à la voiture pour se rendre au travail et avoir mangé plus souvent végétarien. Selon les auteurs de l’étude, les résultats montrent que les protestations ont rendu les gens plus conscients de l’impact de leur comportement sur l’environnement et que des changements importants sont en cours au niveau individuel. Plus d’informations dans le Blick et sur Euronews.
La Confédération veut promouvoir une alimentation non-animale
La Confédération s’engage pour une alimentation plus respectueuse du climat. La « Stratégie Climat pour l’agriculture et l’alimentation 2050 » vise à soutenir les mesures d’adaptation du secteur agroalimentaire au changement climatique et de réduction des gaz à effet de serre. Aujourd’hui, les aliments sont responsables d’environ un quart des gaz à effet de serre émis par les ménages. D’ici 2050, les gaz à effet de serre générés par l’alimentation par habitant devraient être réduits de deux tiers par rapport à 2020. Les émissions de gaz à effet de serre de la production agricole nationale doivent être réduites d’au moins 40% par rapport à 1990. La stratégie renonce aux interdictions et mise plutôt sur l’information et la sensibilisation. Cela doit notamment permettre de réduire la consommation de viande en Suisse. Les organisations de protection de l’environnement critiquent l’horizon temporel de 2050 et doutent que les mesures proposées soient suffisantes. L’Union des paysans craint que la Confédération ne tente de limiter la production animale et d’orienter la consommation. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger et la NZZ (paywall).
Politique climatique internationale
La protection du climat progresse, mais trop lentement
Huit ans après la conclusion de l’Accord de Paris, des progrès ont été réalisés en matière de protection du climat, mais ils sont loin d’être suffisants. Le nouveau rapport Global Stocktake synthesis (inventaire mondial) de la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) examine dans quelle mesure les pays ont tenu leurs promesses en matière de climat. Lors de l’adoption de l’Accord de Paris, les pays se sont mis d’accord pour se réunir tous les cinq ans à partir de 2023 afin d’évaluer les mesures de protection du climat des pays et de négocier s’il convient de renforcer les efforts. Le nouveau rapport s’inscrit dans ce processus.
Par rapport aux prévisions faites avant l’adoption de l’Accord de Paris, ce dernier a conduit à la définition de nouvelles contributions déterminées au niveau national (CDN) qui réduiraient considérablement le réchauffement futur. Mais cela ne suffit pas pour atteindre les objectifs à long terme de l’Accord de Paris. Selon le rapport, le monde se dirige vers un réchauffement d’environ 2,5 degrés d’ici 2100 avec les engagements climatiques actuels – à condition que les pays s’y tiennent. Pour en savoir plus, consultez le New York Times (paywall) et Climate Change News.
Selon le Fonds monétaire international (FMI), les coûts sociaux et économiques des effets de la crise climatique devraient pousser certains pays à un haut niveau de dette publique. Le FMI a publié un rapport à ce sujet. Celui-ci appelle les gouvernements à taxer les émissions de gaz à effet de serre et à accorder un « rôle plus décisif » au financement privé afin de lever des fonds pour la réduction nécessaire des émissions et pour couvrir les coûts croissants des pertes et dommages liés à la crise climatique.
Résultat mitigé pour le sommet du G20
Le sommet du G20 a débuté un jour seulement après la publication du rapport de synthèse de la CCNUCC sur l’inventaire mondial. Les résultats de la réunion ont été mitigés. Parmi les points positifs, les plus grandes économies se sont mises d’accord pour tripler les capacités d’énergie renouvelable d’ici 2030. Parallèlement, il a été constaté que les pays en voie de développement ont besoin d’un financement rentable pour la transition énergétique. L’admission de l’Union Africaine – une coalition de 55 États – en tant que membre permanent du G20 a également été importante. Cela signale une plus grande représentation de l’hémisphère Sud au sein du forum international.
Les pays ne sont toutefois pas parvenus à se mettre d’accord sur une formulation relative à l’abandon des combustibles fossiles. Dans la déclaration de Delhi, les pays sont invités à « accélérer les efforts visant à éliminer progressivement la production toujours aussi intense d’électricité à partir de charbon ». Les chefs d’État et de gouvernement s’étaient déjà mis d’accord sur exactement la même phrase lors de leur dernière réunion à Bali il y a dix mois.
Un nouveau rapport d’Oxfam compare les objectifs climatiques des pays du G20 et conclut que les pays à hauts revenus du G20 et de l’UE ont des objectifs climatiques bien inférieurs à une part équitable des réductions d’émissions requises au niveau mondial. Cela remet en question l’affirmation du G-7 selon laquelle ses plans d’émission sont suffisants et que la responsabilité principale incombe aux pays à revenus moyens. Plus d’informations dans la Déclaration des leaders de New Delhi, sur Climate Change News et DownToEarth.org.
Le pape parle clairement
Le pape François a publié une mise à jour de son encyclique sur l’environnement de 2015 (Laudate deum). Il y met en garde contre les dommages irréversibles qui sont déjà infligés aux humains et à la planète. Il y déplore qu’une fois de plus, ce sont les pauvres et les plus faibles du monde qui paient le plus lourd tribut. « Nous devons surmonter la mentalité qui se montre préoccupée mais qui n’a pas le courage d’apporter des changements essentiels. Nous ne sommes plus en mesure d’arrêter les énormes dégâts que nous avons causés. Il nous reste à peine le temps d’éviter des dommages encore plus tragiques », a-t-il ainsi averti . Plus sur Associated Press.
L’industrie des énergies fossiles reçoit 13 millions de dollars de subventions chaque minute
Le Fonds monétaire international (FMI) rapporte que les énergies fossiles ont bénéficié de 7 trillions (soit 1 000 000 000 000) de dollars de subventions publiques dans le monde en 2022. 20% de ce montant sont des subventions directes, telles que des réductions de prix pour les consommateurs, qui ont doublé depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie. 80% du montant calculé sont des subventions dites « implicites ». Il s’agit de coûts que les consommateurs ne paient pas directement, comme les dommages à la santé et à l’environnement. Les subventions accordées aux industries du pétrole, du gaz et du charbon représentent aujourd’hui 7% du PIB mondial et dépassent de loin les 4% que le monde consacre à l’éducation. Plus d’informations du FMI et du Guardian.
La politique climatique contradictoire des États-Unis
Dans la dernière newsletter sur le climat, nous avons évoqué la politique énergétique et climatique de la Chine. La politique climatique des Etats-Unis est elle aussi marquée par des contradictions et des oppositions. Jamais les Etats-Unis n’ont produit autant de pétrole qu’en ce mois de septembre. En parallèle, le président Biden a qualifié le changement climatique de « menace existentielle » et a annoncé la création d’un corps de protection du climat. Une prévision d’Oil Change International montre que les États-Unis seront responsables de plus d’un tiers de l’expansion totale des combustibles fossiles prévue d’ici 2050. Ces contradictions ne sont pas nouvelles. Lorsque les États-Unis ont participé aux négociations de l’accord de Paris en 2015, ils ont levé l’interdiction d’exporter du pétrole brut le même mois. Aujourd’hui, les Etats-Unis sont le premier producteur mondial de pétrole et le premier exportateur de gaz naturel liquéfié. Mais en raison de la croissance fulgurante de l’extraction du gaz de schiste, les États-Unis produisent aussi nettement moins d’électricité à base de charbon. De ce fait, les émissions du pays ont baissé de près de 20 % depuis 2005.
L’Inflation Reduction Act est de loin l’investissement le plus important que le pays ait jamais réalisé dans les énergies renouvelables. Pourtant, même les prévisions les plus optimistes quant aux effets de la loi ne permettent guère d’espérer une diminution de la production de combustibles fossiles au cours de la prochaine décennie. C’est la raison pour laquelle tant les activistes climatiques de plus en plus frustrés que les politiciens plus modérés adoptent une ligne beaucoup plus conflictuelle vis-à-vis de l’industrie des combustibles fossiles, comme le montre la dernière action en justice pour le climat en Californie (voir article suivant). Plus d’informations dans le New York Times (paywall).
La Californie porte plainte contre les « mensonges de Big Oil »
L’Etat américain de Californie poursuit en justice les groupes pétroliers et gaziers et veut les faire participer aux coûts du changement climatique. Selon la plainte, elles mènent depuis 50 ans une campagne de désinformation visant à dissimuler l’impact des énergies fossiles sur le climat. La Californie poursuit en justice cinq multinationales du pétrole (Exxon, Shell, BP, Conoco Phillips et Chevron), ainsi que l’association professionnelle American Petroleum Institute. L’objectif est de créer, avec les éventuelles pénalités payées par les entreprises, un fonds qui couvrira les coûts des catastrophes environnementales lorsqu’il est prouvé qu’elles surviennent ou sont aggravées par les conséquences du changement climatique, comme les incendies de forêt ou les inondations. Les multinationales du pétrole n’ont jamais eu d’adversaire aussi puissant : la Californie sera bientôt la quatrième puissance économique (après les Etats-Unis, la Chine et le Japon). Elle est en outre le premier Etat producteur de pétrole à porter plainte contre les entreprises. Plus sur Klimareporter.
Des jeunes gagnent un procès sur le climat aux Etats-Unis
Aux États-Unis, un groupe de jeunes du Montana âgés de 5 à 22 ans a gagné un procès sur le climat. Le jugement garantit un « droit constitutionnel fondamental à un environnement propre et sain, dont le climat fait partie ». L’État du Montana possède l’une des constitutions les plus avancées des États-Unis, qui garantit le droit à un environnement propre. Les jeunes ont porté plainte contre une révision de la loi environnementale du Montana. Le gouvernement républicain avait fait passer une révision de la loi qui interdisait aux autorités publiques de prendre en compte les émissions de gaz à effet de serre ou le changement climatique lors de l’approbation de grands projets énergétiques. Le juge a estimé que cette révision était anticonstitutionnelle.
C’est la première fois qu’un tribunal américain décide qu’un gouvernement a violé les droits des enfants en ignorant le changement climatique. Il existe 23 États qui ont inscrit des droits similaires dans leur constitution, de sorte que ce jugement pourrait ouvrir la voie à une série de contestations similaires au niveau des États. Le jugement n’est pas encore définitif et l’état du Montana peut faire appel. Pour en savoir plus, voir APNews, ARD Tagesschau, Washington Post et The Nation.
De plus en plus de plaintes pour le climat dans le monde
Dans le monde entier, les procédures juridiques pour manque de mesures de protection du climat ont nettement augmenté ces dernières années. La plupart se sont déroulées et se déroulent encore aux Etats-Unis, mais plusieurs ont également eu lieu en Allemagne, comme l’a montré une étude du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) en juillet. En 2022, près de 2200 actions en justice pour le climat ont été entendues. En 2017, ce chiffre s’élevait à 900. Une grande partie des plaintes n’a pas été acceptée ou a été rejetée par les tribunaux, mais des jugements importants ont été rendus en faveur des plaintifs, notamment en Allemagne et aux Pays-Bas. Plus d’informations sur Klimareporter.
Le Brésil renforce son objectif climatique et augmente sa production de pétrole
Au Brésil aussi, la politique climatique est contradictoire. Le gouvernement brésilien s’est déclaré prêt à revenir sur l’affaiblissement de l’objectif climatique entrepris par l’ancien président Jair Bolsonaro et à travailler sur un nouvel objectif climatique amélioré. Parallèlement, le pays est en train de devenir le quatrième producteur mondial de pétrole. La production de pétrole du pays ne cesse d’augmenter. Le pays dispose d’importantes réserves et intensifie ses activités d’exploration et de forage. Pour en savoir plus, consultez Oil Price.com.
Les Équatoriens stoppent l’exploitation pétrolière dans le parc national de Yasuní
Les électeurs équatoriens ont voté, lors d’un référendum historique, pour l’arrêt de tous les nouveaux forages pétroliers dans le parc national amazonien Yasuní. Le vote sur le Yasuní a été le résultat de deux décennies de travail de fond des activistes et des organisations autochtones. Ainsi, 726 millions de barils de pétrole resteront sous terre dans le parc national Yasuní. Le parc national est l’une des régions les plus riches en biodiversité de la planète et abrite les communautés Tagaeri et Taromenane, deux des dernières communautés autochtones au monde qui n’ont aucun contact avec le monde extérieur. Plus d’informations dans le Guardian, chez Conservation et APNews.
La compensation climatique reste critiquée
Les projets qui protègent les forêts existantes (REDD+) sont ceux qui génèrent le plus de certificats sur le marché volontaire du carbone – environ un quart de tous les crédits à ce jour. Dans le cadre de ces projets, les gouvernements, les organisations, les communautés et les individus dans les zones forestières (principalement dans les régions tropicales de l’hémisphère Sud) sont payés pour des activités qui préservent la forêt et évitent des émissions de gaz à effet de serre. Pourtant, de nombreuses études et rapports montrent qu’une grande partie de ces projets ne sont que peu utiles au climat.
Un exemple est le projet Tumring, qui vise à protéger une zone de forêt tropicale dans l’un des principaux hotspots de biodiversité du Cambodge. Un nouveau rapport d’Unearthedt révèle toutefois clairement que la forêt de Tumring est déboisée à une échelle bien plus importante que ne le montrent les documents officiels. Le rapport fait également état d’une série d’autres projets REDD de faible qualité.
Une nouvelle étude publiée dans la revue Science montre que des millions de certificats issus de tels projets forestiers (approuvés par Verra, le leader mondial en matière de certification) sont en grande partie sans valeur. S’ils sont utilisés pour des compensations, ils peuvent aggraver le réchauffement climatique, car les acheteurs ne prennent pas de mesures de protection du climat et atteignent malgré tout leurs objectifs climatiques sur le papier. Carbon Market Watch a publié un examen détaillé des principales méthodes REDD+ utilisées sur le marché volontaire du carbone et parvient à une conclusion similaire.
Les investisseurs qui spéculent sur les crédits carbone pourraient perdre des milliards. En effet, de plus en plus d’études scientifiques montrent que de nombreux crédits carbone qu’ils achètent n’ont aucune valeur écologique et ne sont donc pas revendus.
Malgré cela, les investissements dans de tels projets de compensation REDD+ sont toujours importants. Blue Carbon, une entreprise basée à Dubaï et présidée par un membre de la famille royale des Émirats arabes unis, a signé un protocole d’accord avec le Zimbabwe pour générer des certificats carbone REDD+ d’une valeur d’un milliard de livres Sterling sur environ 20 % des terres du Zimbabwe. L’entreprise a également signé des protocoles d’accord avec la Tanzanie et la Zambie. Et au Liberia, Blue Carbon veut acquérir 10% de la masse terrestre du pays et gérer plus d’un million d’hectares de forêts tropicales pendant 30 ans.
Plus d’informations sur le Guardian, Greenpeace et Climate Change News. L’Oeko Institut a publié six fiches d’information utiles sur différents types de projets sur le marché du carbone. D’autres fiches d’information seront publiées d’ici la fin de l’année 2023. Carbon Brief a rassemblé des études de cas sur la manière dont les projets de compensation affectent les peuples indigènes et les communautés locales.
Politique climatique européenne
Le règlement d’urgence a-t-elle fait progresser les énergies renouvelables ?
Dans le cadre de la guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine et de la crise des énergies fossiles qui en a résulté, le règlement d’urgence a été adopté fin 2022 par l’UE. Point central de ce règlement : le développement des énergies renouvelables doit être relancé beaucoup plus rapidement grâce à des procédures d’autorisation simplifiées.
SolarPower Europe a maintenant évalué les progrès pour 16 États membres. Le résultat est mitigé. Alors que l’Allemagne et le Portugal sont relativement bien placés, les progrès sont très limités en Bulgarie et aux Pays-Bas. Des obstacles importants subsistent, notamment en ce qui concerne la mise en œuvre de la directive sur les énergies renouvelables (RED III) récemment adoptée.
Seuls 10 des 27 Etats membres de l’UE ont atteint un niveau de développement de l’énergie éolienne compatible avec l’accord de Paris sur le climat, écrit l’organisation de protection de la nature WWF dans un nouveau rapport. D’ici 2030, les capacités de développement devront être doublées et la consommation d’énergie réduite afin de respecter les objectifs.
Personnel controversé : Hoekstra succède à Timmermanns
Avant l’élection d’un nouveau Parlement européen en juin prochain et l’entrée en fonction d’une nouvelle Commission européenne, un changement explosif a eu lieu début octobre au sein de l’équipe dirigeante de la Commission. Le Parlement européen a confirmé que le chrétien-démocrate Wopke Hoekstra, ancien ministre néerlandais des Finances et des Affaires étrangères, succédera à Franz Timmermanns au poste de commissaire au climat.
Mais avant cela, les critiques ont fusé de la part des défenseurs du climat. Hoekstra a longtemps travaillé comme cadre dans la compagnie pétrolière Shell et ne s’est jamais occupé de questions climatiques par le passé. Avant le vote, Hoekstra a répondu pendant trois heures aux questions critiques des parlementaires européens. En tant que commissaire européen chargé du Climat, il représentera entre autres l’UE lors de la prochaine conférence mondiale sur le climat. Les dossiers en cours du « Green Deal » ne sont toutefois pas négociés par Hoekstra, mais par le commissaire et vice-président de la Commission, Maroš Šefčovič. Voir ZEIT Online et Tagesschau.
Des jeunes vont au tribunal
Six jeunes Portugais ont porté plainte devant la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) contre 32 gouvernements au total, dont les 27 États membres de l’UE, le Royaume-Uni, la Norvège, la Turquie, la Russie et la Suisse. Principal grief : l’action des gouvernements contre la crise climatique est trop lente et viole leurs droits humains. Il s’agit du plus grand procès sur le climat devant la CEDH.
Les six avocats des plaintifs font face à un total de 80 avocats des États. CAN Europe a décrit le procès, qui a débuté fin septembre, comme celui de David contre Goliath. Nous verrons si la plainte aboutit lors du verdict attendu en 2024. Plus d’informations sur Euractiv.
Allemagne
La loi sur le chauffage a été adoptée – la planification thermique reste à faire
En septembre, le Bundestag et le Bundesrat ont donné leur accord final à la loi sur l’énergie des bâtiments (Gebäudeenergiegesetz, GEG), familièrement appelée loi sur le chauffage. Elle entrera en vigueur en janvier 2024. Cette loi doit permettre à long terme de rendre le chauffage des bâtiments neutre pour le climat. La ZDF a établi ici un aperçu des chauffages qui seront encore autorisés à l’avenir. Entre-temps, l’Öko-Institut a calculé pour le ministère de la protection du climat que, selon le comportement des consommateurs finaux, la loi permettra d’économiser un peu moins de 40 millions de tonnes de CO2 d’ici 2030, tandis que les émissions annuelles du secteur s’élévent dernièrement à 112 millions de tonnes de CO2 . Le Conseil d’Experts pour les questions climatiques (Expertenrat für Klimafragen) a attesté que la GEG et d’autres mesures prévues par le gouvernement fédéral ne suffiront pas à combler le déficit de protection du climat en 2030 – c’est-à-dire le montant total des objectifs non atteints – dans le secteur.
Comme la GEG doit être étroitement liée à la loi sur la planification thermique (Wärmeplanungsgesetz, WPG), de nombreuses directives ne s’appliqueront de toute façon qu’à partir de 2028. La WPG est en cours de procédure parlementaire et devrait entrer en vigueur d’ici la fin de l’année. Vous trouverez d’autres articles sur le site du Bayerischer Rundfunk ou du Wirtschaftswoche.
Le débat budgétaire s’intensifie
Traditionnellement, le Bundestag se penche sur le budget fédéral pour l’année à venir lors de la première semaine de session après la pause estivale. Au cours de cette « semaine budgétaire », le ministre des Finances Lindner a examiné le projet d’économies. Le budget fédéral doit être réparti en 25 plans distincts, à partir desquels les institutions importantes ou les ministères seront financés. Lindner veut ainsi réduire les budgets. Ainsi, les dépenses du ministère de l’Économie et de la Protection du climat devraient être réduites de 14,5 milliards d’euros à moins de 11 milliards d’euros. Les détracteurs critiquent toutefois la politique d’austérité ainsi que le recours à des budgets dits secondaires. Plus d’informations sur l’évolution du budget fédéral sur T-Online.
Le WWF Allemagne critique en outre le fait que le projet de budget ne contienne jusqu’à présent aucun critère pertinent pour les investissements publics dans la perspective d’une transformation nette zéro. L’organisation environnementale demande ainsi que, premièrement, l’accent soit mis sur la transformation dans la planification budgétaire. Ainsi, au moins 46 milliards d’euros d’investissements publics seraient nécessaires pour financer la protection nationale du climat. Deuxièmement, le budget devrait combler le déficit de financement pour le climat et la biodiversité. Troisièmement, les subventions de l’État nuisibles à l’environnement et au climat, qui s’élèvent à 68 milliards d’euros par an, doivent être supprimées et réutilisées. À titre de comparaison, le budget total devrait s’élever à environ 445 milliards d’euros en 2024. Plus d’informations sur le site du Bundestag et du Tagesschau.
Les feux de signalisation sur une trajectoire ambitieuse
Une nouvelle étude de la fondation Bertelsmann montre que, malgré les mauvais sondages et les nombreuses querelles, le gouvernement Ampel a déjà réalisé ou au moins abordé environ deux tiers des 453 promesses du contrat de coalition. Le contrat de coalition contient 50% de « véritables promesses » de plus que celui du gouvernement précédent (grande coalition) et est donc considéré comme très ambitieux. Au ministère de l’Économie et de la Protection du climat, 40% des promesses sont déjà pleinement réalisées – seules 22% ne le sont pas encore. Le bilan est donc supérieur à la moyenne par rapport à d’autres ministères.
La crise climatique visible
L’Amazonie émet de plus en plus de CO2
L’Amazonie a commencé à rejeter du CO2 . En 2021, des échantillons d’air ont montré que l’absorption de CO2 par la forêt tropicale avait diminué et que certaines zones étaient devenues une source de CO2 . La combinaison du réchauffement climatique et d’une déforestation drastique pourrait accélérer l’assèchement de l’Amazonie et créer un véritable risque d’incendie pour la forêt tropicale. Le feu pourrait être un point de basculement décisif de la forêt amazonienne, en privant de grandes parties de l’Amazonie de ses arbres. Bien que le feu ne soit pas vraiment présent dans les forêts tropicales, il y joue un rôle croissant lorsque la forêt est endommagée, amoindrie ou totalement disparue. Plus d’informations sur Nature et le PIK.
L’été des extrêmes : est-il trop tard ?
Le mois dernier a été le mois de septembre le plus chaud au monde. Et 2023 est en passe de devenir l’année la plus chaude jamais enregistrée, avec une augmentation de 1,4 °C par rapport aux niveaux préindustriels. Dans de nombreux pays, l’été a été marqué par la chaleur, les incendies et les inondations. Comment faut-il classer ces phénomènes météorologiques extrêmes ? Un point de basculement a-t-il déjà été franchi ? Le Guardian a interrogé 45 scientifiques de renom à ce sujet.
Ils expliquent que le réchauffement global observé jusqu’à présent est tout à fait conforme aux prévisions scientifiques des trois dernières décennies, même s’il semble désormais que les événements aient pris une tournure inquiétante. Les chercheurs soulignent que le monde n’a pas encore franchi le « point de basculement » vers un changement climatique incontrôlable. Certains mettent toutefois en garde contre le fait que ce point se rapproche de plus en plus.
Les scientifiques soulignent également que les phénomènes météorologiques extrêmes de ces derniers mois ne sont que la « pointe de l’iceberg ». D’ici une décennie seulement, 2023 pourrait être une année normale, si aucune mesure drastique de protection du climat n’est prise.
Voici quelques citations des spécialistes consultés :
La professeure Julie Arblaster de l’université Monash, Australie : « Les variations d’une année à l’autre, dues à la variabilité naturelle, signifient que les températures mondiales augmentent comme un escalier et non comme une ligne droite, et nous voyons un grand bond en avant cette année ».
Dr Friederike Otto de l’Imperial College London, Grande-Bretagne : « Le temps change comme les scientifiques l’attendaient et le prévoyaient, mais nos sociétés et nos écosystèmes sont plus vulnérables aux changements, même mineurs, que ce que l’on pensait jusqu’à présent, et les dégâts sont donc plus importants ».
Le professeur Malte Meinshausen de l’Université de Melbourne, en Australie, a déclaré : « Les prévisions de la science climatique sont assez robustes depuis des décennies. Malheureusement, l’obstination de l’humanité à émettre des quantités toujours plus importantes de gaz à effet de serre s’est également révélée assez robuste. Si nous ne stoppons pas rapidement le réchauffement climatique, les événements extrêmes auxquels nous assistons cette année feront pâle figure face à ceux à venir ».
L’écrasante majorité des chercheurs a indiqué une mesure décisive : réduire les combustibles fossiles à zéro. Plus sur le Guardian
Nouvelles de la science du climat
Un rapport de l’UNICEF met en garde : les enfants en déplacement forcé
Un rapport du Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef) montre qu’entre 2016 et 2021, plus de 43 millions d’enfants dans 44 pays ont été contraints de se déplacer en raison de phénomènes météorologiques provoqués par le changement climatique. 95 % des déplacements ont été causés par des inondations et des tempêtes. Cela correspond à environ 20 000 enfants qui sont déplacés chaque jour. Il ne s’agit là que de la « pointe de l’iceberg », car beaucoup plus d’enfants sont probablement concernés. Le nombre d’enfants déplacés par la sécheresse est « radicalement sous-déclaré », car ces déplacements sont moins soudains et donc plus difficiles à recenser. Les pays qui comptent le plus d’enfants déplacés sont la Chine, l’Inde et les Philippines. Pour en savoir plus, consultez le site TAZ .
Les villes se développent le plus rapidement dans les zones inondables
Dans de nombreux pays, les villages et les villes situés dans des zones à haut risque d’inondation connaissent la croissance la plus rapide. Il s’agit d’une tendance inquiétante, d’autant plus que le changement climatique aggrave les catastrophes liées aux inondations dans le monde. L’Asie de l’Est présente le pourcentage le plus élevé d’habitations situées dans des zones à risque d’inondation, soit plus de 18 %. Le développement dans les zones inondables est principalement motivé par la rareté des terres dans des zones plus sûres. Plus sur Nature.
Rapport actualisé de l’AIE sur l’objectif de 1,5 degré
L’Agence internationale de l’énergie (AIE) a publié sa version mise à jour du scénario 1,5ºC. Elle tient compte de la reprise économique après la pandémie COVID-19, de la « croissance exceptionnelle » des technologies d’énergie renouvelable, de l’augmentation des investissements dans les combustibles fossiles et des « émissions obstinément élevées ».
L’AIE appelle à au moins tripler la capacité totale des énergies renouvelables pour atteindre 1,5 TW ou plus d’ici 2030 et réitère son appel aux pays prospères pour qu’ils accélèrent leur transition énergétique. « Dans le scénario net zéro actualisé, un énorme développement des énergies renouvelables piloté par les politiques publiques entraîne une baisse de 25% de la demande en combustibles fossiles d’ici 2030 et une diminution de 35% des émissions par rapport au pic de 2022 », écrit l’AIE.
Étant donné que la demande en combustibles fossiles diminuerait de 80% d’ici 2050, « aucun nouveau projet pétrolier ou gazier à long terme ne serait nécessaire, pas plus que de nouvelles mines de charbon, des extensions de mines ou de nouvelles centrales électriques au charbon dont la puissance ne serait pas réduite ». Le scénario montre également une forte augmentation des véhicules électriques et des pompes à chaleur. Il faut toutefois continuer à investir dans certains projets pétroliers et gaziers afin d’éviter des pics de prix ou des pénuries d’approvisionnement.
L’AIE met en garde contre le fait que les pays qui n’accélèrent pas la transition énergétique d’ici 2030 s’appuient trop sur les technologies d’élimination du CO2 , qui sont coûteuses et n’ont pas été testées à grande échelle. « Pour maintenir en vie l’objectif de limiter le réchauffement climatique à 1,5°C, le monde doit rapidement s’unir », a déclaré Fatih Birol, le chef de l’AIE. « Une forte coopération internationale est essentielle pour réussir. Face à l’ampleur du défi, les gouvernements doivent séparer le climat de la géopolitique ». Plus sur l’AIE et Energymix.
Six des neuf frontières planétaires ont été franchies
La capacité de résistance de notre planète diminue : Six des neuf limites de la capacité de résistance de la planète ont été dépassées. C’est deux de plus qu’en 2015, comme le montre une nouvelle étude publiée dans Science. Les limites planétaires dépassées sont celles du réchauffement climatique, de la biosphère, de la déforestation, des cycles de l’azote, des polluants et de l’eau douce. La pression sur ces systèmes et cycles terrestres ne cesse de croître. « La Terre est un patient qui ne va pas bien », déclare le co-auteur Johan Rockström, directeur de l’Institut de Potsdam pour la recherche sur l’impact climatique (PIK), cité dans un communiqué de l’institut. « Nous ne savons pas combien de temps nous pourrons dépasser de cette manière des limites décisives avant que les effets n’entraînent des changements et des dommages irréversibles ». Plus d’informations sur scinexx, Stockholmresilience.org et Watson.
Azote pour le Stockholm Resilience Centre, basé sur une analyse dans Richardson et al 2023.
Suisse
Oui à la loi sur le climat. Mais quelle est la suite des événements?
Le 18 juin 2023, les électeurs suisses ont accepté la loi sur la protection du climat- comme contre-projet indirect à l’initiative sur les glaciers. 59% ont approuvé la loi, la participation s’est élevée à 42,5% (plus d’infos dans les résultats officiels de la Chancellerie fédérale). Comme le montre l’analyse Vox de l’institut de recherche GFS Berne, la loi a également trouvé une majorité auprès des sympathisants du centre (64%) et du PRD (66%). Comme raison de voter oui, beaucoup ont cité un « besoin urgent d’agir dans le domaine de la protection de l’environnement et du climat », peut-on lire sur srf.ch.
L’objectif zéro net d’ici 2050 est ainsi ancré dans la loi. La loi prévoit en outre des contributions d’encouragement pour le remplacement des chauffages fossiles et le développement de nouvelles technologies. La Suisse est ainsi le premier pays à s’engager à atteindre l’objectif de zéro émission nette lors d’une votation populaire. Mais il faudra encore attendre un certain temps avant que les fonds pour le remplacement des chauffages ne soient versés. L’ordonnance correspondante devrait entrer en vigueur début 2025, a déclaré le conseiller fédéral Albert Rösti sur srf.ch.
Dans un article de Republik, Marcel Hänggi, le père de l’initiative pour les glaciers, dresse un bilan personnel de son engagement au cours des sept dernières années et demie. Un texte qui vaut la peine d’être lu, axé sur le marketing politique, les personnages clés, les compromis et sur la manière de trouver des majorités pour la politique climatique.
Immédiatement après le vote, un débat médiatique animé a commencé sur les mesures nécessaires pour atteindre l’objectif net zéro et augmenter la production d’électricité à partir d’énergies renouvelables. La discussion porte notamment sur la construction d’éoliennes, l’obligation d’utiliser l’énergie solaire pour les bâtiments et les stations de recharge pour les voitures électriques. Le Tages-Anzeiger et le Zeit fournissent un bon aperçu, d’autres informations sont disponibles dans des articles de Republik et das Lamm. Le Tages-Anzeiger (paywall) montre en outre dans quatre scénarios comment la Suisse peut réussir sa transition énergétique.
Les cantons ont également un devoir à remplir, comme l’explique clairement Roberto Schmidt, président de la Conférence des directeurs de l’énergie, dans un entretien avec le Tages-Anzeiger. Il est prévu que les cantons renforcent en août une partie des modèles de prescriptions pour les bâtiments. L’introduction d’une obligation d’installer des panneaux solaires sur les grandes surfaces de toitures est nécessaire.
Pendant ce temps, l’UDC et le PLR exigent la construction de nouvelles centrales nucléaires. De plus, les centrales nucléaires existantes doivent fonctionner plus longtemps, comme le demande entre autres le conseiller aux Etats PLR Ruedi Noser, qui s’était engagé dans le comité d’initiative pour l’initiative des glaciers. L’idée de soutenir avec des fonds publics les mises à niveau nécessaires des centrales nucléaires existantes est donc à nouveau en discussion. Plus d’informations à ce sujet dans la NZZ (paywall) et le Tages-Anzeiger. Ce que signifie la dépendance vis-à-vis des centrales nucléaires pour la sécurité d’approvisionnement a été débattu lors d’une manifestation organisée par la Fondation suisse de l’énergie.
Les groupes électriques Alpiq et Axpo ont déjà clairement fait savoir qu’ils estimaient que le risque financier de nouvelles centrales nucléaires très coûteuses était trop élevé, comme on peut le lire sur srf.ch. Et la population s’oppose également à la construction de nouvelles centrales nucléaires, comme l’a montré le sondage post-votation. Seuls 30% des personnes interrogées se prononcent en faveur de cette solution, comme l’écrit le Tages-Anzeiger. 45% sont favorables à une prolongation de la durée d’exploitation des centrales nucléaires existantes. Avec 57%, c’est l’obligation d’installer des panneaux solaires sur les nouveaux bâtiments qui recueille la plus grande adhésion. Ces résultats confirment ceux d’un sondage de l’Association des entreprises électriques suisses, pour lequel environ 1000 électeurs ont été interrogés en avril 2023 (plus d’informations dans le Tages-Anzeiger).
Le magazine WOZ lance un débat sur la croissance économique et la redistribution. Si la croissance économique reste inchangée, la réalisation de l’objectif net zéro est menacée. Le magazine Beobachter demande une compensation sociale afin que les personnes à faible revenu ne soient pas davantage mises sous pression par les coûts des futures mesures de protection du climat.
Refus des droits de douane sur le climat, mais taxes d’incitation à nouveau à l’ordre du jour
Le Conseil fédéral s’oppose à l’introduction d’un droit de douane climatique suisse. En raison des risques réglementaires et commerciaux, il s’oppose à l’introduction, au même rythme que l’UE, d’un mécanisme de compensation des émissions de CO2 (Carbon Border Adjustment Mechanism, CBAM). Avec cet instrument, l’UE veut limiter le risque que les entreprises délocalisent leur production dans des pays tiers où la législation sur la protection du climat est moins stricte. Une phase de test commencera début octobre de cette année dans l’UE, et l’introduction progressive de taxes d’importation est prévue à partir de 2026. Avec son rapport négatif, le Conseil fédéral s’oppose à plusieurs interventions du Parlement qui demandent l’introduction d’un tel instrument. Plus d’informations dans la NZZ (paywall) et chez Lamm.
En revanche, un autre instrument de protection du climat est à nouveau en discussion : les taxes d’incitation. La Commission de l’environnement, de l’aménagement du territoire et de l’énergie du Conseil national (CEATE) a approuvé une motion visant à soumettre toutes les émissions de gaz à effet de serre à une taxe d’incitation, donc également les carburants. Le président du centre Gerhard Pfister, qui a déposé la motion, veut ainsi obtenir que les émissions de gaz à effet de serre reçoivent un prix conforme au principe de causalité. Les recettes de la taxe doivent être intégralement reversées à la population et aux entreprises. La commission de l’environnement sait également à quel point une mise en œuvre est difficile. L’objectif n’est pas de « bouleverser brutalement le mix d’instruments qui a fait ses preuves, mais de mener une discussion approfondie sur l’efficacité et l’acceptation des mesures de politique climatique ». Plus d’informations dans la NZZ (paywall).
Recul des émissions de CO2 et le problème des vaches
En 2022, la Suisse a émis moins de CO2 que l’année précédente. Dans le domaine des transports, les émissions des carburants essence et diesel ont baissé de 1,1% par rapport à 2021. L’Office fédéral de l’environnement explique ce recul par la part croissante des véhicules électriques dans le trafic routier et par le changement de comportement en matière de mobilité suite à la pandémie de Covid-19. Le WWF attribue le fait que les émissions ne diminuent pas plus fortement au fait que le parc automobile qui arrive sur les routes en Suisse est particulièrement lourd et le plus émetteur d’Europe. Les émissions de CO2 des combustibles (principalement le pétrole et le gaz) ont diminué de 4,9% en données corrigées des variations climatiques. L’amélioration de l’efficacité énergétique des bâtiments et l’utilisation croissante d’énergies renouvelables pour le chauffage ont notamment contribué à cette évolution. Plus d’informations sur srf.ch.
Outre les transports et les bâtiments, l’agriculture contribue également de manière significative aux émissions de CO2 , notamment en raison de l’élevage et des rejets de méthane, un gaz climatique très puissant, qui en découlent. Désormais, la Confédération verse des paiements directs aux agriculteurs laissant vivre leurs vaches laitières un ou deux ans de plus, comme le rapporte la NZZ am Sonntag (paywall). Comme les vaches ne produisent pas de lait durant les premières années de leur vie, mais émettent déjà de grandes quantités de gaz à effet de serre, le bilan climatique devrait s’en trouver amélioré.
D’autres États envisagent la voie opposée : le gouvernement irlandais a proposé d’abattre plus de 200 000 vaches afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre de l’agriculture irlandaise. En Suisse, Franzsika Herren veut réduire le nombre d’animaux par le biais de l’initiative sur l’alimentation. La demande populaire a été déposée à la mi-juin, comme le rapporte le Tages-Anzeiger (paywall). La Bernoise avait déjà lancé l’initiative sur l’eau potable, qui avait été rejetée par le peuple en 2021. La nouvelle initiative veut obliger la Confédération à prendre des mesures pour promouvoir un mode d’alimentation basé sur des aliments végétaux.
L’Union suisse des paysans (USP) veut éviter que le nombre d’animaux soit réduit. Pour ce faire, elle a rédigé un rapport sur les effets climatiques du méthane. L’USP s’appuie sur une étude de l’Académie suisse des sciences naturelles sur l’impact climatique des gaz à effet de serre de courte durée de vie, en premier lieu le méthane. Les auteurs concluent que la formule de conversion utilisée aujourd’hui sous-estime fortement l’effet du méthane sur le climat à court terme, c’est-à-dire pour les prochaines décennies, mais qu’elle le surestime à long terme. Selon la formule proposée, les émissions actuelles de méthane de l’agriculture, converties en équivalents CO2 , seraient six à sept fois moins importantes. Les climatologues indiquent toutefois que les émissions de méthane devront être réduites d’au moins 50 % d’ici 2050 afin de limiter le réchauffement à 1,5 degré. Cela nécessite également une réduction du cheptel. Plus d’informations dans le Tages-Anzeiger (paywall).
Les installations de biogaz qui traitent le fumier et le lisier permettent de limiter les émissions de méthane. Dans une prise de position, l’association économique swisscleantech demande de meilleures conditions-cadres pour de telles installations. Concrètement, l’utilisation énergétique et matérielle des biodéchets doit devenir obligatoire, dans la mesure où elle est techniquement possible et économiquement supportable. De plus, il faudrait fixer des objectifs de développement et des compensations obligatoires, et exempter les gaz renouvelables de la taxe sur le CO2 . Les gaz renouvelables importés de l’étranger doivent également être reconnus.
Comment le Parlement et le Conseil fédéral veulent développer les énergies renouvelables
Le Parlement n’est pas d’accord sur la manière dont les énergies renouvelables doivent être développées : Le Conseil national et le Conseil des Etats ne sont pas encore parvenus à un compromis sur l’acte modificateur de la politique énergétique. La loi combine la révision de la loi sur l’énergie et la révision de la loi sur l’approvisionnement en électricité, et doit régler le développement de l’approvisionnement en énergie. Les divergences portent sur l’obligation d’utiliser l’énergie solaire. La Commission de l’environnement, de l’aménagement du territoire et de l’énergie du Conseil national (CEATE) maintient que l’obligation d’installer des modules photovoltaïques doit être introduite pour toutes les nouvelles constructions ainsi que pour les transformations et rénovations importantes. Le Conseil des Etats avait rejeté l’obligation d’installer des panneaux solaires lors de la session d’été.
Les deux Chambres ont également des positions différentes en ce qui concerne les débits résiduels des centrales hydroélectriques. La CEATE du Conseil national demande que les prescriptions relatives aux débits résiduels pour les centrales hydroélectriques existantes puissent être assouplies sous certaines conditions. En cas de menace de pénurie, le Conseil fédéral doit pouvoir réduire les débits résiduels à un minimum. Lors de la session d’été, le Conseil des Etats avait décidé que cette mesure pouvait être prise non seulement en cas de pénurie, mais aussi lorsque cela s’avérait nécessaire pour atteindre les objectifs de production. Plus d’informations sur energate.ch.
Les députés s’accordent à dire que la construction de centrales électriques dans des biotopes d’importance nationale et dans des réserves d’oiseaux d’eau et d’oiseaux migrateurs doit rester exclue. En revanche, la construction doit être possible dans les nouvelles zones d’avancée des glaciers et dans les plaines alluviales alpines. Plus d’informations sur le débat relatif à l’arrêté fédéral sur srf.ch, NZZ (paywall) et watson.ch.
Après le « Solarexpress », le Parlement a également adopté le « Windexpress », une loi urgente visant à accélérer les projets d’énergie éolienne avancés. Lors de la session d’été, le Conseil national et le Conseil des Etats se sont mis d’accord pour simplifier les procédures d’autorisation des projets éoliens. Désormais, ce sont les autorités cantonales qui délivreront le permis de construire, et non plus les communes comme c’est le cas actuellement. Un recours au Tribunal fédéral ne serait plus possible que de manière limitée. Les facilités sont valables pour les grandes installations éoliennes, et ce jusqu’à ce qu’une puissance supplémentaire de 600 mégawatts d’énergie éolienne soit installée dans toute la Suisse. Aucun référendum n’a été annoncé à ce jour ; le délai étant fixé au 5 octobre 2023. Pour en savoir plus, voir nau.ch et la Sonntagszeitung (paywall).
En plus de « Solarexpress » et « Windexpress », le Conseil fédéral veut encourager le développement de la production d’électricité avec le « décret d’accélération ». Celui-ci prévoit de simplifier les procédures pour la planification et la construction de grandes centrales solaires, éoliennes et hydrauliques d’intérêt national. Il a transmis au Parlement le message relatif à la modification de la loi sur l’énergie. Le décret d’accélération prévoit de regrouper toutes les étapes nécessaires en une seule procédure : Plan d’affectation, permis de construire, autorisation spéciale, expropriation éventuelle et viabilisation. La voie de recours doit également être modifiée : au niveau cantonal, seul un recours auprès du tribunal cantonal supérieur serait désormais possible. Les organisations locales et cantonales ne pourraient plus déposer de recours contre de tels projets. En revanche, les cantons et communes d’implantation ainsi que les organisations actives au niveau national comme le WWF ou Pro Natura continueraient à avoir le droit de recourir. Plus d’informations dans la NZZ (paywall), l’Aargauer Zeitung et sur srf.ch.
Le développement non planifié des énergies renouvelables en Suisse viole la Convention alpine européenne, déclare le directeur de l’organisation de protection des Alpes Cipra International dans l’hebdomadaire. Co-signé par la Suisse en 1991, ce traité constitue la base juridique permettant de protéger les écosystèmes alpins sensibles et les identités culturelles régionales.
Le développement des énergies renouvelables peut-il se faire dans le respect de l’environnement ?
Un groupe d’étude de l’ETH Zurich veut lancer un débat de fond sur la manière de réaménager l’espace alpin face au changement climatique et à la transition énergétique. Rien que la fonte des glaciers mettra à nu 800 kilomètres carrés d’ici la fin du siècle, soit une surface aussi grande que le canton de Neuchâtel. Il n’y a pas de discussion sur ce qu’il en adviendra. Sous la direction de l’architecte paysagiste Günther Vogt et du chercheur alpin Thomas Kissling, des étudiants en architecture ont élaboré des scénarios de l’évolution future. Le groupe d’étude demande que les priorités d’utilisation ne soient plus définies à l’avenir selon des critères purement commerciaux. L’utilisation doit plutôt être intensifiée là où se trouvent déjà de nombreuses infrastructures. En contrepartie, les régions inaccessibles ayant une grande valeur paysagère, comme la région du Trift dans l’Oberland bernois, doivent être exclues de toute exploitation commerciale. Le projet, qui n’a pas encore été publié, est présenté en détail dans das Magazin. Des informations de fond sur le thème « Profiler les paysages alpins » sont disponibles auprès du département d’architecture de l’ETH.
Chiffres et projets concernant les nouvelles installations solaires, éoliennes et géothermiques
L’énergie solaire gagne en importance en Suisse. En 2022, la capacité de production installée a augmenté de 58% par rapport à l’année précédente. Selon l‘Office fédéral de l’énergie, l’électricité solaire a ainsi couvert environ 7% des besoins en électricité de la Suisse. La production annuelle des installations photovoltaïques mises en place dans tout le pays s’est élevée à 3800 gigawattheures d’électricité, ce qui correspond à environ la moitié de la production de la centrale nucléaire de Gösgen. L’état d’avancement du développement de l’énergie solaire dans les différentes communes peut être consulté sur tagesanzeiger.ch (paywall).
Toutefois, pour atteindre les objectifs de développement, d’énormes efforts restent nécessaires. Le scénario « Perspectives énergétiques 2050+ » de la Confédération prévoit presque dix fois plus d’électricité solaire en 2050. Avec l’arrêté actuellement en discussion au Parlement, une grande partie de ce développement devrait déjà être atteint d’ici 2035. Pour l’année en cours, l’association professionnelle Swissolar s’attend à une construction d’installations photovoltaïques aussi importante qu’en 2022. Le développement est toutefois freiné par la pénurie de main-d’œuvre qualifiée. Pour en savoir plus, consultez le Tages-Anzeiger et la NZZ (paywall).
Malgré sa croissance, la Suisse fait toujours partie des derniers de la classe en Europe en ce qui concerne le développement des énergies renouvelables. Selon la nouvelle évaluation de la Fondation suisse de l’énergie (SES), seuls la Roumanie, la République tchèque, la Slovénie, la Slovaquie et la Lettonie produisent moins d’électricité solaire et éolienne par habitant. Sur les 28 pays étudiés, la Suisse se situe comme l’année dernière en 23e position. Le Danemark et la Suède, qui sont en tête du classement, produisent sept à huit fois plus d’électricité par habitant à partir de l’énergie solaire et éolienne que la Suisse.
Projets solaires : L’assemblée communale de Laax a approuvé l’installation solaire alpine près de la station de montagne de Vorab, comme l’écrit le Südostschweiz. L’entreprise d’électricité Repower, en collaboration avec la commune et l’entreprise de remontées mécaniques, veut ainsi alimenter 2200 foyers en électricité par an. Les projets de la centrale électrique de la ville de Zurich (EWZ) sont nettement plus importants. Le fournisseur d’électricité veut produire dans les prochaines années de l’électricité solaire alpine pour 58 000 ménages. Un projet doit être réalisé dans le domaine skiable de Savognin, sur le territoire de la commune de Surses. Une deuxième installation est prévue dans la commune de Rheinwald. L’autorisation des deux communes concernant ces projets est encore attendue. Plus d’informations dans la NZZ (paywall).
On peut lire dans Republik ce qui pousse un paysan de montagne à lancer un projet d’installation solaire alpine. Le projet Morgeten Solar vise à alimenter 3000 foyers en électricité sur l’alpage du même nom dans le Simmental.
L’un des obstacles à la réalisation des installations est le raccordement au réseau. En raison de l’absence de lignes électriques, un deuxième grand projet en Valais a déjà été fortement redimensionné après Grengiols Solar : Vispertal Solar. Seule la moitié des 800’000 modules solaires initialement prévus sera probablement réalisée, écrit la Sonntagszeitung (paywall). Et la NZZ (paywall) montre la nécessité et les obstacles à l’extension du réseau électrique suisse.
Des projets éoliens : les entreprises d’électricité du canton de Zurich (EKZ), l’EWZ et les services municipaux de Winterthur veulent réaliser ensemble des installations éoliennes. Sous le nom de « Zurich Wind », le développement, le financement, la construction et l&rs